Texte de la conférence UTLS du 8 juillet 2002 publié aux Editions Odile Jacob
« Qu’est-ce que la diversité de la vie ? » ISBN 2-7381-1307-9
5
Il existe aussi des infections cellulaires, qui sont très rapides, au cours desquelles un
virus entre dans l’organisme et va immédiatement se loger à l’intérieur d’une cellule, où
il s’intègre dans le génome. Il se sert de la machinerie de la cellule pour subsister :
quand les chromosomes se divisent et se répliquent, le virus, qui y est intégré, se
réplique aussi, transformant ainsi la cellule en usine à virus. Si ces agents n’ont pas été
attaqués lorsqu’ils étaient dans la circulation, le système immunitaire B ne peut plus les
reconnaître maintenant qu’ils sont intracellulaires. C'est notre système immunitaire T
qui va être capable de s’attaquer aux cellules infectées pour les tuer, et ceci en
préservant les cellules saines.
En 1974, Peter Doherty et Rolf Zinkernagel sont à l’origine du concept du soi modifié,
qui introduit deux nouveaux acteurs de la réponse immunitaire : le lymphocyte T et le
CMH (le Complexe Majeur d’Histocompatibilité, HLA chez l’homme pour Human
Leucocyte Antigen), qui représente la carte d’identité biologique d’un individu. Le
complexe HLA est formé de trois gènes, A, B et C, présentant chacun 99 types (on parle
d’haplotypes). Un individu est par exemple A28B96C3. Ces trois protéines, qui
représentent l'équivalent du numéro de sécurité sociale d’un individu, sont présentes à la
surface de toutes les cellules de son organisme. Leur rôle premier est de présenter,
comme dans une vitrine, un échantillon des protéines présentes dans la cellule, sous
forme de fragments peptidiques, que la cellule produit constamment. La plupart du
temps, il s’agit de protéines du soi. Si la cellule est infectée par un virus, elle présente
aussi des morceaux de virus. C’est cela que reconnaît le lymphocyte T : le soi modifié,
le peptide viral présenté dans le contexte du HLA. Le lymphocyte T, qui se différencie
dans le thymus, présente lui aussi une pince à sa surface qui reconnaît le HLA, le
récepteur T, mais ce dernier n’est jamais sécrété. La cellule T scrute constamment le
HLA des cellules qu’elle rencontre. Si elle rencontre une cellule infectée, son récepteur
T reconnaît le soi modifié, et le lymphocyte T la tue ; si la cellule rencontrée est saine, il
y juste reconnaissance du soi et rien ne se passe. Comme pour le lymphocyte B et
l’anticorps présent à sa surface, chaque lymphocyte T porte un récepteur T spécifique à
sa surface, soumis aux mêmes règles quant à la génération de la diversité, des groupes
de plusieurs centaines de gènes se recombinant de manière aléatoire pour le générer.
En revanche, la sélection des cellules T se fait de manière un peu différente. Alors que
la cellule B n’est éliminée que si elle reconnaît, avec une forte affinité, une molécule du
soi pendant le développement, la cellule T passe par une étape de sélection
supplémentaire. En effet, le lymphocyte T doit reconnaître du soi modifié, c’est à dire