ACTUALITE MEDICALE
Le dépistage du cancer du sein doit-il être
abandonné ?
Publié le 22/11/2012
Mettre en doute l'intérêt du dépistage systématique du cancer du sein
par mammographie était un tabou il y a encore 10 ans, et tout
particulièrement en France. Mais depuis quelques années de
nombreuses publications, pour la plupart émanant de pays nordiques
ou anglo-saxons, ont suscité des interrogations sur l'opportunité de
cette mesure dite de santé publique.
Dernière en date de ces études choc, celle que vient de publier le New
England Journal of Medicine qui jette à nouveau un pavé dans la marre.
Il ne s'agit pas cette fois d'un essai randomisé comparant populations
dépistées et non dépistées ou d'une méta-analyse comme récemment
dans le Lancet, mais d'une étude épidémiologique d'un concept
relativement simple.
Un travail portant sur 10 % de la population américaine
durant 30 ans
Archie Bleyer et coll. se sont basés pour ce travail sur le réseau SEER (Surveillance, Epidemiology and
End Results) qui regroupe des informations médicales sur environ 10 % de la population des Etats-
Unis depuis 1973. Il a été ainsi tout d'abord possible de déterminer quelle était l'incidence "naturelle"
du cancer du sein chez les femmes de plus de 40 ans avant tout dépistage organisé par
mammographie (c'est à dire avant le milieu des années 80 et plus précisément entre 1976 et 1978).
Une fois cette mesure réalisée, les auteurs ont pu, année après année, calculer la variation
d'incidence de ce cancer par rapport à l'état basal en distinguant les tumeurs dépistées à un stade
précoce (y compris les carcinomes canalaires in situ) qui sont la cible du dépistage et celles
diagnostiquées à un stade tardif (définies par une extension régionale ou des métastases à distance).
Les résultats sont présentés sur les courbes ci-dessous.
Seuls 8 cancers dépistés chez 100 000 femmes auraient évolué défavorablement
Il apparaît au premier coup d'œil que l'augmentation des cancers dépistés à un stade précoce après
40 ans (qui était attendue) n'a pas entrainé une baisse équivalente des néoplasies diagnostiquées à
un stade tardif. Ainsi l'incidence des stades précoces est passée de 112/100 000 et par an à 234/100
000 (soit une augmentation de 122/100 000) alors que dans le même temps l'incidence des stades
tardifs n'a diminué que de 102 à 94/100 000 par an (soit une réduction de 8 cas pour 100 000 par an).
Si l'on admet que l'incidence "naturelle" du cancer du sein n'a pas varié durant ces décennies, en
toute logique, seuls 8 des 122 cancers supplémentaires dépistés pour 100 000 femmes et par an
étaient "destinés" à évoluer vers un stade tardif. En d'autres termes il y a eu 114 sur-diagnostics pour
100 000 femmes par an (soit pour les Etats-Unis plus de 70 000 chaque année et 31 % des cancers
du sein diagnostiqués).
Le dépistage ne serait pas le premier responsable de la baisse de mortalité par
cancer du sein
Un taux d'incidence "naturelle" du cancer du sein stable étant un élément déterminant du
raisonnement, Archie Bleyer et coll. ont refait leurs calculs en tenant compte d'hypothèses dans
lesquelles l'incidence "naturelle" augmentait de 0,25 à 0,50 % par an.
Mais même
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