n° 2 — Février 2013
Mettons à l’honneur l’humilité
Avec l’arrivée du carême, il nous semble opportun de revenir sur cette belle
vertu de l’humilité. Le péché originel est entré dans le monde par la porte de
l’orgueil, le salut nous est parvenu grâce à l’humilité : l’humilité de la Sainte Vierge
par son Fiat et l’humilité d’un Dieu par son Incarnation et l’obéissance jusqu’à la
mort et la mort de la Croix !
Au moment nous voulons, par le carême, faire œuvre de salut, penchons
nous sur cette belle vertu.
«
Toute la vie du Christ est pour nous un enseignement, nous dit saint
Augustin, mais c’est surtout son humilité qu’Il offre à notre imitation » (De vera
religione) C’est Lui qui a révélé au monde cette grande vertu, non pas qu’il n’y eût
avant Lui des actes d’humilité, mais ils étaient rares, peu appréciés des hommes, et
généralement peu profonds et bien éloignés de cette perfection dont sus nous a
donné l’exemple, et qui est devenue si fréquente depuis l’Incarnation. S’il est vrai
que les philosophes païens blâment l’orgueil lorsqu’il est trop choquant, qu’ils
enseignent à modérer le faste et à éviter l’ostentation, aucun, cependant, n’a
recommandé l’humilité telle que le christianisme l’a entendue et pratiquée.
1. Noverim te, noverim me
Qu’on se souvienne de cette prière que saint Augustin adressait à Dieu :
Noverim te, noverim me : « faites que je vous connaisse et que je me connaisse » :
que je vous connaisse pour vous admirer et pour vous aimer, et que je me connaisse
pour me mépriser.
L’humilité chrétienne est une vertu par laquelle l’homme jette un regard de
rité sur Dieu et sur lui-même. L’humilité c’est larité a dit sainte Thérèse
d’Avila. (6e Demeure, ch. 10) Il y a donc deux éléments dans l’humilité.
La connaissance de Dieu est cessaire à l’humilité. Quand on a de Dieu une
juste idée, quand on comprend sa grandeur, ses droits, la puissance et l’universalité
de son action, qui s’étend à tout, on comprend aussi que la créature, qui sans Lui ne
peut subsister, ne peut même agir ni avoir une seule bonne pensée, ne mérite
qu’oubli et dédain.
« Qu’as-tu que tu n’aies reçu, dit saint Paul, et si tu as tout reçu, pourquoi
t’en glorifier comme si tu ne l’avais pas reçu ? » (I Cor., 4, 7) Même les bonnes
œuvres que nous faisons sont le fruit de la grâce : le beau rite que voilà quand
l’enfant a fait une belle page d’écriture, alors que sa re lui a guidé la main ! Il n’a
pas résisté, c’est vrai, il s’est prêté à l’action maternelle, mais c’est la maman qui a
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été habile et non pas l’enfant. Ainsi en est-il de toutes les œuvres que l’on attribue au
talent, au génie, à la vertu, à l’héroïsme ; elles sont de Dieu beaucoup plus que de
l’homme.
Et lui, l’homme qu’a-t-il donc qui lui soit propre ? « Qu’êtes-vous ? dit saint
Bernard. Un sac d’immondices. Que deviendrez-vous ? La pâture des vers. » « Les
arbres et les plantes, dit le pape Innocent, produisent des fleurs et des fruits, tandis que
le corps humain est un cloaque d’ordures et de puanteur. » (Lib. 8 de cont. mundi)
Quant à nos fauts spirituels, ils sont plus répugnants encore et plus odieux que les
vilenies corporelles : «
Toutes vos justices, dit Isaïe, sont devenues comme un
tement souillé. »
Connaissance de sa petitesse et acceptation amoureuse de celle-ci. Connaître
ses défauts et concevoir du mépris de se voir imparfait, c’est faire acte d’orgueil et non
d’humilité ; cette insatisfaction est motivée par un amour çu de soi-même. Celui qui
s’arrête au mépris de soi-même en raison de ses misères sans s’accepter comme tel finit
par désespérer. Celui qui au contraire embrasse sa petitesse peut alors se jeter dans le
Seigneur. Le terme de l’humilité n’est pas soi-même mais Dieu. C’est à l’aune de Dieu
que tout prend sa vraie valeur. « L’abime appelle l’abime » nous dit le psalmiste. Notre
abime de misère permet à la Miséricorde de faire éclater sa puissance.
« Celui qui s’imagine être quelque chose, alors qu’il n’est rien, se séduit lui-
même » nous dit saint Paul (Gal., 6, 3) ; se connaissant mal, sa volonté repoussera avec
horreur toute humiliation ; mais d’autre part celui qui a l’amour de sa propre excellence
ne veut pas avouer sa misère, il cherche à s’élever à ses propres yeux, et il parvient à
s’aveugler.
Parce qu’elle est vraie, juste et sainte, l’humilité plaît éminemment au
Seigneur : « Je porterai mes regards, dit le Seigneur, sur celui qui est humble et qui a le
cœur brisé. » (Is., 66, 2) « Quiconque s’élève sera abaissé, a déclaré le Sauveur, et
quiconque s’abaisse sera élevé ». Oui, les humbles ont toujours é les préférés de
Dieu ; l’humilité sincère et profonde a toujours attiré ses gces. Au contraire, le plus
souvent ce qui fait que les âmes bonnes et vertueuses restent stationnaires, ou même en
avançant quelque peu ne parviennent cependant pas au degré d’amour que Dieu leur
réservait, c’est qu’elles ne pratiquent pas, comme elles le devraient, cette grande vertu.
2. Exercice de l’humilité
Pour acquérir cette vertu si importante, il faut, comme pour toute autre vertu,
recourir aux deux grands moyens, qui, lorsqu’ils sont joints ensemble, sont
irrésistibles : prières instantes, efforts généreux et persévérants. Trop de personnes
pieuses, tout en estimant beaucoup l’humilité, ne font pas de progrès dans cette vertu,
parce qu’elles ne la demandent pas avec ardeur et constance, et parce qu’elles ne
s’appliquent pas avec assez de courage à la pratiquer. « L’humiliation est le chemin qui
conduit à l’humilité, dit saint Bernard, comme la patience à la paix, comme l’étude à la
science. Si vous voulez devenir humbles ne fuyez pas l’humiliation. » (Epist., 87)
Voici les pratiques d’humilité qu’un chrétien pieux doit observer :
- S’appliquer à s’estimer à sa juste valeur et accepter sa petitesse
: donc
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Litanies de l’humilité
Ô Jésus, doux et humble de cœur,
exaucez-moi
Du désir d'être estimé, délivrez-moi,
Jésus
Du désir d'être aimé, délivrez-moi, Jésus
Du désir d'être exalté, délivrez-moi, Jésus
Du désir d'être honoré, livrez-moi,
Jésus
Du désir d'être loué, délivrez-moi, Jésus
Du désir d'être préféré aux autres,
délivrez-moi, Jésus
Du désir d'être consulté, livrez-moi, Jésus
Du désir d'être approuvé, délivrez-moi, Jésus
De la crainte d'être humilié, livrez-moi, Jésus
De la crainte d'être méprisé, livrez-moi, Jésus
De la crainte d'être rebuté, livrez-moi, Jésus
De la crainte d'être calomnié, délivrez-moi, Jésus
De la crainte d'être oublié, délivrez-moi, Jésus
De la crainte d'être tourné en ridicule,
délivrez-moi, Jésus
De la crainte d'être injurié, livrez-moi, Jésus
Que les autres soient plus aimés que moi, Jésus, faites
-moi la grâce de le désirer
Que les autres soient plus estimés que moi,
Jésus, faites-moi la grâce de le désirer
Que les autres puissent être choisis et moi mis de côté,
Jésus, faites-moi la grâce de le désirer
Que les autres puissent être loués et moi négligé,
Jésus, faites-moi la grâce de le désirer
Que les autres puissent m'être préférés en tout, Jésus,
faites-moi la grâce de le désirer
Que les autres puissent devenir plus saints que moi,
pourvu que je devienne saint autant que je le puis,
Jésus, faites-moi la grâce de le désirer
penser souvent à son ant, à ses fauts, à ses fautes, et se plaire à se faire tout petit
devant Dieu, dont on admire en même temps les grandeurs et l’amour.
- Ne pas s’estimer supérieur quand on voit le prochain tomber en quelque faute
et se rappeler ce que dit saint Augustin : « Notre frère ne fait aucun péché que nous ne
ferions nous-mêmes, si la miséricorde de Dieu ne nous tenait constamment par la
main. » (Soliloque c.17)
- S’humilier aussi quand on reçoit quelque éloge : «
Il est aisé, dit saint
Augustin à l’évêque Aurélien, d’accepter de ne pas être loué, mais il est difficile d’être
insensible aux louanges que l’on reçoit. »
- Eviter toute parole qui tende à se faire valoir, à faire remarquer ses rites ;
dire plutôt ce qui humilie. S’humilier surtout près de son confesseur et directeur. Mais
les paroles d’humilité doivent être sincères, évitons la fausse humilité que le P.
Rodriguez appel l’humilité à crochet : « il en est qui disent du mal d’eux-mêmes pour
en faire dire du bien, c’est ce qu’on a appelé l’humilité à crochet, parce que, comme on
se sert d’un crochet pour attirer à soi les objets éloignés, ainsi on se sert de cette fausse
humilité pour attirer sur soi des louanges ». (Rodriguez, De l’humilité, ch. 13)
- Faire des actes d’humilité. Saint Augustin commentant l’acte du Sauveur qui
lava les pieds de ses apôtres, fait cette juste remarque : « Quand vous faites un acte
extérieur d’humilité, comme de vous prosterner aux pieds de votre frère, vous faites
naître dans votre cœur un sentiment d’humilité, et si ce sentiment y était déjà, il se dé-
veloppe et se confirme. »
-
Enfin et surtout contempler les abaissements et les opprobres du Verbe
incar depuis la crèche jusqu’au Calvaire et à l’Eucharistie, et aimer ce Dieu si
humilié. C’est cet amour de Jésus, qui, mieux que toute autre industrie, nous fera aimer
et nous apprendra à pratiquer parfaitement cette grande vertu.
En guise de conclusion, je vous livre cette prière des litanies de l’humilité que
récitait chaque jour le cardinal Merry del Val, secrétaire d'État de Saint Pie X.
Abbé Sauvonnet.
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A nnonces de Février
- Dimanches de Carême, 17h15 : Vêpres et sermon de carême.
- Vendredi 1er février, 19h00 : messe du premier vendredi du
mois.
- Samedi 2 février, 10h30 : Messe de la Purification de la
Sainte-Vierge, précédée de ladiction des cierges.
- Mercredi 13 février, 19h00 : messe chantée du mercredi des
Cendres.
Pour les enfants :
Le patronage des Amis de Saint-Dominique Savio aura lieu le
samedi 16 février, de 14h à 17h. Cette activité, à la fois spirituelle
et ludique, s’adresse aux enfants âgés de 5 à 11 ans.
Répétition d’enfants de chœur, le samedi 16 février de 11h00 à
12h00.
Catéchisme pour lycéens les vendredis 8 et 22 février à 19h.
Pour les étudiants :
Café-Caté à 20h30 le mercredi 6 février (abbé Coiffet) et le 20
février
(abbé Sauvonnet).
Soirée Petrus le mercredi 27 février (au Central Pub).
Pour les adultes :
Cours pour adultes à 20h30: mardi 5 février (abbé Coiffet) et
mardi 19 février (abbé Sauvonnet)
Retrouvez les annonces de la semaine et l’agenda complet
de notre communauté sur notre site:
http://www.fssp-bordeaux.fr/
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Le sens de l'histoire
A peine a-t-on quitté le cycle de Noël quand advient le cycle de ques -
surtout en cette année- et le cycle de la Septuagésime nous fait basculer
rapidement dans la perspective du Carême, comme une marche inévitable à
laquelle on n’eut guère le temps de s’habituer. La tendre allégresse de Noël et de
l’Epiphanie cèdent leur place à la sobriété. Le temps de l’Avent est marqué par
l’attente du Sauveur, selon les prophéties. Le dimanche de la Septuagésime, en
l’occurrence, l’Eglise commence, la lecture suivie de l’histoire sainte dans le
bréviaire, en commençant par la Création, et passant par les plus grandes étapes
de l’histoire du salut, des figures du Messie à venir. Le cycle de Noël vise plutôt
le Messie, et le cycle quadragésimal l’homme sous l’influence de la gce, mais
ces deux trouveront leur orientation commune dans le mystère deques.
L’histoire du salut commence s l’expulsion du Paradis : malgré leur
transgression, Dieu créa pour les premiers parents des tements de peau comme
protection dans un monde devenu cruel. Ensuite, il scelle la première alliance
avec Noé, dont le signe fut l’arc-en-ciel. Plus tard, Abraham sera le détenteur de
la promesse d’une nombreuse descendance. Enfin, Moïse conclut le grand pacte
avec Dieu, que les Hébreux vont suivre par leur fidélité aux préceptes de la Loi.
Le long temps de préparation va se poursuivre, en effet, jusqu’à la venue du
Messie, qui va promulguer la nouvelle et éternelle alliance dans son sang. Après
cela, il n’y aura plus d’histoire sainte, au moins selon le sens usuel de ce terme,
rédemptrice. Tout est consommé. La Révélation est close et les prophéties se
taisent. L’homme a été éduqué pour la venue de son Sauveur ; à lui de le
reconnaître. Ici commence le Royaume de Dieu, et la mort du Christ a été son
prix.
Une conception antique du temps l’imaginait comme une infinie succession
d’époques, chacune avec son caractère propre. Les quatre âges de l’homme se
renouvelleront, l’âge de fer dans lequel nous vivons cédant enfin à un nouvel âge
d’or, selon Virgile. Ainsi les cycles continueront à jamais : l’homme connaîtra des
déchéances progressives avant de retrouver sa première gloire. La notion
chrétienne du temps, en revanche, est résolument linéaire. Ce n’est pas le chaos
primitif des Grecs, préexistant depuis toute éternité, avant que le démiurge n’y
imposât l’ordre. Le Dieu des chrétiens, au contraire, créa le monde à un moment
précis, et ce monde aura terme aussi précis que ne le fut son début ; entre les deux
va se rouler toute l’histoire de l’homme. A la fin du monde, la nouvelle
rusalem, née du renouveau définitif et non cyclique de toute la création, durera
à jamais.
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