Un trou noir super-massif alimenté par du gaz froid
Au centre des amas de galaxies, il existe souvent une galaxie monstrueuse, qui avale tout ce
qui l'entoure, et en particulier les galaxies voisines. Cette galaxie géante abrite en son noyau
en trou noir super-massif, la plupart du temps très actif, brillant et rejetant de la masse dans
des jets de matière ionisée, puissants émetteurs d'ondes radio. L'origine de cette forte activité
reste jusqu'à présent mystérieuse.
Une équipe internationale comprenant des astronomes de l'Observatoire de Paris, a mis en
évidence, grâce à l'interféromètre ALMA de l'ESO, une pluie de gaz moléculaire tombant sur
le trou noir. L'accrétion de ce gaz d'origine inter-galactique, pourrait être à l'origine de
l'activité du trou noir super-massif. Ce travail fait l'objet d'une publication dans Nature (9
Juin 2016).
L'amas Abell 2597 est un amas riche, comprenant une galaxie monstrueuse en son centre : une galaxie elliptique
géante, entourée d'un halo dense de plasma chaud. A une distance de 350 millions de parsec (ou 1 milliard
d'années-lumière), cette galaxie possède un trou noir central de 300 millions de masses solaires. Ce trou noir est
très actif, et notamment émet des jets radio dans deux directions opposées, à des vitesses relativistes. Le centre est
une source puissante d'ondes radio, en particulier dans les longueurs d'onde millimétriques. Cette source de
continuum d'origine synchrotron permet de voir des nuages de gaz en absorption qui passent devant.
C'est grâce à cette possibilité d'absorption que l'équipe d'astronomes a pu détecter des nuages moléculaires denses,
tombant sur le trou noir. La vitesse de ces nuages, mesurée par effet Doppler, montre que ces nuages sont tous en
train de tomber sur le trou noir. Leur raie d'émission est décalée vers le rouge. Lorsque ces nuages sont détectés en
émission, toutes les vitesses sont observées, à la fois décalées vers le bleu et le rouge, car il n'est pas possible de
distinguer les nuages devant ou derrière le trou noir central.
Les nuages moléculaires froids (10-30 K) ont été détectés par leur raie d'émission (et d'absorption) de la molécule
CO (en particulier le niveau de rotation J=2-1 de cette molécule). Les observations à 1 millimètre de longueur d'onde
ont été effectuées avec ALMA (Atacama Large Millimeter Array) dans le désert d'Atacama au Chili. La résolution
spatiale des observations de l'ordre de 0,5 secondes d'arc, correspond à 2 000 années-lumière à la distance de
l'amas. Les nuages font partie d'une structure filamentaire, un mélange de gaz chaud et froid, et au total
correspondent à une masse de gaz moléculaire de 2 milliards de masses solaires. Une partie de ces nuages est vue
en absorption devant la source de continuum coïncidant avec le trou noir, et tombe sur le trou noir avec une vitesse
de 300 km/s. La nature de l'absorption permet de conclure à une pluie de petits nuages moléculaires denses et
compacts, et opaques dans la raie de CO(2-1).
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