Rétro-injection optique hétérodyne sur laser à fibre

publicité
Instrumentation, Caractérisation et Capteurs
A7.3
RETRO-INJECTION OPTIQUE HETERODYNE SUR LASER A FIBRE DFB POUR
L’IMAGERIE OPTIQUE COHERENTE EN CHAMP PROCHE
Hervé Gilles, Sylvain Girard, et Mathieu Laroche
CIMAP UMR 6252 CNRS, CEA, ENSICAEN, 6 boulevard Maréchal Juin, 14050 Caen
[email protected]
RESUME
La rétro-injection hétérodyne sur un laser de classe B est une technique interférométrique de
détection cohérente de très faibles flux lumineux. En exploitant le phénomène d’oscillation de
relaxation caractéristique de la dynamique des lasers de classe B, elle permet en effet un filtrage
spectral et spatial et une amplification du signal hétérodyne à détecter, utile pour améliorer le
rapport signal/bruit de la chaîne de mesure. Cette technique a été mise en œuvre pour l’imagerie en
champ proche optique par balayage de sonde (SNOM) sur un laser à fibre DFB fonctionnant autour
de 1.55µm. Plusieurs exemples de caractérisations en amplitude et en phase de champs évanescents
micro-structurés sont présentés pour illustrer le principe de la technique.
MOTS-CLEFS : interférométrie laser par rétroinjection optique ; laser à fibre DFB ;
imagerie en champ proche .
1. INTRODUCTION
Parmi les différentes techniques de microscopie par balayage de sonde, la microscopie
optique en champ proche permet l’enregistrement de la distribution spatiale du champ évanescent
optique créé à la surface d’un objet micro-structuré [1]. Complémentaire à l’imagerie topographique
AFM, cette mesure permet d’étudier le comportement de composants intégrés ayant des
fonctionnalités optiques : guides d’onde diélectrique, fibres micro-structurées, structures diffractives
sub-longueur d’onde, couche mince métallique présentant une résonnance plasmonique, etc… Dans
les dispositifs SNOM commerciaux, seule l’intensité de l’onde collectée ou diffractée par la
microsonde est détectée. L’information de phase de l’onde collectée étant perdue, il est par
conséquent impossible d’accéder à des propriétés optiques fondamentales telles que la vitesse de
phase de propagation dans la structure étudiée ou l’étude des phénomènes de réfraction ou de
diffraction de façon complète et exhaustive. Cette information de phase est pourtant essentielle pour
interpréter le comportement des objets réalisés et comparer leurs caractéristiques avec les propriétés
optiques simulées numériquement [2]. D’autre part, la résolution transverse est directement fixée
par les dimensions de la micro-pointe utilisée. Pour collecter suffisamment de lumière et conserver
un rapport signal/bruit de détection convenable, il est souvent nécessaire de trouver un compromis
aboutissant à une augmentation significative de la taille de la microsonde, au détriment de la
résolution transverse du SNOM. Guère significative dans le domaine visible grâce à l’utilisation de
tube photomultiplicateur permettant l’amplification du signal détecté sans augmentation exagérée
du bruit, ce dernier point peut devenir critique dans le proche infrarouge au-delà de 1µm en raison
de la dégradation des performances des détecteurs photovoltaïques. Pour contrebalancer ces deux
défauts majeurs – en particulier pour une détection cohérente dans le domaine infrarouge - une
approche possible consiste à exploiter le phénomène de rétro-injection optique sur un laser de classe
B. Cette technique d’imagerie cohérente a déjà prouvé son efficacité pour réaliser de l’imagerie en
milieu turbide [2]. Dans ce travail, la méthode est mise en œuvre pour réaliser de l’imagerie optique
en champ proche autour de 1.55µm. Le montage SNOM hétérodyne réalisé est entièrement fibré et
fonctionne par rétro-injection optique sur un laser à fibre DFB. La faisabilité d’une telle mesure est
démontrée en réalisant une réflexion totale frustrée sur un prisme.
343
JNOG, Lannion 2008
Instrumentation, Caractérisation et Capteurs
A7.3
2. MONTAGE EXPERIMENTAL
Parmi les sources lasers envisageables pour réaliser de la mesure par rétro-injection optique,
les lasers de classe B tels que les lasers à semi-conducteurs ou les lasers à solide diélectriques dopés
aux terres rares ont été identifiés comme les sources lasers de choix en raison de leur dynamique
spécifique de retour à l’équilibre après une perturbation transitoire. En effet, cette dynamique est
caractérisée par des oscillations de relaxation qu’il est facile d’exciter ou d’entretenir par retour
optique lorsque le champ réinjecté est décalé en fréquence d’une valeur proche de la fréquence des
oscillations de relaxation du laser. La modulation en puissance optique résultante contient à la fois
une information sur l’amplitude mais aussi sur la phase du champ réinjecté. Le laser se comporte
alors comme un interféromètre mais son caractère d’oscillateur actif permet également un effet
d’amplification. Malgré un coût plus élevé et une mise en œuvre plus complexe que les lasers à
semi-conducteur, les lasers à solide (micro-laser ou laser à fibre) présentent une sensibilité exaltée
par un facteur de gain pouvant atteindre 106 – 107 (+60-70dB) par rapport à une configuration
interférométrique classique.
Cette technique a ainsi été mise en œuvre dans une expérience de microscopie de type
SNOM. Le montage expérimental est représenté sur la figure 1. Il est basé sur une approche avec
une microsonde à ouverture (fibre optique étirée) et une configuration par réflexion totale frustrée.
La source laser utilisée est un laser à fibre dopée erbium Koheras à structure DFB
fonctionnant à 1.55µm. Le laser est pompé par une diode fibrée délivrant jusqu’à 120mW à 980nm.
L’émission du laser à fibre DFB est parfaitement monomode longitudinal jusqu’à une puissance
optique P=10mW et présente alors un pic d’oscillation de relaxation situé autour de 750kHz.
L’émission est directement couplée à un circulateur optique permettant de réaliser une boucle
optique unidirectionnelle.
Détection
synchrone
Circulateur
2
Détecteur
InGaAs
Laser à
fibre DFB
Modulateurs AO fibrés
(ordres +1 et -1)
1
y
z
Mouvement de
balayage 3 axes
Piézoélectrique
x
3
Onde
Evanescente
Structurée
FIG. 1 : Montage expérimental de détection en champ proche par rétro-injection optique
Le faisceau collimaté subit une réflexion totale sur la face interne d’un prisme taillé à 90°. Le
champ évanescent est sondé à l’aide d’une micro-pointe optique obtenue par fusion-étirage d’une
fibre monomode. Cette micro-pointe est collée sur un diapason en quartz permettant un
asservissement de position par la technique dite par force de cisaillement (technique « Shear
force »). L’ensemble est fixé sur une table de micro-déplacement 3 axes Melles Griot permettant le
déplacement et l’asservissement de position selon z de la pointe à partir du signal fourni par le
diapason et le balayage transverse dans le plan xy pour réaliser l’imagerie. On a alors accès,
simultanément, à la topographie de la surface de l’objet étudié et à l’imagerie SNOM. La lumière
collectée est décalée en fréquence à l’aide de deux modulateurs acousto-optiques fibrés (ordre +1 et
ordre -1) montés en série permettant d’ajuster le décalage de fréquence optique du champ
évanescent collecté autour de 750kHz. Le signal optique est alors réinjecté via la dernière voie du
circulateur vers le laser DFB. La perturbation est détectée sur la voie arrière du laser à l’aide d’une
photodiode fibrée et analysée à l’aide d’une détection synchrone Stanford Research System SR844
permettant de remonter à l’amplitude et à la phase de l’onde détectée.
344
JNOG, Lannion 2008
Instrumentation, Caractérisation et Capteurs
A7.3
3. IMAGE SNOM-LFI D’UNE ONDE EVANESCENTE STRUCTUREE SUR UN DIOPTRE
Afin de valider la technique de mesure, les premières expériences ont consisté à détecter la
topographie du champ évanescent obtenue par une simple réflexion totale sur un prisme en silice
[4]. Ces premières mesures ont permis de valider la possibilité de mesurer simultanément
l’amplitude et la phase du champ évanescent en un point donné sur le dioptre. Afin d’obtenir une
image 2D d’un champ évanescent inhomogène par la technique SNOM-LFI (Scanning Near Field
Optical Microscopy by Laser Feedback Interferometry), l’onde évanescente a ensuite été structurée
par un effet d’interférence en ajoutant un miroir de renvoi après le prisme, comme représenté sur la
figure 1. Les franges d’interférences obtenues suivant l’axe x (figure 2) dans le champ évanescent
correspondent alors à l’effet d’interférence observé en surface entre les deux ondes évanescentes
contra-propagatrices. L’interfrange obtenu est de 710nm. Lorsque l’on balaye la micro pointe
perpendiculairement à l’interface, on retrouve la décroissance exponentielle caractéristique du
champ évanescent simple avec une profondeur de pénétration de plusieurs microns, obtenue en
ajustant précisément l’angle du prisme juste au dessus de l’angle limite de réflexion totale.
FIG. 2 : Topographie du signal détecté pour un balayage 2D : (a) dans le plan xy parallèle au dioptre ; (b) dans
le plan xz perpendiculaire au dioptre.
Ces premières expériences d’enregistrement 2D d’images SNOM cohérentes par rétroinjection peuvent être couplées à l’information de topographie obtenue par l’asservissement shear
force sur des objets micro-structurés en surface. L’utilisation d’une source laser fonctionnant à
1.55µm est particulièrement adaptée pour la caractérisation d’éléments d’optique intégré pour les
télécoms ou pour sonder des micro-objets sur substrats à semi-conducteurs transparents dans ce
domaine spectral (Si, InP, GaAs).
CONCLUSION
Le montage de rétro-injection hétérodyne sur laser à fibre DFB a permis de valider le concept
de détection cohérente par rétro-injection optique sur laser à solide de classe B. D’autres études sur
des objets structurés d’intérêt sont en cours pour étendre la validation de la technique présentée.
RÉFÉRENCES
[1] R.C. Reddick, R.J. Warmack, T.L. Ferrell, “New form of scanning optical microscopy,” Phys. Rev. B 39,
767–770 (1989).
[2] A. Nesci, R. Dändliker, H.P. Herzig, “Quantitative amplitude and phase measurement by use of a
heterodyne scanning near-field optical microscope”, Optics Letters, 26, 208-210 (2001).
[3] E. Lacot, R. Day, F. Stoeckel, “Laser optical feedback tomography”, Optics Letters, 24, 744-746 (1999).
[4] H. Gilles, S. Girard, M. Laroche, A. Belarouci, “Near-field amplitude and phase measurements using
heterodyne optical feedback on solid-state lasers”, Optics Letters, 33, 1-3 (2008).
345
JNOG, Lannion 2008
Téléchargement