LES BRYOZOAIRES

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LES BRYOZOAIRES
Différents bryozoaires
Rose de mer
Dentelle de Neptune
Grande flustre
Bois de cerf
Ecorce marine
Doigt de feu
Bugule spiralé
Bugulle
Scrupocellaire
Les bryozoaires ou ectoproctes sont des animaux plutôt discrets, donc peu connus des plongeurs. Ils
comprennent des espèces de forme et de taille très variées dont seules les colonies sont aisées à
distinguer à l’œil nu. Les individus qui les constituent ne dépassent que rarement le millimètre.
Encroûtantes, dressées, ou arbustives, ces colonies peuvent atteindre de grandes dimensions (plus d’un
mètre) ; c’est le cas des roses de mer et des céllépores. De nombreuses autres formes plus petites, telles
le faux corail, les dentelles de Neptune, les bugulles sont tout de même assez faciles à observer. Elles
sont souvent confondues avec les hydraires avec lesquels elles constituent l’essentiel des épibiontes (qui
vit sur un autre être vivant sans parasiter celui-ci). Ces animaux sont fixés sur des supports variés tels
qu’algues, phanérogames, madrépores, gorgones et aussi les coques des navires. Dans ce dernier cas, on
les regroupe sous le vocable peu flatteur de salissures marines ou foulings. Certaines espèces résistent
même aux peintures destinées à les empêcher de se fixer, ce qui peut provoquer des problèmes aux
1
stations de pompage ou aux coques des navires. On connaît environ 5.000 espèces de bryozoaires qui
colonisent tous les niveaux marins sauf polaires jusqu’aux plus grandes profondeurs et sur tous les types
de substrats.
Classification.
Le critère essentiel de classification des bryozoaires repose sur la forme de la couronne tentaculaire.Les
bryozoaires d’eau douce (phylactolèmes) arborent un panache en forme de fer à cheval alors que celui des
bryozoaires marins (gymnolèmes) est de forme circulaire.
Caractères généraux
Ces animaux pluricellulaires sont souvent réunis avec les brachiopodes et les phoronidiens à l’interieur du
groupe des lophophoriens, animaux munis d’une couronne de tentacules,le lophophore,qui leur permet de
respirer et de se nourrir. Ce sont en principe des coelomates protostomiens qui possèdent un système
digestif en U, un réseau vasculaire et un système nerveux ganglionnaire.
Les bryozoaires sont des animaux coloniaux constitués d’un grand nombre d’individus, les zoïdes. Les
colonies ou zoariums mesurent de quelques millimêtres à quelques dizaines de centimètres. Chaque zoïde
[A] est constitué d’une partie vivante, le polype, et vit dans une logette. Ces logettes donnent à la colonie
un aspect mousseux qui justifie le nom d’origine grecque de bryozoaire (bryo=mousse, zoon=animal).
Chaque individu est un filtreur actif qui étend dans
l’eau une couronne de tentacules en forme de fer à
cheval nommée lophophore [1] qui entoure la bouche
[2] Chaque tentacule, en forme d’aigrette (lophos en
grec) est recouvert de cils vibratiles et sert à happer
les particules nutritives et à les amener à la bouche.
Les cavités digestives des zoïdes communiquent toutes
entre elles par des orifices. Un pharynx mène à
l’estomac [3]. L’anus [4] se trouve en dehors de la
couronne tentaculaire. La logette ou cystide [5] est
faite d’une paroi calcaire, cornée ou gélatineuse. Un
muscle rétracteur [6] permet de retirer le polype à
l’interieur du cystide.
Les colonies [B] sont faites par l’apposition de multiples zoïdes, le plus souvent disposés en rangées très
régulières. On reconnaît la paroi des cystides [5], le lophophore [1] et l’opercule [7] qui referme
l’ouverture du cystide quand le polype s’y retire.
En dehors des autozoïdes représentés ici, il existe d’autres formes dépourvues de lophophore et de
système digestif. Ainsi on distingue, par exemple, les individus reproducteurs (gonozoïdes), les individus
préhensiles en forme de bec d’oiseau (aviculaires) et les individus sphériques (ovicelles) où se
développent les larves. Les aviculaires servent à défendre ou à nettoyer la colonie en éliminant les
organismes épibiontes, éponges et algues susceptibles de recouvrir et d’étouffer les colonies, mais aussi à
attraper de gros individus planctoniques, dont les produits de décomposition nourriront les autozoïdes
voisins. Les photos [C] et [D] montrent le détail de quelques colonies de bryozoaires.
2
Différentes zoécies
Il existe d’autres zooécies correspondant à une répartition différente des tâches.
Les zoécies de la base d’une colonie évoluent en chénozooécies qui assument exclusivement les fonctions
d’ancrage de la colonie. Les vibraculaires sont munies de soies rigides ou de flagelles dont les oscillations
engendrent une circulation permanente d’eau évitant ainsi la formation de dépots sédimentaires sur la
colonie.
Anatomie, morphologie et fonctionnement
Les bryozoaires possèdent un système nerveux
réduit à la présence d’un ganglion cérébroïde
situé entre la bouche et l’anus. Des cellules de la
paroi intestinale se chargent des produits
d’excrétion jouant ainsi le rôle d’accumulateur
des déchets azotés. L’accumulation de ces
déchets
aboutit
généralement
à
la
dégénérescence du polype qui se transforme en
un corps brun à l’interieur du cystide. En cas de
mort du polype, ou bien s’il est la proie d’un
prédateur, le cystide possède la faculté d’en
régénérer un nouveau plusieurs fois.
Les corps bruns résiduels s’accumulent dans la partie coelomique ou sont digérés par le polype nouveau. Les
zoécies des bryozoaires marins communiquent entre elles par des plaques perforées de trous appelées
plaques en rosette.
Le lophophore.
Sa sortie est assurée par une augmentation de
pression du liquide interne par compression
musculaire. La gaine du lophophore est dévaginée.
Un mouvement pendulaire et circulaire des
tentacules favorise la circulation d’eau et la capture
des micro-organismes. La rétraction du polype est
plus rapide que la propulsion en raison de la
présence de muscles rétracteurs puissants. La
propulsion du lophophore peut également être
assurée par la présence d’un sac compensateur qui
comprime le lophophore. Ce système existe chez les
espèces qui ont une paroi frontale rigide et donc
absence de muscles pariétaux.
3
Quelques zoécies spécialisés
Certains bryozoaires possèdent des zoécies spécialisées dont le rôle est :
•
défensif ce sont les aviculaires, en forme de bec d’oiseau, chez les bugules et les vibraculaires, à
longues antennes, chez d’autres espèces.
L'image ci-contre montre la position de l'aviculaire et un
gros plan de celui-ci.
Lorsque l’on agite un peu la colonie, les aviculaires se
balancent et plus rarement on peut les voir se refermer
brusquement. Il semble y avoir à l'intérieur du "bec" des
cils sensibles qui déclencheraient cette fermeture...
D'autres espèces possèdent des 'tiges', mobiles également, nommées vibraculaires. Le mouvement
des cils parait assez complexe car ils peuvent aussi éjecter une particule jugée (sur quel critère ?)
indésirable.
•
nutritif
les gastrozoïdes qui, comme leur
nom l'indique, ne 'pensent' qu'à
manger mais nourrissent aussi la
colonie. Voici une image d’un
gastrozoïde de zoobotryon. Dans le
coin gauche en haut, une image
montrant l’anus dilaté (invisible
autrement) qui vient d’éjecter une
pelote fécale que l’on voit encore à
proximité.
La masse brune que l’on distingue dans l’autre image près de la base du zoïde est une sorte de
gésier capable de briser le frustule des diatomées ingérées.
Une vue rapprochée de l'estomac de l'un d'eux
montre une algue dinoflagellée à l'intérieur. Des
cils et des contractions aident à la digestion.
proie
4
A gauche une image de zoïdes
rétractés : le muscle rétracteur est
bien visible sur l'individu le plus à
droite
A droite un zoïde déployé. On voit
bien l'anus à droite du lophophore,
ainsi que le muscle rétracteur en
bas à gauche.
Alimentation
Les bryozoaires sont des filtreurs,ils se nourrissent principalement du phytoplancton, mais également de
petit zooplancton. Suspensivores, ils capturent, algues, diatomées, petits invertébrés, larves et détritus avec
leur lophophore en forme d'entonnoir orienté vers le courant. Ils absorbent aussi, à travers l'épiderme, des
substances aminoacides dissoutes dans l'eau de mer.
Reproduction
Les bryozoaires utilisent deux modes de reproduction : asexuée, par bourgeonnement ou séxuée. Dans ce
cas, les individus sont généralement hermaphrodites.
•
Reproduction asexuée.
La reproduction asexuée assure l’extension de la colonie par bourgeonnement en deux phases. Un
premier cystide se développe dans une zone limitrophe de la colonie. Ensuite le polype est fabriqué
par le cystide. Le bourgeonnement est utilisé également pour permettre à la colonie de disséminer
l’espèce. Dans ce cas un cystide clos rigide, appelé hibernacule, rempli de mésoderme et muni de
crochets permettant la fixation est généré. Lorsque la colonie meurt à l’automne, ces hibernacules
sont libérés, emportés par le courant et se fixent pour former de nouvelles colonies.
•
Reproduction sexuée
Les bryozoaires marins sont hermaphrodites protandres c'est-à-dire qu’ils deviennent femelles après
avoir été mâles. Ils élaborent simultanément des gamètes mâles et femelles dans la loge du cystide
qui seront émis dans le milieu par deux orifices situés à l’extrémité de deux tentacules sexuels pour
s’y féconder mutuellement. La fécondation est fréquemment interne, les œufs restant au sein du
géniteur où ils accomplissent leur maturation dans une loge d’incubation. L’œuf donne naissance à
une larve incubée dans une poche appelée oécie.
La larve ciliée, en forme de cloche, va être ensuite
expulsée et donnera naissance à une autre colonie.
La plupart des gymnolèmes sont vivipares, c'est-àdire que les œufs fécondés vont être incubés près du
lophophore ou dans une chambre incubatrice qui
libère de nombreuses larves. Dans les cas
d’oviparité, la larve ciliée transparente mène une
existence planctonique avant de se fixer pour former
une nouvelle colonie. Donc, lorsqu’une larve se fixe
sur un substrat, elle se tranformera en un zoïde
primaire, appelé ancestrule.
Le cycle est donc le suivant :
Oecie
Planula
Î
5
Î
Jeune individu
Î
Individu adulte
Î
Colonie
Symbiose
Chez les bryozoaires, on connaît des symbioses avec des bactéries au moment de la fixation des larves de
bryozoaires sur leur futur support. La surface poreuse des bryozoaires est propice à la colonisation par des
cnidaires encroûtants,le plus souvent coralligènes. La photo de gauche montre un Hyppodiplosia colonisé,
sous un grossissement 40 X. Les photos de droite montrent une symbiose entre bryozoaires et gorgones.
Fossiles
Après une longue émersion pendant le début de
l’ère tertiaire, un golfe ouvert sur l'Atlantique s'est
installé au Miocène moyen, il y a une quinzaine de
millions d'années, sur un vaste territoire le long de
l'axe actuel de la Loire créant des dépôts marins
constitués de calcaires gréseux, de boues calcaires
et sables plus ou moins coquilliers. Ces dépôts sont
appelés « faluns », et contiennent énormément de
fossiles dont les squelettes résultant d’une d’une
symbiose entre les bryozoaires Celleporaria palmata
et les coraux Culicia parasitica ou Cryptangia woodi.
Prédateurs
Parmi les prédateurs des bryozoaires, il y a quelques mollusques nudibranches, certains vers comme le
planaire rose, les oursins et certains petits crustacés (caprellidés et pycmogoides). Les bryozoaires ont
cependant plus à redouter la concurrence spatiale des algues qui risquent de les étouffer. C’est certainement
pour cette raison que la plupart des bryozoaires sont sciaphiles c’est à dire qu’ils recherchent l’ombre.
Bryozoaires d’eau douce
A l’automne 1999, des masses gélatineuses pouvant
atteindre 60 cm de diamètre sont venues s’échouer sur les
rives de l’étang du Goulot à Lormes (Nièvre). Il agit de
colonies de bryozoaires Pectinella magnifica. C’est une
espèce nord-américaine, introduite en Allemagne orientale
à la fin du 19ème siècle, qui est propagée en Europe centrale
durant le 20ème siècle. En France, elle est décrite pour la
première fois en 1995 dans les Vosges, en 1998 en Saôneet-Loire, puis ici dans le Nièvre en 1999. Ces petits
animaux, presque microscopiques, fabriquent des sortes de
graines (statoblastes) munies de grappins pouvant
aisément s’accrocher sur les écailles des poissons ou les
pattes des oiseaux.
C’est là probablement l’origine de leur introduction en Morvan. Bien qu’inhabituelles
dans nos eaux douces, ces colonies, ne se développent qu’en période très chaude et
sont sans danger pour l’homme. Certains auteurs leur prêtent même des vertus
épuratrices grâce à la filtration permanente de l’eau nécessaire à leur alimentation.
A droite un statoblaste
6
Découverte faite près de Belfort à Lachapelle sous chaux (90).
Il s'agit de masses ayant une taille allant de la balle de tennis au
balllon de football voir plus. Elles semblent fixées au départ sur un
support qui peut être fragile comme un brin d'herbe et les libérer
en se rompant.
Découverte en Haute Saône, voici une colonie approchant le mètre de diamètre vu dans un étang aux
environs d'Ecromagny. On constate l'implantation d'algues sur le haut affleurant de la masse. Mais le réseau
de polypes est intact plus bas. Observé à la loupe, il apparaît en surface de petits panaches rétractiles qui
sont les individus ou polypes de ces animaux coloniaux. L'intérieur de la masse est constitué d'une gelée
assez consistante pour se découper au couteau. La mort des polypes laisse un réseau en surface imitant le
squelette de certains coraux. A plus fort grossissement, il apparaît sur les polypes une couronne de
tentacules en forme de fer à cheval, caractéristique des bryozoaires d'eau douce de l’ordre des
Phylactolèmes = Lophopodes.
L'espèce, signalée en Franche comté depuis 1994 et connue des pêcheurs de la région des mille étangs, est
nommée Pectinatella magnifica. Elle est également présente au Japon et en Amérique du Nord.
Allergie
Il existe un risque d’excema allergique pour certaines personnes au contact des bryozoaires.
Observation en plongée.
Il est relativement facile, avec un peu d’habitude, d’observer en plongée les bryozoaires de grande ou de
moyenne taille. En Bretagne notamment on peut trouver des roses de mer dont le diamètre avoisine ou
dépasse le mêtre. Les dentelles de Neptune, le faux corail, abondants en Méditerranée sous les surplombs,
permettent à ceux qui ont une bonne vue d’apercevoir les nombreux panaches des lophophores qui forment
une sorte de velours autour de la colonie. N’oubliez pas toutefois que ces animaux sont très fragiles et que
le moindre contact peut réduire à néant en une seconde le patient travail de milliers d’individus.
Selon l’espèce,la longévité d’une colonie de bryozoaires atteint de quelques semaines à plusieurs années.
U. Korn
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Mes sources
Steven Weinberg : Découvrir l’Atlantique.
Helmut Göthel :Guide de la faune sous
marine.Edition Ulmer.
Christine Bertrand :Subaqua hors série 1.
Jean Louis Etienne :Clipperton.
Sociétéd’histoire naturelle d’Autun :Invertébrés
notules.
Fournerzau.J. :Inrs :allergie.
Christian Coudre :L’association Côte Bleue.
Jean François Lhomme :Bryozoaires du
Miocène.
Dominique Millet :Commentaires faluns, coraux
et bryozoaires.
Bertrand Langillier :Faluns Touraine.
Daniel Nardin :Pectinatella.
Christian C. Emig :C’est quoi un phoronidien ?
Vie océane.
Photo bryozoaires sur gorgones : Subaqua.
Jean Marie Cavanihac :Forum Mikroscopia.
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