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Les chiffres représentés dans le tableau 1 sont intéressants dans la mesure où ils
indiquent des différences importantes entre les trois langues. En effet, ils nous permettent de
caractériser les auteurs anglais et norvégiens comme « personnels », les auteurs norvégiens
également comme « pluriels » et les auteurs français comme « indéfinis » : les chercheurs
anglais et norvégiens utilisent le plus de pronoms de la première personne du singulier (0,24
% de I et de jeg/eg respectivement), les Norvégiens le plus de pronoms de la première
personne du pluriel (0,64 % de vi/me) et les Français le plus de pronoms indéfinis (0,43 % de
on)6.
3. Le pronom on
Traditionnellement le pronom on a été rangé dans la classe des pronoms indéfinis; cependant,
dans les grammaires ainsi que dans d’autres études récentes, la valeur de on comme pronom
personnel est de plus en plus prise en considération. Quel que soit son classement, nous
observons pourtant qu’il y a un consensus concernant certaines spécificités du pronom on à
prendre en considération. En addition du fait que on assume toujours la fonction grammaticale
de sujet, les chercheurs sont plus ou moins d’accord pour indiquer les traits suivants comme
caractéristiques :
- on réfère à une ou plusieurs personne(s)
- on peut se substituer à tous les pronoms personnels
- on ne marque pas un statut énonciatif précis
- on véhicule différents effets de sens.
Ces spécificités ainsi que d’autres sont traitées et mises en relief de différentes manières dans
différents travaux que je ne pourrai pas aborder ici7.
n’est normalement pas inclus (voir Vassileva 2000 pour un aperçu). Cela s’explique peut-être par le fait que les
pronoms dits
indéfinis diffèrent beaucoup d’une langue à une autre. Le pronom anglais one (ou you) par exemple
ne s’utilise pas de la même manière que le on français : le one anglais se caractérise par un sémantisme plus
homogène et par un emploi beaucoup moins fréquent que celui du pronom français on. Le man norvégien (ou
en/ein) semble être assez proche des pronoms correspondants anglais. C’est le pronom français on qui présente
les emplois les plus intéressants dans la mesure où sa référence peut varier du personnel à l’indéfini.
6 Le tableau 1 cache une dimension importante dans la caractérisation de l’emploi des pronoms sujets dans les
articles de recherche : la dimension disciplinaire. Il y a en effet des différences importantes entre les diverses
disciplines (pour plus de détails, voir Fløttum 2003a ; Fløttum, Dahl & Kinn à paraître). En termes très généraux,
on peut dire que les linguistes sont les plus explicites et les médecins les moins explicites ; les économistes se
situent entre ces deux extrêmes. Ces résultats correspondent bien aux conceptions traditionnelles des différences
entre les sciences dites « molles » et « dures » (voir Hyland 2000).
7 Je me contente de mentionner que ces travaux se fondent sur une gamme de matériaux différents, dont des
corpus journalistiques (Atlani 1984), littéraires (Rabatel 2001) ou oraux (Viollet 1988) ; des genres discursifs
spécifiques comme l’article scientifique (Loffler-Laurian 1980 ; Gjesdal 2003) ou l’article lexicographique
(François 1984) ; ou encore des matériaux composés de différents genres (Larsen 1984). Cette gamme de
matériaux variés s’accompagne d’une série de différentes perspectives adoptées. Plusieurs abordent la question
portant sur la classification des différents emplois que peut assumer on (Muller 1979 ; Rey-Debove 2001 ;