Calcul de la valeur efficace : le num érique n`a pas que d

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INSTRUMEN T A T I O N É L E C T RO N I Q U E
Calcul de la valeur efficace: le num

Une nouvelle génération de multimètres numériques arrive sur le marché, qui fait appel à l’échantillonnage direct du signal
et à un calcul numérique de la valeur efficace des courants alternatifs. Principaux avantages : une mesure plus rapide, une
précision améliorée (surtout sur les sinusoïdes à fréquence élevée) et l’absence de déclassement lié au facteur de crête. Malgré
toutes ces améliorations, il faut savoir que la technique de l’échantillonnage direct présente aussi quelques inconvénients,
en particulier une bande passante aux limites strictes et un bruit élevé pour certaines fréquences du signal d’entrée.
L
es multimètres présents sur le marché font appel à différentes techniques pour mesurer la valeur efficace vraie d’un signal. On peut
en distinguer quatre : thermique, analogique, sous-échantillonnage ou échantillonnage direct. Les deux premières techniques
convertissent habituellement le signal d’entrée en une tension continue proportionnelle
au signal d’entrée alternatif efficace. Les deux
dernières réalisent un échantillonnage direct
du signal d’entrée.
La méthode thermique mesure l’élévation
de température provoquée par le signal
d’entrée dans une résistance de précision,
mais elle n’est plus utilisée dans les multimètres de laboratoire. La technique analogique fait appel à un circuit électronique qui
délivre un niveau continu proportionnel à la
valeur efficace vraie d’un signal alternatif. La
sortie continue du circuit
est mesurée à
L’essentiel
l’aide d’un convertisseur analogique/nu Jusqu’à une époque récente,
mérique et convertie
le calcul de la valeur efficace
en une mesure alterétait effectué avec une
native. C’est la méélectronique analogique et le
thode la plus répanrésultat était ensuite
due.
numérisé pour être affiché.
Ces deux techniques
 Les nouvelles générations de
se limitent exclusivemultimètres réalisent un
ment à donner la vacalcul numérique, directeleur efficace du signal.
ment à partir des échanSi on veut en savoir
tillons du signal.
plus sur le signal lui La technique apporte des
même, il faut faire
améliorations importantes
appel à une des deux
en vitesse et précision…
autres techniques.
 ...à condition que les
La méthode du sousfréquences contenues dans
échantillonnage fait
le signal se situent dans la
appel à un circuit suibande passante de l’appareil.
veur-bloqueur et à une
Sinon, la mesure peut être
largement faussée
base de temps de précision pour échan-
48
Si ces deux multimètres présentent un évident lien de parenté, ils n’appartiennent pas à la même génération.
Le 34401A utilise une technique analogique pour calculer la valeur efficace alors que 34410A fait appel une technique numérique, ce
qui lui permet d’être plus précis et plus rapide. Mais ce dernier est moins tolérant aux déformations importantes du signal, surtout aux
fréquences élevées.
tillonner de façon uniforme un signal répétitif. Elle nécessite pour cela la réalisation de
mesures incrémentées dans le temps, sur de
nombreuses périodes du signal d’entrée.
Chaque sortie du suiveur-bloqueur est convertie à l’aide d’un convertisseur analogiquenumérique et les résultats sont combinés
numériquement en une mesure alternative.
La technique présente en outre l’avantage de
mesurer un signal d’entrée contenant des
fréquences plus élevées.
L’échantillonnage direct numérise l’entrée alternative à une fréquence d’échantillonnage fixe. Il capture un ou plusieurs
cycles du signal d’entrée, puis le signal capturé est analysé. Les échantillons sont élevés
au carré et moyennés, la racine carrée de
cette moyenne est ensuite extraite pour produire la valeur efficace vraie (valeur quadratique moyenne). Cette technique est relativement nouvelle pour les multimètres, mais
elle est répandue dans les oscilloscopes, qui
offrent pour la plupart une combinaison de
techniques d’échantillonnage direct et de
sous-échantillonnage.
Toutes ces techniques sont applicables aussi
bien aux tensions qu’aux courants alternatifs. Dans la plupart des cas, la mesure de
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ériquen’apasquedesavantages…
courant est effectuée en convertissant le signal en tension à l’aide d’une résistance
shunt de précision.
Toutes ces méthodes permettent également
de faire des mesures sur des signaux comportant une composante continue (couplages AC et AC+DC).
Intéressons-nous plus particulièrement à la
technique de mesure à échantillonnage direct qui est, comme on l’a dit, relativement
nouvelle dans les multimètres. Et voyons ce
qu’elle apporte par rapport à la technique
analogique classique. Dans les deux cas, on
va s’intéresser à une mesure couplée AC. Le
couplage AC permet de mesurer de légères
variations du signal AC en présence de signaux continus importants. Cette configuration est par exemple utilisée pour vérifier
l’ondulation d’une alimentation à courant
continu. Le couplage de l’entrée AC est réalisé à l’aide d’un simple condensateur de
blocage.
Une approche radicalement
numérique
Dans le schéma synoptique d’un multimètre
réalisant la mesure de la valeur efficace à
l’aide d’un circuit analogique, on trouve,
juste derrière le condensateur de blocage de
la composante continue, un amplificateur/
atténuateur dont la valeur d’amplification/
atténuation dépend de la gamme de mesure
sélectionnée. Celui-ci est suivi du convertisseur RMS (qui calcule la valeur efficace en
effectuant une élévation au carré, un moyennage et une extraction de la racine carrée.
Tout ceci est réalisé avec des composants
analogiques. On obtient ainsi un niveau continu correspondant à la valeur efficace vraie
de l’entrée. A la sortie du convertisseur RMS,
le signal analogique est numérisé à l’aide
d’un CAN (convertisseur analogique/numérique). Comme le signal alternatif a été converti en un niveau continu équivalent, il
suffit que le CAN soit assez rapide pour permettre un rafraîchissement de la lecture “raisonnable”. La fréquence d’échantillonnage
du CAN se situe typiquement dans la gamme
de 200 Hz à 2 kHz, quelle que soit la fréquence maximale du signal d’entrée. Les
valeurs du CAN sont pondérées (mises à
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Calcul de la valeur efficace
Technique analogique
Technique numérique
Par définition, la
valeur efficace d’un
courant de forme
quelconque est égale
au courant continu I
qui produirait le
même échauffement
dans une résistance R.
Cette notion découle
donc directement de
la définition de la
puissance P dissipée
par effet Joule :
P = R.I2
RMS signifie Root
Mean Square, c’est-àdire “racine carrée de
la moyenne du carré”.
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Temps d’établissement1
Fréquence
d’entrée
minimale
Précision, en fonction de la valeur lue (L)
et de l’étendue de mesure (E.M.)
Agilent 34401A
Agilent 34410A
(RMS analogique) (RMS numérique)
Fréquence
Agilent 34401A (RMS analogique)1
Agilent 34410A (RMS numérique)2
8,0 s
2,50 s
3 Hz – 5 Hz
1,00 % L + 0,03 %E.M
0,50 % L + 0,03 %E.M
1,5 s
0,50 s
5 Hz – 10 Hz
0,35 % L + 0,03 %E.M
0,10 % L + 0,03 %E.M
1,5 s
0,33 s
10 Hz – 20 kHz
0,06 % L + 0,03 %E.M
0,06 % L + 0,03 %E.M
0,025 s
20 kHz – 50 kHz
0,12 % L + 0,05 %E.M
0,10 % L + 0,05 %E.M
1
50 kHz – 100 kHz
0,60 % L + 0,08 %E.M
0,40 % L + 0,08 %E.M
2
100 kHz – 300 kHz
4,00 % L + 0,50 %E.M
1,20 % L + 0,50 %E.M
3 Hz
20 Hz
50 Hz
2
200 Hz
0,15 s
Jusqu’à 0,01 % de la gamme, pour un pas AC de 100 % à 1 % de la
gamme, sans changement DC
Mesurée avec une bande passante de 20 Hz.
1
Le 34401A et le 34410A gèrent 3 bandes passantes, ce qui permet d’arbitrer entre le
temps d’établissement et la fréquence d’entrée minimale.
l’échelle) afin de tenir compte de la valeur
du gain de l’amplificateur/atténuateur placé
à l’entrée du circuit RMS.
Le schéma synoptique d’un multimètre à
échantillonnage direct est sensiblement différent. Les différences se situent à deux niveaux. En premier lieu, le signal analogique
est numérisé juste après le filtrage de la composante continue (par le condensateur de
blocage et l’atténuateur/amplificateur. Le
convertisseur RMS, placé à l’aval du CAN, est
ici basé sur un DSP (Digital Signal Processor)
et il réalise ici une estimation numérique de
la valeur efficace (on a toujours les opérations les opérations d’élévation au carré, de
moyennage et de calcul de la racine). Il est
impératif que le signal numérique présent à
l’entrée du convertisseur RMS soit représentatif du signal analogique présent à l’entrée
du multimètre. Pour que le calcul de la valeur
efficace donne un résultat correct et en
Pour les gammes de 1 Veff et plus, et pour les signaux compris entre 5 % et 120 % de la gamme.
2
Pour les gammes de 1 Veff et plus, et pour les signaux compris entre 0,3 % et 120 % de la gamme.
Ce tableau montre pour les signaux compris entre 100 kHz et 300 kHz, l’amélioration de la précision et la dynamique accrue du 34410A
(à échantillonnage direct, calcul numérique de la valeur efficace) par rapport au 34401 (calcul analogique de la valeur efficace).
temps réel (c’est-à-dire que l’on puisse suivre les variations du signal d’entrée), le CAN
doit travailler à une fréquence qui soit au
moins le double de la fréquence maximale
du signal d’entrée (théorème de Shannon).
En pratique, la fréquence d’échantillonnage
du CAN est typiquement 5 à 10 fois supérieure à la fréquence la plus élevée du signal
d’entrée (par exemple, une fréquence
d’échantillonnage de 1,5–3 MHz pour une
bande passante de 300 kHz). Le filtre antirepliement s’impose pour s’affranchir du
bruit produit par des signaux d’entrée dont
la fréquence est supérieure à la moitié de la
fréquence d’échantillonnage.
tres à échantillonnage direct : des CAN
travaillant à des fréquences d’échantillonnage suffisamment élevées et un traitement numérique du signal à bas prix.
Toutes deux se sont fortement améliorées
au cours de ces dernières années. Les convertisseurs Delta-Sigma (avec la technique
de sur-échantillonnage) ont permis de
réaliser des CAN de précision travaillant à
des vitesses élevées, et utilisables sur les
multimètres de laboratoire. Derrière le
convertisseur, il faut que le traitement du
signal puisse “suivre le rythme”.
Aujourd’hui, même les circuits FPGA relativement modestes offrent des ressources
DSP suffisantes pour cela.
Résultat, l’échantillonnage direct permet désormais de réaliser des mesures plus rapides
sur les signaux alternatifs, des lectures plus
Des avantages déterminants
Deux technologies de base sont indispensables pour permettre de réaliser des multimè-
Erreur générée (en % de la valeur lue)1 en fonction
de la forme du signal
Fréquence
Agilent 34401A (RMS analogique)
Agilent 34410A (RMS numérique)
Sinusoïde
Triangle
Carré
Sinusoïde
Triangle
Carré
200 Hz
- 0,01 %L
- 0,02 %L
0,02 %L
0,00 %L
0,00 %L
- 0,01 %L
1 kHz
0,00 %L
- 0,01 %L
0,03 %L
0,00 %L
0,00 %L
- 0,05 %L
2 kHz
0,00 %L
- 0,01 %L
0,04 %L
0,00 %L
0,00 %L
- 0,11 %L
5 kHz
0,00 %L
- 0,01 %L
0,08 %L
0,00 %L
0,00 %L
- 0,27 %L
10 kHz
0,01 %L
- 0,01 %L
0,13 %L
0,00 %L
0,00 %L
- 0,55 %L
20 kHz
0,02 %L
0,01 %L
0,25 %L
0,00 %L
0,00 %L
- 1,11 %L
50 kHz
0,08 %L
0,04 %L
0,55 %L
- 0,03 %L
- 0,05 %L
- 2,88 %L
100 kHz
0,21 %L
0,08 %L
1,08 %L
- 0,06 %L
- 0,18 %L
- 4,82 %L
1
En plus de la précision de base 1 kHz.
Le tableau montre l’erreur de mesure additionnelle typique introduite lorsque l’on n’a pas affaire à des signaux sinusoïdaux. L’échantillonnage direct offre une meilleure performance, mais uniquement
lorsque les harmoniques du signal d’entrée se situent à l’intérieur de la bande passante de l’instrument de mesure. Plus le signal présente des harmoniques hors bande, plus la méthode d’échantillonnage
direct introduit une erreur importante.
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précises (dans certaines conditions) et une
architecture système plus flexible.
Des mesures plus rapides… La rapidité
des mesures constitue l’avantage le plus significatif de l’échantillonnage direct sur la
technique analogique. Dans un voltmètre à
échantillonnage direct, le filtre passe-bas utilisé pour l’étape du moyennage dans le calcul
de la valeur efficace peut être d’un ordre bien
plus élevé que le passe-bas de premier ordre
typiquement utilisé avec un calculateur RMS
analogique, d’où une amélioration du temps
d’établissement d’un facteur 4, voire plus.
Par ailleurs, le temps d’établissement dû au
couplage AC peut être réduit pour optimiser
la scrutation des voies.
…plus précises… L’une des principales
causes du manque de précision des multimètres analogiques est la réponse en fréquence du circuit de conditionnement du
signal d’entrée (qui effectue l’opération d’atténuation ou d’amplification). Ce circuit est
réglé pour délivrer une réponse aussi plate
que possible. Pour les multimètres à échantillonnage direct, on peut annuler la réponse
en fréquence du conditionnement du signal
en appliquant aux données échantillonnées
un filtre numérique avant de lancer le calcul
quadratique. Ce filtre autorise une correction
plus précise que le circuit d’entrée réglé,
d’où une plus grande précision pour les sinusoïdes à fréquence élevée.
Sur les multimètres analogiques, d’autres
sources d’erreur sur la précision découlent
des limitations du calculateur analogique de
la valeur efficace RMS. En premier lieu, lorsque le signal d’entrée n’a pas une forme sinusoïdale, la précision de la conversion quadratique est réduite. Deuxièmement, lorsque
le niveau d’entrée baisse en dessous de 10 %
de la gamme, on constate une chute de la
bande passante du convertisseur RMS, ce qui
introduit une non-linéarité aux fréquences
élevées. Sur les multimètres à échantillonnage direct, on obtient une précision nettement améliorée sur les signaux non sinusoïdaux (à condition bien sûr qu’ils se situent
dans les limites de la bande passante du multimètre) et la dynamique des signaux est
bien plus élevée.
…et plus complètes. Le multimètre à
échantillonnage direct présente un autre
avantage déterminant sur le multimètre à
calcul analogique de la valeur efficace : la
numérisation du signal d’entrée permet de
disposer des informations sur le signal, indépendamment du calcul de la valeur efficace. Alors qu’avec les calculateurs RMS analogique, on n’a accès qu’à la valeur efficace.
Avec l’échantillonnage direct, la valeur crête-
crête ou la moyenne (en cas de couplage
DC) peuvent être calculées en même temps
que la valeur efficace. Ces informations complémentaires peuvent être très utiles. Par
exemple, la détection des crêtes supérieures
à un niveau attendu peut être précieuse pour
tester certains composants inductifs.
Tout n’est pas parfait
Bien que l’échantillonnage direct présente
de réels avantages, il présente aussi quelques
inconvénients. Le principal concerne le filtre
anti-repliement, imposé par la fréquence
d’échantillonnage du convertisseur analogique-numérique. La pente raide du filtre antirepliement limite la bande passante et introduit une erreur importante pour les signaux
dont la fréquence se situe au-dessus de la
fréquence de coupure. Par exemple, pour
une onde carrée de 20 kHz, un filtre antirepliement raide avec coupure à 300 kHz
exclut 1,2 % de la puissance du signal. Avec
le calcul analogique du RMS, la bande passante décroît généralement de façon progressive au-delà de la bande passante de
mesure spécifiée, si bien que les signaux
présentant un contenu “hors bande” sont
mesurés avec une précision supérieure à la
mesure avec un calcul numérique du RMS.
Pour reprendre l’exemple précédent d’une
coupure à 300 kHz, un convertisseur RMS
analogique peut encore “voir” le contenu
jusqu’à 1 MHz.
L’échantillonnage direct peut amener
d’autres sources d’erreurs, liées à la procédure d’échantillonnage elle-même. C’est
ainsi que pour certaines fréquences du signal
d’entrée, le bruit de mesure peut être beaucoup plus élevé que pour d’autres. C’est le
cas de toutes les fréquences qui sont des
sous-multiples de la fréquence d’échantillonnage. Pour ces fréquences, le bruit de
mesure peut passer brutalement de quelques
ppm à quelques dizaines de ppm. Ces effets
peuvent surprendre l’utilisateur qui mesure
un signal contenant de telles fréquences.
Mais, il faut tout relativiser, ce petit inconvénient est tout relatif si on le compare aux
avantages qu’apporte l’échantillonnage direct.
Enfin, la procédure de calibrage utilisée pour
compenser la réponse en fréquence du circuit de conditionnement du signal (qui réalise l’amplification ou l’atténuation) nécessite typiquement un nombre de points de
calibrage beaucoup plus important que la
technique analogique et peut donc allonger
le temps requis pour le calibrage.
Conrad Proft et Brian Stewart
Agilent Technologies
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