4Pour aller plus loin
Les papillons de jour de France, Belgique et
Luxembourg et leurs chenilles, T. Lafranchis,
2000, collection Parthénope, éditions Bio-
tope, Mèze (France).
Les papillons de jour et leurs biotopes, Ligue
Suisse de Protection de la Nature, 1987, LSPN.
LAzuré de la croisette : « Il était une fois un
papillon, une fleur et une fourmi…»
Cette plaquette, à destination du grand
public, présente le papillon l’azuré de la
Lazuré de la croisette et l’azuré des mouillères ont un cycle particu-
lièrement complexe. Ces petits papillons bleus, très proches parents,
ne volent pourtant jamais au même moment. La faute en est aux
plantes-hôtes, l’estivale gentiane croisette et l’automnale gentiane
pneumonanthe, qui s’épanouissent à des saisons différentes.
La présence de ces deux azurés, rares et protégés, est trahie par l’ob-
servation des pontes, qui ressemblent à de petites têtes d’épingles
blanches et qui restent soudées aux feuilles et aux bourgeons floraux
des gentianes même après l’éclosion des chenilles. Celles-ci ont un
destin original: après avoir vécu un moment au dépend de la plante,
elles se laissent tomber au sol et sont recueillies par des fourmis, leur
développement s’achevant au fond des fourmilières grâce au nour-
rissage attentif des ouvrières, sans doute dupées par une substance
chimique apparentée à celles émises par le couvain (œufs, larves et
nymphes des fourmis).
Depuis 2003, un programme multipartenarial a été lancé pour la pré-
servation de lazuré de la croisette en Franche-Comté. Les actions
sont en grande partie orientées en faveur des gentianes, les mesures
conservatoires étant plus faciles à concevoir et à mettre en
œuvre que dans le cas d’espèces rares comme le mélibée, pour lequel
la disponibilité des plantes-hôtes ne semble pourtant pas poser pro-
blème. Pour l’azuré de la croisette, il s’agit de s’assurer de la
pérennité des pratiques agricoles favorables sur les pelouses pâtu-
rées, de solutionner les problèmes là où menacent l’intensification
ou la déprise ou encore d’optimiser la fauche sur les stations en talus
routiers. Indirectement, la plante bénéficie ainsi de la présence de
son illustre «consommateur» !
Un plan de conservation régional pour l’azuré des mouillères, dont la
plante-hôte pousse dans les habitats marécageux peu dégradés, a vu
le jour et est piloté par l’Office pour les insectes et leur environne-
ment en Franche-Comté.
croisette ainsi que le programme d’actions
mis en place pour assurer sa sauvegarde en
Franche-Comté. Réalisée par le CPIE du
Haut-Doubs, elle est disponible sur demande
à la maison de l’environnement de Franche-
Comté ou en téléchargement sur le site
www.maison-environnement-franchecomte.fr
— www.noeconservation.org/imgs/bibliotheque_
fichier/070321172206_opj_dp-2007.pdf
— www.gretia.org
Rédaction : Conservatoire régional
des espaces naturels de Franche-Comté.
Relecture: Frédéric Mora, Office
pour les Insectes et leur Environnement
en Franche-Comté.
Réalisation : Franche-Comté Nature
Environnement avec le soutien
financier du Conseil régional
de Franche-Comté.
Crédit photos: Luc Bettinelli, Laurent
Delafollye, Emilie Leboucher.
Illustrations : Desmond Bovey.
22 UN E C H E N I L L E
D É V O R E U S E D E F L E U R S
Les chenilles éclosent au bout
de 4 à 10 jours. Elles forent
un passage jusqu’à l’intérieur
des fleurs et s’en nourrissent
pendant 2 à 3 semaines.
33 LA F O U R M I D U P É E
Les chenilles sortent des fleurs et se
laissent tomber au sol. Elles émettent
une odeur particulière qui attire
certaines fourmis rouges
et les préserve de leur
agressivité. Les
chenilles sont
adoptées et
transportées
au nid.
44 UN E P E N S I O N C O M P L È T E
Les chenilles sont nourries par les ouvrières
avec la bouillie préparée pour les larves
de la colonie.
55 L A M É T A M O R P H O S E
Pendant l’hiver, les chenilles arrêtent
leur alimentation. Au printemps,
elles s’enferment dans un cocon de soie
(chrysalide) quelques centimètres sous
la surface du sol.
66 E N F I N L A I R L I B R E
Les papillons émergent quelques semaines
plus tard et recommencent leur cycle.
Sauver les azurés en préservant les gentianes
Il était une fois un papillon, une fleur
et une fourmi
11 L A G E N T I A N E , B E R C E A U
DE L’ A Z U R É D E L A C R O I S E T T E
Entre mi-mai et fin juillet, les femelles
pondent sur les bourgeons floraux
de la gentiane croisette.
Suivi détaillé
de la gentiane croisette
BIODIVERSITÉ | Conservatoire régional des espaces naturels de Franche-Comté
FICHE
44
Il est courant, à la belle saison,
d’observer des lépidoptères
«papillonnant » de fleur en fleur.
Mais sait-on que de l’œuf à l’état
adulte, ces insectes sont sans
cesse en relation étroite avec
les plantes ? Elles leur apportent
surtout le gîte et le couvert,
parfois bien malgré elles.
En contrepartie, les papillons
participent souvent activement
au processus de fécondation
des fleurs.
De l’œuf
au papillon,
des relations
étroites avec
les plantes…
Papillons
et plantes,
une belle
histoire
d’amour
Petites tortues
sur œillets de poète
Chrysalide de gazé
possèdent un appareil buccal de type suceur
très performant, constitué d’une longue
trompe enroulée sur elle-même au repos.
Des milieux comme les prairies naturelles 11,
les ourlets et les lisières forestières, les ron-
ciers et les mégaphorbiaies (habitats humides
à hautes herbes) abritent de nombreuses
plantes nectarifères. Ils constituent des sites
de nourrissage importants pour la conserva-
tion des papillons, malheureusement très
touchés par la crise de la biodiversité et
régressant à un rythme rapide en Europe. La
banalisation des prairies, dans lesquelles la
fertilisation sélectionne les graminées au
détriment des plantes à nectar, en est sans
doute une cause majeure.
Le cycle
de reproduction
Les lépidoptères font partie des insectes dits
holométaboles, qui vivent une métamor-
phose complète et spectaculaire. Ils passent
ainsi par quatre états morphologiquement et
physiologiquement bien distincts : l’œuf, la
chenille (stade larvaire), la chrysalide (stade
nymphal) et enfin, l’imago, aboutissement
d’un long processus de transformation. Ce
dernier correspond au papillon adulte, ailé
chez la grande majorité des espèces.
Les relations du papillon avec les plantes
s’opèrent selon des modalités un peu diffé-
rentes pour chacun de ces stades, son degré
de dépendance vis-à-vis du végétal évoluant
au cours de son développement. Les organes
végétaux ne sont guère que des supports pour
les œufs et les chrysalides. Mais la chenille et
l’imago ont activement besoin de la présence
des plantes, en particulier mais pas seule-
ment – pour leur alimentation.
Concernant la plante, ce sont les consé-
quences de la présence des lépidoptères
qui varient, plus nettement encore,
entre franche nui-
sance prédation »
par les chenilles) et
bénéfice partagé
(pollinisation par
les imagos).
Lalimentation
des imagos
Les imagos trouvent une grande partie de
l’énergie nécessaire pour se déplacer et se
reproduire en se nourrissant de substances
d’origine gétale : fruits pourris, exsudats
(sève, résine) et surtout nectar. Cette subtance
très riche et sucrée est une sorte de résidu
produit par les plantes à fleurs au cours de
la photosynthèse. Les papillons repèrent
d’abord les fleurs grâce à leurs couleurs et à
la lumière ultraviolette qu’elles émettent.
Ensuite, pour atteindre le précieux liquide, ils
n’ont pas besoin de se frayer un chemin au
cœur de la fleur à la manière des abeilles : ils
Parmi les « plantes à fleurs » particulièrement
appréciées par les lépidoptères, on peut citer
le silène enflé, l’origan 22, les ails, les violettes
ou encore des arbustes comme le troène 33et
la viorne mancienne. Certaines plantes culti-
vées sont également très attractives, comme
l’œillet de poète 44ou le buddleia. Ce der-
nier mérite son nom populaire « d’arbre aux
papillons», mais se montre envahissant dans
certaines régions, et sa plantation est donc
déconseillée.
Si les plantes offrent des ressources énergé-
tiques aux papillons adultes, elles y gagnent
l’assurance du transport rapide et efficace de
leur pollen. Tout comme les abeilles, bour-
dons ou autres syrphes, les lépidoptères
participent en effet activement à la pollinisa-
tion des plantes. Certaines plantes à floraison
nocturne sont ainsi fécondées uniquement
par des grands papillons de nuit.
La chenille
et la chrysalide
Les chenilles, qui sortent des œufs minus-
cules déposés sur les plantes, sont parfaite-
ment adaptées à la consommation des végé-
taux (bien qu’il existe également quelques cas
particuliers de chenilles carnivores). Leur
appareil buccal, de type broyeur, est com-
posé de puissantes mandibules ; les organes
internes du système digestif sont eux aussi
très développés. La principale activi des
chenilles, particulièrement voraces, est de se
nourrir, souvent au détriment des feuilles,
parfois directement au détriment des bou-
tons floraux.
Au stade larvaire, le plus long dans le cycle de
l’insecte, on ne peut pas parler d’histoire
d’amour entre la plante et le papillon car elle
est à sens unique: les dégâts occasionnés par
les chenilles peuvent aboutir au dépérisse-
ment des plantes attaquées. Certaines
espèces, comme la pyrale du maïs, posent
d’ailleurs de sérieux problèmes à l’agriculture.
Après plusieurs mues successives (en général
cinq), la chenille cherche un site favorable à
sa nymphose. Elle utilise alors le plus sou-
vent les tiges, feuilles et troncs des végétaux
pour fixer sa chrysalide 77, dans laquelle s’ef-
fectue la métamorphose.
Enfin, c’est encore bien souvent à l’abri des
plantes, comme le lierre, que se réfugient les
rares papillons passant l’hiver à l’état adulte,
comme le citron 88, papillon aux ailes jaune
vif, d’où son nom.
La ponte
Chez les papillons, comme chez de nom-
breux autres insectes, les imagos sont
éphémères et ont une mission précise : se
reproduire et assurer, grâce à leur grande
mobilité, la dispersion des espèces.
Après l’accouplement, les femelles fécondées
cherchent avec soin le site de ponte, afin d’as-
surer aux futures chenilles un environnement
favorable à leur développement. Le choix des
« plantes-hôtes », sur lesquelles elles vont
déposer leurs œufs, est essentiel.
Certaines espèces sont relativement généra-
listes, acceptant un spectre plus ou moins
large de végétaux, parfois parmi une famille
précise ou au sein d’un même type biolo-
gique. C’est le cas d’espèces communes
comme le myrtil, qui peut pondre sur de
nombreuses graminées, l’argus bleu, qui
s’adapte à une vaste gamme de légumineuses,
ou encore la grande tortue, qui recherche le
feuillage d’arbres et arbustes très divers.
D’autres sont beaucoup plus exigeantes,
jusqu’à être étroitement liées à une seule
espèce de plante. Le paon du jour 55, comme
d’autres spécialistes, recherche les orties, com-
munes et répandues; mais le solitaire 66, qui
pond sur l’airelle des marais, est de fait
inféodé aux tourbières hautes, milieux rares
et menacés où croît sa plante-hôte.
La sélection des supports de ponte ne se limite
pas à l’espèce végétale: les plantes sont choi-
sies individuellement au regard de facteurs
environnementaux très fins, et les organes flo-
raux sont eux aussi choisis scrupuleusement
(dessus ou revers des feuilles, boutons,
tiges…). Les dates de vol des imagos concor-
dent d’ailleurs souvent exactement avec
l’apparition des stades floraux utilisés pour la
ponte.
2 3
Berceau,
chambre
et
garde-
manger
Certaines espèces
peuvent pondre
sur de nombreuses
plantes. D’autres,
plus exigeantes,
sur une seule
espèce de plante
comme le vulcain
sur l’ortie.
Les prairies
abritent de
nombreuses plantes
et constituent des sites
de nourrissage
importants
pour la préservation
des papillons.
œuf
chenille
chrysalide
imago
(machaon adulte)
L’ E X E M P L E
D U M A C H A O N ,
U N E M É T A M O R P H O S E
S P E C TA C U L A I R E
Imago
de citron
Chrysalide
de citron
Le machaon
et sa trompe au repos
Damier de la succise
Cuivré
11
33
55
77
44
2266
Gamma,
papillon de nuit
Myrtils sur origan
Accouplement
de mélitées
orangées
Solitaire
Chenilles de paon
du jour sur ortie
Chenille du
bombyx à livrée
Belle-Dame
sur troène
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