L`hydrométallurgie - Société Chimique de France

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UNION DES PROFESSEURS DE PHYSIQUE ET DE CHIMIE
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L’hydrométallurgie
par Jean-Louis VIGNES
IUFM de Créteil
[email protected]
et Yves JEHANNE
Ingénieur en génie chimique
RÉSUMÉ
Depuis la rentrée scolaire 2002, des expériences d’hydrométallurgie sont introduites
dans le programme de chimie de spécialité en terminale S. Cet article fait le point sur cette
métallurgie, fondée sur la chimie des solutions, largement employée industriellement. De
nombreux exemples et en particulier celui du zinc illustrent ce procédé.
Les nouveaux programmes de spécialité en terminale S introduisent des expériences
d’hydrométallurgie. Nous nous proposons dans cet article de faire une mise au point sur
ce procédé en insistant sur l’illustration des concepts chimiques (acido-basicité, oxydoréduction) étudiés en classes de première et terminale. Nous ne développerons pas des
notions qui, bien qu’importantes dans les procédés industriels, n’entrent pas dans le cadre
de l’enseignement secondaire. Par exemple, les concentrations des solutions industrielles
sont souvent élevées et l’assimilation des activités avec les concentrations n’est plus possible. De même, nous avons peu pris en compte les phénomènes cinétiques, qui concernant, en général, des réactions en phase hétérogène (solution et particules ou surfaces
solides), sont difficiles à modéliser.
L’hydrométallurgie est un procédé industriel d’élaboration de métaux mis en œuvre
à différentes étapes du cycle d’un métal (cf. figure 1 page ci-après).
C’est d’abord un procédé de métallurgie consistant à extraire un élément métallique
- généralement à l’état oxydé - d’un minerai et à le réduire sous forme d’un métal possédant la pureté souhaitée. Son importance est considérable : elle fournit, par exemple,
plus de 90 % de la production mondiale de zinc primaire (1), 80 % de celle d’or, 20 % de
celle de cuivre. Elle intervient également dans l’extraction de l’uranium et les métallurgies de l’aluminium, cadmium, cobalt, nickel, argent, tungstène, terres rares… Le terme
d’hydrométallurgie est également employé pour des procédés de traitement de minerais
ne conduisant pas nécessairement au métal mais s’arrêtant, par exemple, à l’obtention
d’un oxyde de pureté donnée. L’opération finale de réduction est, dans ce cas, absente.
(1)
On appelle métal primaire celui provenant directement des activités minières par opposition au métal recyclé, parfois dénommé secondaire ou de deuxième fusion.
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Figure 1 : Schéma général de l’élaboration des métaux.
L’hydrométallurgie est en concurrence avec la pyrométallurgie qui est un procédé
très ancien, employé dès le VIe millénaire avant J.-C. pour réduire des oxydes de cuivre
et obtenir le métal. Son importance est telle que les découvertes pyrométallurgiques ont
donné leur nom à diverses époques préhistoriques (âges du bronze, du fer).
L’hydrométallurgie est aussi un procédé employé lors du recyclage de divers métaux :
or, zinc, cuivre…
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C’est également - contrairement à la pyrométallurgie - un procédé :
♦ appliqué à l’échelle industrielle récemment : fin du XVIIIe siècle pour le cuivre, fin du
XIXe siècle pour l’or, début du XXe siècle pour le zinc. Son développement est lié à celui
de la chimie et à la découverte de ses lois ;
♦ qui utilise, en général, des solutions aqueuses, donc des températures proches de l’ambiante ;
♦ qui pollue peu l’atmosphère mais qui génère des effluents liquides qui faut traiter et
stocker.
C’est enfin un procédé qui repose sur la chimie des solutions et qui permet d’illustrer par des exemples concrets divers concepts et techniques enseignés dans le secondaire :
acido-basicité, oxydoréduction, complexation, électrolyse, solubilité, précipitation, filtration, purification… Des expériences d’illustration des procédés effectivement employés
industriellement peuvent facilement être mises en œuvre par les élèves (2).
1. L’AMONT DE L’HYDROMÉTALLURGIE
1.1. Les minerais
Les éléments extraits par hydrométallurgie sont à l’origine inclus dans un minerai
qui peut être défini comme une roche naturelle contenant un ou plusieurs des éléments
susceptibles d’en être extraits dans des conditions économiques satisfaisantes afin d’alimenter les activités humaines.
La formation des gisements de minerais résulte de processus géologiques variés
(commandés en grande partie par les lois de la chimie) qui ont conduit à une accumulation importante de certains éléments en un lieu donné. Ces processus concernent, en
général, des éléments chimiquement proches (appartenant à une même colonne, une
même famille ou un même bloc du tableau périodique) et en conséquence, les minerais
sont des mélanges complexes de divers éléments, en général à l’état oxydé en ce qui
concerne les éléments métalliques, présents dans des composés variés (sulfures, oxydes,
carbonates, sulfates, chlorures, phosphates…). Parmi ces éléments certains sont intéressants, d’autres inutiles (ils se retrouveront dans les stériles ou gangue) ou toxiques (mercure, arsenic, radon…). Les teneurs sont extrêmement variables : de 65 % en masse pour
le fer à quelques ppm pour l’or.
1.2. La minéralurgie ou concentration des minerais
Pour des raisons principalement économiques, il est généralement nécessaire de traiter le minerai, sur le lieu d’extraction, afin d’augmenter sa teneur en éliminant la plus
grande partie possible de la gangue. Cela va du simple tri manuel comme dans les mines
(2)
Voir, par exemple dans le BUP, la série d’articles : « Une vie de zinc », « Une vie de cuivre », « Une vie
d’aluminium » [1-3].
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de charbon du XIXe siècle jusqu’au tri automatique par luminescence induite par les
rayons X employé actuellement dans des mines de diamants [4].
Les techniques de séparation font appel, en général, aux différences de propriétés
physiques entre les éléments valorisables du minerai et la gangue. Parmi ces techniques
on peut citer la gravimétrie, le magnétisme, la radioactivité et surtout la flottation - qui
met en jeu des différences de tension superficielle - principale technique de concentration
des minerais sulfurés. Afin de séparer, il est nécessaire, au préalable, de concasser puis
de broyer le minerai afin d’atteindre « la dimension de libération » des éléments valorisables, souvent de quelques centaines de µm. Lors de ces traitements l’élément métallique valorisé reste, le plus souvent, sous la forme chimique qu’il possédait dans le minerai.
Par exemple, la teneur en zinc passe de 4 à 20 % en masse dans le minerai à 40 à
60 % dans le concentré. Pour l’uranium on passe d’environ 0,2 % à 70 % (3).
1.3. Le grillage
Ce traitement métallurgique concerne les minerais sulfurés. C’est un prétraitement
qui consiste à transformer les sulfures métalliques (4) en oxydes. La réaction de base est
la suivante [5] :
MS(s) + 3/ 2 O2(g) " MO(s) + SO2(g)
Lors de cette opération, pour faciliter la lixiviation ultérieure, il faut conserver la
finesse initiale des particules ce qui nécessite d’éviter de trop hautes températures qui
induisent un frittage (5). Cela n’est pas le cas en pyrométallurgie où, au contraire, un frittage partiel est souhaité. Les techniques de grillage seront en conséquence différentes :
l’hydrométallurgie privilégiera le lit fluidisé avec des températures d’environ 900 °C pour
le grillage de la blende - principal minerai de zinc [6].
Lors du grillage, les impuretés présentes dans le concentré sous forme de sulfures
seront également transformées en oxydes ou parfois éliminées (HgS donne Hg volatil).
Le SO2 formé lors du grillage est transformé sur place, par le procédé de contact
[7], en acide sulfurique et ainsi il n’est pas surprenant de constater que les producteurs
de zinc, cuivre, plomb… sont également fournisseurs d’acide sulfurique. Par ailleurs,
cette production est, souvent, en partie consommée sur place lors des opérations de lixiviation.
(3)
La minéralurgie de cet élément est une exception car il subit lors de sa concentration une transformation
chimique, d’oxyde en uranate (par exemple MgUO4).
(4)
Les sulfures qui forment les principaux gisement de Zn, Pb, Cu, Ni, Hg… posent des problèmes lors des
traitements lors des traitements de lixiviation en hydrométallurgie. Il en est de même pour les traitements
pyrométallurgiques [6].
(5)
On appelle frittage, un phénomène de diffusion de matière, à haute température, à l’état solide, qui se traduit par la formation de ponts entre les particules suivie d’un grossissement des grains. Le solide acquiert
ainsi une plus grande cohésion. Le stade ultime du frittage est l’obtention d’un matériau massif après élimination de toute porosité.
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2. L’HYDROMÉTALLURGIE « PRIMAIRE »
Par analogie avec l’origine des métaux (primaire ou secondaire), nous appellerons
« primaire » l’hydrométallurgie des minerais ou concentrés issus directement des exploitations minières par opposition à celle concernant les métaux de récupération que nous
appellerons « secondaire ».
Lors des opérations d’hydrométallurgie, les minerais ou les concentrés grillés subissent, dans des séries de bacs, des successions de traitements chimiques. Selon les minerais, les traitements varient mais, dans de nombreux cas, ils peuvent être regroupés en
trois opérations successives : lixiviation, purification et électrolyse. Nous présenterons
principalement l’exemple de l’hydrométallurgie du zinc et donnerons quelques exemples
significatifs d’autres hydrométallurgies lorsqu’elles diffèrent notablement de celle du
zinc.
2.1. La lixiviation
C’est le début des opérations d’hydrométallurgie proprement dites. Elle consiste à
dissoudre le maximum (en nombre et quantité) d’éléments valorisables en entraînant le
minimum d’éléments gênants.
Dans le cas des minerais pauvres, par exemple pour les gisements oxydés de cuivre,
celle-ci peut s’effectuer à l’intérieur de la mine (6) : c’est la lixiviation in situ. Elle peut
également être réalisée « en tas » à l’extérieur de la mine, par percolation, sur des blocs
simplement concassés, dans le cas de minerais pauvres de cuivre, d’uranium, ou d’or. Les
tas de minerais sont arrosés par la solution de lixiviation qui, par percolation au sein du
minerai, dissout partiellement les éléments valorisables. La solution, recyclée de façon
continue, s’enrichit progressivement. Les rendements d’extraction varient de 50 à 90 %
pour des durées de traitement qui peuvent atteindre de plusieurs mois à plusieurs années
[2, 7, 8]. De plus en plus souvent, la lixiviation en tas est maintenant réalisée sur du
minerai broyé et aggloméré sous forme de granulés à l’aide de ciment. Les durées de traitement peuvent ainsi être réduites à quelques semaines.
Dans le cas des minerais sulfurés, qui sont difficilement solubles, la dissolution peut
être facilitée par une activité bactérienne (cette opération est appelée biolixiviation) qui
transforme les sulfures en sulfates solubles. Les bactéries employées (7) (thiobacillus ferrooxidan, thiobacillus thiooxidan…) catalysent, en présence du dioxygène de l’air et
d’eau, la transformation de la pyrite (FeS2, toujours présente dans les gisements sulfurés)
en sulfate ferreux et l’oxydation de Fe (II) en Fe (III). Ce dernier, très oxydant, oxyde les
(6)
Le terme de mine est employé pour toute exploitation, souterraine ou à ciel ouvert, de minerais métalliques.
À l’opposé, le terme de carrière est réservé aux exploitations, souterraines ou à ciel ouvert, de substances
non métalliques. Ces définitions sont de nature juridique et sont liées, en France, au droit de propriété du
sous-sol.
(7)
Ces bactéries sont naturellement présentes dans les gisements de minerais sulfurés. Afin d’accélérer leur
développement les solutions de lixiviation sont additionnées d’éléments nutritifs (composés azotés).
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sulfures en soufre puis, par catalyse bactérienne, en sulfate. En définitive, les différents
sulfures, peu solubles, sont transformés en sulfates beaucoup plus solubles [9]. Ces oxydations, lentes, sont mises en œuvre lors des lixiviations « in situ » ou « en tas ».
2.1.1. Lixiviation du zinc
La lixiviation est réalisée en usine, les lixiviations « in situ » et « en tas » n’étant
pas employées. Lors de l’hydrométallurgie du zinc telle qu’elle est pratiquée, par exemple,
par le groupe Umicore à Auby dans le Nord [1, 10], le concentré grillé (appelé calcine)
est traité par de l’acide sulfurique à environ 2 mol.L- 1, recyclé après l’opération finale
d’électrolyse (cf. figure 2). On réalise ainsi une réaction acido-basique entre des oxydes
basiques (ZnO et les autres oxydes présents comme impuretés) et l’acide sulfurique.
Figure 2 : Schéma des circuits zinc et acide sulfurique lors de l’hydrométallurgie du zinc.
Le choix de la solution lixiviante est primordial. La dissolution doit être la plus
sélective possible : la solution doit dissoudre les éléments valorisables mais être consommée le moins possible par les éléments inintéressants. L’acide sulfurique est souvent
employé car les acides dissolvent, en général, facilement les oxydes métalliques (basiques)
et il est préféré à l’acide chlorhydrique car il est moins corrosif, il ne dégage pas de gaz
toxique (Cl2) lors de l’opération finale d’électrolyse et c’est le moins cher des acides.
Toutefois, les acides sont gênants lorsque le minerai est riche en calcaire (avec présence
de CaO après grillage) ou en phosphates qui entraînent une surconsommation d’acide.
Pour des raisons économiques le rendement d’extraction doit être le plus élevé possible. Pendant longtemps l’hydrométallurgie du zinc s’est heurtée à la difficulté de traiter les minerais de zinc riches en fer car, lors du grillage, l’oxyde de zinc réagit, à l’état
solide, avec l’oxyde de fer (III) pour donner un composé - la ferrite de zinc (ZnFe2O4) difficilement soluble dans les conditions habituelles de lixiviation. Il a fallu améliorer ces
conditions en augmentant la concentration en acide et la température de traitement pour
que l’hydrométallurgie devienne le principal procédé de métallurgie extractive du zinc
[1]. Par ailleurs, l’acide sulfurique ne permet pas de dissoudre les métaux nobles (Au,
Ag) et le plomb. C’est l’une des raisons qui pourra orienter le métallurgiste vers l’emL’hydrométallurgie
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ploi de la pyrométallurgie pour traiter des minerais de zinc riches en plomb et en métaux
nobles afin de récupérer ces éléments.
2.1.2. Autres exemples de lixiviation
La lixiviation emploie principalement des réactions acido-basiques qui peuvent
parfois utiliser le caractère amphotère de certains oxydes. Par exemple, lors du traitement de la bauxite, en milieu basique et sous pression, les hydroxydes d’aluminium passent en solution alors que la principale impureté, l’oxyde de fer (III), reste insoluble [3].
Le principe du traitement de la bauxite peut être représenté à l’aide de l’équilibre suivant :
Al2O3 , (7 + n)H 2O + 2 OH- + 2 _ Al(OH)4 (H2O)2 i + n H2O
La dissolution des hydroxydes d’aluminium (Al2O3, mH2O) se produit par déplacement de l’équilibre vers la droite. Après élimination de l’oxyde de fer (III), l’alumine
hydratée est précipitée à partir des ions aluminates (AlO2-) hydratés - _ Al(OH)4 (H2O)2 i à l’aide d’un ajout d’eau qui déplace l’équilibre vers la gauche.
Pour l’uranium, l’acide sulfurique est généralement utilisé mais lorsque la gangue
est calcaire ou phosphatée, des dissolutions en autoclave, en milieu alcalin, sont mises en
œuvre par exemple à l’aide de carbonate de sodium [7].
Lorsque les réactions acido-basiques ne donnent pas de résultats satisfaisants,
d’autres types de réactions peuvent être employés par exemple, des réactions de complexation. C’est le cas de la métallurgie extractive de l’or, qui consiste à former, en présence de dioxygène et de Pb (II) qui catalyse la réaction, des complexes cyanure avec cet
élément [7].
4 Au + 8 CN - + O2 + 2 H2O " 4 Au(CN)2- + 4 OHDes réactions de complexation avec l’ammoniac peuvent être également employées
dans les hydrométallurgies du cobalt et du nickel.
2.2. La purification
Les opérations à réaliser dépendent évidemment de la nature des impuretés présentes dans le minerai. Cette purification est effectuée sur la solution provenant de la lixiviation. Lors de celle-ci une première purification a été réalisée car les produits insolubles sont éliminés (métaux nobles, plomb, silice lors de l’hydrométallurgie du zinc). La
solution est, en général, séparée des produits insolubles par décantation. Parmi les impuretés que l’on rencontre dans la plupart des solutions de lixiviation, la principale est souvent le fer.
2.2.1. L’élimination du fer dans l’hydrométallurgie du zinc
Le fer est éliminé en jouant sur le pH de début de précipitation de son hydroxyde.
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Pour les hydroxydes M(OH)z, les valeurs approchées (8) des pH de début de précipitation
- regroupées dans le tableau 1 - peuvent être obtenues à partir de la relation [11] :
pH = 14 - 1/z pKs - 1/z log 9 Mz + C
Hydroxydes
Sb (III)
Sn (II)
Fe (III)
In (III)
pH
<0
2
2
3,6
Hydroxydes
Al (III)
Cu (II)
Zn (II)
Fe (II)
pH
4,0
5,2
6,5
7,0
Hydroxydes
Ni (II)
Co (II)
Cd (II)
Mn (II)
pH
7
7,5
8
8,6
Tableau 1 : pH de début de précipitation de divers hydroxydes pour 1 mol.L- 1 de Mz +.
Ces valeurs peuvent également être
reportées sur un diagramme potentiel - pH
(cf. figure 3).
Figure 3 : Superposition des diagrammes potentiel
– pH de : Fe, Cu et Zn tracés pour 1 mol.L- 1
d’espèce ionique en solution [11].
On élimine le fer en fixant le pH
entre 2 et 6,5 afin d’éviter la précipitation
du zinc. On prend la précaution d’oxyder
au préalable le fer (II) en fer (III) par injection d’air ou par ajout, par exemple, de
dioxyde de manganèse. Dans la pratique,
cette précipitation est réalisée à pH 5, ce
pH étant ajusté par ajout de concentré
grillé, car cet ajout consomme de l’acide
et donc entraîne une augmentation de pH
(cf. figure 2).
Lors de ce traitement apparaît une
difficulté technique qui est intéressante
pour l’enseignement expérimental de la
chimie. Les particules de précipité formé - appelé pour simplifier (9) hydroxyde de fer
(III) - sont extrêmement fines et restent sous forme d’une suspension stable. Il est donc
impossible de séparer les deux phases par simple décantation. Cette difficulté de séparation
peut être observée au laboratoire : le précipité passe à travers tous les filtres classiques
disponibles. Pour résoudre ce problème une (10) des solutions adoptée est de modifier la
nature chimique du précipité et de former un autre composé de fer (III) qui précipite sous
forme de plus grosses particules. Ce composé, la jarosite - Fe6 (NH4)2 (SO)
4 4 (OH)12 - se
(8) Les solutions industrielles étant concentrées, il serait nécessaire de travailler avec les activités.
(9) Le précipité formé lors de la neutralisation d’une solution de fer (III) est un oxyde hydraté de composition
complexe [12].
(10) Ce procédé, générant de grandes quantités d’effluents difficilement valorisables, il lui est maintenant préféré un autre procédé dit « à la goethite » [1].
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forme grâce à un ajout de sulfate d’ammonium.
+
6Fe3 + + 4SO42 - + 2NH4 + + 6H2O " Fe6 (OH)12 (SO)
4 4 (NH4)2 + 12 H
On peut ainsi montrer que la réalisation d’une simple réaction de précipitation se
révèle parfois délicate à mettre en œuvre dans la pratique et nécessite des études complémentaires approfondies de nucléation et de croissance des précipités.
Lors de cette augmentation de pH, d’autres éléments éventuellement présents (Sn,
Al…) sont éliminés sous forme d’hydroxydes insolubles. Mais des éléments ont des
valeurs de pH de précipitation de leurs hydroxydes trop proches (Cu) ou supérieures (Ni,
Co, Cd) de celle du zinc pour pouvoir être éliminés (cf. tableau 1). Ces éléments seront,
dans le cas de l’hydrométallurgie du zinc, extraits en mettant en œuvre une réaction classique d’oxydoréduction appelée cémentation (11).
2.2.2. La cémentation dans l’hydrométallurgie du zinc
Lorsque dans l’enseignement secondaire on introduit expérimentalement l’oxydoréduction il est habituel de travailler avec les couples redox des éléments métalliques et de
plonger de la poudre d’un métal réducteur (Fe, Zn) dans une solution d’ions d’un métal
moins réducteur (Ag+, Cu2 +). Ces réactions sont très employées en hydrométallurgie.
Dans le tableau 2 sont regroupées les valeurs des potentiels standards de quelques couples
redox.
Mn2 + / Mn
Zn2 + / Zn
Cd2 + / Cd
– 1,17 V
– 0,76 V
– 0,40 V
Co2 + / Co
Ni2 + / Ni
Cu2 + / Cu
– 0,29 V
– 0,25 V
+ 0,34 V
Tableau 2 : Valeurs de potentiels standards d’oxydoréduction.
Les valeurs des potentiels redox peuvent aussi être reportées sur un diagramme
potentiel – pH (cf. figure 3).
En ne prenant pas en compte les problèmes cinétiques, on constate que si on veut
éliminer par réduction les ions du tableau 2 tout en ne réduisant pas les ions Zn2 +, il faut
trouver un métal dont le potentiel du couple redox est compris entre – 0,40 et – 0,76 V.
Il faut également que ce métal n’apporte pas de nouvelle impureté qu’il faudrait par la
suite éliminer. La solution la plus judicieuse est d’employer le zinc métal. La réduction
ayant lieu au contact des particules solides, il faudra une grande surface de zinc et donc
employer de la poudre fine (d’environ 30 µm de diamètre). Les métaux, Cu et Cd se
déposent facilement sur la poudre de zinc qui s’oxyde partiellement en enrichissant la
solution en Zn2 +. Le dépôt de Co et Ni nécessite l’ajout de catalyseurs. Les différentes
(11) Ne pas confondre le terme de cémentation employé ici avec celui définissant un procédé de traitement thermique des métaux, par une phase gazeuse carbonée ou azotée, consistant à augmenter leur dureté par diffusion de carbone ou d’azote.
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impuretés restant en solution, sauf les ions Mn2 +, sont ainsi éliminées. Les céments,
contenant le zinc non dissous et les différentes impuretés extraites, sont traités, par pyro
ou hydrométallurgie, pour récupérer ces éléments.
2.2.3. La purification dans d’autres hydrométallurgies
Dans le cas de l’hydrométallurgie du zinc la cémentation permet d’éliminer les
impuretés. Celle-ci peut aussi être utilisée pour extraire l’élément recherché. Par exemple,
lors de l’hydrométallurgie des minerais pauvres de cuivre par lixiviation « en tas », la
concentration en cuivre n’est pas suffisante pour récupérer efficacement le métal par électrolyse. On procède par cémentation avec du fer (qui peut provenir du recyclage de fer
blanc désétamé (12)) [2]. La solution provenant de la lixiviation est mise en contact avec
des morceaux d’acier sur lesquels le cuivre métal se dépose. Le dépôt de cuivre se
détache facilement, par pelage, du support d’acier et est ainsi récupéré pour être ensuite
purifié. C’est d’ailleurs le premier exemple historique connu, dès 1750, à Rio Tinto en
Espagne, d’une application industrielle de l’hydrométallurgie [14]. Le cuivre obtenu renferme de 5 à 10 % de fer. Une pureté d’environ 99 % est obtenue en associant au traitement un champ magnétique alternatif qui, en générant des chocs entre les plaques d’aciers,
décolle le dépôt de cuivre et permet à l’oxydoréduction de se poursuivre.
Un procédé comparable est utilisé en hydrométallurgie de l’or. La solution de lixiviation renfermant les ions dicyanoaurate (I) est traitée par du zinc. L’or se dépose sur
les particules de zinc qui sont ensuite dissoutes dans l’acide sulfurique ce qui permet de
récupérer l’or. Ce procédé (Merrill-Crowe) est actuellement supplanté par l’adsorption du
complexe d’or sur du charbon actif [7]. Toutefois l’argent ne s’adsorbant pas sur le charbon actif, les minerais d’or riches en argent continuent à être traités par réduction à l’aide
du zinc. Dans ce cas, le cément est traité par un mélange d’acide chlorhydrique et de peroxyde d’hydrogène. L’or est dissout et l’argent précipite sous forme de AgCl.
À côté des techniques décrites ci-dessus utilisant des concepts introduits dans l’enseignement secondaire, il existe d’autres techniques (échange d’ions, extraction liquideliquide) également employées pour purifier les solutions ou extraire l’élément recherché.
2.2.3.1. L’hydrométallurgie des terres rares [7]
L’exemple de la séparation des terres rares est intéressant car, possédant des propriétés chimiques très proches, ces éléments sont difficiles à séparer. Rhodia, leader mondial des terres rares séparées, a développé, à La Rochelle, un procédé hydrométallurgique
d’extraction par solvants qui livre les terres rares sous forme d’oxydes ou de sels, ces
composés étant les plus utilisés. C’est un exemple d’hydrométallurgie ne conduisant pas,
principalement, à l’obtention finale de métaux.
(12) Pour désétamer du fer blanc (provenant d’une boîte de conserve) on peut le traiter par de l’acide sulfurique
concentré pour éliminer le vernis éventuel puis par une solution de chlorure ferrique pour dissoudre l’étain
[13].
L’hydrométallurgie
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Lors du traitement du principal minerai - la monazite (phosphate de terres rares et
de thorium) - les concentrés issus du minerai sont attaqués par de la soude concentrée à
180 °C, en autoclave. Les ions phosphate donnent du phosphate trisodique (Na3PO4),
soluble, qui est éliminé à l’aide d’eau chaude. Les hydroxydes de terres rares et de thorium formés sont récupérés et mis en solution dans l’acide nitrique. Une première séparation par extraction liquide-liquide permet de récupérer le thorium et l’uranium souvent
contenus dans les minerais. Ces éléments, radioactifs, posant des problèmes de stockage,
ces opérations sont maintenant effectuées sur les lieux même d’extraction des minerais
(Chine ou États-Unis).
À La Rochelle, par passages successifs dans plus de 1 500 étages de séparation
liquide-liquide, sont extraits : le lanthane puis le cérium, le mélange Nd/Pr, le mélange
Gd/Tb et ainsi de suite pour l’ensemble des terres rares pour terminer par l’yttrium extrait
en dernier. Les mélanges sont ensuite séparés à leur tour. Lors de ces diverses extractions,
des solvants adaptés sont employés : acide diéthylhexylphosphorique, tributylphosphate,
sels d’ammonium quaternaire, acides carboxyliques…
Une faible part de la production d’oxydes ou de sels est réduite en métal. Ces
métaux peuvent être obtenus par pyrométallurgie, par exemple par calciothermie (13) à
plus de 1000 °C pour Nd, Y et Tb dans l’usine Rhodia de Phoenix (États-Unis). L’obtention des métaux de terres rares met ainsi en jeu une succession de traitements hydrométallurgiques puis pyrométallurgiques.
2.2.3.2. L’hydrométallurgie du nickel [7, 15]
L’obtention de cet élément est un autre exemple où l’hydro et la pyrométallurgie
sont complémentaires. L’emploi de l’une ou de l’autre métallurgie dépend d’abord de la
nature des minerais. Les minerais sulfurés, les plus importants en quantité extraite, sont
traités par pyrométallurgie. Les minerais oxydés (14), tels que la garniérite de Nouvelle
Calédonie traitée dans un premier temps, dans l’usine du groupe Eramet à Doniambo près
de Nouméa, sont transformés par pyrométallurgie pour donner un sulfure de nickel contenant diverses impuretés dont du fer, du cobalt et du chrome. Ce sulfure, appelé matte, est
ensuite envoyé en métropole, à l’usine de Sandouville, dans la Seine-Maritime, pour être
traité par hydrométallurgie.
Après broyage, les mattes sont dissoutes par une solution de chlorure ferrique, en
présence de dichlore. Le nickel et les impuretés métalliques (Fe, Co, Cr...) passent en
solution. Le soufre éliminé lors de cette opération est récupéré. La solution de Ni2 + est
(13) Exemple de métallothermie employant comme réducteur le calcium. L’aluminothermie est un autre exemple
plus connu.
(14) On appelle minerais oxydés des minerais qui contiennent des éléments sous forme d’oxyde, de carbonate,
de silicate… dans lesquels l’élément oxygène est présent. Une autre grande famille de minerais métalliques
est celle des minerais sulfurés (blende, galène, chalcopyrite, pentlandite…) dans lesquels, bien évidemment,
l’élément métallique est également oxydé.
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purifiée par extractions successives : les ions Fe3 + par du tributylphosphate, les ions Co2 +
par de la triisooctylamine, les ions Pb2 + à l’aide d’une électrolyse sélective et enfin les
autres impuretés (Cr3 +, Mg2 +, Al3 +, Cu2 +…) par résines échangeuses d’ions et adsorption
sur charbon actif. La solution purifiée de Ni2 + est électrolysée, le nickel se déposant sur
des cathodes constituées au départ de feuilles minces de Ni. Le nickel obtenu possède
une pureté supérieure à 99,97 %.
2.3. L’électrolyse
La solution purifiée contient, sous forme de cations, l’élément recherché. L’opération finale d’obtention du métal sera donc une réduction qui sera réalisée par électrolyse
en solution aqueuse. Celle-ci ne sera possible que si le métal à récupérer n’est pas trop
réducteur sinon on sera limité par la réduction de l’eau. Celle-ci se produit à un potentiel inférieur à celui donné par la thermodynamique (qui dépend du pH) grâce au phénomène de surtension sur la cathode qui peut atteindre jusqu’à 1 V. La réduction de Zn2 +
est possible mais ce couple constitue pratiquement la limite inférieure, dans l’échelle des
couples redox, des métaux qui peuvent être obtenus par électrolyse en solution aqueuse.
La purification préalable de la solution destinée à l’électrolyse dépend de l’élément
à récupérer.
Si cet élément a un potentiel redox élevé (Cu par exemple), en travaillant sous une
tension adéquate, ses ions pourront être réduits avant ceux des impuretés possédant un
potentiel redox plus faible (la plupart des impuretés présentes). En conséquence, une
solution de cuivre sera rarement purifiée de ses impuretés sauf en ce qui concerne le fer.
En effet, cet élément qui accompagne quasi systématiquement les autres éléments métalliques présente l’inconvénient de posséder deux degrés d’oxydation (2 et 3) facilement
accessibles. Contrairement à une idée simpliste répandue dans le système éducatif, lors
d’électrolyses, des cations (Fe2 + par exemple) peuvent par diffusion et convection être en
contact avec l’anode sur laquelle ils pourront s’oxyder (en ions Fe3 + par exemple). Par
diffusion, convection et également dans ce cas, principalement par migration sous champ
électrique, les ions Fe3 + pourront, au contact de la cathode, être facilement réduits en Fe2 +,
le potentiel du couple Fe3 +/Fe2 + étant plus élevé que celui du couple Cu2 +/Cu. Une partie
du courant électrique fournit sera en conséquence perdu par les oxydations/réductions du
fer lors de son va-et-vient perpétuel entre anode et cathode. La présence de cet élément
sera donc préjudiciable au rendement énergétique de l’électrolyse [16].
Si, au contraire, l’élément à récupérer (le zinc par exemple) possède un potentiel
redox faible, inférieur à celui de la plupart des impuretés présentes, la purification de la
solution devra être poussée jusqu’à des teneurs résiduelles pouvant être extrêmement
faibles (cf. tableau 3).
2.3.1. L’électrolyse de la solution purifiée de zinc
Lors de l’hydrométallurgie du zinc, la solution de lixiviation purifiée qui contient
L’hydrométallurgie
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Impuretés
Ge
Sb
Ni
Co
Teneurs maximales
(en mg.L- 1)
0,001
0,1
0,2
0,2
Impuretés
Cd
Fe
F
Cl -
1293
Teneurs maximales
(en mg.L- 1)
2
5 à 10
30
500
Tableau 3 : Concentrations maximales admissibles de la solution de Zn2 + avant électrolyse [17].
de 2 à 3 mol.L- 1 de Zn2 +, au pH de fin de purification, environ 5, est électrolysée entre
une anode en plomb et une cathode en aluminium.
À pH 5, à 25 °C, la valeur du potentiel du couple H +/H2 est de – 0,30 V. Celle du
couple Zn2 +/Zn est voisine de celle du potentiel standard soit – 0,76 V. Si les réactions
n’obéissaient qu’à des considérations thermodynamiques, la réduction de Zn2 + en solution aqueuse ne serait pas possible et sur la cathode on n’assisterait qu’au dégagement
de dihydrogène. Le dépôt de zinc n’a lieu que grâce à la très faible vitesse de réduction
de H + sur la cathode par rapport à celle de Zn2 +. Ces phénomènes cinétiques conduisent
à introduire la notion de surtension qui découle de l’examen des courbes intensité potentiel (cf. figure 4). Le tableau 4 (page ci-après) qui donne l’évolution de la surtension d’hydrogène en fonction de la densité de courant montre que la surtension de dihydrogène est importante et qu’en conséquence le dépôt de zinc est possible. Par ailleurs,
des densités de courant élevées sont préférables afin d’augmenter cette surtension.
Figure 4 : Superposition des courbes intensité – potentiel des couples H +/H2 et Zn2 +/Zn tracées
à pH = 0 avec 2 mol.L- 1 de Zn2 +, une anode en plomb et une cathode en zinc pur.
Nous pouvons constater, sur la figure 4 que sur une anode de plomb, la surtension
ηO2 pour le couple O2 / H2O est d’environ 0,62 V et que sur une cathode de zinc celle du
couple H2/H+ ηH2 est d’environ 0,90 V. Sur cette même cathode la surtension du couple
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Densité de courant (A.m- 2) Surtension de H2 (V)
10
0,716
20
0,726
50
0,736
100
0,743
500
0,926
1 000
1,064
3 000
1,068
Tableau 4 : Surtension de H2 en fonction de la densité de courant pour une solution 2 mol.L- 1
de H2SO4 et 1 mol.L- 1 de Zn2 +, à 25 °C [17].
Zn2 +/Zn est très faible. Lorsqu’une tension d’électrolyse UAC sera appliquée entre les électrodes, la partie chimique de celle-ci (UAC diminuée de la chute ohmique R.I entre les
électrodes) devra être supérieure à la somme des potentiels thermodynamiques et des surtensions soit : 0,76 + 1,23 + ηO2 = 2,61 V. Dans ces conditions on aura un courant anodique iox et un courant cathodique ired, égaux en valeur absolue. Afin d’éviter le dégagement de dihydrogène il est nécessaire de limiter la tension UAC – R.I à une valeur
inférieure à 2,75 V.
La nature des métaux constituant les électrodes est intéressante à étudier. En effet,
le plomb est insoluble (15) en milieu acide sulfurique (lors de l’électrolyse le pH diminuera) et au pH de début d’électrolyse (pH = 5) l’aluminium est recouvert par sa couche
passive d’alumine qui est insoluble à ce pH mais qui étant très fine (quelques nm) ne
constitue pas une barrière isolante autour de la cathode. La présence d’alumine à l’interface entre la cathode d’aluminium et le dépôt de zinc empêche la formation d’un alliage
Al-Zn et permet de séparer, très facilement par pelage, le dépôt de zinc lorsqu’il atteint
une certaine épaisseur. Le zinc obtenu possède une pureté élevée - 99,995 % - et il ne
nécessite pas, pour ses principales applications, une purification ultérieure.
La tension d’électrolyse est de 3,2 à 3,7 V et les densités de courant de 400 à
700 A.m- 2. Les réactions principales se produisant à l’anode et à la cathode sont données
dans la figure 2. À l’anode, l’impureté restante, Mn2 +, est oxydée en dioxyde de manganèse MnO2 solide qui se dépose sur l’anode ou qui reste en suspension dans la solution.
Ce dernier, oxydant puissant, trouve un emploi en amont de la lixiviation. En effet, l’arsenic, souvent présent dans les minerais sulfurés, est éliminé lors de l’opération de purification par précipitation du fer (III) qui entraîne l’arsenic lorsque le pH atteint 4,5 à 5.
Le fer (III) est initialement, principalement, contenu dans la ferrite de zinc peu soluble
et pour entraîner l’arsenic sa teneur, en solution, n’est pas suffisante. En conséquence, il
(15) En réalité le plomb pur est légèrement attaqué (le produit de solubilité de PbSO4 bien que faible n’est pas
nul). Pb2 + formé, est facilement réduit en Pb à la cathode et le zinc obtenu contient jusqu’à 100 ppm de
Pb. Afin de diminuer cette attaque, le plomb de l’anode est allié à environ 1 % d’argent.
L’hydrométallurgie
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faut ajouter du fer (III) soluble en amont de la lixiviation. De nombreuses industries et
en particulier celle du dioxyde de titane [7], coproduisent des quantités importantes de
sulfate ferreux. Ce composé est donc très bon marché et MnO2 permet d’oxyder en
Fe (III) le Fe (II) contenu.
Les ions H + consommés lors de la dissolution de la calcine sont régénérés lors de
l’électrolyse et la solution est recyclée en amont de la lixiviation lorsque la concentration
en zinc atteint moins de 0,5 mol.L- 1 (cf. figure 2).
2.3.2. L’électrolyse dans d’autres hydrométallurgies
L’électrolyse en solution aqueuse est également employée dans l’hydrométallurgie
des minerais oxydés, riches, de cuivre, l’hydrométallurgie du nickel (voir paragraphe précédent) et dans l’hydrométallurgie de l’or après récupération et réextraction des complexes d’or sur charbon actif.
Dans le cas de l’aluminium qui a un potentiel redox très faible, il n’est pas possible
d’effectuer une électrolyse en solution aqueuse et en conséquence celle-ci sera réalisée
en sel fondu dans un mélange à base de cryolithe [3].
3. L’HYDROMÉTALLURGIE « SECONDAIRE »
Elle intervient lors du recyclage de divers métaux : or, argent, cuivre, zinc…
Comme pour l’hydrométallurgie « primaire » elle est concurrencée par la pyrométallurgie qui prend parfois dans ce cas le nom d’affinage ou de métallurgie de deuxième
fusion (16). Du point de vue économique mais également du point de vue chimique, un
matériau récupéré après utilisation peut être proche d’un minerai naturel. Par exemple, la
teneur en or d’un ordinateur professionnel est de deux à trois grammes d’or pour une
tonne d’ordinateur (17). En 1995, la teneur moyenne des minerais d’or exploités, en
Afrique du Sud, par le n° 1 mondial, l’Anglo American Corporation of South Africa, était
de près de cinq grammes d’or à la tonne de minerai. Malgré la faible teneur en or d’un
ordinateur celle-ci est proche de celle de gisements actuellement exploités et les conditions d’extraction sont autrement plus faciles pour les récupérateurs qu’à 3 000 mètres de
profondeur dans les mines sud-africaines. Par exemple, en France, la société Valme, à
Falaise dans le Calvados, a ainsi récupéré en 1995, 400 kg d’or [7, 18].
3.1. Le recyclage du zinc des poussières d’aciéries
Les aciéries électriques rejettent et récupèrent, en moyenne, 20 kg de poussières par
tonne d’acier recyclé. Ces poussières contiennent de 15 à 30 % massique de zinc avec
des teneurs sensiblement égales en fer et environ 5 % de plomb. Le zinc provient prin(16) Si le terme de deuxième fusion est adapté pour cette pyrométallurgie, il ne peut être employé en hydrométallurgie et pour cette raison nous lui préférons le terme d’hydrométallurgie « secondaire ».
(17) L’or est présent sur les contacts électriques.
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cipalement du recyclage de l’acier zingué (18). Lors du traitement de l’acier, le zinc, volatilisé, se retrouve sous forme d’oxyde ZnO et de ferrite ZnFe2O4 dans les poussières qui
sont récupérées. Un article récent des Techniques de l’Ingénieur fait le point sur deux
procédés : le procédé EZINEX qui réalise une lixiviation à l’aide d’une solution de chlorures d’ammonium et de sodium et le procédé REZEDA développé par le groupe Arcelor. Nous détaillerons ce dernier qui n’est pas, pour l’instant, industrialisé [20].
Les poussières sont lixiviées par une solution aqueuse de soude d’environ 7 mol.L- 1.
65 % du zinc et 90 % du plomb contenu passent en solution qui contient ainsi environ
40 g.L- 1 de Zn et 5 g.L- 1 de Pb. Le plomb et la plupart des autres impuretés présentes
sont extraits par cémentation à l’aide de poudre de zinc. La solution de Zn2 + subit ensuite
une électrolyse et donne de la poudre de zinc à 99,7 % de Zn. La solution qui après électrolyse contient environ 15 g.L- 1 de Zn est recyclée en lixiviation. La poudre de zinc obtenue trouve ses principales applications en cémentation, dans les peintures anticorrosion
et en catalyse. Ce procédé est analogue à celui employé lors du traitement des minerais
naturels. Dans ce dernier cas, la lixiviation acide est préférée car elle donne sur les
cathodes, lors de l’électrolyse, directement du zinc massif au lieu de poudre en milieu
alcalin, les utilisations du zinc massif étant plus importantes que celles des poudres.
En concurrence avec l’hydrométallurgie, d’autres procédés permettent de recycler le
zinc des poussières d’aciéries. On peut citer un procédé pyrométallurgique employé à
l’usine Recytech de Fouquières-lez-Lens dans le Pas-de-Calais qui, par traitement des
poussières d’aciéries, produit de l’oxyde zinc qui était, il y a encore peu de temps, réduit
par pyrométallurgie dans l’usine Metaleurop de Noyelles Godault. La Compagnie Européenne de Dézingage à Saint-Saulve dans le Nord, travaille par hydrométallurgie directement sur les tôles de récupération des véhicules usagés. Le zinc du revêtement zingué
est dissout dans une solution aqueuse de soude qui est ensuite électrolysée [7].
3.2. Le recyclage des piles salines et alcalines
Les piles usagées peuvent être traitées par pyrométallurgie dans des fours de production de ferromanganèse [7]. Le manganèse des piles est récupéré mais pas le zinc. L’hydrométallurgie est utilisée avec des solutions de lixiviation acides ou basiques selon la
nature des piles. Par exemple, la voie acide n’est pas intéressante pour les piles alcalines
car l’électrolyte de ces piles étant basique la neutralisation de la potasse concentrée contenue entraînerait une consommation d’acide prohibitive. Au contraire, l’hydrométallurgie en
milieu alcalin, permet des consommations moindres de réactifs et la dissolution du zinc
sous forme de zincate qui donne, par électrolyse, du zinc sous forme de poudre, forme à
plus value importante pour des emplois comme constituant anticorrosion de peintures.
3.3. Le recyclage de l’argent en photographie [7, 21, 22]
Malgré le développement de la photographie numérique, la consommation d’argent
(18) Cet acier est présent, par exemple, dans les carrosseries automobiles [19].
L’hydrométallurgie
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dans les émulsions photographiques continue de croître. Elle est actuellement, par exemple,
de près de 2 600 tonnes par an aux États-Unis dont 14 % dans les radiographies par
rayons X. Les films contiennent de 2 à 15 g d’argent par kilo de film et un fixateur usé
renferme de 4 à 7 g d’Ag/L.
L’argent des films peut être récupéré par lavage à l’aide d’une solution bouillante
de soude dans l’éthanol puis électrolyse. L’argent contenu dans le fixateur est, de plus en
plus, récupéré en continu, par électrolyse, dans les installations de développement. En
1991, fonctionnaient, en France, plus de 3 000 électrolyseurs qui récupéraient ainsi plus
de 140 tonnes d’argent par an. Dans le fixateur (solution de thiosulfate de sodium) l’argent se retrouve sous forme complexée, par exemple : Ag _ S2O3 i D . L’électrolyse entre
2
3-
une anode en graphite et une cathode en acier inoxydable permet, outre la récupération
de l’argent qui se dépose sur la cathode, la régénération du bain de thiosulfate. La tension d’électrolyse est comprise entre 1 et 3 V.
4. LES AVANTAGES ET LES INCONVÉNIENTS
DE L’HYDROMÉTALLURGIE
L’hydrométallurgie présente l’avantage de travailler à des températures proches de
l’ambiante. La consommation d’énergie est donc moins importante que lors des traitements
pyrométallurgiques. L’emploi de solutions aqueuses génère peu d’effluents gazeux contrairement à la pyrométallurgie. La participation à l’augmentation de l’effet de serre (19) est
donc moindre.
L’hydrométallurgie travaille généralement en circuit fermé, les solutions de traitement étant recyclées en amont de la lixiviation. Toutefois, des purges sont nécessaires car
les impuretés non récupérées peuvent s’accumuler. Les impuretés éliminées par décantation (par exemple la jarosite dans l’hydrométallurgie du zinc), si elles ne présentent pas
d’intérêt économique, sont stockées en l’état, c’est-à-dire sous forme de boues. En conséquence, les volumes d’effluents liquides et de boues peuvent être importants (l’obtention
de 2 tonnes de Zn génère la production de 1 tonne de jarosite). Ces effluents, en général
acides, sont souvent toxiques car ils peuvent renfermer des éléments tels que l’arsenic, le
plomb, le cadmium, le chrome… Dans le cas de l’hydrométallurgie de l’or, les effluents,
avant tout traitement ultérieur, contiennent des ions cyanure. Il est donc nécessaire de
contrôler strictement ces rejets et de les neutraliser afin qu’ils ne polluent pas l’environnement. Des exemples récents montrent que divers accidents peuvent se produire. On
peut citer, dernièrement en Europe, la pollution de la rivière Guadiamar, affluent du Guadalquivir, et du parc national de la Doñana en Andalousie lors de la rupture d’un bassin
de décantation d’une mine de pyrite (20) survenue le 25 avril 1998 ou celle de la rivière
(19) La pyrométallurgie emploie souvent comme agent réducteur le monoxyde de carbone qui est d’une part
toxique et qui s’oxyde d’autre part en dioxyde de carbone.
(20) Dans ce cas il ne s’agit pas directement d’opérations d’hydrométallurgie.
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Tisza, affluent du Danube, survenue le 30 janvier 2000 lors de la fissuration d’un bassin
de retenue d’effluents cyanurés de la mine d’or de Baia Mare en Roumanie [23]. Il est
relativement facile, bien que coûteux, de récupérer les cations métalliques (21) et de les
stocker s’ils ne présentent pas d’intérêt économique. La chimie permet également de détruire
les ions cyanure (22). Par contre, les eaux rejetées par les installations hydrométallurgiques
sont souvent riches en anions tels que chlorures ou sulfates associés aux cations sodium
ou calcium. Pour ces anions, les limites admissibles dans certains fleuves sont déjà atteintes,
par exemple le Rhin pour les ions chlorure (23).
Le choix de l’un ou l’autre des procédés métallurgiques dépendra d’abord de la
nature des minerais exploités. Ensuite, les coûts respectifs d’exploitation seront pris en
compte. Les préoccupations de respect de l’environnement, encadrées par les législations
des pays concernés, seront souvent déterminantes pour l’importance de ces coûts.
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(21) Par précipitation, par exemple, d’hydroxydes ou de phosphates.
(22) La destruction des ions cyanure est facilement réalisée par oxydation à l’aide d’eau oxygénée ou d’eau de
Javel.
(23) La pollution du Rhin par les ions chlorure est principalement liée aux rejets des extractions de chlorure de
potassium (la « potasse » des agriculteurs) et des usines (« soudières ») de fabrication de carbonate de
sodium [7].
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Jean-Louis VIGNES
Professeur des universités à l’IUFM de Créteil (Val-de-Marne)
Chercheur au LIMHP-CNRS de Villetaneuse (Seine-Saint-Denis)
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