Georges Dimitrov
Œuvres choisies
Edition électronique réalisée par Vincent
Gouysse à partir de l’ouvrage publié en
1952 aux Editions Sociales.
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Sommaire :
Maurice Thorez : Georges Dimitrov, notre inoubliable guide et ami (p. 3)
Un grand militant du mouvement ouvrier international (p. 5)
ŒUVRES CHOISIES
L'Incendie du Reichstag
Discours final devant le tribunal (p. 10)
Ce que nous devons dire avant tout (p. 23)
Les premiers enseignements (p. 24)
La signification du procès de Leipzig (p. 26)
Le septième congrès de l'Internationale communiste
L'Offensive du fascisme et les tâches de l'Internationale communiste dans la lutte pour l'unité de la classe ouvrière
contre le fascisme (p. 28)
I — Le fascisme et la classe ouvrière (p. 28)
II — Le front unique de la classe ouvrière contre le fascisme (p. 38)
III — Le renforcement des Partis communistes et la lutte pour l'unité politique du prolétariat (p. 62)
Pour l'unité de la classe ouvrière contre le fascisme (p. 69)
La lutte contre le fascisme doit être concrète (p. 70)
Front unique prolétarien, Front populaire antifasciste (p. 72)
Le rôle de la social-démocratie et son attitude à l'égard du front unique du prolétariat (p. 73)
A propos du gouvernement de front unique (p. 75)
De l'attitude à l'égard de la démocratie bourgeoise (p. 76)
Avoir une ligne juste n'est pas encore suffisant (p. 77)
Des cadres (p. 79)
Les gouvernements actuels des pays capitalistes sont des hommes provisoires ; le véritable maître du monde est le
prolétariat (p. 86)
La lutte pour la paix
Pour l'unité d'action du prolétariat dans la lutte contre le fascisme et la guerre (p. 92)
Le front unique pour la paix (p. 95)
L'Union soviétique et la classe ouvrière des pays capitalistes (p. 102)
La démocratie populaire
La Démocratie populaire (p. 107)
I — Principales périodes du développement du Parti (p. 108)
La période des social-démocrates de gauche (« Tesni » socialistes) (p. 108)
L'adhésion du Parti à l'Internationale communiste et le commencement de la bolchévisation (p. 112)
L'Insurrection de septembre 1923, tournant décisif dans la bolchévisation du Parti (p. 114)
La lutte contre le sectarisme de gauche dans le Parti et sa suppression (p. 118)
Le nouveau cours bolchevik, du Parti (p. 120)
II — Le souvement du 9 septembre 1944 a ouvert la voie à la construction du socialisme dans notre pays
(p. 125)
Du 9 septembre 1944 aux élections à la grande assemblée nationale (p. 125)
Vers la construction des bases du socialisme chez nous (p. 130)
III — Le caractère, le rôle et les perspectives de la démocratie populaire et de l'Etat populaire-
démocratique (p. 133)
IV — La situation internationale et notre politique extérieure (p. 135)
V — La fédération des slaves du Sud et le problème macédonien (p. 140)
VI — Nos perspectives et nos tâches dans le domaine économique et culturel (p. 143)
VII — Le Parti, force décisive, motrice et dirigeante (p. 148)
3
Georges Dimitrov, notre inoubliable guide et ami
Par Maurice Thorez
Il y a presque un quart de siècle de cela. Nous étions réunis à Moscou pour une session du Comité
exécutif de l'Internationale communiste. Au cours d'une séance, un homme grand, aux larges épaules,
au visage énergique sous l'abondante chevelure noire, monta à la tribune. C'était Georges Dimitrov. Il
parlait lentement, posément et l'interprète n'avait aucune peine à traduire un discours qui était un
modèle de clarté et de simplicité. J'ai toujours gardé à l'esprit cette image de Dimitrov qui respirait la
force, le calme et la tranquillité. C'est ainsi que je l'avais revu par la suite, dans les entretiens
personnels qu'il voulut bien m'accorder. C'est ainsi que plus tard je me le représentais dans la cellule
les hitlériens l'avaient jeté, et à la barre de Leipzig, où il apostrophait et faisait baver de rage le
sinistre Gœring. Le monde entier eut alors la révélation de cet homme extraordinaire, de ce militant
ouvrier, digne fils du peuple bulgare en me temps que disciple incomparable de Lénine et de
Staline.
Le fascisme, venu au pouvoir en Allemagne, à la faveur de la division des travailleurs provoquée et
maintenue par la social-démocratie et sa politique de trahison, le fascisme prétendait courber l'Europe
et le monde sous sa loi de sang et de boue. Et voilà que l'humble émigré bulgare, victime de la
monstrueuse provocation montée contre le Parti communiste allemand, se dresse comme l'accusateur
du fascisme. Avec une intelligence, une ténacité, un courage admirable, Dimitrov, seul devant ses
pseudo-juges, démonte le mécanisme de la provocation. Il fend le Parti communiste allemand. Il
exalte l'Union soviétique, son système socialiste. Il se glorifie d'être un ouvrier bulgare, attaché à son
peuple, dont il célèbre la culture millénaire et les hautes traditions nationales. Le communiste
Dimitrov, pétri d'internationalisme, est un patriote exemplaire qui lutte pour l'honneur et
l'indépendance nationale de son peuple bulgare. Le combat héroïque de Dimitrov exalta partout la
volonté de lutte des travailleurs et de tous les antifascistes. Sa victoire sur le tribunal de Leipzig fut
une victoire du mouvement ouvrier international et de toutes les forces de la démocratie dans le
monde.
Avec quelle émotion je devais saluer quelques mois plus tard notre cher Dimitrov, dans le sanatorium
près de Moscou où il se remettait des dures épreuves de la captivité et du procès. Il lui avait fallu
penser une somme incalculable d'énergie. Sa santé en fut ébranlée. Pourtant, je retrouvai Dimitrov
aussi souriant, affable et bienveillant. Il était la bonté même. A peine délivré de ses chaînes, à peine
arrivé sur le sol de l'Union soviétique, et sans pouvoir se résigner au repos nécessaire, il s'informait de
l'état du mouvement ouvrier international, du progrès de l'unité ouvrière antifasciste. Il m'interrogeait
sur la situation en France. Nous étions en pleine bataille contre les premières manifestations fascistes.
Nous avions riposté par les grandioses manifestations des 9 et 12 février 1934. Dimitrov s'en
réjouissait. Nous faisions face également à la tentative du traître Doriot de saper de l'intérieur la lutte
des travailleurs de France sous la direction de notre Parti communiste. Dimitrov me dit : « Doriot n'a
pas confiance dans la classe ouvrière. Il est impressionné par la victoire du fascisme en Allemagne. Il
croit que le fascisme viendra aussi en France. Il se dépêche de donner des gages à l'ennemi. Mais il se
trompe. C'est à la classe ouvrière, c'est au communisme que l'avenir appartient. » La suite des
événements confirma brillamment les prévisions de Dimitrov et justifia entièrement son inébranlable
confiance dans les forces et dans la capacité de la classe ouvrière de France et des autres pays.
Le VIIecongrès de l'Internationale communiste se tint l'année suivante. Ce congrès fut dominé par
l'inoubliable figure de Georges Dimitrov. En stalinien accompli, Dimitrov formula notre programme
de lutte contre le fascisme et contre la guerre. Il appela les communistes à l'effort patient et tenace
pour refaire, malgré et contre les chefs traîtres de la social-démocratie, l'unité de la classe ouvrière et
pour asseoir sur cette unité prolétarienne, le front populaire antifasciste. Dimitrov s'était intéressé très
vivement à l'initiative de notre Parti, inspirateur et organisateur du Front Populaire. Il l'avait donné en
exemple. Il avait toutefois recommandé de consolider notre Front Populaire par l'élection
démocratique de comités larges dans les usines, les quartiers et les villages, et de le défendre ainsi
contre les attaques de l'extérieur et contre les entreprises intérieures de désagrégation. Nous ne
parnmes pas à faire élire partout de tels comités ; le Front Populaire, quoique s'appuyant sur le
mouvement des masses, demeura surtout uni par le sommet.
4
Lors du XXeanniversaire de la Révolution Socialiste d'Octobre, j'étais allé à Moscou. Dimitrov me
pria de passer toute une journée chez lui. Que d'agréables moments, que de conversations instructives.
J'écoutais parler Dimitrov. Il s'était forgé une vaste culture. Il était imprégné de la science de Lénine et
de Staline. Il avait réponse à tout. Lui et sa vaillante compagne, notre amie Rosa, étaient accueillants,
pleins de prévenances et d'une grande gentillesse. Dimitrov se préoccupait toujours de la situation
matérielle des militants, de leur état de santé, des conditions propres à assurer leur travail. Il voulait
aussi savoir quelles mesures le Parti prenait pour protéger ses dirigeants contre les attentats que
pouvaient organiser les ennemis du peuple.
En cette fin d'année 1937, alors que la politique dite de « non intervention » commençait à produire
ses résultats néfastes en Espagne, Dimitrov soulignait la gravité de la situation internationale. Le
fascisme, encoura par les Blum et les Chamberlain, faisait peser la menace d'une deuxième guerre
mondiale. Il ne fallait perdre aucune minute, il ne fallait ménager ni ses efforts ni sa peine, disait
Dimitrov, afin de faire échec au fascisme, grâce à l'union et à l'action des forces ouvrières et
démocratiques. Ainsi les peuples pouvaient encore éviter les horreurs de la guerre. Dimitrov exaltait le
rôle de l'Union sovtique dans cette bataille pour la paix et pour la démocratie. Il rappelait que
l'attachement à l'Union soviétique, c'est la pierre de touche de l'internationalisme prolétarien. Quelle
condamnation, par avance, de la trahison d'un Tito et de sa bande d'espions et d'assassins à la solde des
impérialistes anglo-saxons.
Dimitrov répétait souvent : Il ne convient pas seulement de savoir ce qu'il faut faire, il faut encore le
faire. Il fallait, disait-il, donner une trempe bolchevik, stalinienne aux militants, afin qu'ils sachent unir
la fermeté de caractère à l'intelligence des décisions à prendre et à appliquer coûte que coûte.
J'ai revu par la suite Dimitrov, dans les années difficiles de la grande guerre des peuples contre
l'hitlérisme et ses complices. Quoique déjà miné par la maladie, il était toujours aussi actif et d'une
humeur égale. Il savait que la lutte était dure, terrible, qu'elle exigeait beaucoup de sacrifices, surtout
de la part des peuples admirables de l'Union soviétique, qui supportaient seuls, ou presque, tout le
poids de la machine de guerre hitlérienne. Mais Dimitrov, disciple et ami de Staline, savait que la
victoire couronnerait les efforts des peuples libres. Il évoquait l'avenir proche des peuples libérés du
joug fasciste. Il pensait tout particulièrement à son pays, au peuple bulgare, que les fascistes ne
parvinrent pas à dresser contre son aîné et son libérateur, le grand peuple russe. Dimitrov prévoyait et
préparait les transformations profondes qui ont marqué la naissance et le développement continu de la
publique Populaire de Bulgarie. Il souriait en parlant de la vie heureuse et joyeuse qui serait alors
celle du peuple et surtout des enfants qu'il chérissait tendrement.
Au XXXeanniversaire de la Révolution d'Octobre, j'ai revu Dimitrov à Moscou. Avec plusieurs de ses
compagnons et collaborateurs du Comité central du Parti communiste et du Gouvernement de
Bulgarie, il était en délégation dans la capitale des Soviets. Il voulut recevoir quelques uns d'entre nous
qui avions si souvent bénéficié de ses conseils judicieux. Il était heureux de s'informer de nos luttes,
nos succès et nos difficultés. Hélas, je ne devais plus le revoir vivant.
Notre Comité central siégeait quand nous parvint l'affreuse nouvelle que Dimitrov était mort. Après
quelques mots prononcés la gorge serrée, en un dernier hommage au grand disparu, la session du
Comité central fut close en signe de deuil.
Mais dans nos coeurs, dans le cœur de tous les travailleurs, de tous les antifascistes, à travers le monde
entier, le souvenir de notre inoubliable guide et ami vit et vivra éternellement. Et c'est dans l'esprit de
Dimitrov, dans l'esprit du léninisme, du stalinisme qu'il nous inculqua, que nous tendons nos forces
pour faire triompher, contre les fauteurs d'une nouvelle guerre impérialiste, la politique de paix, de
démocratie et d'indépendance nationale dont l'Union soviétique est le ferme champion.
5
Un grand militant du mouvement ouvrier international
Georges Dimitrov est le 18 juin 1882 dans une famille de prolétaires et de révolutionnaires. Son
re et sa re étaient de simples ouvriers, de modestes travailleurs, parents de militants
révolutionnaires hardis. Son frère aîné, Constantin, était secrétaire du syndicat des ouvriers
imprimeurs. Son second frère, Nicolas, ouvrier révolutionnaire, s'était rendu en Russie en 1905 ; arrêté
par la police dans une imprimerie clandestine, il fut jugé et condamné à la réclusion perpétuelle ; il est
mort au bagne, en Sibérie. Le troisième frère, Todor, membre du Comité central du Parti communiste
bulgare, qui avait pris une part des plus actives au soulèvement antifasciste de 1923, fut sauvagement
assassiné par la police fasciste bulgare en 1925. La jeune sœur de Dimitrov, Hélène, avait également
adhéré de bonne heure au mouvement révolutionnaire. Sa re a de tout temps aidé ses enfants dans
leur dure mais glorieuse lutte pour la cause de la classe ouvrière.
A l'âge de quinze ans, Georges Dimitrov est typographe dans une imprimerie. Il adhère au mouvement
révolutionnaire et joue un rôle actif au sein du syndicat des ouvriers imprimeurs, le premier syndicat
bulgare. Le premier article écrit par le jeune Dimitrov et publié en 1897 dans le Petchatarski Rabotnik
(l'Ouvrier imprimeur) est consacré à la lutte des typographes pour l'amélioration de leurs conditions de
travail. Il est âgé de dix-huit ans à peine lorsqu'il est élu secrétaire du syndicat des imprimeurs de
Sofia. En 1902 il entre au Parti social-démocrate ouvrier bulgare et engage la lutte contre le
révisionnisme, se rangeant du côté de l'aile révolutionnaire marxiste des « socialistes étroits » qui ont
pour chef Dimitre Blagoév. Au mois de février 1903, Dimitrov est élu secrétaire de l'organisation de
Sofia des « socialistes étroits » ; il demeurera à sa te pendant dix ans. En 1919, le parti des « étroits »
prend le nom de Parti communiste bulgare et s'affilie à l'Internationale communiste. Elu en 1909
secrétaire des syndicats révolutionnaires bulgares, Georges Dimitrov conserve ce poste jusqu'en 1923,
date à laquelle ces syndicats sont dissous par les fascistes bulgares.
En 1913, les ouvriers bulgares l'avaient élu député au Parlement. Pour la première fois, non seulement
en Bulgarie, mais dans toute l'Europe du Sud-Est de l'époque, on vit siéger au Parlement un
représentant de la classe ouvrière. Aussi bien au Parlement qu'au Conseil municipal de Sofia
Dimitrov est également conseiller municipal — il défend les intérêts des masses laborieuses et tient
te aux exploiteurs.
Les efforts de Georges Dimitrov tendaient à inculquer au Parti communiste bulgare et au protariat de
son pays une fidélité absolue envers la doctrine de Lénine et de Staline. Dès le début de son activité
révolutionnaire, il s'était montré un internationaliste conséquent. Il n'a pas cessé de flétrir les
nationalistes bulgares.
Dimitrov était mortellement haï et cruellement persécuté par les réactionnaires, ennemis de la classe
ouvrière. Plus d'une fois, ceux-ci avaient essayé de faire lever l'immunité parlementaire qui le
protégeait afin de pouvoir l'arrêter. Pendant la première guerre mondiale, Dimitrov est mis en prison
en raison de son activité révolutionnaire parmi les soldats; il y reste un an et demi et ne parvient à en
sortir, avec plusieurs autres détenus politiques, qu'à la faveur du puissant mouvement révolutionnaire
qui, sous l'influence de la grande Révolution d'Octobre, se fait jour en Bulgarie. Peu après, il est de
nouveau arrêté à la suite d'un discours qu'il prononce à Pernik, au meeting des mineurs. La nouvelle de
cette arrestation se propage comme une traînée de poudre dans les quartiers ouvriers de Sofia. Lorsque
Dimitrov arrive, sous bonne garde, à Sofia, les ouvriers de la capitale se portent à sa rencontre et
l'arrachent des mains des policiers. Pendant longtemps, Dimitrov travaille ensuite dans des conditions
semi-légales avant de passer dans la clandestinité. Il se présente un jour à la réunion de la Municipalité
de Sofia, y prononce un discours et, protégé par les ouvriers, échappe à la police. Il prend souvent la
parole devant les ouvriers de province.
En 1920, Dimitrov est envoyé par les communistes bulgares à Moscou, au IIIeCongrès de
l'Internationale communiste. Il rencontre ici pour la première fois les guides du prolétariat mondial,
Lénine et Staline.
Au mois de septembre 1923, lorsque l'indignation provoquée au sein des masses populaires bulgares
par la dictature sanglante des fascistes aboutit à une insurrection armée, Dimitrov est à la tête de l'état-
major des insurgés le Comité révolutionnaire général.
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