La théorie féministe nous incite à nous pencher sur les identités et inté -
rêts collectifs basés sur le genre, non pas parce qu’il est la seule, ou
même la plus importante, dimension de l’identité collective, mais parce
que des changements rapides dans les rôles des genres ces cent der -
nières années apportent des éclaircissements. En comprenant mieux
comment et pourquoi le pouvoir collectif des hommes sur les femmes a
diminué substantiellement, nous pouvons mieux comprendre comment
d’autres formes de pouvoir collectif peuvent être transformées.
Troisièmement, et ceci est particulièrement utile à la compré-hension
du développement économique, l’économie conven-tionnelle se centre
sur la valeur de la production du marché, ou le Produit Intérieur Brut
(PIB). Elle est alors induite en erreur, parce que le PIB ne tient pas
compte de biens non marchands (tels qu’un environnement sain ou un
haut niveau de capital social), et omet de considérer tout travail non
marchand (comme le soin apporté aux membres de la fa-mille).
Lorsqu’on fait passer les femmes d’un travail non payé à un travail
payé, on augmente le PIB par définition, et on surestime la hausse de
la valeur des biens et services produits qui en résulte. Les différents
taux d’augmentation de l’activité féminine dans différents pays
cachent la vraie signification de la différence entre les taux de crois -
sance du PIB.
Les économistes féministes sont à la tête des initiatives qui tentent de
rassembler des données sur l’utilisation du temps qui permettent de
construire un autre modèle que celui du PIB. Le livre de la Néo-zélan -
daise Marylin Waring Si les femmes comptaient a eu un impact impor -
tant. Une partie de mon propre travail offre une estimation alternative
de la croissance économique aux États-Unis – c’est-à-dire qu’elle
présente ce qu’aurait été cette croissance si le travail des femmes avait
été évalué et comptabilisé (Folbre et Wagman, 1993, 1996). Luisella
Goldschmidt-Clermont et Elisabetta Pagnossian-Aligisakis (1995) ont
mené une vaste recherche pour les Nations Unies sur le travail non
marchand des femmes dans les pays en développement.
Mais nous ne voulons pas limiter notre attention à des estimations
alternatives du PIB. De nouvelles dimensions sociales pourraient nous
aider à mieux comprendre des dimensions non pécuniaires de notre