Quand l`effet Hall et un aimant tournant mesurent une

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Solutions
MESURES DE POSITION
Quand l’effet Hall
et un aimant tournant
mesurent une
position angulaire
TWK
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Codeurs absolus ou incrémentaux, potentiomètres, capteurs capacitifs, inductifs… pour mesurer une position angulaire, il
n’y a que l’embarras du choix. Mais lorsqu’on recherche des capteurs sans usure (donc sans contact), robustes et peu coûteux, le principe magnétique s’impose. Si l’effet Hall, la magnétostriction et la magnétorésistance ont fait leurs preuves
depuis de nombreuses années, il apparaît régulièrement de nouveaux capteurs qui en combinent les avantages. C’est ainsi
que le Laboratoire d’Electrotechnique de Grenoble a développé un capteur angulaire basé sur des cellules à effet Hall et une
conception mécanique originale permettant de s’affranchir de toutes sortes de paramètres…
L’
intérêt des capteurs magnétiques
n’est plus à démontrer… L’effet
Hall,la magnétostriction ou encore
la magnétorésistance sont couramment utilisés dans des applications de mesures
de position angulaire ou linéaire,pour lesquelles
ils présentent de nombreux avantages.Comme
il n’y a pas de contact entre le corps du capteur
et l’élément en mouvement,il n’y a pas de frottements et pas d’usure.Par rapport aux capteurs
potentiométriques classiques,leur durée de vie
est donc largement supérieure, et la maintenance quasi inexistante. D’autre part, ils sont
peu coûteux et très robustes. Peu sensibles aux
poussières,aux projections d’huile ou de liquide de coupe,ils s’adaptent aux environnements
les plus difficiles…
En revanche, les matériaux magnétiques sont
sensibles au champ magnétique externe, à la
température (le champ généré par un aimant
permanent varie de 0,2 %/°C) et aux
contraintes mécaniques qu’ils subissent. Mais
ce qui apparaît comme une limitation peut
aussi s’avérer utile : Puisque l’aimantation de
ces matériaux varie en fonction de la température,pourquoi ne pas les utiliser dans le déve-
loppement de capteurs de température sans
contact? De même, si les propriétés magnétiques d’un arbre varient en fonction de la torsion qu’il subit, pourquoi ne pas utiliser cet
effet pour concevoir des capteurs de couple?
Au Laboratoire d’Electrotechnique de Grenoble (UMR
CNRS 5529), cela fait de nombreuses années
que l’on a compris l’intérêt de ces méthodes
et que l’on “joue” avec les propriétés magnétiques des matériaux…
Parmi les derniers sujets de recherche,la conception d’un capteur de position angulaire en collaboration avec la société Sagem.Le début du projet démarre il y a six ans.A l’époque,Sagem travaille
alors sur le développement d’un capteur permettant de mesurer la position des papillons de
carburateurs dans les moteurs automobiles. Il
propose un cahier des charges au laboratoire,
qui explore alors les différentes techniques utilisables. En raison de son faible coût et de sa
robustesse, la solution magnétique s’impose.
Il faut dire que la méthode avait déjà des
antécédents dans le domaine de l’automobile. Elle est par exemple utilisée dans les
capteurs de position des volants (notamment
pour détecter les brusques changements de
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direction et éviter que le véhicule ne parte en
tête à queue), ou dans les systèmes de freinage de type ABS.
Pour développer son capteur, le laboratoire
part sur une idée bien précise : utiliser un
principe différentiel pour
s’affranchir des paraL’essentiel
mètres qui perturbent la
mesure. Il réalise alors Grâce à leur robustesse et à
leur faible coût, les capplusieurs essais, puis
teurs magnétiques sont
choisit une conception
couramment employés
mécanique originale lui
dans le domaine industriel,
notamment pour des
permettant d’atteindre cet
applications de mesure de
objectif.
Un flux qui se
sépare en deux
Le principe est relativement simple… mais
encore fallait-il y penser.
Le capteur est schématiquement constitué de
deux anneaux enserrant
un aimant permanent
mobile (en réalité, il y a
un léger entrefer entre
position angulaire ou
linéaire.
Le Laboratoire d’Electrotechnique de Grenoble a
conçu un nouveau type de
capteur de position angulaire à aimant permanent
Basé sur un principe différentiel et un aimant tournant, il permet de s’affranchir des effets de la
température et d’éventuels
jeux mécaniques.
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Principe du capteur angulaire à aimant tournant
Champs magnétiques
Parties fixes
Entrefers
Mesure des flux B1 et B2
par des capteurs à effet Hall
Position angulaire
Aimant en rotation
Le capteur angulaire est constitué de deux anneaux fixes enserrant un aimant mobile.Le flux traversant l’aimant se sépare au niveau de l’entrefer,générant deux
champs B1 et B2 qui varient,en sens opposé,suivant la position angulaire de l’aimant.
l’aimant et les deux anneaux). L’aimant, en
forme de demi-anneau, est solidaire de
l’arbre dont on mesure la position angulaire (voir schéma). L’ensemble forme une sorte de “bague” constituée de trois anneaux,
deux fixes et un mobile.
Imaginons alors que l’arbre est en rotation.
Dans son mouvement, il met l’aimant en
rotation entre les deux anneaux fixes, autour
de l’axe du capteur.
Le flux magnétique, qui traverse l’aimant suivant la direction axiale du capteur, arrive dans
l’anneau supérieur puis se referme via l’an-
neau inférieur.
Mais l’anneau supérieur n’est pas tout à fait
complet : à son milieu, il est coupé par un
entrefer. Lorsque le flux magnétique y parvient, il doit donc se séparer de part et d’autre
de cette coupure… Et c’est là qu’intervient la
position angulaire de l’aimant. C’est elle, en
effet, qui va déterminer la répartition du flux.
Si la position angulaire de l’arbre est telle que
l’aimant est centré par rapport à l’entrefer, le
flux sera également réparti entre les deux
branches de l’anneau supérieur. Si au contraire l’aimant est décentré par rapport à l’en-
La mesure de position, une question de “principes”…
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Type de capteur
Principe
Principales caractéristiques
Résistif
Variation de résistance électrique
par déplacement d’un curseur mécanique
Simple, peu onéreux et compact,
mais durée de vie relativement faible (usure)
Magnétorésistif
Variation de résistance par action
d’un champ magnétique externe
Sans contact, sans usure. Risques de perturbations
par des champs magnétiques externes
Capacitif
Variation de capacité par déplacement
relatif de deux armatures
Ne fonctionne que pour de très faibles entrefers
Magnétostrictif
Variation des propriétés magnétiques
d’un barreau en fonction des contraintes
appliquées
Permet d’exploiter la magnétostriction en torsion
(effet Wiedemann) pour réaliser par exemple
des capteurs de couple
Effet Hall
Variation du flux magnétique en fonction
de la géométrie du circuit associé
Sans contact, sans usure. Risques de perturbations
par des champs magnétiques externes
Inductif
Variation d’inductance suite à l’application
d’une contrainte extérieure
Très simple et peu onéreux
Optique
Principe photoélectrique
Très répandu, précis, mais demande
un environnement propre
trefer, deux flux différents B1 et B2 vont être
générés dans chacune des branches...
L’angle de déplacement de l’aimant (et donc
la position angulaire de l’arbre en rotation)
détermine donc la valeur des champs B1 et
B2. Ensuite, il n’y a que des relations logiques.
Quelle que soit la position de l’aimant, la
somme des flux est constante (puisqu’elle
est égale au flux total généré par l’aimant), et
ils varient tous deux linéairement, en sens
opposé : si l’un augmente, l’autre diminue
d’autant, et réciproquement… Les courbes
représentant les variations des deux flux en
fonction de la position angulaire de l’aimant
sont donc deux droites se croisant au point
d’équilibre où B1 et B2 ont la même valeur
(position où l’aimant est centré par rapport
à l’entrefer).
Reste à mesurer ces champs magnétiques.Pour
cela, deux cellules à effet Hall sont placées au
niveau de l’entrefer principal (celui par où
passe le champ magnétique pour rejoindre
l’anneau inférieur). Leur tension de sortie, qui
est proportionnelle au courant d’alimentation
et au champ magnétique qui les traverse, permet alors de mesurer B1 et B2.
Mais pas directement… Si c’était le cas, la
mesure serait aussitôt affectée par tous les
paramètres (la température, par exemple)
dont on cherche justement à s’affranchir.
C’est alors que se justifie le principe différentiel. Au lieu de mesurer les champs
magnétiques B1 et B2, les cellules à effet Hall
mesurent le rapport :
S = (B2-B1) / (B1+B2)
Pour cela, le courant d’alimentation des cellules à effet Hall est asservi sur la somme des
flux B1 et B2. Le signal de sortie est alors
directement proportionnel au rapport S.
L’intérêt d’une telle mesure différentielle, c’est
qu’elle rend le capteur insensible à toutes
sortes d’effets parasites. La température,
notamment. Lorsqu’elle varie, B1 et B2 augmentent ou diminuent mais le rapport S, lui,
reste toujours constant. Il en est de même des
éventuels jeux mécaniques ou des défauts
d’alignement du capteur. Si l’aimant se décale légèrement entre les deux anneaux qui l’entourent, le flux sera moins important sur l’une
des deux branches, alors qu’il augmentera
dans l’autre. En calculant B1 et B2 séparément, on ne peut pas compenser cette erreur.
En revanche, même si l’aimant se décale, la
somme des flux est toujours constante. Le
rapport S n’est donc pas affecté…
Ce capteur (et notamment sa conception
géométrique et son principe de mesure différentiel) fait désormais l’objet d’un brevet.
Ses autres caractéristiques sont plus classiques.
Comme la plupart des capteurs basés sur un
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principe magnétique,sa résolution est élevée et
sa précision n’est limitée que par les effets
d’hystérésis présents dans les pièces du circuit
magnétique.Le prototype a par ailleurs été testé avec succès jusqu’à des vitesses de rotation de
l’ordre de 6 000 t/min. En termes de température, il n’y a pas de limite théorique (sauf
celle de l’aimant permanent, qui est utilisable
jusqu’à plus de 400 °C). Quant au coût, il est
de l’ordre de quelques euros…
Grâce à ces avantages, le capteur est déjà utilisé dans certaines applications industrielles. Il a
notamment été homologué pour la mesure
de position des gouvernes d’avions dans le
domaine aéronautique.
Ses limites sont celles de tout capteur de position magnétique :la nécessité d’utiliser un arbre
magnétique et des matériaux dotés d’un faible
champ coercitif,et la sensibilité du capteur aux
champs magnétiques externes…
Depuis la construction de ce capteur, le Laboratoire d’Electrotechnique de Grenoble a exploité le
même principe pour réaliser un capteur de
position linéaire. Il travaille également sur
des capteurs de position sans contact fonctionnant cette fois-ci par saturation locale de
Aratem 2004 : une journée pour la mesure sans contact
Le capteur angulaire du Laboratoire
d’Electrotechnique de Grenoble a été présenté
lors du colloque annuel de l’Aratem (Agence
Rhône-Alpes pour la Maîtrise des Technologies
de Mesure), qui s’est tenu le 14 octobre dernier à Champagne au Mont-d’Or (69). Près de
120 industriels et chercheurs s’y sont rassemblés autour d’un thème fédérateur : la mesure sans contact.
Parmi les sujets abordés, la mesure de température sans contact, les dernières technologies de capteurs sans fil, ou encore l’imagerie
dans le domaine des mesures dimensionnelles et du contrôle non destructif.
matériaux magnétiques : la mesure de position est donnée par la variation d’inductance liée à la saturation partielle d’un circuit
magnétique par un aimant en déplacement… Ce capteur n’est pas encore industrialisé mais une chose est sûre en tout cas :
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Cette année, l’Aratem a aussi profité de cette
journée technique pour annoncer la création,
par le Pôle Traçabilité (qu’elle a fondé en
2001) du “Centre de démonstration des nouvelles technologies de la traçabilité” à
Valence. Un espace de 300 mètres carrés
conçu notamment pour promouvoir l’identification par radiofréquences (RFID) auprès
des industriels.
Rens. : Aratem
26, rue Barthélémy de Laffemas - 26000 Valence
Tél. : 04 75 78 41 80 - Fax : 04 75 78 41 81
http://www.aratem.org
http://www.tracabilite-rfid.com
les capteurs magnétiques n’ont pas encore
fini de faire parler d’eux.
MLZ*
*Article rédigé à partir de documents de Jean-Paul Yonnet,
directeur de recherche au Laboratoire d’Electrotechnique
de Grenoble (UMR CNRS 5529).
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