Statistiques quantiques. Limite classique

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Statistiques quantiques. Limite
classique
1
Statistiques quantiques
1.1
Particules identiques discernables et indiscernables
Dans cette partie, nous considérons des particules identiques sans interactions. Dans un
système S constitué de N particules sans interactions, le hamiltonien H du système est
la somme des N hamiltoniens individuels hi des particules. Ces hamiltoniens sont tous
identiques1 . On note λ un état propre du hamiltonien individuel h et ǫλ l’énergie associée
à cet état propre. Les particules étant indépendantes, un état r du système S peut être
identifié par la donnée des N états individuels, un pour chaque particule
r ≡ (λ1 , λ2 , . . . , λN ).
(.1)
L’énergie Er de l’état r est la somme des énergies des N états individuels. Er = ǫλ1 +
ǫλ2 + · · · + ǫλN 2 . Il existe deux types de particules identiques. Les particules identiques
discernables et les particules identiques indiscernables.
Particules identiques discernables Les particules identiques et discernables correspondent au cas de particules que l’on peut indexer. C’est par exemple le cas de particules
situées aux noeuds d’un réseau cristallin. Dans ce cas, l’état du système est décrit par la
donnée de l’état de chaque particule située à chaque noeud du réseau. C’est une liste ordonnée de N états individuels où l’ordre est fixé par l’indexation des noeuds du réseau.
Ainsi un état (λ1 , λ2 , . . . , λN ) est différent d’un état (λ2 , λ1 , . . . , λN ).
Particules identiques indiscernables Dans le cas de particules identiques indiscernables,
comme par exemple un gaz, il n’est pas possible d’indexer les particules. Un état r est
toujours défini par la donnée de N états individuels, mais il n’est plus possible d’attribuer
1
Si il existe un potentiel d’interaction entre chaque particule i et j V (ri , rj ), le hamiltonien n’est plus
une somme de hamiltoniens individuels. Néanmoins, lorsque les interactions ne sont pas négligeables, on
peut en première approximation se ramener à un modèle de particules indépendantes dans lequel l’influence
sur une particule des autres particules est décrite par un potentiel moyen ne dépendant que de la position
et des caractéristiques de la particule considérée.
2
Cette expression reste valable pour des particules subissant des interactions modélisées par un potentiel moyen ne dépendant que de la position et des caractéristiques de la particule considérée (voir note
précédente).
2
1 Statistiques quantiques
chaque état individuel à une particule bien déterminée. Cette liste n’est plus ordonnée. En
particulier dans le cas de particules identiques indiscernables,
(λ1 , λ2 , . . . , λN ) = (λ2 , λ1 , . . . , λN )
Au lieu de décrire un état par une liste d’états individuels qui n’est donc plus une description
unique de l’état, on décrira un état r du système S par la donnée des nombres d’occupation
Nλ des différents états individuels λ.
r ≡ {Nλ }
(.2)
La somme des nombres d’occupation est égale au nombre de particules.
X
Nλ = N
(.3)
λ
L’énergie de l’état r est donnée par
Er =
X
Nλ ǫλ
(.4)
λ
Néanmoins, il existe une contrainte sur la liste (.2). Des particules identiques doivent respecter le postulat de symétrisation. Si ce sont des bosons, Nλ peut prendre n’importe quelle
valeur. Si ce sont des fermions, Nλ ne peut valoir que 0 ou 1.
1.2
Fonction de partition
Fonction de partition canonique
Particules identiques discernables Calculons la fonction de partition canonique Z du
système S dans le cas de particules identiques discernables. Ainsi
X
X
X
X
X
e−βǫN
e−βǫ2 · · · · ·
e−βǫ1 ·
Z=
e−βEr =
e−β(ǫλ1 +ǫλ2 +···+ǫλN ) =
r
λ1
(λ1 ,λ2 ,...,λN )
λ2
λN
La troisième égalité provient du fait que des différents
λi peuvent varier les uns indépendamment
P
des autres. En introduisant finalement ζ = λ e−βǫλ ,
Z = ζN
(.5)
Particules identiques indiscernables Pour des particules indiscernables, le calcul de la
fonction de partition canonique ne se simplifie pas 3 . Il est pratique pour les calculs de se
placer dans l’ensemble représentatif grand canonique.
3
Calculons la fonction de partition canonique pour des particules indiscernables. On peut toujours écrire
X
X
e−β(ǫλ1 +ǫλ2 +···+ǫλN )
Z=
e−βEr =
r
(λ1 ,λ2 ,...,λN )
Mais à chaque état l correspond une liste non ordonnée. Si on fait varier les λi indépendamment les uns
des autres, on compte comme si la liste était ordonnée. On compte donc trop de termes d’un facteur
3
1 Statistiques quantiques
Fonction de partition grand canonique
En l’absence d’hypothèses supplémentaires, il est plus pratique d’utiliser l’ensemble grand
canonique pour traiter les problèmes portant sur des particules identiques et indiscernables.
Lorsque le nombre de particules considérées est grand (limite thermodynamique), les ensembles représentatifs canonique et grand canonique sont équivalents. La fonction de partition grand canonique s’écrit par définition
"
#
X
X
Ξ=
exp −β
Nλ (ǫλ − µ)
(.8)
λ
{Nλ }
Cette fonction de partition se factorise. En effet, il n’existe plus de contrainte sur le nombre
de particules dans la caractérisation d’un état. La donnée d’un état l = {Nλ } est donc
la donnée des nombres d’occupation {Nλ } pour chacun des états individuels λ sans autre
contrainte. Dans la sommation précédente il faut donc sommer sur tous les nombres d’occupation possibles. De plus, l’exponentielle de la somme sur les états individuels s’écrit
comme un produit d’exponentielles. Ainsi
Y
YX
exp [−βNλ (ǫλ − µ)] =
ξλ
(.9)
Ξ=
Nλ
λ
λ
On obtient à partir de Ξ les valeurs moyennes des grandeurs thermodynamiques. On montre
notamment que le nombre moyen de particules N = 1/β∂ lnP
Ξ/∂µ du système
P et l’énergie
moyenne E = −∂ ln Ξ/∂β + µN du système s’écrivent N = λ N λ et E = λ N λ ǫλ où
Nλ =
1 ∂
(ln ξλ )
β ∂µ
est le nombre moyen de particules dans l’état λ ou encore le nombre d’occupation moyen
dans l’état λ.
1.3
Nombre moyen d’occupation
Fermions
Pour des fermions, la somme dans l’expression de ξλ se limite à deux termes : ξλ = 1 +
e−β(ǫλ −µ) . On en déduit le nombre moyen d’occupation pour les fermions
Nλ =
Q
N !/( λ Nλ !). Si l’on a des bosons
Z=
XX
λ1
λ2
1
eβ(ǫλ −µ)
+1
X Q Nλ !
λ
···
e−β(ǫλ1 +ǫλ2 +···+ǫλN )
N!
λ2
(.6)
λN
Pour des fermions, il n’est pas possible que Nλ soit supérieur à 1. D’où
XX
X Q α(Nλ )
λ
e−β(ǫλ1 +ǫλ2 +···+ǫλN )
Z=
···
N!
λ1
(.10)
(.7)
λN
où α(Nλ ) = 1 pour Nλ valant 0 où 1 et α(Nλ ) = 0 sinon. On voit donc que sans hypothèses supplémentaires,
il n’est pas possible d’obtenir une expression simple pour la fonction de partition canonique pour des
particules indiscernables.
4
2 Limite classique
Bosons
Pour les bosons, ξλ est une série géométrique :
ξλ =
+∞
X
e−β(ǫλ −µ)
Nλ =0
Nλ
=
1
1 − e−β(ǫλ −µ)
Notons que pour que cette série soit convergente, il faut que le potentiel chimique µ soit
inférieur à toute énergie ǫλ . On voit donc que dans un système à l’équilibre, la condition
précédente devant être valable pour tous les états λ, le potentiel chimique devra être inférieur
au niveau d’énergie le plus petit. Dans ces conditions, on trouve :
Nλ =
2
2.1
1
eβ(ǫλ −µ)
(.11)
−1
Limite classique
Limite classique et distribution de Maxwell-Boltzmann
Lorsque les nombres d’occupation sont petits, c’est-à-dire lorsque eβ(ǫλ −µ) ≫ 1, les nombres
d’occupation des bosons et des fermions tendent vers une même limite appelée distribution
de Maxwell-Boltzmann
N λ = e−β(ǫλ −µ)
(.12)
C’est la limite classique. Notons qu’à cette limite ln ξλ = e−β(ǫλ −µ) . Écrivons la fonction de
partition grand canonique dans cette approximation :
X
X
e−βǫλ = ζeβµ
(.13)
ln ξλ = eβµ
ln Ξ =
λ
λ
où ζ est la fonction de partition d’une particule. Soit finalement
βµ
Ξ = exp[ζe ] =
+∞
X
N =0
eβµN
ζN
N!
(.14)
D’autre part, comme il a été vu au chapitre précédent, la fonction de partition grand
canonique peut s’écrire
+∞
X
Ξ=
eβµN Z(N)
(.15)
N =0
où Z(N) est la fonction de partition canonique. En identifiant avec l’expression précédente,
on trouve qu’à la limite classique Z(N) = ζ N /N!.
Condition suffisante pour la limite classique Dans le cas d’un grand nombre de
particules, ce qui est le cas pour un gaz, on peut confondre le nombre de particules du gaz
N avec sa valeur moyenne N. Dans ce cas,
X
Nλ = ζeβµ
(.16)
N=
λ
5
2 Limite classique
Pour obtenir une condition suffisante pour la limite classique, on remplace la condition
eβ(ǫλ −µ) ≫ 1 par e−βµ ≫ 1. Cette condition s’écrit encore à l’aide de (.16) comme
ζ/N ≫ 1
(.17)
La fonction de partition à une particule ζ peut s’écrire comme le produit d’une fonction de
partition de translation ζtr = V (2πm/h2 β)3/2 par la fonction de partition due aux autres
formes d’énergie4 . En prenant la convention que le plus bas niveau d’énergie vaut 0, cette
dernière fonction de partition est toujours supérieure à 1. La condition suffisante sur la
limite classique s’écrira ζtr ≫ N, soit
λDB ≪
V
N
1/3
=d
(.18)
p
où λDB = h2 β/2πm est la longueur d’onde de De Broglie 5 et d est la distance moyenne
entre les particules. Lorsque la longueur d’onde de De Broglie est inférieure à la distance
moyenne entre les molécules, les fonctions d’onde des particules ne se recouvrent pas et les
effets quantiques sont négligeables. C’est la limite classique.
2.2
Distribution des vitesses de Maxwell-Boltzmann
Nous allons chercher ici à obtenir à l’équilibre le nombre de particules dN d’un gaz de
particules identiques sans interactions dans un élément de volume d3 r qui ont la vitesse
v à d3 v près. Ce nombre est égal au produit de la densité d’états par le nombre moyen
d’occupation de ces états. Si on suppose les conditions de l’approximation classique réunies,
alors la densité d’états est
d3 rd3p
h3
si on considère les conditions de la limite classique vérifiées, alors le nombre moyen d’occupation des états est donné par la distribution de Maxwell-Boltzmann Nλ = e−β(ǫλ −µ) .
Comme
P il a été indiqué précédemment, dans le cas d’un grand nombre de particules
N = λ Nλ = ζeβµ . On en déduit
e−βmv
dN = N
ζ
2 /2
d3 rd3 p
h3
En reportant ζ = V (2πm/h2 β)3/2 , en définissant n = N/V et la distribution f 0 (v) de
Maxwell-Boltzmann à l’équilibre comme dN = f 0 (v)d3 rd3 v alors
m 3/2
mv2
0
f (v) = n
(.19)
exp −
2πkT
2kT
4
le hamiltonien d’une particule individuelle peut se mettre sous la forme h = hP
tr + hen où l’indice
−β(ǫtrλ +ǫenλ )
=
en
désigne
les
autres
formes
d’énergie.
La
fonction
de
partition
s’écrit
alors
ζ
=
λe
P −βǫ P −βǫ
trλ
enλ
e
e
=
ζ
ζ
tr en
λ
λ
5
On définit la longueur d’onde de de Broglie en écrivant que λDB = p/h. On peut en faire une estimation
en reliant p à la température à l’aide de p2 = 3mkT . On obtient alors l’expression utilisée à un facteur
numérique près.
6
3 Gaz de fermions indépendants
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
μ -2kT μ
μ +2kT
Fig. .1: Distribution de Fermi-Dirac à température non nulle.
2.3
Théorème d’équipartition de l’énergie
Soit un système de particules identiques pour lequel les conditions de la limite classique
sont remplies et pour lequel les conditions de l’approximation classique sont satisfaites pour
une forme d’énergie. Supposons de plus que le hamiltonien d’une particule s’écrive sous la
forme
h = ap2m + b
alors la valeur moyenne de ap2m s’exprime comme suit :
R 2
Q
apm exp[−βap2m ] ni=1 dpidqi
kT
2
Qn
=
apm = R
2
2
exp[−βapm ] i=1 dpi dqi
(.20)
2
On obtient un résultat identique avec un hamiltonien de la forme h = aqm
+ b. Ainsi quand
les conditions de la limite classique sont remplies, l’énergie par particule est kT /2 par degré
de liberté apparaissant quadratiquement dans l’hamiltonien. Ceci constitue le théorème de
l’équipartition de l’énergie.
3
3.1
Gaz de fermions indépendants
Facteur de Fermi-Dirac
Le nombre d’occupation N λ , c’est-à-dire le nombre moyen de fermions occupant l’état λ
est donné par (.10). À température nulle, N λ vaut 1 pour ǫλ < µ et vaut 0 si ǫλ > µ. À
température non nulle, on voit que si ǫλ = µ alors N λ = 1/2. De plus si on calcule la dérivée
de la fonction N = 1/[exp β(ǫ − µ) + 1], on trouve une dérivée égale à −1/4kT lorsque ǫ
est égal au potentiel chimique (Fig. .1).
3.2
Gaz libre
Les formules grand canoniques permettent de calculer les valeurs moyennes des grandeurs
thermodynamiques usuelles pour tout système de fermions en contact avec un réservoir de
7
3 Gaz de fermions indépendants
température β et de potentiel chimique µ. Néanmoins, pour les systèmes à grand nombre
de particules, les formules grand canoniques permettent aussi d’obtenir des résultats pour
des systèmes où le nombre de particules est fixé. Le potentiel chimique est alors donné dans
le cas de fermions par la relation implicite suivante
N=
Z
0
∞
1
eβ(ǫ−µ) + 1
ρ(ǫ)dǫ = 4π
2m
h2
3/2
V
Z
∞
dǫ
0
ǫ1/2
eβ(ǫ−µ) + 1
(.21)
où ρ(ǫ) = 4π(2m/h2 )3/2 V ǫ1/2 est la densité énergétique d’états pour des particules de spin
1/2. L’énergie est donnée par
E = 4π
2m
h2
3/2
V
Z
∞
dǫ
0
ǫ3/2
eβ(ǫ−µ) + 1
(.22)
Le grand potentiel J = −1/β ln Ξ est utile pour calculer l’entropie S = −(∂J/∂T )µ,V et la
pression p = −(∂J/∂V )µ,T . On trouve pour les fermions J = −2/3E(V, T ) et p = 2E/(3V ).
3.3
Gaz de fermions à température nulle
Niveau de Fermi
Lorsque la température est nulle, les expressions précédentes se simplifient. Il est par
exemple possible de relier explicitement le potentiel chimique µF à température nulle au
nombre de particules N. En effet, à T = 0
N = 4π
2m
h2
3/2
V
Z
µF
ǫ1/2 dǫ
(.23)
0
On en déduit le potentiel chimique de Fermi ou niveau de Fermi
h2
µF =
8m
3N
πV
2/3
(.24)
Les énergies inférieures à ce nombre correspondent toutes à des états individuels occupés,
les énergies supérieures à des états inoccupés. On introduit aussi une température de Fermi
TF définie comme TF = µF /k.
Pression quantique
De la même manière, on calcule l’énergie d’un gaz de fermions à température nulle :
EF = 4π
2m
h2
3/2
V
Z
µF
0
3
3
ǫ3/2 dǫ = NkTF = NµF
5
5
(.25)
La pression dans un gaz de fermions étant donnée par 2EF /(3V ), on trouve pour la pression
à température nulle
2/3 5/3
2 1 h3
3N
2 NµF
pF =
(.26)
=
15 m 4π
2V
5 V
8
3 Gaz de fermions indépendants
Ce résultat est surprenant. Même à température nulle, il existe une pression non nulle dans
un gaz de fermions. C’est un phénomène purement quantique dû au principe d’exclusion de
Pauli. Les fermions ne pouvant pas être dans le même état, il ne peuvent pas tous avoir une
quantité de mouvement nulle. Il en existe au contraire un grand nombre qui ont une quantité
de mouvement différente de zéro ce qui fait que dans un tel gaz, même à température nulle, il
y aura des chocs contre les parois. Notons que ce phénomène est responsable de la stabilité
des étoiles en fin de vie lorsque la fusion thermonucléaire s’arrête. On a alors une naine
blanche ou une étoile à neutrons.
Points clés
•
•
•
•
Discernabilité et indiscernabilité.
Notion de nombre moyen d’occupation
Limite classique
Equipartition de l’énergie
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