Que faire contre les insectes piqueurs, alors?
Des méthodes éprouvées permettent de lutter contre la nuisance due
aux insectes piqueurs. Au niveau individuel on peut s’habiller de
façon à être moins attirant ou exposé aux piqûres, et utiliser des
répulsifs. Au niveau communautaire, c’est-à-dire au niveau des
villes, banlieues et villages, on peut effectuer un contrôle biologique
des larves de moustiques et de mouches noires.
Pour une meilleure protection individuelle, il faut éviter de
s’habiller avec des couleurs sombres comme le bleu (jeans) et le noir.
Il faut donc préférer les vêtements de couleurs claires comme le
blanc, le jaune et le gris pâle. Lorsque la nuisance est forte il faut
porter des vêtements étanches au cou, aux poignets, à la ceinture et
aux chevilles, et le tissu doit être tissé serré pour empêcher les
mouches de piquer au travers. Dans les cas extrêmes on peut porter
un casque en filet. Les répulsifs les plus efficaces sont à base de
DEET (diethyl-m-toluamide). C’est un produit chimique qu’il faut
utiliser avec précaution, selon les instructions du fabricant, car à
haute dose il peut devenir toxique, surtout pour les enfants. Lorsque
la nuisance est très forte, il est possible de se préparer des “habits
anti-moustiques” avec une formulation à haute concentration de
DEET (plus de 30 %): on choisit des vêtements de coton de couleur
claire (pantalons, coton ouaté avec capuchon) et on imbibe les
poignets, le bord des bas de pantalons, la ceinture et le tour du
capuchon avec la formulation de DEET (on peut aussi utiliser des
formulations spéciales de perméthrine). On diminue ainsi le contact
avec la peau tout en assurant une protection à plus long terme.
Lorsqu’on enlève les habits anti-moustiques, on les range dans un
sac de plastique, ce qui empêche l’évaporation du DEET et permet
de les réutiliser tels quels à la prochaine sortie.
Les insecticides en aérosols et les spirales d’encens (serpentins
fumigènes) sont populaires pour le contrôle des moustiques à
l’intérieur. Les produits les plus efficaces et les moins toxiques pour
l’homme sont à base de pyréthrines (perméthrine, alléthrine, etc..).
Ces substances ont la propriété d’avoir un bon “knock-out” contre
les insectes et donc de les mettre rapidement hors d’état de nuire.
Cependant les vapeurs d’aérosols et la fumée des spirales peuvent
être irritantes et il faut donc minimiser l’inhalation de ces produits
chimiques. Les diffuseurs électriques sont probablement plus
adéquats et moins irritants pour le contrôle des moustiques dans les
pièces peu aérées.
Les chandelles à la citronnelle sont fréquemment utilisées pour
chasser les moustiques le soir. Ces chandelles procurent un éclairage
romantique pour les veillées au grand air, mais leur efficacité est
faible. Une étude récente en Ontario a montré que la réduction des
moustiques est de 42.3%, ce qui n’est certainement pas assez lorsque
la nuisance est forte. Il est probablement plus efficace d’utiliser les
spirales d’encens aux pyréthrines pour le contrôle des moustiques à
l’extérieur.
La meilleure méthode: le contrôle biologique
La méthode la plus efficace, la plus écologique et la plus économique
pour lutter contre la nuisance demeure le contrôle biologique des
larves de moustiques et des larves mouches noires. Le principe de
cette méthode consiste à appliquer un insecticide biologique, le B.t.
H-14 (ou B.t.i.), dans les milieux où se développent les larves, juste
avant qu’elles ne se métamorphosent en mouches. L’ingrédient actif
du B.t. H-14 est un petit cristal de protéines produit par la
fermentation d’une bactérie, le Bacillus thuringiensis var. israelensis.
La formulation de B.t. H-14 utilisée pour le contrôle des larves de
moustiques et de mouches noires se présente comme un liquide à
base d’eau contenant les cristaux de protéines. On applique la
formulation de B.t. H-14 dans l’eau où se développent les larves, et
les cristaux se mélangent à leur nourriture. Cette bactérie est
naturellement présente dans le sol, mais en la produisant en grande
quantité par fermentation on arrive à en augmenter la concentration
au point où elle devient toxique pour les larves d’insectes piqueurs.
Le B.t. H-14 est très sélectif car il n’agit que s’il est avalé par des
larves de moustiques ou de mouches noires. C’est un produit très sûr
parce qu’il n’a pas d’effet sur les autres animaux et qu’il se dégrade
naturellement en quelques jours. Il faut donc appliquer le B.t. H-14
plusieurs fois au cours de l’été pour contrôler les générations
successives de larves de moustiques ou de mouches noires. Les
grands milieux aquatiques sont parfois traités par hélicoptère, mais la
majorité des applications se fait au sol, avec des pulvérisateurs.
Le contrôle biologique des moustiques et des mouches noires avec le
B.t. H-14 requiert un haut niveau d’expertise, un important travail de
planification, et l’obtention de permis auprès des autorités. C’est
pourquoi le contrôle biologique doit être réalisé pour des
communautés et par des experts.
LE#CONTRÔLE#
DES#INSECTES#PIQUEURS:#
MYTHES#ET#RÉALITÉS
par Christian Back, entomologiste médical
Chaque année on apprend par les journaux, la radio, la télévision ou
la publicité qu’il est possible de contrôler la nuisance des insectes
piqueurs par des moyens écologiques, en installant des nichoirs à
hirondelles, des abris à chauve-souris, ou des électrocuteurs de
moustiques. On nous propose aussi immanquablement des “chasse-
moustiques électroniques”. Il est vrai que ces méthodes semblent
écologiques dans la mesure où elles visent à remplacer l’utilisation
d’insecticides chimiques. Mais sont-elles vraiment écologiques et,
surtout, efficaces?
Hirondelles et chauves-souris
La publicité
Les hirondelles et les chauves-souris du Québec se nourrissent
exclusivement d’insectes. On a donc pensé, et depuis longtemps,
qu’en favorisant l’installation de ces insectivores on pourrait
contrôler naturellement les insectes piqueurs. La littérature écologiste
propose donc régulièrement d’installer des “condominiums” à
hirondelles et à chauves-souris. L’entreprise privée a suivi et fait des
promotions publicitaires pour des équipements prêts à utiliser ou à
monter soi-même. On lit dans ces publicités que “l’hirondelle mange
2,000 moustiques par jour, et jusqu’à 14,000 en période
d’abondance”. On lit aussi qu’une chauve-souris “peut manger 3,000
moustiques par nuit” et “se gave de moustiques au rythme de 600 à
l’heure”, et qu’il suffit “d’installer un nichoir de 350 chauves-souris
pour se débarrasser d’un million de bibittes par nuit”. Ces
promotions ne sont pas entièrement désintéressées, et le commerce
propose des nichoirs et abris pour des prix pouvant dépasser la
centaine de dollars (modèle “en acajou du Belize et du Nicaragua
récolté par les Indiens Mayas”).