LE GRAND SECRET DE L’ISLAM
Quatrième partie
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Omar (634-644) et Otman (644-656) : escamoter les judéonazaréens
détruire les documents hétérodoxes. L’expansion militaire complique ce processus au plus haut
point : l’Egypte, perle de l’empire Byzantin, est conquise en 640-642, Séleucie-Ctésiphon tombe
en 641 et les Perses sont vaincus à Nihâvend l’année suivante. D’autre part, le retournement
d’alliance et l’élimination physique des chefs judéonazaréens ne sont pas si faciles à accepter. Ils
compromettent l’unité idéologique et favorisent les divergences. Ils désorganisent les hiérarchies
et tendent à faire perdre l’unanimité fragile que l’oumma présentait encore pour le projet de
conquête de Jérusalem. Naturellement, des chefs, des généraux, des émirs ont dû se rebeller, et
d’autant plus franchement que les succès militaires leur ont permis d’acquérir un grand pouvoir –
d’aucuns sont maintenant gouverneurs des territoires qu’ils ont conquis, hors de portée de
l’autorité somme toute discutable du généralissime des Arabes. Sans judéonazaréens, d’où la
tiendrait-il ? L’escamotage de toute la communauté judéonazaréenne, l’abandon du temple, cette
collecte intrusive des textes, leur réécriture pour en extirper grossièrement le fait judéonazaréen,
bref, l’atteinte à la «religion d’Abraham» que cette opération représente constitue un réel
outrage à ce que des décennies de propagande ont patiemment établi. Un outrage au sens même
des combats, de l’épopée de la conquête de Jérusalem. Un viol des mémoires et même une
atteinte à la volonté de Dieu selon la «religion d’Abraham». Il y a donc naturellement des
incompréhensions, des résistances, des oppositions. C’est ainsi que l’on a refusé l’autorité
d’Omar, qu’on s’est accusé l’un l’autre d’être un munafiq, un traître à la foi... Ce sont là les racines
et le commencement de l’incessante fitna, de la guerre civile qui a ensanglanté l’oumma
pendant des siècles, jusqu’à aujourd’hui. Il n’est dès lors pas étonnant qu’Omar soit rapidement
assassiné en 644, quatre ans seulement après le « non-événement » de Jérusalem.
Otman, chef militaire issu du noyau qoréchite des Emigrés et grand artisan des conquêtes,
s’impose alors face à Ali, autre Emigré, comme nouveau maître de Médine. Devant la
contestation, alors que l’oumma s’englue dans le bourbier des manipulations religieuses et de la
guerre civile, il saisit les enjeux et les leviers du contrôle du pouvoir religieux. Il poursuit la
stratégie d’effacement du judéonazaréisme comme source de la religion des conquérants
arabes, et l’ostracisation consécutive de la communauté judéonazaréenne de Syrie. Mais surtout,
il entreprend la reprise en main politique et idéologique de l’oumma.
Cette reprise en main se révèle d’autant plus nécessaire qu’au delà même de la fitna, la
«religion d’Abraham» est aussi contestée par les Juifs et les chrétiens. Bien que
conquis militairement, ils ne sont pas dupes devant les justifications religieuses avancées par les
Arabes pour leur domination. Ils ont à l’appui de leurs religions ancestrales des livres sacrés
savamment constitués, ce qui manque encore à Otman. Il lui faut donc absolument un livre pour
établir son pouvoir et les prétentions de la «religion d’Abraham» à tout dominer par son
entremise. Pour cela, il faut travailler la logique et la cohérence que l’élimination des
judéonazaréens a considérablement affaiblies. Le but initial était, rappelons-le, de sauver le
monde en faisant revenir le messie, et d’établir les membres de l’oumma comme élus et maîtres
du nouveau monde à venir ; les moyens consistaient à conquérir Jérusalem sous l’autorité des
judéonazaréens, y relever le temple, pour que les chefs judéonazaréens y réalisent les rites qui
auraient dû faire revenir le messie, ce qui avait piteusement échoué. Mais qu’à cela ne tienne, le
projet tient toujours. Et il doit d’autant plus tenir qu’il justifie avantageusement la domination des
nouveaux conquérants. A moins que ce ne soit l’inverse ? A moins qu’il ne faille absolument
établir une justification religieuse à la domination des Arabes et à leur conquête du monde qui se
poursuit ? Les deux logiques se recoupent de toute façon, pour le plus grand bénéfice d’Otman.
Avec ses scribes et ses conseillers, il poursuit donc la manipulation de la religion qui doit
absolument le légitimer et travaille à lui donner une nouvelle cohérence qui oriente la volonté de
Dieu dans son sens. Un travail de démolition et de reconstruction à partir des débris... Car on ne
peut certes pas asservir ad libitum toute la «religion d’Abraham», et avec elle la volonté de Dieu,
qui est l’objet même de la religion. Il faut faire avec les fondamentaux. Le messie reviendra à la fin
des temps : cela on ne peut le renier, c’est l’espérance ultime. Mais si Dieu n’a pas voulu que
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