Thème 1 : Terre dans l'univers, la vie et l'évolution du vivant Partie B - Le domaine continental et sa dynamique Chapitre 6 - Les caractéristiques du domaine continental ● Dès sa mise en évidence par Wegener la répartition bimodale des altitudes en surface de la Terre suggère que la croûte terrestre est divisée en deux domaines distincts: la croûte océanique et la croûte continentale. L'étude se focalisera sur les continents. Il s'agira de dégager les caractéristiques de la lithosphère continentale et d'en comprendre son évolution. I. La densité de la croûte continentale et la notion d'isostasie A. Les roches de la croûte continentale et leur densité ● Il existe une grande diversité de roches continentales visibles en surface. On distingue des roches magmatiques volcaniques (basaltes, rhyolites, trachytes, andésites...) des roches magmatiques plutoniques (granites, diorites, granodiorites...), des roches sédimentaires (calcaires, marnes, argiles, grès...) ou métamorphiques (gneiss, ardoises, marbres, schistes métamorphiques, éclogites...). ● Néanmoins, le socle de la croûte continentale est essentiellement constitué de roches voisines du granite et du gneiss. ● La différence de composition minéralogique entre les roches de la croûte continentale et celle de la croûte océanique explique les différences de densité : la densité moyenne de la croûte continentale est de l’ordre de 2,7 alors que celle de la croûte océanique est proche de 3 et celle du manteau supérieur de 3,3 (péridotite). B. L'équilibre isostatique de la lithosphère ● Du fait des différences de densité entre la lithosphère et l'asthénosphère sous-jacente, la lithosphère peut être affectée de mouvements verticaux consécutifs à la mise en place ou la disparition d'une surcharge. Ainsi, en Scandinavie, on observe actuellement un soulèvement de la lithosphère, qui fait suite à la fonte d'une calotte glaciaire entre -15000 et -7000 ans. ● Ces mouvements attentent de la rupture provisoire d'un équilibre entre la lithosphère et l'asthénosphère: la lithosphère, rigide et cassant, repose en équilibre sur l'asthénosphère, plus ductile et plus dense. II. L'épaisseur de la croûte continentale et les reliefs continentaux ● Les études de la propagation des ondes sismiques permet de localiser la discontinuité de Mohorovičic et de déterminer l'épaisseur de la croûte continentale. ● Epaisse de 30 km en moyenne, la croûte continentale est plus mince au niveau des marges passives, et s'amincit à mesure que l'on s'approche de la croûte océanique. ● L'épaisseur de la croûte continentale est accrue au niveau des reliefs montagneux (jusqu'à 70 km). Cet épaississement est lié à la présence d'une racine crustale en profondeur. En effet comme le laissait penser l'un des modèles de l'équilibre isostatique, l'excès de masse représenté par la chaîne de montagnes est compensé en profondeur par la "racine crustale" moins dense que le manteau. ● Reste à comprendre comment, dans ces régions, la croûte continentale s'est épaissie au point d'ériger des reliefs de plusieurs kilomètres, qui surmontent les racines profondes. 1/6 III. Des indices tectoniques et pétrographiques de l'épaississement crustal ● Sous l'effet des contraintes liées au déplacements de ces plaques, les roches ont subi des déformations ou des déplacements parfois considérables avec pour conséquence l'érection de chaînes de montagnes. ● Divers indices de terrains révèlent les contraintes compressives dans de tels contextes tectoniques. A. Des indices tectoniques ● Les plis, qui affectent les séries sédimentaires, témoignent d'une déformation souple et permettent de repérer la direction générale des contraintes, perpendiculaire à l'axe des plis. ● Les failles inverses sont des indices de déformation cassante et traduisent un raccourcissement local. ● Les nappes de charriage résultent d'un déplacement important sur de longues distances (sous l'effet de contraintes tectoniques compressives), de formations géologiques qui viennent chevaucher d'autres formations en place. Il en résulte des empilements complexes, où des roches initialement très éloignées se retrouvent en "contact anormal". C'est d'ailleurs le constat de telles anomalies qui permet de repérer ces formations "voyageuses". B. Des indices pétrographiques ● Au niveau des chaînes de montagnes, l'épaississement de la croûte continentale est lié au raccourcissement et aux empilements imposés par les contraintes tectoniques. Les roches crustales subissent les conséquences de ces conditions nouvelles. Les roches sont ainsi soumises à des conditions de températures et de pressions importantes. ● On observe alors des roches métamorphiques, c'est à dire des roches qui ont subi des transformations à l'état solide sous l'effet de changement de température et de pression. Outre les modifications de texture des roches (apparition de schistosité, de foliation), on peut observer la cristallisation de nouveaux minéraux. La composition chimique globale de la roche reste stable mais les minéraux se transforment progressivement: les minéraux stables sous certaines conditions ne le sont plus lorsque pression et température varient et interagissent chimiquement pour donner de nouveaux minéraux. ● Si la température s'élève encore plus, une partie de la roche métamorphique peut entrer en fusion et donner naissance localement à une lentille de magma. Ce phénomène de fusion partielle constitue ce que l'on nomme l'anatexie. C'est ainsi que l'on observe des migmatites, c'est-à-dire des gneiss contenant des lentilles granitiques. 2/6 IV. L'âge de la croûte continentale ● La radiochronologie permet de dater la croûte continentale. Cette méthode s’appuie sur la désintégration d’isotopes radioactifs naturels. Elle fait partie des méthodes de datation absolue qui attribuent un âge en années aux « objets géologiques ». ● La croûte continentale présente des roches d'âges variés, parfois supérieur à 4Ga. Remarque: On sait que la croûte océanique est recyclée en permanence: la croûte océanique ancienne devenue trop dense, sombre inexorablement dans le manteau au niveau des zones de subduction. Ainsi, on ne connaît pas de croûte océanique d'âge supérieur à quelques 200Ma. A. Principe général de la radiochronologie ● La radiochronologie permet de date la croûte continentale. Cette méthode s’appuie sur la désintégration d’isotopes radioactifs naturels. Elle fait partie des méthodes de datation absolue qui attribuent un âge en années aux « objets géologiques ». Lors de la cristallisation d'un magma, les minéraux incorporent différents isotopes d'éléments chimiques dont certains isotopes naturels radioactifs. Ceux-ci ont la capacité de se désintégrer spontanément en élément(s) plus stable(s). Cette désintégration s’accompagne de l’émission de rayonnements : α, β, γ… L’isotope radiogénique d’origine constitue l’élément « père » (N0 ou P), il se transforme en élément « fils » (Nt ou F). Les spectromètres de masse permettent de déterminer les quantités respectives de ces éléments dans un échantillon donné. Les transformations en éléments « fils » s’effectue régulièrement au cours du temps selon une loi exponentielle du temps : Nt = N0 e-λt Avec : N0 : nombre initial d’atomes de l’isotope « père » Nt : nombre d’atomes de l’isotope « père » à l’instant t λ : constante de désintégration de l’élément radioactif t : temps de désintégration ● Cette relation exponentielle indique que, quelle que soit la quantité d’éléments « père » présente à un instant donné, il faut toujours le même temps pour que cette quantité soit divisée en deux : cette durée est caractéristique de l’élément considéré s’appelle la période radioactive ou période de demi-vie. Quand (N0 / Nt )= ½ c’est-à-dire quand il reste moitié moins de l’isotope « père » qu’à l’instant initial, on a : ln (½) = - λT d’où : T = ln 2 / λ ● La mesure des quantités relatives entre les deux éléments permet de dater le début du processus de désintégration. Si ce processus a débuté au moment de la mise en place de la roche, du minéral, ce temps correspond à celui de l’échantillon. ● Les conditions de validité des mesures : - la constante λ doit être connue avec précision ; - le système doit rester en permanence fermé (ni apport de l’extérieur, ni fuite). Par exemple : - pour une roche plutonique : la fermeture du système au moment où la cristallisation est achevée (souvent longue) ; - pour une roche volcanique : la fermeture du système est plus rapide car le refroidissement est plus rapide ; - pour une roche sédimentaire : système rarement fermé. 3/6 B. Etude du géochronomètre « Rubidium/Strontium » ● Cette méthode est complexe car on ne connaît ni P 0, ni F0 et on n’a aucun moyen de les connaître ... La méthode Rb-Sr est utilisée pour dater les roches magmatiques comme les granites ; en effet, au moment de la cristallisation d’un magma, les minéraux comme les micas, les plagioclases, l’orthose incorporent dans leur réseau cristallin une certaine quantité de 87Rb ; la quantité de 87Rb et de Sr dans chaque minéral d’un granite dépend donc de sa composition chimique. ● Le Sr existe sous deux formes isotopiques : 87Sr et 86Sr qui sont incorporés indifféremment : leur proportion dans les minéraux ne dépend pas de la composition chimique de ceux-ci mais de la proportion de 87Sr et de 86Sr dans le magma. Les minéraux d’un granite se formant tous à partir du même magma, ils ont tous la même proportion initiale de 87Sr et de 86Sr. Illustration des rapports isotopiques dans 3 minéraux différents (M1, M2, M3) d'un granite lors de leur cristallisation ● Après la cristallisation qui correspond au moment to, le 87Rb qui est radioactif se désintègre en donnant du 87Sr (T = 48,8.109 ans et λ = 1,42.10-11.an-1). Les quantités de 87Rb et de 87Sr se modifient donc au cours du temps dans chacun des minéraux : la quantité de 87Rb diminue alors que celle de 87Sr augmente. La quantité de 87Sr à un instant t est égale à la quantité initialement emprisonnée dans le minéral à laquelle s’ajoute la quantité issue de la désintégration du 87Rb. La quantité de 86Sr quant à elle ne change pas au cours du temps. Ces modifications font que dans chacun des minéraux le rapport 87 86 87 86 ( Rb / Sr) diminue alors que le rapport ( Sr / Sr) augmente. Illustration de l'évolution des rapports isotopiques dans les 3 minéraux au cours du temps après la cristallisation. ● Sur le graphe, les 3 points « se déplacent » mais restent alignés car la quantité d’atomes radioactifs désintégrés pour une durée donnée dépend de sa quantité initiale (Pt = P0 . e -λt). La droite obtenue est appelée droite isochrone (iso = même, chrone = âge). 4/6 ● Cette droite est la représentation graphique d’une fonction qui peut s’exprimer sous la forme y = a.x + b où a est le coefficient directeur de la droite. La valeur de a, qui est la pente de la droite, peut être déterminée graphiquement. Elle dépend du temps écoulé depuis que 87Rb a commencé à se désintégrer (depuis to). Par le calcul on montre que a = (e λt ) – 1 ce qui permet de déduire que: t = ln(a+1)/ λ ● Concrètement, lorsque l’on veut connaître l’âge d’un granite (ou d’une autre roche magmatique) par la méthode Rb-Sr, il faut donc mesurer grâce à un spectromètre de masse les quantités de 87Rb, 86Sr et 87Sr dans plusieurs minéraux de la roche puis calculer les rapports (87Rb / 86Sr) et (87Sr / 86Sr) chacun des minéraux afin de tracer le graphe (87Sr / 87Sr) en fonction de (87Rb / 86Sr). ● Si les mesures sont suffisamment précises, on obtient une droite, appelée droite isochrone, à partir de laquelle il est possible de déterminer t : celui-ci est d’autant plus important (et donc la roche plus âgée) que la pente de la droite est élevée. 5/6 Définitions : - granite (n.m.; ital. granito, grenu) : roche magmatique plutonique grenue dont les minéraux principaux sont les feldspaths (orthose et/ou plagioclase), le quartz; les minéraux accessoires et secondaires sont très variés, les micas, l'amphibole, tourmaline... - gneiss (n.m) : roche métamorphique à grain moyen ou grossier, à foliation souvent nette caractérisée par des lits généralement de teinte sombre, riches en minéraux ferromagnésiens (micas, amphiboles...) alternant avec des lits clairs (blancs, gris, rosés) de quarts et de feldspaths, ces derniers nombreux et souvent visibles à l'oeil nu. - isostasie (n.f.; gr. stasis, immobilité, équilibre): état d'équilibre de la lithosphère sur la l'asthénosphère; équilibre réalisé à une profondeur dite profondeur de compensation. - ductile (adj.; lat. ductilis, mallélable) : qui peut s'étirer sans se rompre. Ant. cassant; - discontinuité de Mohorovičic, dite « MOHO » : surface de discontinuité au sein de la lithosphère qui sépare la croûte et le manteau. Sous les océans elle est située entre 0 et 15 km de profondeur ; sous les continents elle est située entre 30 et 70 km. - marge continentale (n.f; lat. margo, marginis, rebord) : région immergée de la bordure d'un continent faisant le raccord avec les fonds océaniques. On distingue les marges continentales passives, où le passage de la croûte continentale à la croûte océanique se fait au sein de la même plaque lithosphérique, et les marges continentales actives, où la croûte océanique s'enfonce par subduction sous la croûte continentale. - pétrographie (n.f., gr. petra, pierre; graphein, écrire) ; synonyme de pétrologie (n.f., logos, discours, parole) : sciences des roches, comprenant leur description (pétrographie, stricto sensu), leur classification et l'interprétation de leur genèse. - métamorphisme (n.m., de méta et du gr. morphê, forme) : transformation d’une roche à l’état solide du fait d’une élévation de température et/ou de pression, avec cristallisation de nouveaux minéraux, dits néoformés, et acquisition de textures et structures particulières, sous l'effet de conditions physiques (et/ou chimiques) différentes de celles ayant présidé à la formation de la roche originelle. - schistosité (n.f) : feuilletage plus ou moins serré présenté par certaines roches, acquis sous l'influence de contraintes tectonique, distinct de la stratification, et selon lequel elles peuvent se débiter en lames plus ou moins épaisses et régulière. - foliation (n.f.; lat. folium, feuille) : structure visible dans certaines roches métamorphiques où, à la schistosité, s'ajoute une différenciation minéralogique entre des différents lits (aspect rubané). - anatexie (nf.; gr anatêksis, fusion): processus par lequel des roches métamorphiques, soumises à des températures de plus en plus fortes, subissent une fusion partielle donnant des migmatites. - radiochronologie (n.f.; de radioactif et, du gr. khronos, temps; logos, discours): ensemble des méthodes de datation des minéraux ou des roches fondées sur l'étude de leurs éléments radioactifs et de leurs produits de désintégration. - isochrone (n.f.; gr. khronos, temps) : en radiochronologie, droite dont la pente permet de dater un évènement isotopique. Je dois être capable : - de définir le vocabulaire spécifique ; - d'expliquer les caractéristiques lithologiques et physiques des roches de la lithosphère et de l'asthénosphère; - exploiter des modèles pour expliquer la notion d'isostasie; - de déterminer la profondeur du Moho; - de recenser différents indices révélant l'épaississement de la croûte continentale; - de déterminer un âge en utilisant la méthode de la droite isochrone Sources: - Bordas, SVT, Term.S, enseig. spécifique, collection C. Lizeaux, D. Baude, programme 2012 - Belin, SVT, Term.S, enseig. spécifique, collection A. Duco, programme 2012 - Dictionnaire de géologie, A. Foucault, J.F. Raoult, 4è édition, édition Masson - Académie en ligne, terminale S, programme 2002, Séquence 4-SN02, p.137-138 6/6