LISRA - Questions fréquentes sur la recherche-action -1-
Questions fréquentes
sur la recherche-action
TOUT CE QUE VOUS AVEZ VOULU SAVOIR SUR LA RECHERCHE-ACTION SANS OSER LE DEMANDER !
Les questions fréquentes sont celles que nous rencontrons dans une implication personnelle ou lors de la mise
en place d'espaces de travail. Voici quelques éléments de réponse aux attentes des acteurs qui voudraient
s'approprier une démarche de la recherche-action. Si votre question n'est pas représentée, contactez-nous sur
http://labo.recherche-action.fr (Les mots suivis d’un « * » renvoient au glossaire en fin de document).
Sommaire
La recherche-action et son époque .................................................................................................................... 2
La recherche-action n’est-elle pas un outil daté, en quoi est-ce encore aujourd’hui une réponse pertinente ? . 2
Quels sont les secteurs d’activités et les probmatiques concernées par la recherche-action ? ....................... 2
Comment répondre à la complexité des situations contemporaines ? ............................................................. 3
La recherche-action et l’engagement................................................................................................................. 4
Comment sais-je que je suis « en recherche-action » ? ................................................................................... 4
Tout le monde peut-il faire de la recherche-action ou faut-il être chercheur professionnel ? ........................... 4
Faut-il une formation et des compétences particulières ? ............................................................................... 5
En quoi les acteurs sur le terrain peuvent-ils trouver un intérêt à la recherche-action ? ................................... 5
Comment l’engagement en recherche-action peut-il être reconnu professionnellement ? ............................... 6
Le déroulement d’une recherche-action ............................................................................................................. 7
Comment débuter une recherche-action ? ..................................................................................................... 7
Comment dégager des problématiques de travail ? ....................................................................................... 8
Qu’est-ce qu’un « chercheur collectif » ? ........................................................................................................ 9
Quand et comment peut-on estimer une recherche-action « réussie » ? ....................................................... 10
La recherche-action et la science ..................................................................................................................... 11
Est-ce qu’il existe plusieurs écoles ou courants de la recherche-action ? ....................................................... 11
Quelle est la posture de « l’acteur-chercheur » : plus de la recherche ou plus de l’action ? ............................ 12
La recherche-action est-elle une vraie science ou simplement une méthodologie d’action ? .......................... 13
Glossaire ......................................................................................................................................................... 14
LISRA - Questions fréquentes sur la recherche-action -2-
La recherche-action et son époque
La recherche-action n’est-elle pas un outil daté, en quoi est-ce encore aujourd’hui une
réponse pertinente ?
Le terme recherche-action est souvent renvoyé aux années 70, une époque où les corps professionnels,
particulièrement ceux de l’éducation, de la santé, du travail social, cherchaient des réponses alternatives aux
pratiques institutionnelles.
Rappelons premièrement que la recherche-action est plus ancienne. Elle est issue de la Seconde Guerre
mondiale (années 40/50). Des chercheurs progressistes aspiraient à une autre vision du monde où les sciences
humaines et sociales pouvaient jouer un rôle. Il existe donc plusieurs générations de chercheurs en recherche-
action. S’il y a des fondateurs, il n’y a pas de « maître à penser » mais des mouvements scientifiques de
consciences qui s’approprient cet ritage collectif pour répondre aux questions de leur époque comme nous le
faisons aujourd’hui.
Le principe de recherche-action se conjugue toujours au pluriel, réactualisé par différents acteurs
contemporains. La recherche-action n’est pas une simple méthodologie (comme un outil qui se transmet de
génération en génération) mais un processus qui forge ses propres outils en fonction des contextes, il n’y a donc
pas obsolescence d’une démarche mais une reconstruction permanente.
L’approche en recherche-action repose principalement sur l’idée que pour connaître une réalité sociale, il faut
participer à sa transformation. Elle est donc toujours pertinente dans les moments de profondes
transformations lorsque les repères habituels sont bouleversés. C’est le cas dans nos sociétés contemporaines.
Parce qu’elle expérimente dans la vie réelle, elle ne craint ni d’étudier la complexité*, ni de se plonger au cœur
des problèmes sociaux : quand le monde n’est plus pensable, la recherche-action apparaît alors comme mode
intelligible et évident de le penser autrement.
La recherche-action est performante dès qu’il s’agit de travailler sur des situations inextricables, des
dynamiques multidimensionnelles, interdisciplinaires*, des systèmes d’interactions : relations
économie/développement, espaces/territoire, précarité/innovation sociale*, citoyenneté/gouvernance,
art/social…
Quels sont les secteurs d’activités et les problématiques concernées par la recherche-
action ?
Historiquement la recherche-action a été portée par les approches de la dynamique de groupe* au sein des
entreprises et des institutions (psychosociologie, analyse institutionnelle), les modalités d’apprentissage dans le
système scolaire (sociologie de l’éducation).
Travailler avec des groupes restreints en milieu fer facilite la maîtrise des paramètres d’une expérimentation
et son évaluation : profil commun des acteurs, repérage des difficultés et constitution d’une problématique*
commune, intégration de la recherche-action dans l’environnement de travail, visibilité directe des effets de
l’expérimentation, etc.
Néanmoins, il est tout à fait possible de construire une recherche-action en « milieu ouvert ». Cela demande
évidemment d’autant plus de rigueur et de précision.
LISRA - Questions fréquentes sur la recherche-action -3-
Il n’y a pas a priori de domaines et de problématiques qui échappent à la recherche-action. La faisabilité n’est
pas une question de contenu mais de processus*. Elle ne peut émaner que d’acteurs en mouvement, dans la
conscience d’un état de recherche. Toute la force de la recherche-action réside dans son potentiel de
développement et de transformation.
C’est pour cette raison que les problématiques touchant au développement humain et social sont
particulièrement conceres (éducation, santé, éducation populaire, culture, travail social, économie solidaire,
coopération Nord-Sud, etc.).
Il est donc aussi logique que les acteurs qui animent la recherche-action partagent également les mêmes
valeurs : l'esprit de coopération et de responsabilité sociale, de mocratie participative, de reconnaissance des
droits individuels et culturels…
Comment répondre à la complexité des situations contemporaines ?
La recherche-action est une science de la complexité* parce que les situations humaines sont complexes, ce qui
ne veut pas dire que son abord est compliqué. Les acteurs sur le terrain posent naturellement une cohérence
dans leur manière d’appréhender leurs situations de vie. Ils les abordent globalement (holisme*) et adoptent
logiquement cette approche des systèmes dynamiques (systémique*). La complexité qualifie donc la manière
dont nous prenons en compte les situations humaines.
Penser que la résolution des problèmes passe par leur simplification conduit bien souvent à une impasse. Dans
ce sens, la recherche-action s’oppose à la parcellisation des actions et des savoirs, à l’ordre hiérarchique des
compétences, à la verticalité des programmes et à la linéarité des projets.
En d’autres termes plus savants, la démarche holistique s’oppose à la démarche analytique classique qui sépare
les éléments d’une situation, nous estimons que la connaissance des situations implique une compréhension
globale qui s’affine progressivement par approximations (série d’évaluations* approchées) et
expérimentations*.
Les modes habituels de conception (séparation action/recherche), d’organisation (séparation en disciplines), de
financement (séparation en champs d’activité) provoquent des cassures, des « chaînons manquants » dans les
processus* de production de connaissance et de transformation sociale. Car bien souvent toutes les ressources
sont monopolisées pour résoudre les probmes générés par la sectorisation institutionnelle plutôt que de
s’attacher aux réels problèmes que nous renvoient les situations socioprofessionnelles.
La recherche-action peut se comprendre ici comme une « science radicale », non dans un aspect militant ou
comme opposition bornée aux appareils institutionnels ; c’est une radicalité scientifique dans le sens où la prise
en compte de la complexité exige dans notre manière de penser et d’agir une rupture autant sur le plan de la
production de connaissance (épistémologie*) que de l’existence.
Cette « intelligence des situations* » n’hésite pas à s’appuyer sur des dynamiques habituellement considérées
comme « non-construites » parce que non ordonnées : organisation non formelle, système du chaos, zones de
conflits, etc. Ce sont des principes fondamentaux de la vie, du mouvement et de la démocratie. Non seulement
cela n’est pasgatif, mais cela peut être considéré comme un exercice à la citoyenneté, à la régulation des
rapports sociaux et à une refondation des modes de participation à la société.
LISRA - Questions fréquentes sur la recherche-action -4-
La recherche-action et l’engagement
Comment sais-je que je suis « en recherche-action » ?
Bien souvent nous sommes en recherche-action sans le savoir, car nous n’avons pas au début mis un nom sur
cette démarche. C’est ensuite par la rencontre et les échanges avec d’autres personnes partageant les mêmes
préoccupations et le même mode d’implication que l’on prend conscience de ce qui nous anime.
Lorsque nous sommes confrontés à un problème apparemment insoluble, des conditions de vie difficiles, des
cadres socioprofessionnels figés, nous commençons par opérer un travail réflexif* comme l’autobiographie
raisonnée où l’on prend sa propre exrience comme matériaux de recherche. Difficile de faire de la recherche-
action sans être clair avec soi-même, ce travail réflexif est incontournable.
Puis, nous imaginons in vivo de nouvelles méthodes (ethnométhodes*) pour répondre au contexte, par exemple
par la pratique empirique* de l’expérimentation*. Ainsi s’acquiert progressivement par l’autoformation* un
outillage méthodologique et théorique.
La recherche-action n’est donc pas une doctrine qui s’enseigne en tant que telle dans les livres ou les écoles,
même s’il existe des livres et des formations s’appuyant sur la recherche-action. C’est tout d’abord une prise de
conscience et un mode d’implication.
Tout le monde peut-il faire de la recherche-action ou faut-il être chercheur professionnel ?
Si vous rencontrez quelqu’un qui se présente comme un « professionnel » de la recherche-action, alors c’est qu’il
n’est pas en recherche-action ! On ne peut revendiquer un statut en recherche-action puisqu’elle est la
conséquence d’une transformation de la réalité en commençant par soi-même, la reconnaissance ne peut venir
que d’un work-in-progress*, non d’une posture corporatiste.
La recherche-action n’est donc pas une profession avec un outillage d’« expert » ou de « consultant », puisque la
connaissance n’est pas le produit d’une étude sur la réalité. C’est une démarche traversant nos différents
investissements : on est chercheur-acteur à travers d’autres choses (travailleur social et/ou artiste et/ou
bénévole et/ou formateur et/ou rmiste, etc.)
La confusion vient du fait que des professionnels chercheurs ou experts utilisent le mot « recherche-action »
pour qualifier une modalité d’intervention, une méthode d’investigation. Ils devraient plus justement qualifier
leurs postures « intervention sociologique », « intervention psychosociale », etc., suivant les disciplines et les
courants scientifiques auxquels ils appartiennent.
Cette facilité ou abus de langage aboutit à un contre-sens lorsque la « recherche-action » nomme une
intervention où un professionnel arrive sur un « terrain » pour faire une étude impliquant quelques acteurs.
Participer à une action et y réfléchir n’est pas suffisant pour prétendre être en recherche-action. En recherche-
action il n’y a pas de « terrain » mais des situations*. L’exigence de produire une connaissance doit être
nécessairement portée par les acteurs qui sont en quelque sorte « commanditaires ».
La recherche-action répond à des critères scientifiques mais cela ne veut pas dire qu’elle est destinée à la seule
corporation scientifique où le chercheur « officiel » est le seul capable de décoder la réalité dont le commun des
mortels ne peut percevoir la structure.
Néanmoins, un chercheur professionnel peut bien entendu aussi être « chercheur-acteur ». Il peut alors jouer un
rôle d’impulseur, de facilitateur, d’évaluateur pour une mise en espace public d’un problème, mais ce sont tous
LISRA - Questions fréquentes sur la recherche-action -5-
les acteurs en situation* et en temps réel qui sont porteurs du processus* : ils posent le cadre et la
problématique* de travail, les outils d’expérimentation* et d’évaluation*.
Dans ce travail en situation, les problématiques et leurs résolutions émergent dans une mise en relation
collective horizontale et interdisciplinaire*. Nous parlons alors de chercheur collectif* : acteurs, chercheurs et
autres protagonistes croisent leurs regards et leurs compétences en fonction des besoins de chacun, des
problèmes à traiter et produisent un changement pour tous selon des connaissances généralisables et
accessibles à tous.
Faut-il une formation et des compétences particulières ?
Il ne faut pas de compétences ou de formations initiales spécifiques si nous considérons que les solutions ne sont
pas plus du domaine de « l’expert » et que la connaissance n’est pas la chasse gardée du « savant ». Pour ces
mêmes raisons, il n’y a pas de techniciens en recherche-action qui procurent un savoir techniciste.
Le savoir-faire et le savoir être de la recherche-action est avant tout une manière de concevoir son rapport aux
autres et au monde. Cela débute toujours par une prise de conscience de sa propre situation
socioprofessionnelle.
Il n’existe pas de formation « en » recherche-action mais des formations « par » la recherche-action.
Effectivement, la recherche-action n’est pas une discipline académique qui s’enseigne mais un processus qui est
toujours lié à une transformation individuelle et sociale. C’est une métaformation en ce qu’elle apprend à
apprendre. Il n’y a donc pas de scialiste en recherche-action ni de profils d’acteurs types susceptibles d’y
participer.
La recherche-action demande avant tout une certaine sensibilité et intelligence des situations, une envie de
connaissance. L’intelligence n’est pas uniquement « intellectuelle », elle est aussi pragmatique* dans cette
manière aiguë de percevoir la réalité et dans la conscience de son positionnement dans la société. Elle pose un
rapport entre le sensible et l’intelligible, le populaire et le scientifique, la réflexion et la pratique.
Ainsi, c’est surtout par l’autoformation* et un réseau de compagnonnage que se constitue la base structurante.
La recherche-action peut être comparée à ce titre à une architecture fluide* par rapport aux formes
académiques et instituées de l’apprentissage. Modifier la réalité sociale afin de la connaître est sans doute le
principe fondamental qui procure à la recherche-action la force de cette mise en mouvement originale.
En quoi les acteurs sur le terrain peuvent-ils trouver un intérêt à la recherche-action ?
La recherche-action ne fait pas du conseil en stratégie ou de la méthodologie de projet. Elle n’apporte pas de
réponses clefs en main et n’offre pas de solutions opérationnelles immédiates. Si c’est ce type de réponse qui est
attendue, il vaut mieux s’inscrire dans une logique de consulting.
La recherche-action souligne et renforce les compétences transversales aux secteurs d’activité. Ce qui permet
plus facilement de se dégager des contraintes subies pour être force de proposition (proaction*).Il ne s’agit pas
simplement d’améliorer ses actions, mais aussi contribuer à un mieux-être ensemble, des organisations plus
démocratique.
Des acteurs adhèrent à ce processus* de recherche-action, parce qu’ils sont eux-mêmes dans un mouvement
réflexif* de questionnement, une éthique de l’engagement (coopération, mutualisation, don, etc.).
Entrer dans un cycle de connaissance (mise à distance) et résoudre un problème concret (implication en
situation) sont deux postures qui ne s'opposent pas mais entrent en synergie. L’optimisation stratégique de
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