2001.2009. Entre la première reconnaissance institutionnelle de la
scène de Boulazac et celle, nationale et déjà célébrée ce jour se
sont écoulées 9 années, ou plutôt saisons, car c’est de culture et de
spectacles qu’il s’agit ici. Cette belle tranche de vie peut nous
indiquer que le temps institutionnel n’est pas obligatoirement le
même que celui de la création ou que celui qui rythme l’activité d’un
centre culturel, situé à Boulazac, dans l’agglomération de Périgueux,
en Dordogne. Elle nous signifie surtout que ces neuf saisons sont
celles des Arts sauts, de Johann le Guillerm, de Jérôme Thomas, du
GdRA, de Mathurin Bolze. Aux côtés des arts du cirque, ce furent
également des saisons qui ont vu éclore des jeunes talents ou vécu
en direct la confrontation avec des grands noms du théâtre, de la
musique ou de la danse. Rappelons-nous les Tchekhov de Lacascade,
La Religieuse d’Anne Théron, Patrice Chéreau, l’immense Jacques
Bonnaffé, Dominique Blanc ou les danses engagées de Farid’O ou
de Peeping Tom. Chacun de ces projets a participé à cette
reconnaissance, l’a construite autant que les seules créations
circassiennes. Le cirque n’est pas seul, n’est pas fétichisé. Sur scène,
la porosité avec les arts frères comme la revendication d’une
technique unique sont des faits admis et salutaires : l’idée de culture
et des arts résiste alors à une double définition, celle d’un monde
d’objets hérités et bridés par le testament, et celle du nécessaire
métissage. Au cœur de ce projet, cette pluridisciplinarité ouvre sur
une saison, voyageant librement parmi des œuvres du répertoire
ou contemporaines. Les Corses d’A Filetta, la voix jazz de la franco-
béninoise Mina Agossi ou la danse flamenco sublimée par
Aurélien Bory voisinent avec une relecture savoureuse de Pagnol par
des Flamands et de Molière par Bérangère Jannelle. Jean-Louis
Trintignant vient célébrer la poésie du XXesiècle avec Desnos, Vian
et Prévert et Anne Conti rend hommage à toutes les femmes
avec un auteur de notre siècle. Et le cirque de cette saison, peut-être
un peu plus légitime que les années précédentes, ne rentre pas
pour autant dans le rang. Malgré le label et l’institutionnalisation qui
va avec, le CirkVOST, AOC et tous les autres continuent sur les pistes
à surprendre, émouvoir, faire rire et rassembler.
FRÉDÉRIC DURNERIN, Directeur