Sur les précipitations extrêmes, le changement est subtil mais déjà mesurable”. Il ajoute que “la région subit
des records d’inondations et, paradoxalement, des sécheresses intenses en quantité grandissante ces dernières
décennies”. L’étude est encore plus précise en révélant que si les précipitations extrêmes augmentent, la
quantité totale d’eau déversée annuellement diminue régulièrement. Depuis les années 1950, le nord de
l’Europe subit une augmentation de la quantité d’eau des précipitations moyennes annuelles. Par contre, cette
moyenne a diminué jusqu’à 50 mm de précipitations dans la région bordant la Méditerranée. La plupart des
canicules extrêmes observées en Méditerranée et associées à des sécheresses ont eu lieu ces 15 dernières
années. Ces conclusions ne font que corroborer les prévisions de tous les modèles climatiques régionaux qui
affirment que les sécheresses vont augmenter en nombre et en sévérité. Et si ces phénomènes sont les plus
visibles, le changement climatique, et notamment la montée des eaux qu’il engendre, auront des impacts plus
nuisibles. Ils redessineront de nombreuses côtes des deux continents, l’Europe et l’Afrique. Ces phénomènes
extrêmes suivent le schéma de “Plus l’air se réchauffe, plus il s’humidifie” (loi de Clausus-Klapayron). En
d’autres termes “si l’atmosphère est capable de contenir plus d’eau sous forme de vapeur, elle va en relâcher
beaucoup plus lorsqu’elle va la condenser”.
Les facteurs locaux plaident pour une plus grande dégradation
En plus du réchauffement climatique global, d’autres facteurs anthropiques (causés par l’homme) plaident
jusque-là pour une plus grande sévérité des phénomènes extrêmes que sont les canicules, les sécheresses et
les inondations. La déforestation alarmante, une occupation et un usage des sols qui obéissent à un marché
piloté par la finance voire par la corruption, la croissance démographique, l’absence d’une réglementation
rigoureuse de l’usage de l’eau non renouvelable et les échanges mondialisés dominés par un libéralisme sans
normes ne peuvent que constituer des potentiels d’aggravation. L’étude de la revue Sciences estime que la
végétation évoluerait vers des états plus secs dans une grande partie du bassin. “Un réchauffement global de 3
°C induirait une migration du désert vers le nord de l’Afrique et une réduction des forêts alpines. Au-delà de 4
°C, la désertification s’étendrait au sud de l’Europe”.
Afrique du Nord
Les pays de l’Afrique du Nord (Maroc, Algérie, Tunisie, Libye) ne bénéficient du climat méditerranéen
subhumide (400 à 600 mm de précipitations annuellement) que sur une frange étroite du littoral. Les Étas de la
région, dans un contexte de rareté, ont mobilisé l’essentiel de leurs ressources hydriques bien avant les effets
du changement du climat (démographie, urbanisation ….). Les eaux superficielles et souterraines subissent une
pression en raison d’une concurrence à l’usage (agriculture, ménages, industries). Mohamed Taabni et Moulay-
Driss El Jihad (Eau et changement climatique au Maghreb : quelles stratégies d’adaptation ?) estiment que notre
pays doit s’attendre, selon de nombreuses études à une hausse des températures de l’ordre de 1°C avec des
baisses de précipitations de 5 à 10% à l’horizon 2020 déjà et plus du double de ces valeurs à l’horizon 2050,
soit une augmentation des températures de 2° à 3°C et une chute des précipitations de 10 à 30%. Les
estimations moyennes par pays de la région prévoient des baisses du ruissellement allant de 20% en Algérie et
en Tunisie à 25% au Maroc (GIEC-IPCC, 2008 ; Mostefa-Kara, 2008).
Le secteur agricole sera le plus touché, la baisse significative des précipitations et les sécheresses plus
fréquentes et intenses empêcheront la régénération du couvert végétal et constitueront une menace grave sur
les rendements agricoles, avec une réduction des périodes de croissance, l’accélération de la dégradation des
sols. Les deux chercheurs ajoutent : “De ce fait, la production agricole accusera des réductions moyennes des
rendements des céréales de 5,7% à près de 14%. Le changement climatique induira également des baisses de
rendement des productions des légumes de 10 à 30% à l’horizon 2030”. Bien avant 2100 donc !
R. S.