MODÈLE ATOMIQUE
DE LA MATIÈRE
Cette image d'atomes a été générée par un microscope à effet tunnel.
Après avoir lu le présent chapitre, vous saurez répondre aux
questions suivantes :
Comment distingue-t-on les mélanges, les composés et les
éléments ?
Sur quelles lois reposent les transformations chimiques de la
matière ?
Quelles découvertes scientifiques ont permis d'établir les
caractéristiques des particules subatomiques ?
De quelle manière les éléments chimiques sont-ils regrou-
pés ?
Comment un nombre aussi limité d'atomes peut-il donner
naissance à une aussi grande variété de composés ?
Quel système utilise-t-on pour nommer les composés ?
OBJECTIFS
24 Chapitre 2
Pour parvenir aux connaissances actuelles en chimie, les scientifiques
ont dû procéder à une classification systématique de la matière. Le
présent chapitre décrit les étapes qu'ils ont franchies pour établir un
système cohérent, fruit d'environ 150 ans de découvertes.
La matière existe sous trois états, gazeux, liquide et solide, lesquels se
manifestent sous la forme quasi exclusive de mélanges. Leur analyse permet
d'en isoler des substances pures, éléments et composés, qui possèdent des
propriétés spécifiques.
Dès le XVIIIe siècle, des scientifiques ont établi que les différentes combi-
naisons d'éléments qui ont engendré la dizaine de millions de composés con-
nus à ce jour sont déterminées par des lois simples : la loi de la conservation
de la masse, la loi des proportions définies et la loi des proportions multiples.
Ces lois ont amené Dalton à élaborer une première théorie selon laquelle la
matière est composée d'atomes. Puis, d'autres travaux portant sur les gaz ont
permis de compléter et de renforcer les hypothèses de Dalton.
Au XIXe siècle, de nombreux travaux scientifiques ont mené à la décou-
verte des particules constitutives de l'atome : d'abord les électrons, particules
négatives, puis le noyau, concentrant la quasi-totalité de la masse de l'atome
et renfermant des protons, particules positives, et des neutrons, particules
sans charge électrique.
L'ensemble de ces travaux conduisit à l'élaboration à peu près définitive
d'un système structuré des éléments chimiques, le tableau périodique. Cha-
que élément est en effet doté de caractéristiques uniques : un nombre exclusif
de protons et une masse atomique spécifique. On réussit également à regrou-
per les éléments en raison de distributions électroniques analogues, ce qui se
manifeste par des propriétés semblables.
À partir des structures électroniques des éléments, on est parvenu à ex-
pliquer la formation des liaisons chimiques entre les atomes et, par le fait
même, celle des composés. Ces liaisons résultent soit d'un transfert électro-
nique, soit d'un partage électronique. Dans le premier cas, des atomes cèdent
des électrons à d'autres atomes, engendrant ainsi des particules de charge
opposée dont l'attraction électrostatique assure la cohésion de la nouvelle struc-
ture chimique. Dans le second cas, les atomes mettent en commun des élec-
trons, ce qui forme aussi de nouvelles structures.
Le développement de modèles atomiques a suivi de près l'isolement et la
synthèse d'un nombre grandissant de nouveaux composés. C'est pourquoi, l'éla-
boration d'un système de nomenclature est vite apparue nécessaire. Après
une assez longue période de confusion au cours de laquelle plusieurs systè-
mes de nomenclature ont coexisté, la tendance vers l'uniformisation semble
désormais prévaloir.
2.1 MÉLANGES, SUBSTANCES PURES, ÉLÉMENTS
ET COMPOSÉS
On a vu au chapitre précédent que la matière se présente sous forme de mé-
langes, eux-mêmes décomposables en substances pures formées d'un élément
ou d'une combinaison de deux éléments ou plus (les composés). Avant de passer
aux caractéristiques de ces différentes formes de la matière, voyons-en d'abord
la classification la plus élémentaire : les solides, les liquides et les gaz.
2.1.1 ÉTATS DE LA MATIÈRE
Dans la nature, on peut observer trois états de la matière : les solides, les
liquides et les gaz. La principale caractéristique d'un solide est la rigidité. En
outre, il a une forme et un volume définis, il résiste à la compression et il ne
Découvertes
scientifiques sur
les propriétés
des particules
subatomiques
Mélanges,
composés,
éléments
Lois des
transformations
chimiques
Tableau
périodique
des éléments
Formation
des composés :
liaisons
chimiques
Nomenclature
des espèces
chimiques
MODÈLE ATOMIQUE DE LA MATIÈRE 25
peut être déformé facilement. Par contre, un liquide épouse la forme du con-
tenant qui le renferme tout en ayant un volume distinct. Il conserve une sur-
face plane et s'écoule facilement. Comme un solide, il est peu compressible.
Quant à un gaz, il se caractérise par son absence de forme et par son volume
indéfini : il se répand en occupant tout le volume accessible. Il peut être forte-
ment comprimé ou se dilater indéfiniment. Par exemple, la chambre à air
d'un pneu de bicyclette renferme de l'air sous pression, lequel se disperse dans
le milieu environnant s'il y a crevaison. Et le vent, qui ne semble pas être
constitué de matière à première vue, fait bouger les feuilles des arbres. Pour
les chimistes, les gaz occupent une place particulière, car les résultats tirés
de l'étude de cet état de la matière ont entraîné le développement d'une cer-
taine partie de la théorie atomique, comme nous le verrons à la section 2.2.
2.1.2 MÉLANGES ET SUBSTANCES PURES
La seule existence des états de la matière ne suffit pas à rendre compte de la
diversité que la nature présente. C'est que la matière est le produit des boule-
versements géologiques et climatiques gigantesques qui se sont succédé pen-
dant des milliards d'années et ont conduit à la formation de la Terre. Une
grande variété de matériaux en ont résulté avec des répartitions très inéga-
les, l'eau constituant la substance prédominante.
Ainsi, la plupart des substances naturelles sont des mélanges composés
d'un ou de plusieurs constituants dispersés dans un milieu solide, liquide ou
gazeux. Par exemple, l'air est un mélange formé principalement d'azote (78 %)
et d'oxygène (21 %), et l'eau de mer est un mélange qui renferme environ 3,5 %
de sels minéraux. À l'exclusion des particules en suspension dont la présence
est le plus souvent due à la pollution, l'air et l'eau de mer appartiennent à
une première catégorie de mélanges : les mélanges homogènes. La princi-
pale caractéristique de ces mélanges est la dispersion uniforme de leurs com-
posants de sorte qu'ils sont invisibles, même au microscope. Les roches dont
sont extraits la plupart des minerais font partie d'une deuxième catégorie de
mélanges : les mélanges hétérogènes. Leur caractéristique provient de ce
qu'on peut distinguer leurs composants. Dans le granite, par exemple, les agré-
gats colorés de quartz, de mica et d'autres minéraux, dispersés dans la silice,
sont visibles. Il existe aussi une catégorie de mélanges intermédiaire entre
les deux groupes précédents; ce sont les colloïdes. Quoique visibles à l'œil ou
au microscope, les particules d'un colloïde demeurent indéfiniment en sus-
pension. Ainsi en est-il de la fumée, du brouillard, du lait et de la gélatine.
Tous les mélanges, qu'ils soient homogènes, hétérogènes ou colloïdaux,
ont une propriété commune : la composition variable de leurs constituants et,
par le fait même, leurs propriétés physiques variables. Ainsi, une pièce est
plus ou moins enfumée selon le nombre de personnes qui y fument; la teneur
en alcool des bières sur le marché varie de 0,5 % à près de 8 %; et, comme le
montre le tableau 2.1, l'eau salée gèle à des températures d'autant plus bas-
ses qu'elle renferme de grandes quantités de sel; de la même façon, sa tempé-
rature d'ébullition sera d'autant plus élevée que le sera sa teneur en sel.
Mélange : association de plu-
sieurs espèces chimiques dans la-
quelle chacune garde ses caracté-
ristiques; le mélange est
homogène si sa composition est
uniforme; il est hétérogène si ses
composants ne sont pas dispersés
uniformément.
Dans ce morceau de granite, on
distingue les agrégats colorés de
quartz, de muscovite et de
cassitérite, un minerais d'étain.
Tableau 2.1 Températures de congélation et d'ébullition d'eau salée.
5,5
10,5
14,9
-3,5
-7,1
-10,6
100,9
101,9
103,9
Pourcentage
massique de sel Température de congélation
(°C)
Température d'ébullition
(°C)
Colloïde : suspension de fines
particules, solides, liquides ou ga-
zeuses dans un milieu quelcon-
que.
26 Chapitre 2
Divers procédés physiques, dont certains sont très complexes, permettent
d'isoler les substances pures que renferme un mélange. Contrairement aux
mélanges, les substances pures possèdent des propriétés invariables. Par exem-
ple, l'eau débarrassée de ses sels et de toute impureté, qu'elle provienne de
l'océan, d'une rivière ou d'une usine de filtration, se solidifiera à 0 °C et pas-
sera à l'ébullition à 100 °C. L'eau est par conséquent une substance pure quelle
que soit son origine. Il existe une dizaine de millions de substances pures,
naturelles ou synthétiques.
2.1.3 ÉLÉMENTS ET COMPOSÉS
La plupart des substances pures peuvent être fragmentées en substances plus
simples. Le premier groupe représente les composés et le second forme les
éléments. Jusqu'à maintenant, 110 éléments ont été découverts; parmi eux,
une vingtaine ont été obtenus artificiellement. Plusieurs de ces éléments sont
très rares; une quarantaine tout au plus présentent un intérêt particulier, car
ils donnent lieu à la formation de la plupart des composés. En outre, la distri-
bution des éléments varie considérablement selon le milieu observé. Ainsi,
comme on peut le voir à la figure 2.1, l'oxygène constitue environ 65 % de la
composition élémentaire du corps humain, 49 % de celle de la Terre (incluant la
croûte terrestre, les océans et l'atmosphère) et à peine 1 % de celle de l'Univers.
Dans la nature, on ne retrouve que quelques éléments dans leur état élé-
mentaire, tels l'or, l'azote, l'oxygène, le soufre et l'hélium. La plupart sont en
effet combinés à d'autres éléments par suite de réactions chimiques et forment
des composés. En s'unissant, les éléments perdent leurs propriétés physiques
originales telles que la couleur, la dureté et la température de fusion. Par exem-
ple, le sucre, un composé qui se présente sous la forme d'une poudre blanche
cristalline soluble dans l'eau, diffère totalement des éléments qui
le composent : le carbone est un solide noir, l'hydrogène et l'oxygène sont des
gaz.
Le plus souvent, les éléments sont représentés par des symboles chimi-
ques, formés de une ou deux lettres dont la première est une majuscule. Gé-
néralement, le symbole chimique comprend la première lettre du nom de l'élé-
ment et la seconde, le cas échéant, appartient au reste de son nom. Cepen-
dant, quelques symboles sont composés à partir de leur nom en latin ou en
grec et non de leurs noms en français. Le tableau 2.2 présente les éléments
sur lesquels nous reviendrons le plus souvent dans cet ouvrage1.
Une grande partie du travail des
chimistes consiste à isoler des
substances pures à partir de pro-
duits naturels ou à en synthétiser
de nouvelles.
chimiste au tra-
vail dans un labo
Composé: substance pure
décomposable en ses éléments.
Élément : substance pure non
décomposable en espèces plus
simples.
Figure 2.1 Distribution des éléments dans des milieux différents (en pourcentage mas-
sique).
Symbole chimique : représenta-
tion symbolique d'un élément
chimique formé de une ou deux
lettres dont la première est une
majuscule.
1. Pour bien suivre le cours, il est nécessaire de mémoriser les symboles chimiques des éléments
présentés au tableau 2.2. (Une liste complète des éléments figure au verso de la page couver-
ture.)
Substance pure : forme de ma-
tière dont les propriétés physi-
ques et chimiques sont constan-
tes.
Oxygène 1,0 %
Univers Terre Corps humain
Néon 0,7 %
Carbone 0,3 %
Autres 1,0 %
Hélium
36,6 %
Oxygène
60,4 %
Sodium 2,6 %
Potassium 2,4 %
Magnésium 1,9 %
Autres 2,3 %
Oxygène
49,1 %
Oxygène
64,6 %
Silicium
26,1 %
Calcium 3,4 %
Fer 4,7 %
Aluminium 7,5 %
Azote 3,1 %
Calcium 1,9 %
Phosphore 1,1 %
Autres 1,3 %
Carbone
18,0 %
Hydrogène 10,0 %
MODÈLE ATOMIQUE DE LA MATIÈRE 27
2.2 PREMIÈRE THÉORIE ATOMIQUE
L'isolement de substances pures à partir de mélanges ou à la suite de trans-
formations chimiques a conduit les scientifiques, à la fin du XVIIIe siècle et
au début du XIXe, à établir des lois élémentaires, souvent désignées lois fon-
damentales de la chimie. La découverte de ces lois qui régissent la combinai-
son des éléments a amené Sir John Dalton à soumettre une première théorie
structurée concernant la composition de la matière.
2.2.1 LOIS FONDAMENTALES DE LA CHIMIE
À partir du milieu du XVIIIe siècle, les scientifiques commencèrent à se
rendre compte de l'importance de mesures quantitatives fiables. À cette
époque du reste, Lavoisier conçut des balances suffisamment précises
pour établir des bilans réactionnels assez exacts et reproductibles. On lui
doit la première loi fondamentale de la chimie, la loi de la conservation de
la masse. Connue sous la forme proverbiale, « rien ne se perd, rien ne se
crée », elle prend cependant une tournure plus rigoureuse dans l'énoncé
suivant :
Loi de la conservation de la masse Au cours d'une transformation chimique,
la masse totale des substances réagissantes est égale à celle des substances for-
mées.
Cette approche quantitative de Lavoisier conduisit Proust à analyser systé-
matiquement un certain nombre de composés, ce qui lui permit d'établir la loi
des proportions définies :
Loi des proportions définies Un composé contient toujours les mêmes élé-
ments combinés dans les mêmes proportions massiques, quelle que soit son ori-
gine ou sa méthode de préparation.
Ainsi, le carbonate de calcium, CaCO3, donnera toujours la même
proportion massique de carbone, d'oxygène et de calcium, qu'il soit ob-
tenu à partir du marbre, de la calcite, de la craie ou du calcaire, ou qu'il
Tableau 2.2 Symboles chimiques des éléments les plus usuels.
Élément Symbole Élément Symbole Élément Symbole
Aluminium
Argent
Argon
Azote
Baryum
Brome
Calcium
Carbone
Chlore
Chrome
Cobalt
Cuivre
Al
Ag
Ar
N
Ba
Br
Ca
C
Cl
Cr
Co
Cu
Étain
Fer
Fluor
Hélium
Hydrogène
Iode
Lithium
Magnésium
Manganèse
Mercure
Néon
Nickel
Sn
Fe
F
He
H
I
Li
Mg
Mn
Hg
Ne
Ni
Or
Oxygène
Platine
Plomb
Potassium
Silicium
Sodium
Soufre
Titane
Tungstène
Uranium
Zinc
JOSEPH LOUIS PROUST
(1754-1826)
Chimiste français; l'un des fonda-
teurs de l'analyse chimique. Il
énonça la loi des proportions dé-
finies en 1806.
Au
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