conférence en différée 14 30 novembre · ADF Paris 2012 La salive ou l’eau à la bouche Connaître les effets de l’âge et des maladies systémiques sur la salive. Savoir organiser la prise en charge et les mesures préventives dans les cas d’hyposialie. Appréhender la salive comme marqueur biologique de la santé générale. Responsable scientifique : Dr Jacques-Olivier Pers( UFR de Brest PU-PH) Conférenciers : Sylvie Boisramé-Gastrin, Franck Chaubron, Bernard Pellat, Jacques-Olivier Pers Cours A2 -La salive ou l’eau à la bouche – Date, heure Mardi 27novembre – 9H30 – 11H30 – Thématique Recherche, biologie, épidémiol – Type Conférence On appelle communément salive le liquide biologique qui baigne la cavité buccale. Est-ce pertinent ? Dès lors que l’on identifie dans ce fluide oral des micro-organismes, des leucocytes, des cellules épithéliales desquamées, des débris alimentaires, le biologiste renonce à qualifier ce liquide de salive. Il réserve ce vocable aux produits de sécrétion des trois paires de glandes salivaires majeures (sous-mandibulaires, sub-linguales et parotides) et des glandes mineures réparties dans la muqueuse buccale. Le liquide de la cavité buccale est dès lors appelé fluide oral, de composition complexe et extrêmement évolutive selon le mode de stimulation, la situation physiologique, le cycle circadien, l’état de santé du sujet, son âge… Néanmoins, la contribution des sécrétions salivaires est déterminante même si d’autres apports endogènes (fluide gingival, sang) et des composants exogènes enrichissent l’ensemble(1). La grande originalité biologique des composants de la cavité buccale est qu’ils se trouvent placés sous la double influence du milieu dit intérieur, et du fluide oral, assimilé à un « milieu buccal extérieur ». On est alors fondé à rechercher les Fig. 1 : Face dorsale d’une langue sèche, fissurée. Fig. 2 : Candidose aiguë sous sa forme pseudomembraneuse. influences qu’exerce ce fluide oral sur les structures et fonctions buccales. Actions antimicrobiennes, maintien des structures dentaires superficielles, rôles dans la nutrition, la gustation et l’élocution, équilibre muqueux trouvent leur justification dans l’étude fine de la composition du fluide oral et des sécrétions salivaires. La xérostomie, étymologiquement, bouche sèche, se réfère généralement à une appréciation subjective du sujet, alors que l’hyposialie renvoie à un signe objectif, mesurable, une diminution du débit salivaire, les deux approches n’étant pas nécessairement liées. Les sécrétions salivaires étant de compositions différentes selon leur origine glandulaire, on comprend aisément qu’il faudrait préciser si le déficit sécrétoire est lié à telle ou telle glande. Si tout le monde s’entend sur la nécessité d’adosser un diagnostic de trouble salivaire à plusieurs groupes de critères diagnostiques – la xérostomie, l’hyposialie, et une sialadénite auto-immune – on est loin du consensus sur la signification à donner à chaque item. Aspects cliniques de l’hyposialie et de sa prise en charge Quoi qu’il en soit, l’hyposialie est un motif fréquent de nos consultations du fait de son caractère invalidant (alimentation, vie sociale (communication, sexualité)) entraînant un isolement tant physique que psychologique. Dans la cavité buccale, l’hyposialie engendre des modifications du microbiote oral favorisant le développement d’infections opportunistes, de caries mais aussi d’altérations tissulaires (Fig. 1), et des candidoses souvent récidivantes (Fig. 2). Les infections bactériennes sont la source de gingivites (Fig. 3), de parodontites et de caries à progression rapide aboutissant à une édentation progressive. Ces infections bactériennes peuvent s’étendre aux glandes salivaires (Fig. 4). De même, en l’absence de salive, les muqueuses buccales s’atrophient et ont un aspect lisse et fin propice à une intolérance aux prothèses dentaires amovibles. La diminution du pouvoir tampon engendre sur les dents une déminéralisation amélaire à l’origine d’érosions dentaires pouvant atteindre les surfaces non fonctionnelles (Fig. 5) et des lésions carieuses. Plus l’interception est précoce, adaptée et prolongée, plus grandes seront les chances de conserver les aspects fonctionnels et esthétiques des dents. Il est donc néces- Fig. 3 : Amincissement gingival avec gingivite marginale généralisée. saire de connaître les aspects cliniques et de rechercher les étiologies car les conséquences peuvent aboutir à un édentement précoce qui aggravera la qualité de vie de ces patients. Les traitements proposés pour l’hyposialie sont préventifs et curatifs. Ils sont fonction de l’étiologie. Les agents aggravants comme le tabac et l’alcool sont à proscrire. Le traitement va inclure l’utilisation des solutions allant des rinçages buccaux et des substituts salivaires à la prescription de sialogogues, l’élimination éventuelle de médicaments ayant des effets anti-cholinergiques, le suivi des soins conservateurs et la prévention carieuse par un praticien(2). Parfois, lorsqu’il n’y a plus de possibilité de stimulation salivaire, la prise en charge est palliative et associe le maintien de l’humification orale à une fluoruration topique et des conseils d’hygiène et de diététique. Ainsi, la collaboration avec un diététicien trouve toute sa place, car celui-ci pourra suggérer des aliments et des boissons aidant le patient à retrouver du « goût ». Il appartient donc à l’odontologiste de dépister au plus tôt l’hyposialie, souvent évoquée par le patient, de trouver l’étiologie pour proposer une thérapeutique et un suivi adaptés. Une prise en charge multidiciplinaire précoce permettra d’en limiter les effets néfastes. DR BOISRAMÉ-GASTRIN SYLVIE MCU-PH, PhD · Ancien interne des Hôpitaux de Brest · Coordonnateur odontologiste D.E.S.C.O. interrégion Ouest · Membre titulaire de la Société Française de Chirurgie Orale (SFCO) DR FRANCK CHAUBRON PhD · Institut Clinident PR BERNARD PELLAT professeur émérite (sciences biologiques) · ex-doyen, Université Paris Descartes PR JACQUES-OLIVIER PERS · Directeur EA2216 « Immunologie & Pathologie » · Vice-Doyen de l’UFR d’odontologie de Brest La salive comme biomarqueur de la santé générale L’analyse de la salive humaine permet aujourd’hui d’investiguer un certain nombre de pathologies comme le syndrome de Gougerot-Sjögren, la cirrhose, la cystite, certains diabètes ainsi que des diagnostics bactériologiques (parodontite, cariologie) et viraux (HIV). Des biomarqueurs spécifiques peuvent être identifiés dans la salive et sont le reflet d’un exsudat du sérum. Ces biomarqueurs sont associés à l’installation d’un écosystème microbiologique et chimique en lien avec des facteurs de risques (tabac, alimentation, hygiène…). On peut certainement se permettre de parler d’un métabolisme salivaire. Le diagnostic salivaire du risque carieux par la mesure de la charge en Lactobacillus spp., de Streptococcus mutans et la mesure du pouvoir tampon de la salive en est un bon exemple en chirurgie dentaire. Le diagnostic salivaire peut-il avoir des applications Fig. 4 : Pus retrouvé à l’orifice du canal parotidien. en médecine générale ? La salive peut-elle aussi être analysée pour diagnostiquer des pathologies cancéreuses ? Il a été rapporté que des cellules tumorales d’un patient atteint d’un cancer oral étaient présentes dans sa salive(3). Le transcriptome de la salive (ensemble des ARNm) compte environ 3000 ARNm différents, dont 180 sont toujours communs parmi les sujets sains représentant ainsi le transcriptome salivaire normal. Par ailleurs, l’évaluation quantitative de certaines bactéries peut être un bon marqueur de risques de cancers buccaux(4). Pouvons-nous y ajouter l’analyse des métabolites cellulaires, les composés organiques volatils (COV) ? En effet, l’utilisation de molécules volatiles Fig. 5 : Erosions de l’émail chez une personne souffrant d’asialie. Aspect gingival vernissé. conférence en différée ADF Paris 2012 · 30 novembre comme marqueur d’un état de santé, n’est en fait pas une idée récente. Par exemple, une haleine ayant une forte odeur « d’acétone » révèle un dysfonctionnement hépatique. L’accentuation des recherches sur les molécules volatiles a été possible grâce à l’essor de technologies telles que la chromatographie en phase gazeuse et la spectrométrie de masse. Correctement piégées et analysées, les molécules volatiles donnent une empreinte générale qui reflète l’état de santé d’une personne (Fig. 6). Cette théorie est prouvée scientifiquement par l’analyse de l’air expiré dans certains cas pathologiques (cancer, diabète, maladies hépatiques,…) (5). Cependant , à ce jour, il n’existe aucun test de salive commercialisé au niveau mondial pour le dépistage et le diagnostic de cancers. L’analyse des COV dans la salive a donc été utilisée comme outil de diagnostic précoce du cancer de l’oropharynx (Fig. 7). Plusieurs composés volatils (COV) sont retenus pour discriminer le groupe Fig. 7 : Discrimination de 2 populations (sain et cancer oral) avec l’aide d’un algorithme basé sur un ratio de 6 COV. « cancer » du groupe de référence « sain ». A partir du même échantillon de salive, les ARNm et les ADN sont analysés pour mesurer la surexpression d’ARNm humain et/ou d’ADN bactérien. Le sujet est considéré comme présentant un cancer oropharyngé dès que le résultat positif du screening COV est associé à la surexpression d’au moins l’un des biomarqueurs ARNm et/ou ADN. Cette combinaison d’approches génomiques à d’autres types de marqueurs vient d’être appliquée au dépistage des cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS). Plus précisément, les cancers de la cavité buccale représentent chaque année en France plus de 7500 nouveaux cas et 1875 décès. A l’heure actuelle, 70% de ces cancers sont diagnostiqués à un stade avancé. Or, il serait possible de les détecter précocement et de pouvoir ainsi améliorer leur pronostic tout en évitant les traitements mutilants. A partir d’un simple prélèvement de salive conservé dans un kit fourni à divers types de praticiens (médecins généralistes, dentistes, pharmaciens, services spécialisés…), il est possible de réaliser l’analyse diagnostique de cancer et de fournir le résultat sous quelques jours (Fig. 8). Les avantages du test salivaire en cancérologie des VADS sont : – la praticité : prélèvement de salive par un simple rinçage de bouche (1 minute) – la fiabilité technique : stabilité des caractéristiques de l’échantillon (10 jours) – la sensibilité : taux très élevé de 98% – la fiabilité scientifique : dépistage/diagnostic cancer établi directement – la puissance : dépiste un cancer de toute la sphère oropharyngée difficilement ac- 15 cessible par examen oral (nez, pharynx, gorge…), y compris en l’absence totale de signes visibles – les coûts : faibles par rapport aux approches de dépistage actuel ( analyse lésions/biopsie voire imagerie) – l’accès : populations mondiales quel que soit le niveau d’équipements de diagnostic du pays – la rapidité : 72h à réception de l’échantillon Ces nouvelles approches diagnostiques et de suivi thérapeutique sont donc prometteuses et constituent des perspectives de recherche de tout premier plan. Références : (1) Dodds et al. Health benefits of saliva. J. Dentistry 2005 ; 33, 223-233. (2) Cassolato SF and Turnbull RS. Xerostomia: clinical aspects and treatment. Gerodontology 2003; 20: 64-77. (3) El-Naggar AK et al. Genetic heterogeneity in saliva from patients with oral squamous carcinomas: implications in molecular diagnosis and screening. J Mol Diagn. 2001;3:164-70. (4) Mager DL et al. The salivary microbiota as a diagnostic indicator of oral cancer: a descriptive, non-randomized study of cancer-free and oral squamous cell carcinoma subjects. J Transl Med. 2005;3:27. (5) Mashir A and Dweik RA. Exhaled breath analysis: The new interface between medicine and engineering. Adv Powder Technol. 2009;20:420-425. Synergizing Practice Excellence with Modern Technological Advances Fig. 6 : Exemple de profil chromatographique des COV présents dans la salive humaine. Plus de 300 COV, ont pu être identifiés dans un échantillon de salive stabilisée, par spectrométrie de masse. Parmi ces 300 COV, 60 ont été utilisés pour développer des algorithmes de classification en cancérologie. LOG ON www.35thAPDC2013.com for updates Date : 7-12 May 2013 Venue : Kuala Lumpur Convention Centre, Kuala Lumpur, Malaysia Bringing together international dental experts and leaders at a world-class venue... Discover Malaysian hospitality, endless opportunities to enjoy nature-based adventures, enriching cultural experiences and fabulous shopping sprees... Come join us for an unforgettable experience! Main / Platinum Sponsor: Speaker sponsors: Fig. 8 : Etape de la réalisation du kit d’analyse diagnostique du cancer des VADS. Supported by: