Effets de la dégradation des termes de l`échange de l

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Effets de la dégradation des termes de
l’échange de l’Australie.
Résumé
Malgré sa situation économique enviable par rapport à la plupart des économies avancées (25 ans sans
récession, croissance supérieure à 2%, chômage et dette publique faibles), l’Australie vit une période de
transition avec la fin de la croissance rapide fondée sur les exportations massives de matières premières vers
la Chine. Cette économie très ouverte devrait cependant rebondir à moyen terme à nouveau par son
commerce extérieur, en utilisant la baisse de sa monnaie et la croissance de nouveaux secteurs d’exportation.
Cette recherche de la croissance par le commerce extérieur explique l’intensité de la volonté australienne de
conclure la négociation du TPP mais aussi d’accords bilatéraux de libre-échange, ce qu’elle a fait avec ses
principaux partenaires asiatiques, et qu’elle souhaite maintenant signer avec l’Union européenne qui pourrait
lui fournir des débouchés complémentaires.
Des termes de l’échange favorables aux exportations minières
ont permis une forte croissance
L’Australie est une économie avancée parmi les plus prospères. Son PIB par habitant nominal était de 61 219
USD en 2014, soit le 5ème mondial selon le FMI. Elle bénéficie d’une croissance ininterrompue depuis 25 ans,
qui a été soutenue essentiellement par le secteur primaire depuis le début du siècle. La valeur des exportations
minérales australiennes a augmenté de 58Mds AUD à 215Mds AUD entre 2001 et 2011 (+171%) et leur part
des exportations a augmenté de 38,5% à 58,8%. La croissance chinoise a été l’élément-clé de la demande
pour les exportations australiennes, notamment en fer et charbon, utilisés pour la production d’acier, sachant
que l’Australie est le premier exportateur mondial de minerai de fer, et le premier exportateur de charbon en
valeur. La croissance chinoise a permis à la fois une croissance des volumes et des prix, permettant le
financement de nombreux investissements miniers.
Le boom minier a en revanche favorisé le déclin d’autres secteurs car la demande pour les produits miniers a
fait augmenter le taux de change du dollar australien, ce qui a pesé négativement sur la compétitivité-prix des
autres produits australiens. Certains économistes y ont vu un symptôme de « maladie hollandaise » (dutch
disease), situation dans laquelle la forte croissance des entrées de devises liées à un secteur pénalise le reste
de l’économie. L’industrie a particulièrement souffert, ce qui s’est traduit notamment par la décision
emblématique de l’ensemble des groupes automobiles présents en Australie de fermer leurs unités de
production d’ici 2017.
Par ailleurs, le boom minier a peu bénéficié aux finances publiques car le gouvernement, bénéficiant de
recettes record et de surplus budgétaires (de 2002 à 2008), a réduit les impôts. Cette politique fortement procyclique a été vivement critiquée par le FMI comme de la « prodigalité fiscale ». Le gouvernement a certes
créé un fonds souverain, le Future Fund, destiné au financement des retraites publiques mais il n’atteint que
127 Mds AUD (soit 8,1% du PIB) en 2014, ce qui apparaît limité. De plus, pour empêcher la surchauffe de
l’économie, la banque centrale a dû augmenter son taux directeur de 4,75% fin 2003 à 7,25% en mars 2008,
ce qui a pesé sur les coûts de financement des entreprises.
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La dégradation des termes de l’échange met fin au boom
minier.
La concentration de ses clients rendait l’Australie vulnérable à des chocs extérieurs. En effet, la Chine achète
par exemple environ 80% du minerai de fer australien et ce sont les aciéries chinoises qui tiraient à la hausse
les cours du fer et du charbon. La croissance de l’économie chinoise s’est toutefois stabilisée en deçà de 8%
après 2012, avec notamment une baisse progressive de la demande de construction et de production d’acier.
Ce ralentissement de la demande est intervenu alors même que la production mondiale de fer et de charbon
a très fortement augmenté, suite à la construction de plusieurs mines géantes, notamment en Australie. Le
prix spot du minerai de fer au port de Shanghai et du charbon métallurgique a ainsi perdu 70% de sa valeur
entre 2011 et 2015.
Selon les modèles du gouvernement dans le Budget pour l’exercice 2015-2016, une baisse de 1% du cours
du minerai de fer correspondrait à une baisse d’autour de 0,15% des termes de l’échange. Chaque baisse de
1% des termes de l’échange correspondrait à son tour à une baisse du PIB nominal d’environ 0,25%. Le
Trésor australien prévoit une baisse de -8,5% des termes de l’échange en 2015, ce qui a conduit à réviser le
taux de croissance nominal à 3,25% (au lieu de 4,75% prévu en 2014). Ce taux reste inférieur à la croissance
potentielle.
Cependant, l’effet net d’une baisse des termes de l’échange sur le PIB n’est pas mécaniquement positif ou
négatif. Certes, les profits des entreprises minières vont baisser et vont réduire leurs effectifs. Mais la forte
baisse du taux de change (chute de plus de -33% contre l’USD et -20% en taux de change effectif depuis mi2011 a rendu les produits australiens non-miniers plus compétitifs. Par ailleurs, les salaires réels continuent à
stagner (2,6% en 2014, soit le plus faible depuis 1990) ce qui a modéré la destruction d’emplois. L’effet net
sur le PIB dépendra aussi de la demande et du cours des autres exportations de l’Australie, ainsi que de la
croissance de l’économie chinoise.
S’agissant de l’effet sur la balance commerciale, celle-ci a déjà atteint un déficit record de -4,16Md AUD en
avril 2015. Mais la baisse du dollar devrait permettra la poursuite de l’ajustement des prix réels des
exportations australiennes, favorisant les exportations. En revanche, la baisse du taux de change commence
a exercé une pression inflationniste sur les biens échangeables. Ceux-ci ont augmenté de 1,1% (prenant en
compte les ajustements saisonniers) au T2 2015, période pendant laquelle le dollar australien a chuté de 10%.
S’agissant du marché du travail, le taux de chômage a augmenté sensiblement depuis le boom (4% en début
2008 contre 6,3% en juin 2015). L’effet dans le secteur minier a été très prononcé : en effet, 55.000 emplois
(20% du total) dans ce secteur ont été perdus depuis 2012. Autre indicateur, le taux de chômage dans l’Etat
minier d’Australie Occidentale (principal bénéficiaire du boom) a augmenté de 2,3% en octobre 2008 à 6,4%
en juin 2015. A ceci s’ajoute la destruction de presque 100.000 emplois dans le secteur manufacturier depuis
2009.
Les possibles relais de croissance du commerce extérieur :
dépréciation du dollar et diversification
La baisse du taux de change du dollar australien devrait favoriser la compétitivité prix des exportations et à
terme leur croissance. Cette dépréciation permet d’ores et déjà de limiter l’impact sur les comptes des sociétés
australiennes et sur les ressources fiscales des baisses des cours des matières premières en dollars
américains. Elle devrait aussi prémunir partiellement l’Australie de l’effet de la forte baisse récente des
monnaies des pays émergents asiatiques.
Au-delà du fer et du charbon, l’Australie est en mesure de fournir des produits pour lesquels la demande
asiatique est forte : les autres métaux comme le cuivre, le gaz, et les produits agricoles. Le gaz naturel liquéfié
(GNL) poursuit son expansion et le pays deviendra d’ici 2020 le premier exportateur de GNL au monde, devant
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le Qatar. Le gaz liquéfié est plus cher que le gaz fourni par des pipelines, aussi les clients du gaz australien
sont des pays sans accès à d’autre sources d’énergie moins chères et sans possibilité de construire des
pipelines (le Japon et la Corée notamment). Le Japon, premier importateur au monde du gaz naturel liquéfié,
achète autour de 80% du gaz australien, et est prêt à payer des prix les plus élevés au monde (>14USD par
giga Joule contre <2,5 USD aux Etats-Unis [Henry Hub] ou <7USD en Europe) pour assurer son alimentation
énergétique, notamment suite à l’arrêt de ses centrales nucléaires. La plupart des contrats
d’approvisionnement sont à long terme (20+ ans) et fixés au cours du pétrole en dollar américain. Ainsi, la
baisse du cours du pétrole a provoqué une baisse du prix du gaz exporté au Japon, mais ceci a été modéré
par la force du dollar américain. La consommation de la Chine, qui n’a commencé à importer du GNL qu’en
2006, devrait augmenter fortement (de 18Mt en 2014 à 28 Mt en 2016, soit +35% en deux ans). En tout état
de cause la demande mondiale de GNL dépasse l’offre, même en tenant compte de la forte hausse de
production australienne. Le GNL devrait devenir la première exportation australienne dès 2017.
Le cuivre est aujourd’hui le 11e poste d’exportation de l’Australie et la demande asiatique devrait s’accroitre à
moyen terme avec l’urbanisation croissante et le besoin de cuivre dans la construction d’infrastructures de
communication. Toutefois, le potentiel de croissance est limité car l’Australie ne produit que 5% du minerai de
cuivre et 2% du cuivre raffiné au monde.
S’agissant des produits agricoles, l’enrichissement des classes moyennes en Asie devrait augmenter sa
demande de produits agricoles de qualité. L’Australie, avec ses règles sanitaires très strictes, est bien placée
pour exporter de la viande (notamment le bœuf), du blé et des produits laitiers. Même si les premiers clients
du bœuf australien aujourd’hui sont les Etats-Unis et le Japon (qui achètent respectivement 31% et 21% du
bœuf australien), la demande du bœuf en Chine devrait augmenter massivement d’ici 2050. Les accords de
libre-échange conclus récemment avec la Corée et la Chine devraient également faciliter les exportations de
produits laitiers. De même, un accord de libre-échange est en négociation avec l’Inde, ce qui faciliterait l’accès
au marché indien pour les produits laitiers.
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Annexes
20 premiers postes à l’exportation (2014)
$Md AUD
Part du total (%)
Minerai de fer
66,005
20,18%
Charbon
37,999
11,62%
Gaz naturel
17,76
5,43%
Services de voyage liés à
l’éducation
17,037
5,21%
Services de voyage
14,227
4,35%
L’or
13,46
4,12%
Pétrole brut
10,582
3,24%
Bœuf
7,751
2,37%
Minerai d’aluminium
6,321
1,93%
Blé
5,92
1,81%
Minerai de cuivre
5,421
1,66%
Services professionnels
4,753
1,45%
D'autres minerais
4,599
1,41%
4,26
1,30%
Aluminium
raffiné/transformé
3,968
1,21%
Cuivre
3,849
1,18%
3,733
1,14%
Services professionnels
d'affaires
3,333
1,02%
Services financiers
3,328
1,02%
Pétrole raffiné
2,807
0,86%
Services
d’affaires
Viandes
bœuf)
de
(autre
voyage
que
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le
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Evolution des trois premiers postes à l'exportation de l'Australie (Md AUD)
80
70
60
50
40
30
20
10
0
2006
2007
2008
2009
Minerai de fer
2010
Charbon
2011
2012
2013
2014
Gaz naturel
Cours du minerai de fer, de l’acier et du charbon (de trois niveaux de qualité différents)
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Exportations de minerai de fer et de charbon
en valeur et en volume
Production mondiale de minerai de fer (Mt)
2010-2015
900
800
700
600
500
400
300
200
100
0
2010
2011
Australie
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2012
Brésil
2013
Canada
2014
2015
Afrique du Sud
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Taux directeur/part des impôts dans le PIB
8
30
7
25
6
20
5
4
15
3
10
2
5
1
0
0
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
Taux directeur (gauche)
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Part des impôts dans le PIB (% droite )
Périodes de « prodigalité fiscale » pour l’Australie
Sources : FMI (http://www.imf.org/external/pubs/ft/wp/2013/wp1305.pdf)
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Taux du dollar australien 2010-2015 (taux effectif et AUD/USD
85,0
1,2
1,1
80,0
1
75,0
0,9
70,0
0,8
65,0
60,0
05-janv.-2010
0,7
0,6
05-janv.-2011
05-janv.-2012
05-janv.-2013
Taux de change effectif (gauche)
05-janv.-2014
05-janv.-2015
AUD/USD (droite)
Taux de croissance réelle des salaires réels
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Balance commerciale de l'Australie, de 2007à 2015
3000
2000
1000
0
2007
-1000
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
-2000
-3000
-4000
-5000
Prix du gaz 1) aux Etats-Unis (Henry Hub), 2) au Royaume-Uni (National Balancing Point) 3) en
Allemagne (à la frontière allemande et 4) au Japon (GNL débarqué)
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Sources : ABS
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Evolution des exportations de
ressources minières 2001-2011
Sources : DFAT Composition of Trade 2011
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Sources : DFAT COT 2011
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Sources : Budget 2010-2011
Sources : Budget 2015-2016
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Sources : DFAT COT 2011-2012
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