Cardiologie RAPPORT DE LA DIVISION DE CARDIOLOGIE S T. M I C H A E L ’ S H O S P I T A L , U N I V E R S I T É D E T O R O N T O e e al ci u .ca es m lle pé a tes tiv thè ve s site ali si ce ou on e tu po r N ati otr eac dia su t n i s t en z log de oin és ite io er rp pr Vis ard nn we c o w. isio s P ww ur v que i po gog da pé ST. MICHAEL’S HOSPITAL UNIVERSITY OF TORONTO Actualités scientifiques MC La prévention de la mort subite grâce aux défibrillateurs cardiaques implantables prophylactiques Rapport sur une présentation effectuée à la séance sur les toutes dernières études tenue dans le cadre de la 51e réunion scientifique annuelle de l’American College of Cardiology Une partie des données a été présentée initialement par : A. J. Moss, MD 17 au 20 mars 2002 Atlanta, Georgie et Rapport sur une présentation effectuée au Congrès canadien sur les maladies cardiovasculaires Présenté initialement par : F. Bokhari, MD, D. Newman, MD, Korley, MD, M. Greene, MD et P. Dorian, MD 26 au 30 octobre 2002 Présenté et commenté par : PAUL DORIAN, M.D. Le roi Dionysus était un tyran qui vivait dans un magnifique palais où régnait grandeur et bonheur. Damoclès, son ami, enviait sa chance. Les deux hommes décidèrent d’échanger d’habitation pour un jour. Damoclès participait à une grande fête, lorsqu’il remarqua au-dessus de sa tête une épée qui ne tenait que par un fil. Horrifié, il demanda à Dionysus la signification de cela. Dionysus lui expliqua que c’était le « danger omniprésent » dans sa vie de roi. Jamais plus Damoclès envia le roi. Adaptation de Favorite Tales of Long Ago, Réadapté par James Baldwin L’épée de Damoclès Les défibrillateurs cardiaques implantables (DCI) sont devenus le principal traitement pour la prévention de la mort cardiaque subite due aux tachyarythmies ventriculaires. Les études effectuées pendant toute une décennie ont confirmé la supériorité des DCI par rapport au traitement pharmacologique antiarythmique pour prolonger la vie des patients présentant des antécédents de tachycardie ventriculaire (TV) ou de fibrillation ventriculaire (FV) soutenue. Des études récentes ont comparé les DCI aux médicaments ou à aucun traitement antiarythmique comme « prophylaxie primaire » chez des patients présentant un risque élevé de mort subite ou des antécédents d’infarctus du myocarde (IM). Chez des patients sélectionnés, les DCI entraînent une réduction relative et absolue importante de la mortalité chez les patients ne présentant pas d’antécédents de TV ou de FV soutenue. Les Division de cardiologie Duncan J. Stewart, MD (chef) Gordon W. Moe, MD (rédacteur) David H. Fitchett, MD (rédacteur-adjoint) Juan C. Monge, MD (rédacteur-adjoint) Beth L. Abramson, MD Warren Cantor, MD Luigi Casella, MD Robert J. Chisholm, MD Chi-Ming Chow, MD Paul Dorian, MD Edmonton, Alberta cliniciens doivent prendre en considération ces études dans le traitement des patients atteints de coronaropathie et de dysfonction du ventricule gauche (VG) sévère. Un patient de 57 ans vous consulte en raison de son intolérance à l’effort et de ses craintes quant à son pronostic. Il a déjà subi deux IM, un pontage aorto-coronarien il y a 6 ans et souffre actuellement de dyspnée à l’effort de la classe II de la New York Heart Association (NYHA). Il ne souffre pas d’angine et n’a jamais présenté de présyncope ou de syncope. Une scintigraphie de perfusion révèle des anomalies irréversibles dans deux territoires vasculaires myocardiaques. La fraction d’éjection selon une ventriculographic isotopique (MUGA) est de 26 %. Il ne souffre pas d’insuffisance cardiaque manifeste et est traité avec des doses adéquates de bêta-bloquants, un inhibiteur de l’ECA, de l’aspirine et une statine. L’électrocardiogramme montre un rythme sinusal, un IM antérieur et un IM inférieur préalables et un bloc de branche gauche. Il n’a jamais été hospitalisé pour insuffisance cardiaque. Est-ce que vous changeriez son traitement ou effectueriez d’autres examens? Quel est le pronostic? Il a lu que chez les patients dont la fonction ventriculaire est mauvaise, le taux de mortalité est élevé. Que lui conseilleriez-vous? On sait maintenant que la mort cardiaque et, en particulier, la mort cardiaque subite due aux arythmies ventriculaire mortelles, est l’une des causes les plus fréquentes de décès dans les pays occidentaux. Après le succès spectaculaire des traitements thrombolytiques, anti-ischémiques et de revascularisation dans les années 1990, on s’est de plus en plus concentré sur le traitement des patients souffrant des conséquences chroniques de la coro- Michael R. Freeman, MD Shaun Goodman, MD Anthony F. Graham, MD Robert J. Howard, MD Stuart Hutchison, MD Victoria Korley, MD Michael Kutryk, MD Anatoly Langer, MD Howard Leong-Poi, MD David Newman, MD Trevor I. Robinson, MD Bradley H. Strauss, MD St. Michael’s Hospital, 30 Bond St., suite 7049, Queen Wing, Toronto, Ontario M5B 1W8 Télécopieur : (416) 864-5941 Les opinions exprimées dans cette publication ne reflètent pas nécessairement celles de la Division de Cardiologie, St. Michael’s Hospital, Université de Toronto, du commanditaire de la subvention à l’éducation ou de l’éditeur, mais sont celles de l’auteur qui se fonde sur la documentation scientifique existante. On a demandé à l’auteur de révéler tout conflit d’intérêt potentiel concernant le contenu de cette publication. La publication de Cardiology, Actualités scientifiques est rendue possible grâce à une subvention à l’éducation sans restrictions. naropathie, principalement la dysfonction du VG et l’insuffisance cardiaque, et la tendance à la mort subite d’origine arythmique. Bien que l’on ait très clairement établi que les patients souffrant de dysfonction du VG, avec ou sans insuffisance cardiaque symptomatique, présentent un risque élevé d’arrêt cardiaque en dehors de l’hôpital et de mort subite non documentée, mais probablement d’origine arythmique, la prévention de leur décès constitue un défi thérapeutique majeur. Tout d’abord, il est difficile, sinon impossible, de prédire avec un degré raisonnable de certitude quels sont les patients qui souffriront d’arythmies mortelles et quels sont ceux qui demeureront cliniquement stables, ou du moins qui ne souffriront pas d’arythmies ventriculaires graves. Bien entendu, si l’on pouvait identifier ces patients, on pourrait alors orienter le traitement uniquement vers ce groupe sélectionné dont la destinée est de souffrir de TV ou de FV (ils représentent environ 40 à 60 % de tous les patients atteints de dysfonction du VG modérée à sévère)1. Les tests visant à identifier les patients présentant un risque particulièrement élevé de mort subite comprennent : • Provocation d’une tachycardie ou d’une fibrillation ventriculaire lors d’une étude électrophysiologique invasive; • Documentation d’une tachycardie ventriculaire non soutenue lors d’une surveillance Holter ou d’un ECG à l’hôpital; • Présence d’anomalies ECG subtiles (non visibles à l’œil nu) de la dépolarisation et de la repolarisation à l’ECG avec haute amplification ou présence d’une alternance de l’onde T; • Présence d’une modulation anormale de la fonction cardiaque par le système autonome, sur la base de l’enregistrement d’une variabilité de la fréquence cardiaque anormalement faible, ou barocepteur à sensibilité réduite. Bien que chacun de ces tests ait une certaine valeur pronostique, pour des raisons cliniques pratiques, ils ne sont pas suffisamment précis pour orienter le traitement. Une autre expression de cette difficulté est « l’énigme bayesienne » par laquelle les patients chez qui l’on a noté les marqueurs de risque ci-dessus présentent un risque très élevé de mort subite, peut-être de 20 à 40 % chaque année, en présence de plusieurs facteurs de risque d’origine arythmique. Cependant, ces sujets ne constituent qu’une petite fraction de tous les patients souffrant de dysfonction ventriculaire présentant un risque potentiel de mort subite. En revanche, l’incidence de la mort subite parmi tous les patients ayant subi un IM est relativement faible. Un deuxième problème conceptuel et pratique est l’incapacité à identifier le moment ou les causes immédiates de la mort subite due à une TV/FV. Ces événements surviennent apparemment brusquement et chez la plupart des sujets, aucun facteur clairement identifiable ne précède la mort cardiaque subite. Bien que la coronaropathie soit le facteur étiologique le plus important entraînant des arythmies ventriculaires menaçant la vie, on observe rarement une angine, d’autres manifestations de l’ischémie myocardique, une aggravation soudaine de l’insuffisance cardiaque ou des facteurs comportementaux tels que le stress ou l’effort, immédiatement avant la mort subite. Une amélioration des traitements à court et à long terme et de la survie chez les patients ayant subi un IM a entraîné une augmentation relative du nombre des patients atteints de coronaropathie chronique et de dysfonction du VG dont l’état est néanmoins stable et chez qui l’on ne prévoit pas une récidive imminente de l’infarctus ou une insuffisance cardiaque progressive. Ces patients se sentent généralement relativement bien et il faut parfois les convaincre d’envisager un traitement prophylactique pour les arythmies cardiaques, qui d’un point de vue subjectif ne peuvent que diminuer leur qualité de vie à court terme. Pour faire face à ces dilemmes, les cliniciens pendant les années 1980 et 1990 pensaient que l’on pouvait prévenir la mort subite en administrant un traitement pharmacologique antiarythmique. Cette approche offrait l’avantage conceptuel qu’elle pouvait être appliquée en tant que « chimioprophylaxie » contre la mort cardiaque subite à un large groupe de patients présentant un risque relativement faible. En raison de l’échec spectaculaire des médicaments de la classe I (p. ex. flécaïnide) après un IM, on s’est intéressé aux médicaments qui prolongent la repolarisation cardiaque (médicaments de la classe III). Le plus étudié de ces médicaments est l’amiodarone. Plusieurs études de très grande envergure ont examiné en détail l’utilité potentielle de l’amiodarone pour prévenir la mort subite chez les patients à haut risque atteints de coronaropathie et de dysfonction du VG, les études les plus importantes étant EMIAT (European Myoardial Infarction Arrhythmia Trial)2 et CHF-STAT (Congestive Heart Failure – Survival Trial of Antiarrhythmic Therapy)3. L’étude CAMIAT (Canadian Amiodarone Myocardial Infarction Arrhythmia Trial)4 comprenait également des patients ayant souffert d’un IM, dont la plupart présentaient au moins une dysfonction modérée du VG, ainsi que des extrasystoles ventriculaires fréquentes. Toutes ces études étaient des études cliniques randomisées et contrôlées avec placebo. Aucune n’a pu démontrer une réduction statistiquement ou cliniquement significative de la mortalité cardiaque toutes causes. Bien que des méta-analyses de l’amiodarone aient suggéré une réduction légère et statistiquement significative de la mortalité toutes causes dans les populations à haut risque, les études individuelles auprès de patients atteints de coronaropathie et de dysfonction du VG ne laissent que peu d’espoir quant à l’utilité de l’amiodarone dans cette population de patients. Le fardeau croissant des effets indésirables associés à l’amiodarone est un autre obstacle à son utilisation. Étant donné le faible nombre de données à l’appui, il n’existe pas de raison valable de prescrire l’amiodarone comme traitement prophylactique primaire de la TV ou de la FV chez les patients atteints de coronaropathie et de dysfonction du VG et ne présentant pas de symptômes d’arythmies ventriculaires soutenues. Des études de grande envergure ont également examiné les avantages potentiels des nouveaux médicaments antiarythmiques de la classe III dans la prévention de la mort subite après un IM ou chez les patients atteints d’insuffisance cardiaque, comprenant les études sur le dofétilide (DIAMOND5 et DIAMOND-CHF6) et sur l’azimilide (ALIVE7). Ces études n’ont pas démontré une différence en ce qui concerne la mort subite ou la mortalité toutes causes entre les patients traités avec les médicaments actifs et ceux traités avec le placebo. Il est extrêmement important de noter que le traitement avec les bêta-bloquants offre sans aucun doute l’avantage de prolonger la vie chez les patients ayant subi un IM, en particulier chez ceux atteints d’insuffisance cardiaque ou de dysfonction du VG importante. Cependant, en-dehors des bêtabloquants qui sont universellement nécessaires, à moins qu’ils ne soient absolument contre-indiqués, on ne peut pas vraiment espérer que les médicaments antiarythmiques apportent du moins Cardiologie Actualités scientifiques pour l’instant une solution même partielle au problème de la mort subite dans les populations susceptibles atteintes de maladie coronarienne. Figure 1 : Survie à long terme des patients assignés au hasard au DCI comparativement à l’amiodarone dans l’étude CIDS13 100 Le défibrillateur cardiaque implantable 80 Survie (%) Le DCI est un traitement efficace pour prévenir la mort due aux arythmies ventriculaires, mais il est intellectuellement inélégant, car il ne prévient pas les arythmies, mais les traite uniquement après leur apparition. Les chocs causés par le défibrillateur sont douloureux et désagréables. Ces dispositifs sont coûteux et leur implantation nécessite une intervention chirurgicale. En outre, le suivi des patients peut être techniquement difficile. Quelles sont les données en ce qui concerne les défibrillateurs implantables et la mort subite? Il existe de nombreuses données sur l’efficacité des DCI. Lorsque ces dispositifs sont correctement vérifiés, la probabilité qu’ils rétablissent correctement un rythme permettant la perfusion du myocarde est d’au moins 99 % chez les patients atteints de TV ou de FV. Actuellement, l’implantation de ces dispositifs est associée à un taux de morbidité majeure ou de mortalité < 1 % et la morbidité et la complexité chirurgicales de leur implantation sont très similaires à celles associées à l’implantation d’un cardiostimulateur. De nombreuses arythmies menaçant la vie chez les patients ayant reçu un SCI sont dues à des tachycardies ventriculaires soutenues que l’on peut traiter généralement avec succès (sans douleur) avec un cardio-stimulateur anti-tachycardies. Les améliorations dans la conception des SCI entraîneront probablement une meilleure discrimination des tachycardies, grâce à laquelle le patient devrait recevoir un moins grand nombre de chocs, en particulier les chocs inappropriés. Les études menées auprès de patients présentant des antécédents d’arrêt cardiaque ou de tachycardie ventriculaire soutenue (prophylaxie secondaire) ont démontré clairement que les DCI sont à la fois efficaces et supérieurs au traitement pharmacologique antiarythmique pour prévenir la mortalité toutes causes chez ces patients. Les études AVID8, CIDS9 et CASH10, et leur méta-analyse, ont démontré une réduction d’environ 20 à 30 % de la mortalité toutes causes chez ces patients. Le plus grand avantage relatif des défibrillateurs cardiaques par rapport au traitement antiarythmique (amiodarone en traitement primaire) a été observé chez les patients dont la fonction ventriculaire était la plus mauvaise et chez les personnes âgées12. L’étude CIDS (Canadian Implantable Defibrillator Study) a révélé une réduction non significative du risque de mortalité globale grâce à un DCI comparativement à l’amiodarone9. Un sous-groupe de patients de l’étude CIDS ont été suivis de 1991 à 2002. Ce sous-groupe comprenait des patients qui avaient été assignés au hasard à l’amiodarone (n = 60) ou à un DCI (n = 60) pendant la durée de l’étude CIDS qui a eu lieu dans un seul centre (Hôpital St. Michael, Toronto) et dont le traitement n’avait pas été modifié après la fin officielle de l’étude. Les résultats de cette étude ont été présentés au Congrès canadien sur les maladies cardiovasculaires en octobre 200213. Sur une période de 11 ans, on a enregistré 28 décès dans le groupe amiodarone comparativement à 16 décès dans le groupe DCI (figure 1). Dans le groupe amiodarone, 49 patients (82 %) ont présenté des effets secondaires associés à l’amiodarone. Parmi eux, 30 patients (50 %) ont du arrêter le traitement ou réduire la dose du médicament; 18 ont été DCI (n = 60) 60 p = 0,0231 40 Amiodarone (n = 60) 20 RR = 2,01 (1,08-3,72) 0 Nbre à risque DCI 60 Amiodarone 60 2 4 6 8 Temps (années) 53 50 48 42 33 24 16 7 10 12 4 2 permutés dans le groupe DCI en raison de l’échec du traitement avec l’amiodarone (n = 7) ou des effets indésirables du médicament (n = 11). Dans cette étude, l’avantage du DCI par rapport à l’amiodarone a apparemment augmenté avec le temps, étant donné que la plupart des patients traités avec l’amiodarone ont présenté des récidives ou des effets indésirables ou sont décédés durant le suivi de 11 ans. Étant donné que dans la majorité des cas, la mort subite est survenue chez des patients sans antécédents de TV ou de FV soutenue documentée, les études ont évalué l’utilité des défibrillateurs cardiaques en tant que « traitement primaire » de la mort cardiaque subite. Les données recueillies de ces études ont été brièvement analysées ci-dessous. Études cliniques sur les DCI prophylactiques Les études initiales étaient axées sur des patients qui présentaient un risque particulièrement élevé de mort cardiaque subite d’après leur faible fraction d’éjection et un marqueur de risque additionnel de mort cardiaque subite. MADIT I L’étude MADIT (Multicenter Automatic Defibrillator Implantation Trial I) a évalué des patients atteints de coronaropathie, ayant une mauvaise fonction du VG et une TV asymptomatique non soutenue avec une TV ou une FV inductible lors d’une étude électrophysiologique (EP) que l’on ne pouvait pas supprimer par un traitement pharmacologique antiarythmique14. Cette étude était la première à démontrer que les DCI prophylactiques offraient un avantage potentiel, à savoir une réduction de 54 % de la mortalité chez les patients ayant reçu un DCI comparativement à ceux ayant reçu un traitement médical conventionnel. Les points faibles de cette étude comprenaient sa taille relativement petite, le traitement par des bêta-bloquants et des inhibiteurs de l’ECA qui était inadéquat et la séquence cliniquement peu pratique suivante qui était nécessaire pour la stratification du risque : étude EP avec la nécessité d’induire une TV, puis tentative de suppression de la TV/FV avec le procaïnamide. Cependant, les résultats de l’étude Cardiologie Actualités scientifiques CABG Patch Dans l’étude CABG Patch (Coronary Artery Bypass Graft), les patients ont été assignés au hasard à un DCI ou à un traitement témoin sans DCI, immédiatement après un pontage aorto-coronarien réussi, s’ils répondaient aux critères d’inclusion suivants : faible fraction d’éjection (< 35 %) et ECG positif avec haute amplification15. Tous les dispositifs étaient attachés au cœur à l’aide de bandes adhésives épicardiques pour défibrillateur (que l’on n’utilise plus dans le pontage aorto-coronarien). Cette étude n’a pas montré que le défibrillateur implantable offrait un avantage, mais chez les patients dotés d’un défibrillateur et ceux qui n’en étaient pas dotés, on a noté une faible mortalité cardiaque (5,9 % par année), ce qui suggère que la revascularisation chirurgicale a un effet protecteur très important contre la mort subite. MUSTT Comme l’étude MADIT, l’étude MUSTT (Multicenter UnSustained Tachycardia Trial) a également sélectionné des patients atteints de coronaropathie et présentant une fraction d’éjection < 40 % s’ils souffraient de TV asymptomatique non soutenue lors d’une surveillance Holter ou d’une surveillance ECG à l’hôpital, ainsi que de TV inductible lors d’une étude EP16. Ils ont été assignés au hasard à un traitement sélectionné selon les résultats d’une étude électrophysiologique (EP-guided) ou à aucun traitement antiarythmique. Le groupe ayant reçu un traitement sélectionné selon les résultats d’une étude électrophysiologique pouvait recevoir des médicaments antiarythmiques visant à supprimer l’inductibilité de la TV, des médicaments pouvant rendre des arythmies inductibles hémodynamiquement stables ou un DCI. Le choix entre le défibrillateur et le traitement pharmacologique n’a pas été randomisé. Le taux de mort subite à 5 ans était plus faible dans le groupe ayant reçu un traitement sélectionné selon les résultats d’une étude électrophysiologique (25 % vs 32 %, p = 0,04), mais la mortalité toutes causes n’était pas plus faible (48 % vs 42 %, p = 0,06, figure 2). Cependant, une analyse secondaire comparant les patients ne recevant pas de traitement antiarythmique à ceux à qui l’on avait implanté un DCI et recevant un traitement antiarythmique a montré des tendances frappantes. Le risque relatif de décès toutes causes dans le groupe DCI comparativement au groupe ne recevant pas un traitement antiarythmique était de 0,45 (IC à 95 %, 0,32-0,63) et comparativement au groupe recevant un traitement pharmacologique antiarythmique sélectionné selon les résultats d’une étude électrophysiologique, il était de 0,40 (IC à 95 %, 0,270,59). Bien que l’on ne puisse pas attribué strictement ces résultats au traitement randomisé, on a à juste titre interprété l’étude dans un sens large comme démontrant que l’utilisation du DCI était supérieure à aucun traitement antiarythmique ou à un traitement antiarythmique. Étant donné les DCI étaient de plus en plus utilisés, on a observé qu’avec le temps, la stratégie consistant à administrer un traitement Figure 2 : Mortalité totale chez les patients recrutés dans l’étude MUSTT15. Le DCI est associé à une plus faible mortalité qu’aucun traitement antiarythmique ou un traitement pharmacologique sélectionné selon les résultats d’une étude électrophysiologique (EP-guided). 0,6 0,5 Taux d’événements MADIT I ont mené à l’approbation des DCI par la FDA pour le sous-groupe particulier de patients répondant aux critères d’inclusion de cette étude. Traitement « EP-guided », pas de DCI Pas de traitement antiarythmique « EP-guided » Traitement « EP-guided » 0,4 0,3 p < 0,001 0,2 0,1 0 1 2 3 4 Temps écoulé jusqu’au recrutement (années) 5 sélectionné en fonction des résultats d’une étude EP était de plus en plus supérieure à aucun traitement antiarythmique. En outre, du fait que cette stratégie était relativement plus efficace dans les centres qui utilisaient plus fréquemment le DCI, l’hypothèse selon laquelle le défibrillateur avait contribué à tous les avantages observés dans le groupe recevant un traitement antiarythmique était plus plausible. À la suite de l’étude MUSTT, des organismes spécialisés, y compris les lignes directrices consensuelles pour le traitement des arythmies ventriculaires de la Société canadienne de cardiologie, ont conclu que si les patients atteints de coronaropathie qui avaient une fraction d’éjection < 40 % et souffraient de TV non soutenue présentaient une tachycardie ventriculaire inductible lors d’une étude EP, on devrait les traiter de préférence avec un DCI17. Jusqu’à très récemment, du fait que les données ci-dessus étaient ambiguës et applicables à un sous-groupe de patients sélectionnés (tous atteints de coronaropathie, ayant une faible fraction d’éjection, souffrant de TV non soutenue et de TV/FV inductible lors d’études EP), il n’était pas justifié d’appliquer ces recommandations de façon générale dans la pratique clinique quotidienne. MADIT II L’ étude MADIT II, publiée en mars 200218, a adopté une approche simplifiée pour vérifier l’hypothèse que les DCI pourraient réduire la mortalité toutes causes dans des populations à risque. Les seuls critères pour identifier les patients présentant un risque de mort subite était la présence de coronaropathie, d’un IM préalable et d’une fraction d’éjection < 30 %. Dans cette étude, 1232 patients ont été randomisés à un DCI (742 patients) ou à un traitement médical conventionnel (490 patients, ratio de 3:2). Ni une TV non soutenue ni une étude EP étaient nécessaires pour être admis dans cette étude. La population de patients de l’étude MADIT II était raisonnablement représentative d’un groupe potentiellement Cardiologie Actualités scientifiques Figure 3 : Les chiffres au-dessus de chaque barre reflète le nombre nécessaire pour traiter (NNT) pour prévenir un décès (durant la période de temps indiquée) dans diverses études sur les traitements cardiovasculaires 28 1,0 26 25 22 23 0,8 20 20 15 11 9 10 5 0 3 Groupe défibrillateur 24 Probabilité de survie Le nombre nécessaire pour traiter 30 Figure 4 : Survie chez 364 patients participant à l’étude MADIT-II dont la durée du complexe QRS est > 120 msec (à l’exclusion des patients dotés d’un cardiostimulateur), assignés au DCI (groupe défibrillateur) ou à aucun traitement antiarythmique (groupe conventionnel). 4 MUSTT MADIT MADIT-2 AVID SAVE SOLVD CIBIS-II ISIS-2 MERIT-HG 4S (5 ans) (2,4 ans) (3 ans) (3 ans) (3 ans) (4 ans) (1 an) (2 ans) (1 an) (6 ans) 0,6 Conventional Group 0,4 RÉDUCTION DE LA MORTALITÉ 0,2 P < .0001 0,0 0 NNT x années = 100 /(% de mortalité dans le groupe témoin – % de mortalité dans le groupe de traitement) SAVE et SOLVD sont des études sur les inhibiteurs de l’ECA. CIBIS-II et MERIT-HG sont des études sur les bêta-bloquants. ISIS-2 est une étude sur un agent thrombolytique. 4S est une étude sur le traitement avec des statines. 2 ans 3 ans Convent. 36 % 53 % 14 % 21 % DCI 1 2 Années 3 4 RR = 0,37 (p = 0,004), réduction de 63 % de la mortalité17 très important de patients atteints de coronaropathie chronique et ayant subi un IM. L’âge moyen était de 65 ans et 70 % présentaient des symptômes de la classe I ou II de la NYHA. Une majorité avait subi il y a longtemps un pontage aorto-coronarien (57 %) ou une angioplastie coronarienne (44 %). Chez la vaste majorité des patients, il s’était écoulé plus de 6 mois depuis leur IM le plus récent. Fort heureusement, le traitement pharmacologique était suffisamment perfectionné pour permettre de généraliser les résultats; 70 % recevaient des inhibiteurs de l’ECA, 70 % des bêta-bloquants, 57 % de la digitale et 66 % des statines. Environ 12 % recevaient de l’amiodarone à la dernière visite (probablement le plus souvent en raison de fibrillation auriculaire), seulement 9 % recevaient des bloqueurs calciques et 3 % recevaient des médicaments antiarythmiques de la classe I. Les patients ont été suivis, afin que l’on évalue un paramètre primaire commun, à savoir la mortalité toutes causes. La limite d’efficacité préspécifiée (mortalité) était atteinte un peu plus de 4 ans après le début de l’étude, après un suivi moyen de 20 mois. Avec le temps, le traitement à l’aide d’un défibrillateur a été supérieur en ce qui concerne la mortalité comparativement au traitement conventionnel, avec une réduction globale de 31 % du risque de décès, quel que soit l’intervalle de temps, et une diminution relative de la mortalité de 12 %, 28 % et 28 %, à 1, 2 et 3 ans, respectivement. En terme absolu, cela signifiait une réduction de 1 %, 6 % et 9 % de la mortalité à 1, 2 et 3 ans. Par conséquent, le nombre nécessaire pour traiter (NNT) pour prévenir 1 décès après 3 ans était d’environ 11. Ce NNT se compare très favorablement à celui d’autres traitements cardiovasculaires couramment utilisés, par exemple les bêta-bloquants (CIBIS 2, NNT = 23), les statines (4S, NNT = 28) ou les inhibiteurs de l’ECA (SAVE, NNT = 20, figure 3). On a noté une probabilité légèrement plus élevée d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque dans le groupe DCI (11 pour 1000 mois), comparativement au groupe témoin (9 pour 1000 mois, p = 0,09). Une autre analyse ultérieure de sous-groupe a montré que chez les patients présentant une prolongation de la durée du complexe QRS à l’ECG de surface > 120 msec au départ, l’implantation d’un DCI a entraîné un effet bénéfique spectaculaire et particulièrement important. Chez ces patients, la mortalité a été réduite de 53 % à 21 % (réduction de 63 %) à 3 ans (figure 4). Cette dernière observation est compatible avec des données antérieures démontrant que la prolongation de la durée du complexe QRS à l’ECG de surface est un marqueur simple, mais particulièrement puissant, de la probabilité de mortalité toutes causes et de mort subite. Quelle est la situation actuelle? Les données indiquant que les DCI prolongent la vie chez les patients qui présentent une vulnérabilité à la mort cardiaque subite sont convaincantes. Il est important de souligner que jusqu’à présent, les études portaient exclusivement sur des patients atteints de coronaropathie (contrairement à ceux atteints de cardiomyopathie dilatée ou d’autres formes de cardiomyopathie) et n’étaient probablement pas applicables aux patients venant de subir un pontage aorto-coronarien. Aucune étude n’a montré que les DCI sont supérieurs au traitement médical chez les patients atteints de cardiomyopathie dilatée. Cependant, une étude importante sur les DCI comparativement à l’amiodarone (SCD-HeFT) traitera de cette question. Mises à part ces exceptions, chez les patients dont la fonction ventriculaire est très mauvaise, l’implantation d’un défibrillateur aura sans aucun doute un effet bénéfique, même s’ils reçoivent un traitement médical optimal. Bien que les études MADIT et MUSTT n’aient pas systématiquement comparé le DCI au « meilleur » traitement médical (presque certainement l’amiodarone), l’absence de preuve évidente que l’amiodarone est efficace, ainsi que le Cardiologie Actualités scientifiques Références 1. Hauer RN, Aliot E, Block M, et al. Indications for implantable cardioverter defibrillator (ICD) therapy. Study Group on Guidelines on ICDs of the Working Group on Arrhythmias and the Working Group on Cardiac Pacing of the European Society of Cardiology. Eur Heart J 2001;22(13):1074-1081. 2. Julian DG, Camm AJ, Frangin G, et al. 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On notera que dans l’étude MADIT et d’autres études, l’implantation du défibrillateur n’a pratiquement pas causé de mortalité périopératoire et a entraîné une incidence de 2,5 % d’événements indésirables non mortels nécessitant une intervention chirurgicale (problèmes de dérivation ou infection)18. Le principal obstacle à l’utilisation répandue des DCI prophylactiques, du moins dans un contexte canadien, semble être la limitation des ressources, tant en ce qui concerne les coûts des dispositifs et de leur implantation et que la disponibilité du personne médical capable de réaliser les interventions et d’effectuer le suivi des patients. En outre, on n’a pas réellement déterminé le nombre total d’années de vie prolongée ainsi que la qualité de ces années de vie supplémentaires, étant donné la courte période de suivi pour toutes les études publiées jusqu’à présent. Comment le clinicien fait-il face à ces ambiguités? Pour l’instant, il semble approprié au moins d’envisager l’implantation d’un DCI prophylactique chez tous les patients ayant subi un IM de longue date et ayant une fraction d’éjection < 30 %, sous réserve qu’ils reçoivent ou que l’on envisage de leur administrer des traitements pharmacologiques fondés sur l’expérience clinique (bêta-bloquants, inhibiteurs de l’ECA, aspirine, statines et spironolactone, tel qu’indiqué). Si la revascularisation est indiquée et faisable, elle doit être réalisée. La présence d’une TV non soutenue pendant la surveillance Holter ou à l’hôpital ajoute probablement une certaine signification pronostique19, bien que l’importance des informations fournies par cette observation ne soit pas claire. Chez la plupart des patients, il n’est probablement pas nécessaire d’effectuer une étude EP pour la stratification des risques. L’attente d’un avantage thérapeutique est plus grande chez les patients présentant un bloc de branche gauche ou un complexe QRS > 120 msec. Sur la base de ces considérations, on devrait informer le patient des options thérapeutiques disponibles, à moins qu’il présente de graves comorbidités qui réduisent la probabilité que le traitement offre des avantages. On ne devrait pas prendre explicitement en considération le fait que les ressources actuellement disponibles ne sont pas suffisantes pour répondre à la demande potentielle de DCI prophylactique dans le calcul du risque-avantage individuel pour un patient. De toute évidence, les implications en matière de ressources (les exigences en matière de coût et de ressources indirectes) pour l’adoption générale des DCI sont considérables. Les sociétés scientifiques, les organismes consultatifs, les médecins, les administrateurs d’hôpitaux et les organismes gouvernementaux devront attentivement examiner, collectivement, toutes ces considérations pour bien distribuer les ressources qui sont et peuvent devenir disponibles pour répondre à ces défis. Il sera peut-être ensuite possible d’influencer ce « danger omniprésent » de mort cardiaque subite et d’empêcher l’épée de Damoclès de frapper un autre patient. Le D r Dorian a reçu une subvention pour des études de recherche et des honoraires de conférencier de Medtronic Inc., Guidant Corp. et St Jude Medical Inc. Snell Communication Médicale reconnaît qu’elle a reçu une subvention à l’éducation sans restrictions de Canadian Heart Rhythm Task Force (CHRTF) pour la distribution de ce numéro de Cardiologie – Actualités scientifiques. CHRTF comprend des fabricants d’appareils cardio-vasculaires au Canada qui sont membres de MEDEC (Medical Devices Canada). L’ octroi de cette subvention était fonction de l’acceptation par le commanditaire de la politique établie par la Division de cardiologie et par SNELL Communication Médicale garantissant le but éducatif de la publication. Cette politique garantit que l’auteur et le rédacteur jouissent en tout temps d’une indépendance scientifique rigoureuse totale sans l’interférence de toute autre partie. La version française a été revisée par le Dr George Honos, Montréal. © 2003 Division de Cardiologie, Hôpital St. Michael, Université de Toronto, seule responsable du contenu de cette publication. Éditeur : SNELL Communication Médicale Inc. en collaboration avec la Division de Cardiologie, Hôpital St. Michael, Université de Toronto. MCActualités scientifiques – Cardiologie est une marque de commerce de SNELL Communication Médicale Inc. Tous droits réservés. L’administration des traitements décrits ou mentionnés dans Actualités scientifiques – Cardiologie doit toujours être conforme aux renseignements thérapeutiques approuvés au Canada. SNELL Communication Médicale Inc. se consacre à l’avancement de la formation médicale continue de niveau supérieur. SNELL 202-017F