
Sir Peter Hall, une figure de l’urbanisme (2)
| 2
élaborées[2]. En 1967, l’année record pour le nombre de logements achevés au Royaume-Uni, les
services de planification locale étaient en cours de réorganisation pour relever les défis de ces plans
et de la croissance économique et spatiale. Ces services étaient de plus en plus composés de jeunes
planificateurs « polyvalents » qui sortaient d’écoles d’urbanisme alors en rapide expansion. Portant
un regard rétrospectif sur cette période, Peter Hall conclut que c’était l’apogée d’une croyance dans
un système de planification centralisée, de logique descendante, guidée par les experts, et
« bénigne ». Mais cet âge de confiance a été de courte durée. Déjà avant la fin du gouvernement
Wilson on assiste à l’effondrement du Plan national (1967) et puis à la disparition du Département
des affaires économiques. Les mécanismes de mise en œuvre à hauteur de la vision ambitieuse ne
sont donc désormais plus au rendez-vous. Ensuite la planification spatiale (aussi bien dans les sens
de l’urbanisme réglementaire de la « town planning » que dans le sens de la planification
économique spatialisée de la « regional policy ») est tombée dans une longue spirale descendante,
critiquée pour être trop normative et trop restrictive. Peter Hall nous rappelle l’étude majeure (voir
aussi l’article de Desjardins sur le blog RIU) qu’il a mené avec ses collègues sur The Contaminent of
Urban England en 1973. Celle-ci a conclu que la loi fondatrice du système de planification (la « Town
and Country Planning Act de 1947 ») était trop radicale : fondée sur l’hypothèse que les
planificateurs prendraient l’initiative, et que les promoteurs privés – perçus comme des acteurs
« résiduels » dans un monde qui serait dominé par le logement public – allaient tout simplement
répondre aux plans et préconisations des planificateurs[3]. Pendant les années 1970 et les années
1980, la désindustrialisation a décimé les économies des villes, et l’attention de l’action publique
s’est déplacée vers la régénération urbaine, même si le métier d’urbaniste et le système d’urbanisme
réglementaire pour les villes et les zones rurales sont restés.
Pour Peter Hall, sous les gouvernements de Tony Blair (1997-2007), le Royaume-Uni a vu un bref
retour à la planification stratégique. En 2003 on propose un « Sustainable Communities Plan » qui
avec sa proposition de trois principaux corridors de développement rayonnant à partir de Londres,
n’allait pas sans rappeler la stratégie alors presque oubliée de 1967. On a même cherché à
développer une nouvelle génération de stratégies spatiale régionales, surtout pour faire face aux
défis du logement. Toutefois, en 2004 les électeurs dans le nord-est de l’Angleterre ont rejeté la
proposition d’une assemblée régionale démocratiquement élue. Cet échec est qualifié de
« tragique » par Peter Hall. Faute de légitimité démocratique pour le processus de planification
régionale, c’était trop facile pour le nouveau gouvernement de coalition Conservateur-Liberal élu en
2010, d’abandonner l’ensemble de la structure régionale, ce qui pour Hall, nous a ramené aux
années 1980 – ou peut-être, « cercle complet », au début des années 1920.
Cependant, Peter Hall nous rappelle qu’en 2014, les pressions économiques et démographiques
sous-jacentes à la société et aux territoires du Royaume-Uni, restent plus fortes que jamais, et
d’importantes tensions en résultent. Nous vivons un déséquilibre régional massif, à travers lequel
Londres et sa région se détachent du reste de l’économie britannique. Nous construisons moins de
logements neufs qu’à n’importe quelle année de paix, depuis les années 1920 : seulement deux sur
cinq des nouvelles maisons dont nous avons besoin. Et le résultat physique est trop souvent
médiocre provoquant des réactions « NIMBY » (Not in My Back Yard – pas dans mon arrière-cour)[4]