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Sécurité • Santé • environnement DéC. 2012 - n° 32
La circulaire DRT n°89-2 du 6
vrier 1989 préconisait d’ap-
pliquer les dispositions prévues
par le recueil UTE 18-510, document
de référence dans le domaine de la
prévention des risques électriques.
Les préconisations qui y figuraient
avaient pour beaucoup valeur d’obli-
gation tant ce risque pouvait avoir
des conséquences dramatiques
pour les travailleurs. En rendant
obligatoire la démarche d’habilita-
tion, le décret 2010-1118 du 22
septembre 20101 et l’arrêté du 26
avril 20122 permettent de clarifier
ce processus. La clarification s’est
accompagnée de quelques modi-
fications visant à adapter les habi-
litations électriques aux besoins
actuels du monde du travail.
Ces modifications sont détaillées
dans la norme d’application obliga-
toire NFC 18-510 qui se substitue au
recueil UTE 18-510.
Cette norme définit l’habilitation
comme étant la « reconnaissance
par l’employeur de la capacité d’une
personne placée sous son autorité
à accomplir les tâches qui lui sont
confiées en sécurité vis-à-vis du
risque électrique ».
Les types d’habilitation
Symboles d’habilitation
Les symboles d’habilitation sont
composés de deux à trois caractères
(lettre ou chiffre) éventuellement
accompagnés d’un attribut (voir
tableau n° 1) :
- Le 1er caractère détermine le
domaine de tension concerné :
haute tension, basse et très basse
tension ;
- Le 2e caractère détermine le type
d’opération : opération d’ordre
électrique ou non électrique, consi-
gnation, opérations spécifiques…
- Le 3e caractère, optionnel, donne
des précisions sur la nature des
opérations : travaux sous tension,
nettoyage…
- Lattribut est une mention spéciale,
réservée aux habilitations pour les
opérations spécifiques : essai, véri-
fication, mesurage et manœuvre.
En fonction de l’activité qui sera
confiée aux agents et des instal-
lations électriques concernées, un
niveau d’habilitation sera défini par
l’employeur après analyse des com-
pétences professionnelles et l’ab-
sence de contre-indication médicale.
Le tableau n° 2 propose quelques
exemples de niveau d’habilitation
pour des activités courantes3.
Nouveautés
L’introduction des niveaux d’habi-
litation « BE/HE » et « BS » permet
aujourd’hui de clarifier une situa-
tion jusqu’à présent mal maîtrisée
car très contraignante. Certaines
opérations d’ordre électrique cou-
rantes nécessitaient, avant la modi-
fication du dispositif réglementaire,
La prévention du risque électrique est ancrée dans les pratiques des établissements
publics et privés depuis de nombreuses années, du fait de la gravité des accidents dans
ce domaine (cf. figure 1). L’habilitation électrique, qui occupe une place centrale dans
ce dispositif de prévention, n’était pourtant pas, jusqu’à l’année dernière, une obligation
réglementaire.
Habilitations électriques :
ce qu’il faut savoir
1 Décret codifié aux articles R4544-1 à R4544-11 du code du travail
2 Arrêté du 26 avril 2012 relatif aux normes définissant les opérations sur les installations électriques ou dans
leur voisinage ainsi que les modalités recommandées pour leur exécution
3 Pour plus de précisions sur les symboles d’habilitation, se référer à la norme NF C 18-510
143 1 245
Risques électriques Tous risques
15
AT
avec arrêt
AT avec incapacité
permanente 78
1 AT mortel 1
Fig. 1 "Pyramide de Bird" (source INRS - ED 6127 - L'habilitation électrique)
7
la présence d’un électricien quali-
fié disposant d’une habilitation de
niveau H1/B1 (électricien exécu-
tant) ou BR (chargé d’intervention).
Aujourd’hui, ces opérations peuvent
être confiées à des personnels non
électriciens, mais disposant néan-
moins des habilitations adéquates :
- l’habilitation BE/HE « Manœuvre »
permet de enclencher des dis-
positifs de protection dans les
tableaux électriques (disjoncteurs).
- l’habilitation BS permet de rempla-
cer à l’identique une ampoule, un
interrupteur, une prise de courant.
Le processus d’habilitation
Évaluation des besoins
Les niveaux d’habilitation étant
nombreux, l’employeur doit au
préalable analyser l’activité du
futur habilité afin de définir le type
d’habilitation qu’il devra lui délivrer.
Cette analyse se base sur des critères
tels que le type d’opération envisagé
(électrique ou non), la fonction du
travailleur, la nature des opérations
(consignation, travaux, essai…), les
caractéristiques des installations
(BT, HT)… Des grilles d’identification
des besoins, visant à faciliter cette
démarche, sont mises à disposition
par certains ingénieurs régionaux
de prévention et sécurité du CNRS.
Les prestataires de formation
élaborent également ce type de
document afin d’accompagner les
employeurs dans cette réflexion.
Activités Symboles
Accès à des zones réservées aux électriciens pour réaliser des travaux d’ordre non électrique
(peinture, maçonnerie, nettoyage…)
B0, H0, H0V
Remplacement et raccordement de chauffe-eau, convecteurs…
Remplacement de fusibles BT, réarmement de protec tions
Remplacement à l’identique d’une lampe, d’un socle de courant, d’un interrupteur
BS
Conception d’équipement, prototypage, modification d’appareil de laboratoire BE Essai
Réarmement d’un disjoncteur, d’un relais thermique, mise hors tension d’un équipement
ou d’une installation
BE Manœuvre
HE Manœuvre
Intervention générale d’entretien et de dépannage sur des circuits électriques BR
Travaux sur des ouvrages et installations électriques B1, B1V, H1, H1V,
B2, B2V, H2, H2V
Consignation d’un ouvrage ou d’une installation électrique BC, HC
tabLEau N° 2 : HabiLitatioNS éLECtRiquES LES PLuS CouRaNtES
tabLEau N° 1 : SYStèmE DE CLaSSiFiCatioN DES HabiLitatioNS éLECtRiquES
Remarque : un agent ayant une habilitation d'indice 2 peut prétendre, sans formation supplémentaire, à une habilitation d'indice 0 et 1.
Un agent ayant une habilitation d'indice 1 peut prétendre, sans formation supplémentaire, à une habilitation d'indice 0.
Il en est de même pour l'indice BR, l'agent peut prétendre à une habilitation d'indice BS sans formation additionnelle.
1er caractère 2e caractère 3e caractère Attributs
B : basse et très basse tension
H : haute tension
0 : travaux d’ordre non électrique
1 : exécutant opération d’ordre électrique
2 : chargé de travaux
C : consignation
R : intervention BT générale
S : intervention BT élémentaire
E : opération spécifique
P : opérations sur les installations photo-
voltaïques
T : travaux sous tension
V : travaux au voisinage
N : nettoyage sous tension
X : spéciale
Essai
Vérification
Mesurage
Manœuvre
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Sécurité • Santé • environnement DÉC. 2012 - n° 32
Compétences et absence de contre-
indication médicale de l’agent
Avant d’habiliter un agent, l’em-
ployeur doit également s’assurer
que ce dernier dispose des com-
pétences techniques nécessaires,
en fonction des activités qu’il envi-
sage de lui confier : le niveau de
qualification requis ne sera pas le
même pour une habilitation H1/B1
(électricien qualifié) que pour une
habilitation H0/B0 (personnel non
électricien ne disposant d’aucune
compétence spécifique dans ce
domaine). Le médecin de prévention
devra s’assurer qu’aucune contre-
indication médicale ne s’oppose à la
délivrance de l’habilitation.
Formation
Une fois l’adéquation entre les com-
pétences et le niveau d’habilitation
évaluée par l’employeur, l’agent
devra suivre une formation prépara-
toire à l’habilitation. Cette formation,
composée d’une partie théorique et
d’une partie pratique, vise à lui don-
ner les compétences dans le domaine
de la prévention du risque électrique.
Son programme et sa durée sont
définis en fonction du niveau d’ha-
bilitation souhaité (de 8h pour une
formation de niveau B0 « Exécutant
non électricien » à 24h30 pour une
formation de niveau H2 « Char
de travaux électriques »). Une fois
la formation dispensée, une évalua-
tion des connaissances acquises est
effectuée à l’aide d’un QCM4. Une
évaluation des savoir-faire est égale-
ment réalisée par le formateur à par-
tir d’un ou plusieurs cas pratiques.
Ces formations anciennement
optionnelles sont dorénavant régle-
mentairement obligatoires.
Avis du formateur, titre d’habilita-
tion et carnet de prescriptions
En fonction des résultats du QCM
et de l’évaluation des cas pratiques,
le formateur émet un avis, favo-
rable ou défavorable, sur le niveau
d’habilitation demandé par l’em-
ployeur. Après prise en compte de
cet avis, l’employeur délivre ou non
l’habilitation, qu’il formalise dans
un titre d’habilitation. Celui-ci com-
porte notamment les indications
suivantes : identification de la per-
sonne habilitée, symboles d‘ha-
bilitation ; domaines de tension
4 Questionnaire à choix multiples
Au cours d'un réglage d'un banc optique
(non mis à la masse), la victime a activé
l'interrupteur mural pour éclairer la pièce.
la victime a alors reçu un choc électrique
entre le majeur de la main gauche (point
d'entrée légèrement visible en contact avec
l'interrupteur) et la main droite en contact
du banc optique. Le banc optique était
placé sur une table métallique alvéolaire
(non relié à la masse) sur lequel un boitier
électronique "maison" d'alimentation d'un
photomultiplicateur était posé. Le local a été
condamné immédiatement et un électricien
est intervenu sur l'interrupteur en cause. Le
banc a été mis à la masse et les appareils
électriques posés dessus ont été isolés.
L’interrupteur a été remplacé.
Une victime s’est
électrisée en manipulant
le bouton d'ouverture
défectueux d'une
centrifugeuse de paillasse.
La centrifugeuse a été
envoyée en déchèterie et
une neuve a été achetée.
• Absence d’habilitation électrique
• Absence de plan de prévention
• Matériels défectueux
Absence de protection individuelle
(gants isolants, chaussures isolantes
de sécurité…)
Titulaires
CNRS
non communiqué Non titulaires
CNRS
17 % 37 %
46 %
Statut deS victimeS
PrinciPaleS cauSeS deS accidentS
récitS daccidentS
En remplaçant une cartouche de
résine échangeuse d'ions placée à
côté d'une alimentation électrique
sous tension, la victime a reçu
une décharge électrique. Elle a
ressenti une douleur à la poitrine.
L'appareillage a été arrêté et mo-
difié ; les cartouches de résine ont
été sorties de l'appareillage afin
de procéder à leur remplacement
sans risque de venir en contact
avec un appareil sous tension.
Après consignation du
sectionneur de l'armoire
électrique et vérification de
l'absence de tension, l'opéra-
teur électricien a touché une
partie active située en amont
du sectionneur (non indiquée
dans le plan électrique) d'où
l’électrisation. Le plan élec-
trique a été modifié.
Accident mortel par électrocution lors de
travaux de maintenance sur un LASER par
la personne du service après-vente.
A ce moment, l'appareil était entièrement
démuni de ses capots de protection et les
contacts de sécurité étaient neutralisés par
des bandes adhésives. Les micro-contacts
de sécurité sur les panneaux avaient été
shuntés. La victime est entrée en contact
avec un point du circuit haute-tension
et a reçu une décharge électrique qui l'a
foudroyée. L'autopsie aurait fait apparaître
deux points de contact, l'un à la base du
majeur de la main gauche, l'autre à la base
du cœur.
Une prise électrique murale,
raccordée à une rallonge
reliant un ordinateur, a brulé
au démarrage de ce dernier.
Il semblerait qu'il y ait eu une
agrafe plantée dans le cordon
de la rallonge. Des électriciens
sont intervenus pour vérifier
la ligne électrique.
Suite à une coupure d'électrici-
té dans une pièce du labora-
toire, la victime a procédé au
ré-enclenchement du disjonc-
teur et un arc électrique est
apparu sur les fils dénudés d'un
distillateur à eau. Une flamme
s'est formée mais s'est éteinte
rapidement. Les fils, entourés
d'une gaine en tissu, vétustes,
ont été changés.
9
concernés, ouvrages et installations
électriques concernés, visa du titu-
laire et de l’employeur, durée de
validité du titre. Il remet également
à l’agent habilité un carnet de pres-
criptions basé sur la norme NF C
18-510, complété si besoin par des
consignes de sécurité spécifiques
aux installations entrant dans le
champ de l’habilitation.
Recyclage
La périodicité de recyclage doit être
déterminée par l’employeur, mais
une périodicité de 3 ans est recom-
mandée par la norme NF C 18-510.
Lemployeur doit également s’as-
surer annuellement, en lien avec
la mise à jour du DUER5, que les
besoins en matière d’habilita-
tion sont toujours en adéquation
avec les activités réalisées par les
agents habilités. Le cas échéant, il
doit revoir les niveaux d’habilita-
tion de ses personnels. Attention,
l’introduction de nouveaux niveaux
d’habilitation (BS, BE manœuvre…)
impacte les modalités de recyclage
des personnels habilités sur la base
des anciens standards. En cas de
doute sur le choix du recyclage, un
accompagnement peut être assuré
par les services prévention et sécu-
rité des délégations.
Les travaux sous tension
En plus des dispositions réglemen-
taires détaillées évoquées plus haut,
lorsque les agents effectuent des
travaux sous tension, l’employeur
doit s’assurer qu’ils disposent d’une
certification délivrée par un orga-
nisme de certification accrédité.
La mise en œuvre du nouveau
dispositif réglementaire
Les employeurs ont un délai de 4 ans,
à compter du 1er juillet 2011, pour
progressivement mettre en appli-
cation les dispositions du nouveau
décret. Les habilitations électriques
délivrées entre le 1er juillet et le 26
décembre 2011 (date de publication
de la norme NF C 18-510) restent
valides pour une durée de 3 ans. Il
est néanmoins préférable d’engager
dès que possible une réflexion au
sein de votre structure, en collabo-
ration avec les services de forma-
tion compétents et votre ingénieur
régional de prévention et sécurité,
sur la mise en œuvre de ces dispo-
sitions.
Intervention d'un plombier d'une
entreprise extérieure sur des
convecteurs de climatisation
sans habilitation électrique et
travaillant sous tension dans un
milieu humide. Aucune visite
et aucun plan de prévention
n’avaient été effectués avant les
travaux et l'ACMO n'avait pas été
informé de cette opération.
3
12
11
4
6
6
31
Institut national de physique nucléaire et de physique
des particules (IN2P3) et ancien département physique
nucléaire et corpusculaire
Institut des sciences biologiques (INSB)
et ancien département sciences de la vie
Institut de chimie (INC) et ancien département sciences chimiques
Autres : DGDR, non communiqué
Institut des sciences de l'ingénierie et des systèmes (INSIS)
Institut de physique (INP) et ancien département sciences physiques
Institut national des sciences de l'univers (INSU)
et ancien département sciences de l'univers
Institut d'écologie et environnement (INEE)
La victime, enceinte, s’est
électrisée en plaçant un
thermocouple dans un
four, ce qui a provoqué
des contractions utérines
anormales. Le four a été
débranché et changé.
réPartition deS 46 événementS Par inStitut
benjamin ZuSSY
Ingénieur régional de prévention
et de sécurité
CNRS Délégation Paris A
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5 Document unique d'évaluation des risques
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