01-cets4-une 1/07/05 12:39 Page 1 Cardio N° 4 - Septembre 2005 & Sp rt LA REVUE PRATIQUE DE LA CARDIOLOGIE DE L’EFFORT ÉVÉNEMENT Le suivi cardiovasculaire des tennismen MISE AU POINT Pathologie vasculaire et sport : revue pour une démarche clinique ANALYSE D’ARTICLE Dépistage cardiovasculaire : consensus européen CONGRÈS XVe Journées Européennes de la Société Française de Cardiologie Dossier pratique ALTITUDE ET SPORT ADAPTATION, PATHOLOGIES ET PRISE EN CHARGE ■ Physiologie de l’hypoxie d’altitude : adaptations cardiovasculaires ■ Médicaments cardiovasculaires : peut-on prédire leur effet en altitude ? ■ Pathologies cardiaques en altitude : risques ■ Prise en charge sur le terrain d’un accident cardiaque grave Page 3 édito L’été est fini Les belles journées à Roland Garros, Wimbledon et Flushing Meadow sont maintenant terminées. Avec elles, les conditions climatiques si propices aux jeux de ballons, à la baignade ou aux randonnées en montagne. Ces dernières sont de plus en plus prisées par nos contemporains. Mais si les cordées vers les sommets enneigés ou les simples promenades familiales en moyenne montagne existent depuis longtemps, les cardiologues du sport se trouvent confrontés depuis peu à une nouvelle population : les coureurs et cyclistes d’altitude, qui recherchent électivement les cumuls de dénivelés les plus importants, dans des conditions météorologiques très sollicitantes et souvent bien loin de la première USIC. Intégrer l’hypoxie, le froid, la fatigue et la déshydratation dans notre décision d’aptitude, voilà un joli challenge cardiologique… et médico-légal… Mais revenons à nos beaux jours. L’été a donc incité la plupart d’entre nous à pratiquer cette activité physique qui, depuis la fin des années 80, en prévention primaire comme en prévention secondaire, accumule patiemment les preuves de ses bienfaits. Comme souvent, il aura fallu du temps pour que nous prenions conscience de l’évidence : l’effort , à certaines conditions, est souhaitable pour chacun d’entre nous, coronarien ou non, insuffisant cardiaque ou non, valvulaire ou non. Et le bénéfice est sans commune mesure avec le reste de nos thérapeutiques. Car enfin, quel médicament, quelle prothèse permet à la fois de lutter contre le stress et d’améliorer la variabilité sinusale, la pression artérielle, l’index de masse corporelle, l’insulino-sensibilité, le HDL-cholestérol ? Et au vu des dernières publications, il paraît clair que le champ des bénéfices est loin d’être exploré en totalité. Dernier point, il n’est jamais trop tard, en prévention primaire comme en prévention secondaire, pour encaisser les dividendes d’une activité physique. Alors, pour paraphraser un de nos grands auteurs, nous pourrions dire « Rien ne sert de partir à point, il faut courir ». Vous avez couru, nagé, sauté, gambadé… C’était l’été… Mais en automne et en hiver, continuez… Dr Laurent Chevalier Clinique du Sport, Bordeaux-Mérignac SOMMAIRE ÉVÉNEMENT p. 4 Le suivi cardiovasculaire des joueurs de tennis de haut niveau ● Entretien avec Dany-Michel Marcadet, médecin cardiologue référent de la FFT Pr François Carré (Rennes) DOSSIER p. 9 Altitude et Sport Adaptations, pathologies et prise en charge Introduction Dr Stéphane Doutreleau (Strasbourg) Physiologie de l’hypoxie d’altitude : adaptations cardiovasculaires Pr Jean-Paul Richalet (Bobigny) Médicaments cardiovasculaires : peut-on prédire leur effet en altitude ? Dr Laurent Monassier (Strasbourg) Pathologies cardiaques en altitude : risques, traitements et prise en charge Dr Stéphane Doutreleau (Strasbourg) Sport en altitude : que faire avant un trekking ? Dr Stéphane Doutreleau (Strasbourg) MISE AU POINT p. 25 Pathologie vasculaire et sport : revue pour une démarche clinique Dr Pierre Abraham (Angers) ANALYSE D’ARTICLE p. 31 Dépistage cardiovasculaire : consensus européen pour les jeunes sportifs Pr François Carré (Rennes) CONGRÈS p. 35 XVe Journées Européennes de la Société Française de Cardiologie, Paris 2005 Dr Marc Ferrière (Montpellier), Pr Hervé Douard (Pessac) AGENDA rt 12:40 & Sp 1/07/05 Cardio 02-cets4 som p. 38 •Rédacteur en Chef : Pr François Carré. Rédacteur en chef adjoint : Pr Hervé Douard. •Comité de rédaction : Dr Laurent Chevalier, Dr Stéphane Doutreleau, Dr Marc Ferrière, Dr Jean-Claude Verdier. •Comité scientifique : Dr Jacques Tricoire, Dr Pascal Poncelet, Dr Richard Brion, Dr Alain Ducardonnet, Dr Elisa Pedroni, Dr Jean-Michel Chevallier, Dr Thierry Laporte, Pr Dominique Midy, Dr Pierre Dumoulin, Pr Philippe Mabo, Dr Catherine Montpère, Dr Philippe Vernochet, Dr Sonia Corone, Pr Alain Cohen-Solal, Pr Patrice Virot, Dr François Marçon, Pr Jean-Paul Broustet, Dr Vincent Lafay, Dr Jean Gauthier, Dr Dany Marcadet, Dr Richard Amoretti. Distribué par les Laboratoires Menarini France. 1, rue du Jura, SILIC 528, 94633 Rungis Cedex - Tél. : 01 45 60 77 20 - Fax : 01 46 87 94 31 Edition Expressions Santé S.A. - Directeur de la publication : Dr Antoine Lolivier •Chef du Service Rédaction : Odile Mathieu •Rédacteur : Marjorie Andrès •Secrétaire de rédaction : Annaïg Bévan •Chef de Production et Fabrication : Gracia Bejjani •Maquette : Christine Lecomte Photo de couverture : DPPI •Impression : Imprimerie de Compiègne, 60205 Compiègne - ISSN : en cours. 3 Cardio&Sport • n°4 événement 03-cets4-even 1/07/05 12:40 Page 4 Le suivi cardiovasculaire des joueurs de tennis de haut niveau Entretien avec Dany-Michel Marcadet, médecin cardiologue référent de la Fédération Française de Tennis La saison de tennis terminée, Cardio et Sport fait le point, dans un entretien avec le Dr Dany-Michel Marcadet, cardiologue référent de la Fédération Française de Tennis, sur le suivi médical et plus particulièrement cardiovasculaire, des “tennismen” en France. Propos recueillis par le Pr François Carré, Hôpital Pontchaillou, Rennes Bien entendu, j’interviens aussi sur demande devant l’apparition de symptômes, par exemple. C&S : Comment est structuré le suivi médical des “tennismen” actuellement, en particulier dans le domaine cardiovasculaire ? Cardio & Sport : Dr Marcadet, pouvezvous nous préciser votre fonction et vos responsabilités au sein de la Fédération Française de Tennis ? Dany-Michel Marcadet : Le service médical de la Fédération Française de Tennis a été restructuré il y a trois ans. Je suis chargé des bilans cardiologiques annuels, suivant la réglementation actuelle pour les joueurs de haut niveau, mais le service reste ouvert aux joueurs professionnels. Cardio&Sport • n°4 DMM : Le service médical comprend des médecins salariés à temps partiel (endocrinologue, nutritionniste, psychologue, rhumatologue) et des médecins vacataires (dentiste, ophtalmologiste, cardiologue). Le directeur médical et les kinésithérapeutes sont salariés. Une fois les bilans réalisés, nous nous réunissons avec les entraîneurs à l’occasion d’un staff pour faire le point sur l’état de santé des joueurs. Le centre médical est dans l’enceinte du stade Roland Garros, sous le court Suzanne Lenglen. Nous disposons de plusieurs salles de consultations et le cabinet de cardiologie est équipé d’un matériel d’épreuve d’effort avec ergocycle, tapis roulant, matériel d’analyse 4 des échanges gazeux et d’un échocardiographe qui nous est prêté pendant les périodes de bilan. Les locaux des kinésithérapeutes sont équipés de tout le matériel nécessaire à la rééducation post-traumatique et à l’exploration de la force musculaire, en particulier isocinétique. Un laboratoire d’analyses biologiques est aussi rattaché au centre, mais il se trouve à l’extérieur du stade Roland Garros. Pendant les Internationaux de Roland Garros, un autre poste médical est ouvert sous le court central. C&S : Quel est le contenu de base et la périodicité du suivi cardiovasculaire des “tennismen” ? DMM : Le bilan cardiovasculaire comprend un interrogatoire, un examen physique, un ECG de repos 12 dérivations, une échocardiographie et une épreuve d’effort avec analyse des gaz expirés, pour dépister d’éventuelles pathologies et vérifier l’absence de contre-indication à la pratique du tennis de haut niveau. 1/07/05 12:40 Page 5 Nous voyons les joueurs au moins une fois par an, mais nous sommes parfois amenés à les contrôler après une interruption prolongée pour une blessure, pour réévaluer une anomalie cardiaque éventuelle ou dès qu’ils présentent un symptôme particulier. Si besoin, je prends en charge le joueur pour la réalisation d’examens complémentaires lorsqu’ils sont indiqués. Ma deuxième fonction est de communiquer avec les entraîneurs et les préparateurs physiques, pour leur transmettre les données de l’épreuve d’effort et, en particulier, les paramètres utiles pour individualiser l’entraînement, c’est-à-dire la vitesse maximale aérobie (VMA) et les valeurs de fréquence cardiaque aux “seuils”. Nous comptons beaucoup sur les entraîneurs et les préparateurs physiques pour appliquer les recommandations que nous donnons en fonction des résultats du bilan. Ces recommandations concernent aussi les règles élémentaires d’hygiène de vie et, en particulier, la nutrition. Il faut encore se battre pour réduire le nombre de pizzas et de “Mac do” et c’est souvent l’entraîneur qui vérifie les plateaux au self et ce qu’il y a dans les armoires ! Nous constatons, malheureusement, que même dans cette population, il est très difficile d’avoir une alimentation équilibrée et les fruits, les légumes et les protides sont souvent oubliés. Il a ainsi fallu un énorme travail pour modifier les idées fortement ancrées dans les esprits, comme par exemple ne jamais manger de viande la veille d’un match. C&S : Quels sont les “tennismen” concernés par ce suivi ? DMM : Nous nous occupons de tous les joueurs de haut niveau, c’est-à-dire des joueurs qui ont été proposés par le Directeur Technique National et mis sur une liste par le ministère de la Jeunesse, événement 03-cets4-even Test d’effort avec mesure des gaz expirés chez une jeune joueuse du groupe Espoir. des Sports et de la Vie Associative. Nous suivons aussi les groupes “Espoirs”, les joueurs de Coupe Davis et les joueuses de la Fed Cup. clinique, ECG de repos et échocardiographie). De plus, nous sommes d’astreinte pendant les tournois majeurs (Roland Garros bien sûr, Open de Bercy, Open Gaz de France et le Tournoi des Vétérans à Roland Garros). C&S : Qu’en est-il des professionnels ? En effet, au même titre que les autres sports professionnels, ils ne sont pas concernés par le suivi obligatoire récemment instauré par le ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Vie Associative (arrêté de février 2004). Ont-ils un suivi cardiovasculaire minimal imposé par l’ATP ou le WTA, comme celui que la ligue de football professionnel est en train de mettre en place en France ? DMM : Les joueurs professionnels qui le désirent, bénéficient du même suivi que celui des autres joueurs. Nous sommes sollicités pour certaines missions, comme l’année dernière pendant les Internationaux de Roland Garros, où nous avons ouvert une consultation libre et gratuite pour l’ensemble des joueurs du circuit (examen C&S : A quel âge, en moyenne, les joueurs entrent-ils dans le centre de formation Roland Garros ? Quelle est la charge, le type de travail physique d’un joueur de tennis du centre et comment gère-t-il sa scolarité ? DMM : La plupart des jeunes joueurs entrent à partir de 11 ans dans le centre de formation Roland Garros et ils suivent leurs études en parallèle. Dans la préparation physique, la part du foncier est de 50 % en période hivernale, contre 20 % le reste du temps. La plus grande part étant donnée au travail technique et à la compétition. On se rend compte que, vu l’emploi du temps d’un joueur, il lui est difficile de “caser son jogging” entre les entraînements, les matchs, le travail technique et les études. >>> 5 Cardio&Sport • n°4 événement 03-cets4-even 1/07/05 12:40 Page 6 >>> C&S : Dans votre structure, quel type de protocole utilisez-vous pour les tests d’effort ? DMM : Nous pratiquons essentiellement les tests sur tapis roulant. Le protocole a été établi en accord avec les entraîneurs, avec une pente fixe de 2 % et une vitesse variable. Quand le joueur n’est pas connu de notre service, on commence avec une vitesse de 6 (filles) ou 8 km/h (garçons), avec des paliers de 2 km/h toutes les deux minutes, jusqu’à 10 km/h, puis par paliers de 1 km/h toutes les minutes. Lorsque nous disposons d’un test d’effort antérieur, on adapte le protocole de telle manière que la durée de l’effort soit d’environ 10 à 12 minutes, avec des paliers de 1 km/h au niveau du seuil pour obtenir une vitesse au seuil la plus précise possible. Le calcul direct de la VO2 maximale est réalisé systématiquement. C&S : Utilisez-vous aussi des tests de terrain ? DMM : Oui, nous utilisons aussi des tests de terrain, pour obtenir les VMA comme le Vameval et le Luc Léger. Plus spécifique au tennis, le test “zigzag” étudie la vitesse de déplacement sur 10 mètres, avec de nombreux changements de direction. Les tests “multi-bonds” viennent compléter le test de détente vertical sur tapis de Bosco pratiqué au laboratoire. Enfin, des tests de musculation sur Ariel, mesurant la force, la vitesse et la puissance maximale développée complètent les données du Cybex. Tableau 1 • Résultats de l’examen clinique du cœur des joueurs de tennis de haut niveau. Filles Garçons Total (34) (30) (64) Normal 22 22 44 69 Souffle systolique 7 2 9 14 Souffle vasculaire 1 1 2 3 Varice 1 1 2 Tachycardie 1 1 2 1 2 3 5 Spasme laryngé 1 Asthme 2 L’examen clinique est normal dans 69 % des cas (Tab. 1). L’anomalie la plus fréquente est un souffle systolique, dans 94 % des cas. Les autres anomalies (troubles du rythme, arythmie, souffles vasculaires) restent très modérées, soit 2 à 5 % des cas. L’ECG de repos est normal dans 53 % des cas. Les modifications électriques les plus fréquentes concernent la repolarisation, avec les atypies classiquement décrites chez les sportifs dans 36 % des cas. Dans 30 % des cas, un bloc de branche droit incomplet a été observé (Tab. 2). Chez un joueur, un aspect compatible avec un syndrome de Brugada a nécessité un test à la flécaïne, qui s’est révélé négatif. Enfin, on retrouve une fois une arythmie supra 1 % et ventriculaire (2 %), une fois un bloc de branche droit complet (2 %) et une fois des ondes Q profondes dans le territoire inférieur (2 %). Dans ce dernier cas, l’échocardiographie a mis en évidence une insuffisance mitrale minime par prolapsus valvulaire mitral. L’épreuve d’effort, réalisée suivant le protocole décrit au-dessus, est normale dans 90 % des cas. Dans 8 % des cas, on retrouve des extrasystoles ventriculaires sans critère de gravité, une fois un bloc auriculo-ventriculaire en récupération, un spasme laryngé et une crise d’asthme à l’effort. La VO2 maximale moyenne est de 59 ml/mn/kg chez les garçons, avec une VMA à 18 km/h et de 52 ml/mn/kg chez les filles avec une VMA à 17 km/h (Tab. 3). Tableau 2 • Résultats de l’ECG de repos chez les joueurs de tennis de haut niveau. Filles Garçons Total % (34) (30) (64) Normal 10 14 34 53 Atypies Repolarisation 15 8 23 36 C&S : Pourriez-vous nous décrire les BiD 9 10 19 30 principales caractéristiques cardiovasculaires des “tennismen” ? BBD 1 1 2 1 2 1 2 1 2 ESV-ESSV DMM : Je peux vous résumer les statistiques relevées sur les 64 derniers joueurs que nous avons examinés. Cardio&Sport • n°4 1 Ondes Q 1 Brugada 1 6 1/07/05 12:40 Page 7 L’échocardiographie est normale dans 39 % des cas. Des signes de cœur d’athlète sont observés fréquemment, en particulier chez les garçons, une hypertrophie ventriculaire gauche dans 33 % des cas. La masse ventriculaire gauche moyenne est de 137 g pour les garçons, contre 96 g pour les filles. Les autres anomalies les plus fréquentes concernent le massif auriculaire, un foramen ovale perméable spontanément visible (12 %) et un anévrisme du septum inter-auriculaire (12 %). Nous manquons de références publiées chez les joueurs de tennis de haut niveau pour comparer nos données. La fréquence des anomalies du massif auriculaire spontanément retrouvées est comparable à celle de la population générale. Cependant, elle peut sembler importante pour des sportifs de haut niveau et nécessite, à notre avis, de plus amples investigations pour savoir si elle peut être en rapport avec le sport pratiqué et en particulier les phases d’apnée brèves répétées qui accompagnent les gestes de frappe de la balle. C&S : Lors d’un tournoi de tennis de haut niveau, comme les Internationaux de Roland Garros, existet-il une surveillance médicale spécifique pour les spectateurs et/ou pour les joueurs ? DMM : Pendant les tournois, il y a deux services médicaux, un pour le public et un pour les joueurs. Dans le service des joueurs, ce sont des médecins vacataires qui assurent une présence pour traiter essentiellement des problèmes de traumatologie. Il n’y a pas de consultation cardiologique, mais je reste d’astreinte téléphonique pour les joueurs et les entraîneurs, pas pour le public. Tout le matériel de réanimation nécessaire est disponible sur le site du tournoi et une convention est passée en cardiologie avec l’Hôpital Ambroise Paré à Boulogne, pour la gestion des urgences cardiologiques éventuelles. C&S : Les joueurs participants doivent-ils présenter un certificat médical et bénéficient-ils d’une visite pré-tournoi, comme avant le Tour de France cycliste ? DMM :Le certificat médical est très probablement demandé mais, malheureusement, il n’y a pas de visite pré-tournoi. C&S : Enfin, il est fréquent de voir des compétitions de tennis dites de “masters” ou vétérans. Ces joueurs, parfois d’un âge respectable, doivent-ils présenter un certificat médical avant de participer au tournoi et bénéficient-ils d’un suivi cardiovasculaire minimal ? DMM : Avant chaque tournoi, un certificat médical est présenté, mais il n’existe pas de réel suivi des vétérans. Le suivi médical est seulement pour le haut niveau et les professionnels, les amateurs doivent se prendre en charge eux-mêmes. Il y a deux ans, nous avons Tableau 3 • Résultats de la mesure de VO2 chez les joueurs de tennis de haut niveau. VO2 VMA Seuil Ml/mn/kg km/h % Garçons 59 ± 8 18 ± 2 74 ± 12 Filles 52 ± 8 17 ± 1 73 ± 11 7 organisé une consultation gratuite (examen clinique et ECG de repos avec mesure de la pression artérielle) pendant les Championnats de France des vétérans. Seulement 25 % des joueurs se sont présentés ! Certains joueurs présentaient des pathologies cardiovasculaires (bloc de branche gauche et hypertension artérielle surtout), voire parfois des symptômes ayant nécessité la pratique d’une épreuve d’effort. Ainsi, je me souviens d’un vétéran qui présentait une hypertension artérielle, une douleur thoracique d’effort, un bloc de branche gauche et des lésions à la coronarographie. Il s’était pourtant inscrit au tournoi ! Il a bien sûr eu une contreindication à la poursuite du championnat. Je pense qu’une information, voire une éducation, doit être faite auprès des joueurs plus âgés. En effet, la plupart se croient immunisés contre la maladie, en particulier cardiovasculaire. Il faut aussi insister sur l’importance du certificat médical de non contre-indication. Dans cette population, il doit comporter un interrogatoire, un examen physique et au minimum un ECG de repos, voire, à mon avis, une épreuve d’effort. Les joueurs ont trop tendance à considérer le certificat médical comme une formalité administrative qui peut faire obstacle à leur désir de jouer. Je me souviens du cas de ce joueur persistant dans la volonté de continuer la compétition, alors que nous lui avions trouvé une contre-indication. Un bilan hémodynamique s’imposait en raison de la symptomatologie (dyspnée) qu’il présentait et en raison d’un aspect d’infarctus sur l’ECG de repos avec une fraction d’éjection à 35 % à l’échographie. Le comble est que ce joueur était médecin ! Nous réfléchissons actuellement au niveau de la Fédération Française de Tennis aux examens qui seront obligatoirement demandés aux joueurs vétérans pour l’obtention de leur certificat médical de non contreindication. ❚ Cardio&Sport • n°4 événement 03-cets4-even 05-cets4 dossier 1/07/05 12:36 Page 9 DOSSIER dossier DOSSIER Altitude et Sport Adaptations, pathologies et prise en charge p. 10 Introduction Dr Stéphane Doutreleau (Hôpital civil, Strasbourg) de l’hypoxie d’altitude : Physiologie adaptations cardiovasculaires p. 10 Pr Jean-Paul Richalet (Hôpital Avicenne, Laboratoire Réponses cellulaires et fonctionnelles à l’hypoxie, Université Paris 13, Bobigny) cardiovasculaires : Médicaments peut-on prédire leur effet en altitude ? p. 14 Dr Laurent Monassier (Laboratoire de Neurobiologie et Pharmacologie Cardiovasculaire, Inserm U715, Strasbourg) cardiaques en altitude : Pathologies risques, traitements et prise en charge p. 20 Dr Stéphane Doutreleau (Hôpital civil, Strasbourg) en altitude : Sport que faire avant un trekking ? p. 23 Dr Stéphane Doutreleau (Hôpital civil, Strasbourg) MOTS CLÉS Altitude, sport, compétition, entraînement, hypoxie, physiologie, pathologies cardiaques, pharmacologie, capacité d’effort, trekking, contre-indications 9 Cardio&Sport • n°4 05-cets4 dossier 1/07/05 12:36 Page 10 DOSSIER DOSSIER dossier >>> >>> Introduction Dr Stéphane Doutreleau L a montagne est un milieu “hostile”, qui associe à des dangers d’ordre climatique ou liés au terrain une raréfaction en oxygène. L’hypoxémie qu’elle entraîne, qui s’accentue avec l’altitude, est à l’origine d’adaptations initialement cardioventilatoires. La présence d’une pathologie cardiovasculaire peut donc logiquement interférer avec ces phénomènes d’acclimatation ou s’aggraver avec l’altitude. La montagne n’est plus réservée aux professionnels ou à une élite. De plus en plus de personnes pratiquent les sports de montagne, la randonnée ou le trekking de haute altitude. Cela va généralement bien au-delà de la pratique d’un sport ou d’une activité physique. Il s’agit là de personnes passionnées qui, malgré un événement cardiovasculaire, souhaitent, dans la mesure du possible, repartir en montagne. De plus en plus de patients, conscients et informés des risques liés à l’altitude, viennent consulter et demander des conseils. La réponse que l’on peut leur apporter est difficile parce que les études faites chez les patients porteurs de cardiopathies sont peu nombreuses. En plus, nos patients prennent souvent plusieurs médicaments dont l’efficacité peut être modulée en altitude et/ou interférer avec l’acclimatation. Autant de questions auxquelles plusieurs spécialistes vont essayer d’apporter des éléments de réponses. En effet, si beaucoup de choses restent à montrer, la connaissance des mécanismes de l’adaptation à l’hypoxie et la modélisation des effets des médicaments en altitude peuvent permettre de donner des conseils adaptés. Physiologie de l’hypoxie d’altitude : adaptations cardiovasculaires Pr Jean-Paul Richalet (Hôpital Avicenne, Laboratoire Réponses cellulaires et fonctionnelles à l’hypoxie, Université Paris 13, Bobigny) L’ exposition à l’environnement de haute altitude entraîne des réactions cardiovasculaires variables dans le temps. Nous donnerons d’abord une définition biologique de l’altitude, en fonction de l’importance des effets ressentis et des capacités de survie (1). En basse altitude (jusqu’à 1 000 m environ), aucun effet n’est ressenti, ni au repos ni à l’exercice. Il faut noter cependant que chez certaines personnes souffrant d’affection s’accompagnant déjà d’une hypoxémie au niveau de la mer (cardiopathies Cardio&Sport • n°4 avec shunt droit-gauche), l’altitude de 1 000 m peut aggraver les symptômes. En moyenne altitude (1 000 à 2 000 m), le sportif ressent un effet sur la performance maximale. Ainsi, la consommation maximale d’oxygène diminue. En haute altitude (entre 2 000 et 5 500 m environ), les effets immédiats de l’hypoxie (hyperventilation, tachycardie) sont ressentis pour des exercices d’intensité de plus en plus faible, puis au repos. En très haute altitude (au-delà de 5 500 m environ), la vie humaine permanente est, semble-t-il, impossible. Cependant, l’homme est capable, par 10 des ajustements appropriés, de vivre et même d’avoir une activité physique parfois intense à ces altitudes. Ceci nécessite un temps incompressible d’acclimatation. De l’air ambiant jusqu’à la mitochondrie, le flux d’O2 dépend des gradients successifs de pression d’O 2 et des débits de gaz ou de sang qui transportent l’O2. En altitude, la pression d’O2 et donc les gradients d’O2 diminuent à tous les niveaux. Ainsi, pour maintenir un flux d’O2 adéquat au niveau cellulaire, les débits ventilatoire et cardiaque doivent augmenter pour compenser la baisse des gradients d’O2. 05-cets4 dossier 1/07/05 12:36 Page 11 5500 6000 6500 7000 5000 8000 6500 5000 7000 6500 0 110 5750 % ou b/min 8848 0 100 altitude Sa 90 80 70 Fc 60 0 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 jour dans le caisson hypobare Figure 1 • Variations de la saturation artérielle en oxygène et de la fréquence cardiaque en fonction de l’altitude. Données de l’Opération Everest COMEX, 1997 (20). > La fréquence cardiaque L’activité sympathique augmente en hypoxie, comme en témoigne l’augmentation de l’activité nerveuse mesurée directement dans le nerf tibial ou péronier (2). La concentration plasmatique de noradrénaline augmente rapidement puis se stabilise, voire diminue après 2 à 3 semaines, mais reste toujours supérieure à sa valeur du niveau de la mer (3, 4). La fonction chronotrope cardiaque est fortement stimulée en altitude. Il faut différencier ce qui se passe en hypoxie aiguë (quelques jours) et en hypoxie prolongée ou chronique. En hypoxie aiguë, la fréquence cardiaque de repos augmente de façon proportionnelle au degré d’hypoxémie (Fig. 1). A chaque niveau absolu d’exercice, la fréquence cardiaque est plus élevée en altitude. En hypoxie prolongée, la fréquence cardiaque de repos et à l’exercice modéré diminue progressivement avec l’acclimatation, mais reste supérieure aux valeurs correspondantes de normoxie. A l’exercice maximal, la fréquence cardiaque diminue à partir d’environ 3 000 m (Fig. 2). La diminution de la fréquence cardiaque maximale en hypoxie prolongée constitue certainement un facteur limitant du transport de l’oxygène à l’exercice maximal, car le débit cardiaque diminue de façon parallèle à la fré- quence, le volume d’éjection systolique variant peu en altitude. Ainsi, la quantité maximale d’oxygène apportée par le sang vers les tissus diminue. Ce phénomène de limitation de la fréquence cardiaque maximale est lié à une diminution de la réponse chronotrope cardiaque à la stimulation adrénergique, comme si l’altitude avait un effet “ß-bloquant” sur le cœur. Il a été mis sur le compte d’une hyperactivation parasympathique (5, 6), mais il s’agit surtout d’un phénomène de désensibilisation des récepteurs ß-adrénergiques (4, 7). Ainsi, on note une baisse en hypoxie de la réponse chronotrope cardiaque, soit lors d’une activation adrénergique endogène (exercice), soit d’une stimulation exogène par perfusion d’isoprénaline (8, 9). De plus, la densité des récepteurs ß-adrénergiques diminue en hypoxie, soit sur des lymphocytes chez l’homme (4, 7), soit sur des myocytes chez le rat (10). Cette désensibilisation des ß-récepteurs n’est pas complètement réversible par l’inhalation d’oxygène (9, 11). Il semble que ce phénomène soit lié à une modification de la transduction du signal au sein des ßrécepteurs adrénergiques (12). Il serait lié d’une part, à la stimulation chronique des ß-récepteurs liée à l’activation permanente du système sympathique, d’autre part à un effet spécifique de l’hypoxie sur les récepteurs cardiaques et les protéines G régulatrices (12). Cette atténuation des propriétés chronotropes cardiaques maximales peut limiter la performance physique maximale, mais peut être également considérée comme un mécanisme protecteur du myocarde. En effet, la fréquence cardiaque est l’un des principaux déterminants de la consommation d’oxygène du myocarde et une hypoxie sévère pourrait être incompatible avec la fourniture d’oxygène au myocarde nécessaire à une tachycardie intense (4). Ainsi, l’organisme choisit de limiter ses performances physiques pour protéger le cœur, organe vital, par une véritable autorégulation. > Le débit cardiaque et la contractilité myocardique Le volume d’éjection systolique varie peu en altitude. Au repos ou à l’exercice, il a tendance à augmenter ou à rester stable en hypoxie aiguë et à diminuer en hypoxie chronique. Cette diminution est à mettre en relation avec une baisse du retour veineux, comme en témoigne la diminution des pressions dans l’oreillette droite (13). Le débit cardiaque augmente au repos et, pour des exercices modérés, diminue à l’exercice maximal en hypoxie prolongée. Le cœur ne semble pas souffrir en altitude, même en altitude extrême. Ainsi, des échocardiographies réalisées en 200 180 FRÉQUENCE CARDIAQUE (b/min) 120 max, hypoxie aiguë 160 140 max, hypoxie prolongée 120 repos, hypoxie aiguë 100 repos, hypoxie prolongée 80 60 40 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 ALTITUDE 5km Figure 2 • Variations schématiques de la fréquence cardiaque de repos et à l’exercice maximal en hypoxie aiguë (trait plein) et prolongée (trait pointillé) en fonction de l’altitude (1). >>> 11 dossier DOSSIER Cardio&Sport • n°4 05-cets4 dossier 1/07/05 12:36 Page 12 >>> L’électrocardiogramme L’électrocardiogramme ne montre pas de modification notable outre les conséquences directes de la tachycardie et de l’hypertension artérielle pulmonaire, avec la surcharge ventriculaire droite qu’elle induit : axe droit (107° à 8 800 m), augmentation de l’amplitude de l’onde P et des ondes T aplaties ou inversées en précordiales droites. Par ailleurs, quelques troubles du rythme à type d’extrasystoles ventriculaires, des bradyarythmies nocturnes ont pu être occasionnellement notés (16-18). Aucun signe électrique de souffrance myocardique n’a jamais été noté chez un sujet sain en haute altitude. La pression artérielle • La pression artérielle systémique Elle varie peu en altitude. On note cependant une tendance à une élévation des pressions systoliques et diasto- Cardio&Sport • n°4 A B Fraction d’éjection VG FRACTION D'ÉJÉCTION VG Pression artérielle pulmonaire systolique PRESSION ARTÉRIELLE PULMONAIRE SYSTOLIQUE 80 50 45 70 (mmHg) 40 (%) 60 35 30 25 p < 0.05 vs NM 50 p < 0.05 vs NM 20 NM 5000 7000 8000 RNM NM 5000 CONDITION C 7000 8000 RNM CONDITION D Diamètre télédiastolique Rapport vitesse RAPPORT VITESSE MAX E/Amax E/A DIAMÈTRE TÉLÉDIASTOLIQUE VG 60 3 2,5 50 2 (%) altitude simulée jusqu’à 8 848 m, montrent une augmentation des indices de contractilité, liée à l’activation du système sympathique : à 7 500 m, la fraction d’éjection augmente de 6 % au repos et de 10 % à l’exercice (14). La relation de Starling, évaluée par la courbe volume d’éjection/pression capillaire bloquée, n’est pas altérée en altitude (13). Des échographies cardiaques, réalisées jusqu’à l’altitude équivalente de 8 848 m lors de l’Opération Everest III, n’ont pas montré de modifications significatives de la fraction d’éjection (Fig. 3). Le diamètre télédiastolique du VG était plus faible en altitude, traduisant une diminution du remplissage VG, portant sur le remplissage précoce au profit du rôle joué par la contraction auriculaire (comme en témoigne la baisse du rapport de vitesse maximale de l’onde E sur l’onde A). Cette diminution est probablement liée à une gêne du remplissage du VG, du fait de la dilatation du VD qui refoule le septum vers la gauche (15). (mm) dossier DOSSIER 1,5 40 1 p < 0.05 vs NM 30 NM 5000 7000 8000 RNM CONDITION p < 0.05 vs NM 0,5 NM 5000 7000 8000 RNM CONDITION Figure 3 • Fonction cardiaque en haute altitude : données échocardiographiques obtenues lors de l’Opération Everest COMEX (2,18). A : fraction d’éjection (VG) ; B : pression artérielle pulmonaire systolique ; C : diamètre télédiastolique (VG) ; D : rapport vitesse max E/A. NM : niveau de la mer ; RNM : retour au niveau de la mer après 30 jours en caisson hypobare. liques à l’exercice en hypoxie prolongée (19). Certaines études trouvent une pression artérielle légèrement augmentée dès le début du séjour, mais d’autres études ne trouvent aucune variation des pressions systémiques, même après un séjour prolongé en hypoxie sévère (20). • La pression artérielle pulmonaire La pression artérielle pulmonaire (PAP) augmente en altitude. La vasoconstriction pulmonaire hypoxique, décrite par Von Euler en 1946, induit une hypertension artérielle pulmonaire (HTAP). Cette HTAP est particulièrement marquée à l’exercice en hypoxie (13). Elle est également majorée par la position allongée, en particulier au cours du sommeil. La PAP s’élève après quelques minutes et se stabilise en 12 à 24 heures. Elle augmente avec l’altitude, mais peut être très variable suivant les individus. A 4 500 m, la PAP est le double de sa valeur du niveau de 12 la mer. La PAP mesurée par échographie lors de l’Opération Everest III (COMEX’97) montre une augmentation avec l’altitude (15). La pression ne semble pas revenue à la valeur de base, pour tous les sujets, un jour après le retour en normoxie (Fig. 3B). En hypoxie chronique, l’inhalation d’oxygène entraîne une diminution du débit cardiaque et de la PAP, les résistances pulmonaires ne variant pas : ceci signifie que s’installent des modifications structurelles à type de muscularisation des artérioles d’environ 500 µm de diamètre, comme chez le résident de haute altitude. L’HTAP retentit sur la fonction ventriculaire droite, en créant une hypertrophie (qui semble cependant limitée chez l’homme, alors qu’elle est très importante chez le rat). Elle peut également retentir indirectement sur le remplissage ventriculaire gauche, par interaction entre les deux ventricules. Au niveau de la mer, la PAP, élevée chez le 05-cets4 dossier 1/07/05 12:36 Page 13 foetus, chute brusquement après la naissance ; en altitude, la PAP du nouveau-né ne diminue que très lentement, car le stimulus hypoxique de la vie in utero persiste. Ce phénomène pourrait expliquer l’incidence importante de décompensation de pathologies cardiaques chez les nouveau-nés de certaines populations vivant en altitude (Chinois vivant au Tibet). Le rôle de l’HTAP dans la genèse de l’œdème pulmonaire hypoxique est primordial (1). La circulation • La circulation coronaire La circulation coronaire réagit à l’hypoxie aiguë par une vasodilatation dont le médiateur pourrait être l’adénosine. En hypoxie chronique et chez le résident de haute altitude, le débit coronaire diminue (21). • La circulation cérébrale La circulation cérébrale est le siège d’un conflit entre la vasodilatation induite par l’hypoxie et la vasoconstriction induite par l’hypocapnie. La résultante va dans le sens d’une augmentation du débit cérébral pendant les 3 premiers jours en altitude, suivie d’un retour progressif aux valeurs de base (22, 23). > En conclusion Au total, le système cardiovasculaire est aux avant-postes dans les processus d’ajustement à l’hypoxie aiguë et chronique, particulièrement lors de l’exercice musculaire. La stimulation permanente du système adrénergique est le mécanisme principal de mise en jeu de ce système. Cependant, des mécanismes de protection du cœur se mettent en place très rapidement, qui font que le cœur sain est capable de supporter des hypoxémies très sévères sans dommage, pour peu que l’acclimatation soit progressive. ❚ dossier DOSSIER Bibliographie 1. 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Role of cerebrospinal flow pH in normalization of flow in chronic hypocapnia. Circ Res 1966 ; 19 : 274-82. 13 Cardio&Sport • n°4 05-cets4 dossier 1/07/05 12:36 Page 14 dossier DOSSIER >>> Médicaments cardiovasculaires : peut-on prédire leur effet en altitude ? Dr Laurent Monassier (Laboratoire de Neurobiologie et Pharmacologie Cardiovasculaire, Inserm U715, Strasbourg) S i on a tendance à réfléchir sur le risque d’aggravation d’une pathologie cardiovasculaire du fait de l’altitude et donc de l’hypoxie, la majoration d’un risque médicamenteux n’est que rarement abordée. Or, un travail précurseur, publié en 1988 par une équipe russe (1), chez des malades insuffisants cardiaques, avait révelé des risques d’intoxication digitalique deux fois supérieur en altitude qu’au niveau de la mer. Le problème de la pharmacologie en altitude est complexe, dans la mesure où de nombreuses adaptations physiologiques sont susceptibles de modifier l’efficacité des médicaments, soit pour des raisons de pharmacocinétique, soit pour des variations de la réponse des cibles, c’est-à-dire de la pharmacodynamie. Cependant, très peu de groupes de recherche s’en sont rigoureusement préoccupés en analysant l’ensemble du problème, qui doit intégrer l’altitude à laquelle on va, la vitesse à laquelle on monte, le temps pendant lequel on y reste et l’ensemble des paramètres pharmacocinétiques et pharmacodynamiques qui régissent l’efficacité de chacun des produits étudiés. De plus, dans le cas de l’appareil cardiovasculaire, l’altitude pro- Cardio&Sport • n°4 duit des adaptations qui peuvent indirectement influencer l’effet d’un traitement ciblant cet appareil. Ainsi, comme nous le verrons plus loin, l’altitude peut induire une tachycardie qui se verrait ajoutée à l’effet d’un produit tachycardisant. Il s’agit là d’une interaction non pas pharmacologique, mais simplement fonctionnelle. C’est ainsi qu’il faudrait quasiment faire une étude clinique pour chaque produit cardiovasculaire avant de pouvoir répondre correctement à la question qui nous préoccupe : « Existe-t-il un risque de voir l’efficacité thérapeutique et/ou la toxicité d’un médicament modifiée du fait d’une montée en altitude ? ». Dans ce bref article, nous allons tenter de discuter trois principales questions : 1. En quoi l’altitude affecte-t-elle la pharmacocinétique des médicaments ? 2. Quelle est l’influence de l’altitude sur la pharmacodynamie, c’est-à-dire des effets sur leurs cibles, des produits utilisés à des fins thérapeutiques cardiovasculaires ? 3. Est-ce que l’adaptation à l’altitude conduit elle-même à des interactions fonctionnelles avec les médicaments cardiovasculaires ? 14 > Modifications de la pharmacocinétique Effets de l’altitude sur la résorption La perte de poids associée à une anorexie est un phénomène couramment observé en altitude, particulièrement au dessus de 5 000 m (2). Cette perte de poids peut être observée en dépit d’un apport calorique normal et il est donc normal de se demander si elle ne pourrait pas, au moins en partie, provenir d’une réduction de la résorption intestinale. Les résultats du peu d’études réalisées semblent montrer que des expositions à des altitudes élevées (habituellement plus de 6 000 m) pourraient aboutir à une réduction de la résorption intestinale des sucres (3). Il est cependant peu probable que des modifications de pharmacocinétique des médicaments cardiovasculaires puissent être dues à des anomalies de la résorption intestinale, en particulier à moins de 5 000 m d’altitude. Effet du premier passage Indépendamment de la structure chimique des médicaments, qui n’est pas affectée par l’altitude, l’effet de premier passage est majoritairement hépatique 05-cets4 dossier 1/07/05 12:36 Page 15 Tableau 1 • Aspects de métabolisme hépatique et de liaison aux protéines plasmatiques de quelques médicaments cardiovasculaires. Produits Métabolisme hépatique Liaison aux protéines plasmatiques Digoxine Faible 20 % Périndopril Activation (prodrogue) < 30 % Enalapril Activation (prodrogue) 50-60 % Lisinopril Non Non Losartan CYP2C9 (activation) 99 % Valsartan Non 94-97 % Propranolol CYP1A2, 2C19, 2D6, 3A4, 5, 7 90 % Métoprolol CYP2D6 10 % Carvédilol CYP2D6 98-99 % Diltiazem CYP3A4, 5, 7 80-85 % Vérapamil CYP1A2 et 3A4, 5, 7 90 % Nifédipine CYP3A4, 5, 7 90-95 % Molsidomine Activation (prodrogue) 10 % Amiodarone Non Non Flécaïnide Désacétylation (75 %) 40 % Aspirine Désacétylation (100 %) 95 % Clopidogrel Activation CYP2B6, 3A4 94-98 % Fluindione 65 % 97 % 100 % (métab. actifs) 97 % Faible 96-98 % Non 40 % Atorvastatine CYP3A4 (métab. actifs) 95 % Simvastatine Hydroxylation (métab. actif) 90 % Acénocoumarol Furosémide Hydrochlorothiazide et dépend du taux de fixation du produit aux protéines plasmatiques et aux globules rouges (plus il est fixé, moins il sera capté par les hépatocytes), ainsi que de l’activité des systèmes enzymatiques du foie. L’exposition à des altitudes d’environ 4 000 m est connue pour induire une augmentation de la concentration plasmatique des protéines, passant en partie par une réduction du volume circulant et une polyglobulie dès que la durée du séjour dépasse 5 à 7 jours (4, 5). On ne serait l’augmentation des protéines circulantes, la fixation du furosémide passe de 97,2 % au niveau de la mer à 95,1 % après 15 heures à 3 600 m et 91,1 % chez des volontaires vivant en altitude depuis plus de 6 mois (6). La fraction libre, biologiquement active, du furosémide est donc multipliée par 3, ce qui est tout a fait considérable. Ce résultat, a priori contradictoire, provient probablement d’une réduction encore inexpliquée de l’affinité des protéines circulantes pour ce composé, avec, pour conséquence directe, une majoration de son excrétion rénale. Il est donc probable que son efficacité diurétique soit augmentée en altitude, mais la démonstration de cette hypothèse reste à faire. Si on considère des produits à fixation strictement érythrocitaire (lithium), la polyglobulie d’altitude aboutit à une majoration de la fixation entraînant une réduction de la clairance et une prolongation du temps de demi-vie d’élimination (7). donc pas surpris de voir modifiée la pharmacocinétique des produits hautement fixés dans le compartiment sanguin. En ce qui concerne les produits à fixation partagée entre les protéines et les globules, les résultats sont plus complexes. Une analyse de ce type a été effectuée pour l’acétazolamide, le diurétique recommandé en prévention du mal des montagnes (8, 9). L’altitude provoquerait une augmentation de sa liaison globulaire, associée à une réduction de sa fixation aux protéines plasmatiques. Au total, la chronologie de son excrétion urinaire n’apparaît pas grandement modifiée, elle semble juste être un peu plus rapide au début, avec abaissement du taux résiduel. • Sur les caractéristiques cinétiques Ce problème a été étudié pour le furosémide, chez des sujets placés au niveau de la mer puis en montagne, de manière aiguë ou prolongée. Il est lié à près de 98 % aux protéines plasmatiques, mais n’a pas de fixation érythrocytaire. En altitude, en dépit de En concusion, le risque pricipal posé par l’altitude est l’augmentation de la fraction libre pour les produits très fixés aux protéines plasmatiques, avec réduction du temps de demi-vie d’élimination, mais aussi risque de majoration de l’effet thérapeutique et de la toxicité (Tab. 1). >>> 15 Cardio&Sport • n°4 dossier DOSSIER 05-cets4 dossier 1/07/05 12:36 Page 16 dossier DOSSIER >>> • Sur l’activité des cytochromes L’hypoxie chronique peut aussi affecter l’activité des cytochromes (CYP) hépatiques. En effet, l’exposition de rats à une hypoxie conduisant à maintenir des PaO2 entre 35 et 50 mmHg, soit ce que l’on peut retrouver lors de séjours aux alentours de 4 500 m d’altitude, aboutit à une réduction de l’activité puis de l’expression de CYP1A1, CYP1A2, CYP2B6, CYP2C9, CYP2C19 et CYP2E1, alors que le CYP3A6 est surexprimé (10, 11). Ces résultats doivent être confirmés chez l’homme puisque, au contraire du rat, il a été montré que l’altitude pouvait majorer l’activité du CYP1A2 avec accélération du métabolisme de la caféine (12). Des médicaments cardiovasculaires métabolisés par ce cytochrome pourraient être concernés : la méxilétine et la propafénone ainsi que, pour une partie, le propranolol et le vérapamil, pourraient donc voir leur effet de premier passage hépatique ainsi que leur métabolisme augmenté et donc, leur efficacité diminuée lors de séjours à des altitudes d’environ 4 000 m. En ce qui concerne le cas particulier du CYP1A2, il serait très intéressant de savoir comment son niveau d’expression varie dans d’autres tissus que le foie. Il semblerait que l’induction du CYP1A2 dans la paroi artérielle contribue à réduire les phénomènes de tolérance aux dérivés nitrés (13). Il est donc possible que l’altitude puisse participer à l’augmentation des effets de ces vasodilatateurs, comme cela a été suggéré en 1988 par une étude russe menée chez des malades insuffisants cardiaques en altitude (1). Distribution tissulaire L’altitude peut conduire à une perte de poids liée à une réduction de la masse grasse. Cette fonte peut être relativement rapide, d’autant plus que le séjour en montagne est bien souvent associé à une majoration de l’activité physique. Dans ce cadre, des substances lipo- Cardio&Sport • n°4 philes et stockées dans le tissu adipeux pourraient voir leur concentration plasmatique augmenter. Ce problème doit être envisagé avec l’amiodarone, qui est une substance extrêmement fixée dans les tissus, dont le tissu adipeux, et pour laquelle la toxicité en altitude pourrait augmenter du fait d’une libération accrue. Elimination des médicaments Le rein participe à l’adaptation à l’altitude en synthétisant l’érythropoïétine et encontribuant à la régulation de l’équilibre hydrique et ionique (14, 15). Une exposition chronique à une altitude élevée (5 800 m) peut abaisser le débit rénal de près de 40 % (16). La clairance rénale des médicaments éliminés par cette voie peut donc être diminuée en situation d’hypoxie prolongée, en particulier chez les malades présentant une dysfonction rénale préexistante. > Modifications de la pharmacodynamie Nous verrons ici les adaptations portant sur le système nerveux sympathique et sur la vasorelaxation dépendante de l’endothélium impliquant le monoxyde d’azote (NO). Des expositions brèves à des pressions partielles en oxygène réduites sont connues pour augmenter les concentrations plasmatiques d’adrénaline et de noradrénaline (17). Ces augmentations sont intégralement responsables de la tachycardie d’altitude, car cette dernière est totalement abolie par les β-bloquants. Ces médicaments cardiovasculaires sont donc responsables d’un blocage de la principale adaptation hémodynamique instantanée à l’altitude, avec pour conséquence une réduction des capacités à l’exercice plus importante que celle que l’on pourrait observer pour la même dose de produit au niveau de la mer. 16 Lorsque l’hypoxie se prolonge, les modifications d’expression des protéines qui participent aux réponses adrénergiques vont être complexes, mais globalement contribuer à une réduction des réponses adrénergiques. Par une activation directe des chémorécepteurs, ainsi que par la stimulation de l’expression de la tyrosine hydroxylase (enzyme limitante de la biosynthèse des catécholamines) (18), l’hypoxie déclenche l’activation du système adrénergique mais, de manière intéressante, elle semble porter principalement sur la libération nerveuse de noradrénaline, plus que sur celle d’adrénaline par la glande médullo-surrénale. Cette libération de noradrénaline, en particulier cardiaque et artérielle, est probablement amplifiée par une désensibilisation des récepteurs α2adrénergiques pré-synaptiques, comme cela a été récemment montré chez l’homme en altitude dans les plaquettes sanguines (17). Dans ce cas, des antihypertenseurs activant, au moins en partie, ces récepteurs (rilménidine, moxonidine, clonidine) pourraient voir leur activité thérapeutique diminuée en altitude. On ne peut actuellement émettre aucune hypothèse quant à un éventuel effet de l’altitude sur leurs effets antihypertenseurs centraux. Sur le versant post-synaptique, l’augmentation de la concentration synaptique de noradrénaline conduit à une désensibilisation des récepteurs β1 (19), alors que les β2 ne seraient pas affectés. Cette désensibilisation réceptorielle est associée à une répression de l’expression de la forme active de la protéine Gsα, alors que les protéines G i voient leur niveau d’expression augmenté (20). Comme les récepteurs β1 sont exclusivement couplés à la protéine G s, alors que les β2 le sont à Gs et Gi, la réponse cardiaque chronotrope et 05-cets4 dossier 1/07/05 12:37 Page 17 A. niveau de la mer B. altitude Activation baroréflexe Stimulation de l’expression de la tyrosine hydroxylase + Noradrénaline + + 1 Effet β1 prédominant : Inotrope+, Chronotrope + α2 Noradrénaline 1 Augmentation de la libération de noradrénaline, diminution de sa recapture. Désensibilisation des récepteurs β1. Réduction d’expression de la protéine Gsα. Renforcement de l’effet β2, en particulier passant par Gi (inotrope-, dromotrope-) Figure 1 • Effets de l’hypoxie chronique sur l’expression synaptique des récepteurs β1, β2 et α2 adrénergiques. L’hypoxie augmente la libération de noradrénaline, qui va induire une modification du niveau d’expression de certains récepteurs adrénergiques. inotrope positive (due à l’augmentation de la production d’AMPc, suite à la stimulation de la Gs) diminue avec le temps, pour être remplacée par un effet majoritaire de l’activation G i. Ainsi, les effets post-synaptiques cardiaques habituels de la noradrénaline disparaîtraient avec le temps, pour être remplacés par un effet paradoxal, masqué complètement au niveau de la mer (Fig. 1). Dans ce cadre, les β-bloquants vont empêcher les adaptations initiales, voire même fonctionner en synergie avec la désensibilisation, mais pourraient préserver la densité des récepteurs β1, lorsque ceux-ci désensibilisent puisque cette dernière est la conséquence directe de la stimulation cactécholaminergique. D’autres récepteurs adrénergiques sont aussi concernés par les conséquences de l’altitude. En effet, certains récepteurs α-adrénergiques (α1a et α1b) possèdent, dans la région promotrice de leurs gènes, des zones régulées par l’hypoxie. Ainsi, l’expression du récepteur α1a est stimulée par l’hypoxie (21), au contraire du sous-type α1b qui est réprimé dans cette condition, mais de manière différente en fonction des tissus (22). Vasoconstriction du réseau pulmonaire L’hypoxie d’altitude induit une vasoconstriction, qui semble ne pas être compensée par les habituels systèmes vasodilatateurs, dans plusieurs territoires vasculaires, dont le plus connu est le réseau pulmonaire. Le monoxyde d’azote (NO) est produit à partir de la L-arginine par une enzyme endothéliale, la NO synthase (NOS), avant de diffuser au travers de la lame basale et d’exercer ses effets relaxant sur les cellules musculaires lisses de la paroi artérielles, par activation de la guanylate cyclase et production de GMPc. L’hypoxie, loin de réprimer l’expression de la NOS, provoque une surexpression de cette enzyme qui peut aller jusqu’à environ 4 fois (23), du fait de la présence, dans le promoteur du gène de la NOS, d’une zone stimulée par l’hy- poxie (24). Cependant, l’activité de cette enzyme semble être, au moins en partie, réprimée par l’altitude, puisque l’administration de L-arginine chez des sujets placés 36 heures à 4 350 m aboutit à une moindre production de GMPc et de L-citrulline (formée à partir de la L-arginine par la NOS) (25). Cette moindre activité pourrait passer par une inhibition directe de l’enzyme, mais pourrait aussi provenir d’une moins bonne disponibilité locale de la L-arginine. En tout cas, les protéines situées en aval de la NOS répondent de manière normale en hypoxie, puisque l’inhalation de NO contribue à limiter la vasoconstriction artérielle pulmonaire due à l’altitude (26). Dans ce cadre, il est donc probable que des médicaments “donneurs de NO” soient actifs en altitude. L’activité de ces produits ne pourrait donc être limitée que par les capacités de l’organisme à les dénitrater. L’hypoxie aiguë majore clairement la production de NO, provenant à la fois de la nitroglycérine (trinitrine) et du mononitrate d’isosorbide (27). Cette augmentation d’efficacité apparaît maintenue si l’hypoxie se prolonge, comme cela avait déjà été décrit chez des malades insuffisants cardiaques. Certaines différences entre les produits doivent cependant être envisagées, puisqu’il semblerait que le dinitrate d’isosorbide inhibe la NOSi et la NOSe, au contraire de la trinitrine qui serait sans effet (28). > Interactions fonctionnelles Fréquence cardiaque Il a été clairement décrit dans l’article précédent de ce dossier que la majorité de l’adaptation aiguë à l’altitude passe par la tachycardie, le débit cardiaque augmentant de manière >>> 17 Cardio&Sport • n°4 dossier DOSSIER 05-cets4 dossier 1/07/05 12:37 Page 18 dossier DOSSIER >>> proportionnelle à celle de la fréquence cardiaque. Dans ces conditions, tous les produits qui peuvent modifier la fréquence cardiaque vont interférer avec l’adaptation à l’altitude. Nous avons cité plus haut le cas des β-bloquants, qui vont clairement limiter la nécessaire tachycardie due à l’activation nerveuse sympathique, mais les inhibiteurs des canaux calciques vont aussi pouvoir affecter la fréquence cardiaque. Ainsi, les dépresseurs du nœud sinusal, comme le diltiazem, mais surtout le vérapamil, vont réduire la tachycardie, alors que les produits à effet vasculaire prédominant, parmi lesquels on trouve surtout les dihydropyridines (nifédipine), auraient plutôt tendance à l’amplifier. Bien entendu, pour ces dernières, le risque n’existe que si elles provoquent une chute de pression artérielle rapide et importante, l’utilisation de formes à libération prolongée annulant cet effet réflexe. Notons enfin que les inhibiteurs calciques risquent de contribuer à majorer les œdèmes périphériques d’altitude, mais que la néfédipine s’est montrée active en prévention de l’œdème pulmonaire. Electrophysiologie cardiaque L’altitude peut provoquer des modifications électrocardiographiques extrêmement complexes, liées en partie à l’hypertension artérielle pulmonaire. Dans ces conditions, il apparaît difficile de prédire l’effet des antiarythmiques. En particulier, nous voudrions pouvoir répondre à la question de leur potentiel risque arythmogène en altitude. L’absence de données cliniques nous contraint à ne pas discuter ce point extrêmement complexe du fait des interactions entre les modifications électrolytiques, l’hypoxie tissulaire, le mode d’action pharmacologique du produit et la cardiopathie qui a conduit à leur prescription. Cardio&Sport • n°4 Le problème de la pharmacologie en altitude est complexe Pression artérielle Chez l’homme, les effets de l’altitude sur la pression artérielle sont très controversés. Néanmoins, il semblerait que l’altitude ait plutôt tendance à augmenter la pression artérielle des sujets non acclimatés. L’efficacité des antihypertenseurs pourrait donc être réduite par l’altitude. Il est cependant établi que les bloqueurs du système rénine-angiotensine aldostérone gardent une bonne activité thérapeutique dans ces conditions (29). De plus, plusieurs travaux ont maintenant établi qu’une réduction constitutive de l’activité de l’enzyme de conversion de l’angiotensine facilite l’adaptation à l’hypoxie (30, 31). > En conclusion La prévision des effets des médicaments 18 cardiovasculaires en montagne est un problème complexe. Elle nécessite de pouvoir disposer de l’ensemble des paramètres pharmacodynamiques, pharmacocinétiques et fonctionnels en altitude, dont certains peuvent conduire à des actions complètement opposées. Cette courte revue ne pouvait aborder la totalité de la question et n’a pu qu’essayer d’envisager quelques éléments de la réflexion. Il est clair que, face à la demande croissante des malades et de leurs médecins, le salut ne pourra provenir que de l’élaboration de protocoles de recherche clinique centrés sur les effets de l’altitude sur les divers aspects de la pharmacologie des produits pris individuellement, mais aussi des interactions médicamenteuses. Nous en sommes encore au niveau de la mer, il n’y a plus que la montagne à gravir…❚ 05-cets4 dossier 1/07/05 12:37 Page 19 dossier DOSSIER Bibliographie 1. Moldotashev IK. Characteristics of the pharmacotherapy of chronic heart failure under high-altitude conditions. Ter Arkh 1988 ; 92-6. 2. Tschop M et al. Raised leptin concentrations at high altitude associated with loss of appetite.Lancet 1998 ; 1119-20. 3. Dinmore AJ et al. Intestinal carbohydrate absorption and permeability at high altitude (5,730 m). J Appl Physiol 1994 ; 1903-7. 4. West J.B. Acclimatization to high altitude: truths and misconceptions. High Alt Med Biol 2003. 5. West JB. The physiologic basis of high-altitude diseases. Ann Intern Med 2004 ; 141: 789-800. 6. Arancibia A et al. Effects of high altitude exposure on the pharmacokinetics of furosemide in healthy volunteers. Int J Clin Pharmacol Ther 2004 ; 314-20. 7. Arancibia A et al. Pharmacokinetics of lithium in healthy volunteers after exposure to high altitude. Int J Clin Pharmacol Ther 2003 ; 200-6. 8. Ritschel WA et al. Pharmacokinetics of acetazolamide in healthy volunteers after short- and long-term exposure to high altitude. J Clin Pharmacol 1998 ; 533-9. 9. Ritschel WA. et al. Urinary excretion of acetazolamide in healthy volunteers after short- and long-term exposure to high altitude, in Methods Find Exp Clin Pharmacol 1998 ; 133-7. 10. Fradette C, Du Souich P. Effect of hypoxia on cytochrome P450 activity and expression. Curr Drug Metab 2004 ; 257-71. 11. Fradette C et al. Hypoxia-induced down-regulation of CYP1A1/1A2 and up-regulation of CYP3A6 involves serum mediators. Br J Pharmacol 2002 ; 881-91. 12. Kamimori GH et al. Effects of altitude (4300 m) on the pharmacokinetics of caffeine and cardio-green in humans. Eur J Clin Pharmacol 1995 ; 167-70. 13. Jodynis-Liebert J et al. Serum metabolite/caffeine ratios as a test for liver function. J Clin Pharmacol 2004 ; 338-47. 14. Minamiyama Y et al. 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Effects of 5-day hypoxia on cardiac adrenergic neurotransmission in rats. J Appl Physiol 1998 ; 890-7. 21. Pei JM et al. Impaired G(s)alpha and adenylyl cyclase cause beta-adrenoceptor desensitization in chronically hypoxic rat hearts. Am J Physiol Cell Physiol 2000 ; C1455-63. 22. Michelotti GA et al. Cloning and characterization of the rat alpha 1a-adrenergic receptor gene promoter. Demonstration of cell specificity and regulation by hypoxia. J Biol Chem 2003 ; 8693-705. 23. Eckhart AD et al. Characterization of the alpha1B-adrenergic receptor gene promoter region and hypoxia regulatory elements in vascular smooth muscle. Proc Natl Acad Sci U S A 1997 ; 9487-92. 24. Fagan KA et al. Upregulation of nitric oxide synthase in mice with severe hypoxia-induced pulmonary hypertension. Respir Res 2001 ; 306-13. 25. Palmer LA et al. Hypoxia induces type II NOS gene expression in pulmonary artery endothelial cells via HIF-1. Am J Physiol 1998 ; L212-9. 26. Jiang BH et al. Dimerization, DNA binding, and transactivation properties of hypoxia-inducible factor 1. J Biol Chem 1996 ; 17771-8. 27. Wang GL, Semenza GL. Characterization of hypoxia-inducible factor 1 and regulation of DNA binding activity by hypoxia. J Biol Chem 1993 ; 21513-8. 28. Schneider JC et al. Response of nitric oxide pathway to Larginine infusion at the altitude of 4,350 m. Eur Respir J 2001 ; 286-92. 29. Blitzer ML et al. Endothelium-derived nitric oxide regulates systemic and pulmonary vascular resistance during acute hypoxia in humans. J Am Coll Cardiol 1996 ; 591-6. 30. Agvald P et al. Mechanisms of nitric oxide generation from nitroglycerin and endogenous sources during hypoxia in vivo. Br J Pharmacol 2002 ; 373-82. 31. Jiang HB et al. Effect of isosorbide dinitrate on nitric oxide synthase under hypoxia. Pharmacology 2001 ; 10-6. 32. Vogel JA, Harris CW. Cardiopulmonary responses of resting man during early exposure to high altitude. J Appl Physiol 1967 ; 1124-8. 33. Karliner JS et al. The electrocardiogram at extreme altitude : experience on Mt. Everest. Am Heart J 1985 ; 505-13. 34. Kontos HA et al. Comparative circulatory responses to systemic hypoxia in man and in unanesthetized dog. J Appl Physiol 1967 ; 381-6. 35. Ruiz, L. and D. Penaloza, Altitude and hypertension, in Mayo Clin Proc. 1977. p. 442-5. 36. Cornolo J et al. Autonomic control of the cardiovascular system during acclimatization to high altitude : effects of sildenafil. J Appl Physiol 2004 ; 935-40. 37. Botero R et al. Efficacy and safety of valsartan compared with enalapril at different altitudes. Int J Cardiol 2000 ; 247-54. 38. Woods DR, Montgomery HE. Angiotensin-converting enzyme and genetics at high altitude. High Alt Med Biol 2001 ; 201-10. 39. Woods DR et al. Insertion/deletion polymorphism of the angiotensin I-converting enzyme gene and arterial oxygen saturation at high altitude. Am J Respir Crit Care Med 2002 ; 362-6. 19 Cardio&Sport • n°4 05-cets4 dossier 1/07/05 12:37 Page 20 dossier DOSSIER >>> Pathologies cardiaques en altitude : risques, traitements et prise en charge Dr Stéphane Doutreleau (Hôpital civil, Strasbourg) L es voyagistes proposent des destinations qui, bien que lointaines, sont de plus en plus accessibles pour la majorité d’entre nous. Des milliers de personnes partent ainsi chaque année. Il s’agit pour plus d’un tiers d’entre elles de personnes âgées, donc à fort risque cardiovasculaire. Nos patients, porteurs de cardiopathies plus ou moins sévères ou cumulant simplement des facteurs de risque, veulent aussi participer à cette mondialisation des voyages. Le transport et le stress qui l’accompagne, la fatigue, les modifications du rythme nycthéméral et de l’alimentation, ainsi que la destination choisie, sont autant de facteurs susceptibles d’interférer avec leur statut cardiovasculaire. Les patients, de mieux en mieux renseignés et parfois même poussés par les agences elles-mêmes, se tournent vers le corps médical pour obtenir leur passeport “sécurité”. Dans cet article, nous ne nous intéresserons qu’aux risques engendrés par l’altitude en cas de maladie cardiovasculaire et aux conseils qui en découlent. Les risques inhérents au voyage proprement dit ne sont pas nuls et les compagnies d’assurance montrent que 10 % des rapatriements sanitaires et 56 % des décès en avion sont d’origine cardiovasculaire. Ces aspects, bien évidemment indissociables du voyage, ne seront pas abordés ici. Des revues, complètes sur le sujet, sont disponibles dans la littérature (1, 2). Cardio&Sport • n°4 Peu d’études existent sur l’adaptation à l’hypoxie d’altitude des patients porteurs de cardiopathie. La modélisation des effets de l’hypoxie reste difficile, car aucun patient ne se ressemble et l’interaction avec leur traitement est complexe, mais indissociable de leur pathologie (cf. l’article de L. Monassier). En plus, l’hypoxie n’est pas le seul facteur qui intervient. Il ne faut pas oublier non plus le froid, le vent, les problèmes d’alimentation et l’activité physique, souvent inhabituelle, qui est pratiquée pendant cette période. Les effets attendus ou prouvés de l’altitude vont donc être développés dans chaque grand chapitre de la pathologie cardiovasculaire. > Hypertension artérielle L’hypertension artérielle (HTA) est bien sûr la pathologie la plus fréquente parmi les voyageurs de tous âges ! Chez l’homme, la pression artérielle semble peu varier en altitude, même pour des séjours prolongés. En période d’acclimatation, donc en début de séjour, des poussées hypertensives ont été rapportées. Toutefois, l’effet des médicaments diminuerait avec l’altitude (cf l’article de L. Monassier). Certaines classes thérapeutiques peuvent même poser des problèmes. Les ß-bloqueurs, en inhibant la réponse chronotrope induite par l’hypoxie aiguë, pourraient avoir un effet néfaste et peut-être retardateur de 20 l’état d’acclimatement. C’est surtout le cas pour les séjours à une altitude élevée, où l’augmentation de la fréquence cardiaque est la principale variable d’ajustement du débit cardiaque. Certains inhibiteurs calciques peuvent aussi avoir cet effet chronotrope négatif. Les diurétiques ne sont pas recommandés, surtout pour des séjours prolongés, car il existe toujours en altitude une tendance à l’hypovolémie (exercice physique, air sec). Si l’HTA isolée et contrôlée sous traitement ne contre-indique donc pas un séjour en altitude, une éventuelle modification thérapeutique peut se discuter quand elle est faite suffisamment tôt, que le traitement est bien toléré et les chiffres de pressions artérielles bien contrôlés. > Maladies coronaires Vasodilatation coronaire L’hypoxie d’altitude induit normalement, chez le sujet sain, une vasodilatation coronaire, seul moyen d’augmenter le débit coronaire puisque l’extraction myocardique en oxygène est déjà maximale au repos. La réponse peut-être diminuée, voire inversée, chez les coronariens. Dans tous les cas, l’hypoxie diminue les apports en oxygène et les besoins myocardiques augmentent (tachycardie, activité physique), créant donc une situation de déséquilibre 05-cets4 dossier 1/07/05 12:37 Page 21 délétère en cas de maladie coronaire ou de dysfonction ventriculaire gauche. C’est bien l’augmentation du travail myocardique qui est en cause puisque, chez des coronariens, les signes ischémiques en altitude apparaissent pour le même double produit (FC x PA Systolique), mais bien sûr pour une charge moindre. Une étude récente (3) a d’ailleurs montré que chez des coronariens, la réserve coronaire à l’effort est diminuée (-18 %) pour une altitude de 2 500 m, alors qu’elle augmente chez des sujets sains pourtant exposés à une altitude supérieure (4 500 m). La réponse du réseau coronaire est donc anormale, dès lors que des lésions coronaires ont été détectées, mais aussi, probablement, dès qu’il existe une dysfonction endothéliale coronaire, même sans atteinte coronarographique décelable. Période à risque Plusieurs études, faites essentiellement dans le Colorado (4), confirment que l’altitude diminue le seuil ischémique mais que, pour des altitudes inférieures à 3 000-3 200 m, les accidents étaient finalement exceptionnels chez des coronariens connus, traités et stables. La période à risque est celle de l’acclimatation, donc pendant les 2-3 premiers jours à une altitude donnée, du fait de l’augmentation de la consommation myocardique en oxygène. Par ailleurs, l’incidence du mal aigu des montagnes n’est pas supérieure chez les coronariens. Dans tous les cas, l’interférence avec les traitements anti-angineux doit être envisagée : si les ß-bloquants, dans cette indication, ne semblent pas devoir être remis en cause, l’emploi de certains dérivés nitrés en particulier est discutable (cf l’article de L. Monassier). Aucune règle ne peut donc être établie et les conseils devront être individualisés en fonction du degré d’atteinte coronaire, de l’existence d’une ischémie résiduelle, de la fonction ventriculaire gauche, d’éventuels troubles du rythme associés et des traitements pris. Une évaluation complète est donc indispensable. Chez un coronarien stable, une altitude de 3 000 m n’est pas déraisonnable, sous réserve d’une acclimatation bien sûr correcte. Pour des trekkings de haute altitude (au-delà de 5 000 m), aucune donnée n’est disponible, mais des cas de coronariens pontés, ayant effectués des marches dans l’Himalaya, ont été rapportés (4). En post-angioplastie, il faut attendre quelques semaines avant d’autoriser la montée en altitude, d’autant plus que le risque thrombotique est accru dans ces conditions. > Insuffisance cardiaque effets, sur les performances à l’exercice, de différentes altitudes simulées en laboratoire (niveau de la mer, 1 000, 1 500, 2 000 et 3 000 mètres) (5). Une population de 38 insuffisants cardiaques stables (FE moyenne = 34 ± 7 % ; diamètre VG > 65 mm), habitués à la pratique des épreuves d’effort sur bicyclette ergométrique avec enregistrement des échanges gazeux, a été comparée à 14 sujets sains appariés. La population d’insuffisants cardiaques était répartie en trois groupes, en fonction de leur pic deVO2 : > 20, entre 15 et 20 et < 15 ml.min-1.kg-1. Les patients de cette étude prenaient tous un traitement par IEC, digitaliques et diurétiques. Quatre d’entre eux prenaient un inhibiteur des antagonistes aux récepteurs de l’angiotensine II et seulement un prenait des ß-bloquants. Les risques de l’altitude Altitude et capacité d’effort La prévalence de l’insuffisance cardiaque ne cesse d’augmenter du fait de la prise en charge optimisée des accidents coronariens, des progrès thérapeutiques et du vieillissement de la population. Beaucoup d’insuffisants cardiaques modérés, stables sous traitement médical optimal, reprennent une activité professionnelle et une vie quotidienne proches de la normale. Logiquement, ces patients sont désireux à la fois de voyager et même, pour certains d’entre eux, de prendre de l’altitude. L’élévation des catécholamines circulantes, les modifications de la perméabilité capillaire pulmonaire, les altérations du métabolisme aérobie musculaire et une éventuelle ischémie myocardique ne sont pas des facteurs qui, au premier abord, nous incitent à les autoriser à monter en altitude. Cependant, très peu d’études se sont intéressées à l’adaptation et, surtout, aux risques que comporte la montée en altitude chez les insuffisants cardiaques. Les effets de l’altitude sur les capacités d’effort sont d’autant plus marqués que l’insuffisance cardiaque est grave : la pente de réduction de la puissance maximale développée est surtout significativement diminuée (-10 ± 3 % par 1 000 m d’altitude) chez les insuffisants cardiaques, avec un pic de VO2 < 15 ml.min-1.kg-1 comparativement aux sujets sains (-2 ± 1 %/1 000 m) ou aux insuffisants cardiaques moins sévères (-4 ± 2 %/1 000 m). De la même façon, on observe une diminution de la consommation d’oxygène similaire chez tous les insuffisants cardiaques par rapport aux sujets contrôles, mais uniquement pour des altitudes supérieures à 2 000 m. Protocole d’étude Une seule étude s’est intéressée aux Adaptation ventilatoire L’adaptation ventilatoire à l’exercice chez l’insuffisant cardiaque n’est pas modifiée et contrairement aux sujets contrôles, il n’y a pas d’augmentation du débit ventilatoire de fin d’effort. Cette absence d’hyperventilation, bénéfique sur le plan énergétique car n’augmentant pas le travail ventilatoire, >>> 21 Cardio&Sport • n°4 dossier DOSSIER 05-cets4 dossier 1/07/05 12:37 Page 22 dossier DOSSIER >>> est toutefois, peut-être, un facteur péjoratif sur le plan de l’acclimatation. Enfin, élément important, les auteurs ne signalent aucun trouble du rythme ou aucun signe électrique d’ischémie myocardique, quelle que soit l’altitude. Finalement, l’hypoxie aiguë d’altitude ne semble pas plus risquée sur un myocarde altéré. Les effets d’une hypoxie chronique ne sont pas connus, mais ne devraient pas s’accompagner d’une majoration du risque. L’insuffisant cardiaque stable, sous traitement médical optimal, va voir sa capacité d’exercice diminuée et ce, d’autant plus qu’elle était initialement altérée. C’est donc le problème essentiel : monter, oui, mais pour faire quoi ? On peut donc probablement autoriser un insuffisant cardiaque stable, sans hypertension artérielle pulmonaire, à monter jusqu’à une altitude de 3 000 m. Un programme de réentraînement, avant son séjour, ne pourra lui être que bénéfique. Aucune étude n’est disponible pour des altitudes supérieures, mais nous connaissons tous, parmi nos patients, des insuffisants cardiaques (évidemment modérés), ayant effectué des séjours à des altitudes bien supérieures et étant revenus enchantés et heureux ! > Troubles du rythme Les troubles du rythme, compliquant une cardiopathie ou une hypertension artérielle, peuvent s’aggraver, du fait de l’activation du système adrénergique en altitude. Ceci, d’autant plus que l’effet de la plupart des médicaments antiarythmiques (sauf l’amiodarone) est diminué. C’est donc un facteur supplémentaire à prendre en compte avant d’autoriser un séjour en altitude. Pour les troubles du rythme survenant sur cœur “sain”, l’influence de l’hypoxie n’est pas connue mais ne semble pas délétère. On décrit parfois des extrasystoles ventriculaires ou auriculaires en début de séjour, à un moment où la désaturation du sang artériel en Cardio&Sport • n°4 L’hypertension artérielle est la pathologie la plus fréquente parmi les voyageurs. oxygène est la plus importante et toujours à des altitudes importantes. Dans tous les cas, l’exercice peut être, comme au niveau de la mer, un facteur déclenchant. Des troubles du rythme paroxystiques, sur cœur sain, surtout s’ils ne nécessitent pas de traitement antiarythmique, ne contre-indiquent pas le séjour en altitude. Une mention spéciale pour la fibrillation auriculaire. L’exposition à une hypoxie aiguë ou chronique entraîne, sur une étude échographique, une augmentation de la participation auriculaire au débit cardiaque (6). L’adaptation à l’hypoxie, lorsque la systole auriculaire mécanique a disparu, est probablement moins bonne, mais cela n’a jamais été montré. Si un traitement est nécessaire, son efficacité ou sa toxicité seront probablement affectées par l’altitude, mais une modélisation reste difficile. Les patients doivent en être avertis avant de partir. > Patients porteurs de stimulateurs Les sujets porteurs d’un stimulateur cardiaque sont généralement aussi porteurs d’une cardiopathie. Dans ce cas, c’est bien sûr elle qui détermine l’autorisation ou non au séjour en altitude. Toutefois, plusieurs règles et recommandations, découlant de l’adaptation “normale” à l’altitude, peuvent être énumérées. Les seuils de détection et de stimulation des 22 sondes, aussi bien ventriculaires qu’auriculaires, ne sont pas modifiés en situation d’altitude aiguë (pendant 30 minutes), simulée (hypoxie hypobare) entre 500 et 4 000 m (7). Aucune étude ne s’est intéressée aux effets de l’hypoxie chronique, donc aux séjours prolongés, mais aucun accident n’a jamais été rapporté. Compte tenu de l’importance de l’adaptation de la fréquence cardiaque en début de séjour, il convient de la rendre possible, en l’absence de contre-indication : augmentation de la fréquence cardiaque de base pour les patients dépendants et/ou augmentation de la sensibilité des capteurs d’asservissement. La fréquence cardiaque maximale n’a pas besoin d’être supérieure, mais il faut s’assurer par épreuve d’effort qu’elle sera suffisante pour l’exercice à réaliser en altitude.❚ Bibliographie 1. Possick SE, Barry M. Air travel and cardiovascular disease. J Travel Med 2004 ; 11 (4) : 243-8. 2. Touze JE, Fourcade L, Heno P et al. [Cardiovascular risk for the traveler]. Med Trop 1997 ; 57 (4 Bis) : 461-4. 3. Wyss CA, Koepfli P, Fretz G et al. Influence of altitude exposure on coronary flow reserve. Circulation 2003 ; 108 (10) : 1202-7. 4. Alexander JK. Coronary heart disease at altitude. Tex Heart Inst J 1994 ; 21 (4) : 261-6. 5. Agostoni P, Cattadori G, Guazzi M et al. Effects of simulated altitude-induced hypoxia on exercise capacity in patients with chronic heart failure. Am J Med 2000 ; 109 (6) : 450-5. 6. Boussuges A, Molenat F, Burnet H et al. Operation Everest III (Comex ‘97) : modifications of cardiac function secondary to altitude-induced hypoxia. An echocardiographic and Doppler study. Am J Respir Crit Care Med 2000 ; 161 (1) : 264-70. 7. Weilenmann D, Duru F, Schonbeck M et al. Influence of acute exposure to high altitude and hypoxemia on ventricular stimulation thresholds in pacemaker patients. PACE 2000 ; 23 (4 Pt 1) : 512-5. 05-cets4 dossier 1/07/05 12:37 Page 23 dossier DOSSIER Sport en altitude : que faire avant un trekking ? Dr Stéphane Doutreleau (Hôpital civil, Strasbourg) D e plus en plus de patients, désireux de partir en altitude, viennent nous demander conseil. > Les processus d’adaptation Comme nous l’avons vu, les études sont peu nombreuses, mais la connaissance des processus d’adaptation à l’hypoxie aiguë et chronique permet de donner quelques règles : - il existe une activation du système adrénergique à l’origine d’une augmentation de la consommation en oxygène du myocarde et, éventuellement, de l’aggravation de troubles du rythme; - pour un travail équivalent, la consommation en oxygène du myocarde est augmentée ; - la pression artérielle pulmonaire augmente en altitude et est susceptible d’aggraver ou de décompenser une cardiopathie ; - l’altération des capacités d’exercice sera d’autant plus importante en altitude qu’elles sont limitées au niveau de la mer ; - la réserve coronaire d’exercice est diminuée chez les coronariens, mais aussi, probablement, chez tous les patients cumulant des facteurs de risque cardiovasculaire. Pour chaque sujet se rendant en altitude, des renseignements précis doivent être obtenus avant de se prononcer. - cardiopathies instables ou décompensées ; - troubles du rythme grave ; - cardiopathie cyanogène ; - hypertension artérielle pulmonaire importante. > Les contre-indications De là, découlent bien sûr des contreindications aux séjours en haute altitude (supérieure à 2 500 m) : > Les renseignements utiles Pour chaque sujet se rendant en alti- tude, des renseignements précis doivent être obtenus avant de se prononcer. Renseignements concernant le patient Il est bien sûr indispensable de faire le point sur la cardiopathie pour connaître la symptomatologie actuelle et le traitement pris. Des >>> 23 Cardio&Sport • n°4 05-cets4 dossier 1/07/05 12:37 Page 24 dossier DOSSIER >>> examens complémentaires sont nécessaires : - ECG de repos ; - épreuve d’effort (éventuellement avec mesure des échanges gazeux), pour connaître le seuil ischémique et l’existence de troubles du rythme induits par l’exercice ; - échographie cardiaque : fonction systolique ventriculaire gauche, pression artérielle pulmonaire ; - holter ECG, éventuellement à l’effort, selon le contexte. Renseignements concernant le séjour Il faut absolument connaître l’effet d’un éventuel séjour antérieur en altitude et connaître les caractéristiques du séjour prévu : altitude d’arrivée, altitude maximale envisagée, profil d’ascension, dénivelé quotidien, port de charge, nature du terrain et possibilité d’une assistance ou non ! sujets ne prenant pas de médicaments chronotropes négatifs. > En conclusion Un séjour en altitude ne doit pas être systématiquement interdit aux patients atteints de pathologies cardiovasculaires. Aucune règle ne peut être établie faute d’étude sur le sujet. La décision doit donc faire appel à nos connaissances et au bon sens. Les hypertendus, les porteurs de stimulateurs cardiaques (sans autres anomalies importantes) et les patients ayant des troubles du rythme idiopathiques peuvent, a priori, être autorisés à séjourner en altitude, moyennant parfois des aménagements thérapeutiques. Les coronariens stables, sans dysfonc- tion ventriculaire gauche importante (< 40 %), peuvent être autorisés à séjourner en altitude. Les accidents en dessous de 3 500 m sont rares. Audelà, le risque est peut-être plus élevé et à discuter au cas par cas. Les insuffisants cardiaques seront limités à l’exercice, d’autant plus que leur capacité d’effort est réduite au niveau de la mer. Il ne semble pas y avoir de sur-risque rythmique ou ischémique pour des altitudes inférieures à 3 000 m. Tout est conditionné par le but du séjour : un trekking avec sac à dos sera probablement difficile, mais contempler un panorama grandiose après une montée en téléphérique ne doit pas leur être interdit. La montagne est une passion. Les passionnés prennent des risques. ❚ > Conseils et tests Dans tous les cas, la décision et les conseils seront individualisés. Il faut donc aussi pouvoir discuter des éventuelles complications possibles. Les risques liés à l’altitude, à l’activité physique et, éventuellement, à un isolement géographique (pas de secours possible) sont expliqués au sujet, pour qu’il puisse prendre une décision. A côté des explorations purement cardiologiques, l’intérêt d’un test en hypoxie peut se discuter. Il s’agit de tester l’adaptation aiguë, c’est-à-dire la sensibilité des chémorécepteurs à l’hypoxémie, au repos et à l’exercice sous maximal. Il ne s’agit en aucun cas d’un test d’aptitude en cas de cardiopathie, mais l’apparition de signes ischémiques sur l’ECG n’est pas de très bon augure ! De plus l’interprétation des résultats, qui se base entre autres sur la fréquence cardiaque, est faite pour des Cardio&Sport • n°4 Un séjour en altitude ne doit pas être systématiquement interdit aux patients atteints de pathologies cardiovasculaires. 24 1/07/05 12:38 Page 25 mise au point 03-cets4 mise au point Pathologie vasculaire et sport : revue pour une démarche clinique La pathologie vasculaire est encore mal connue chez le sportif. Le symptôme dominant en est la douleur. On se propose donc de partir des symptômes douloureux et de leur localisation pour envisager la pathologie vasculaire dans cette population. L’angor et l’infarctus du myocarde qui, du point de vue du médecin vasculaire, ne sont “que” des complications cardiaques de lésions artérielles parmi d’autres, ne seront pas abordés dans cette revue, qui se limite aux vaisseaux “extra-cardiaques”. Dr Pierre Abraham (Service Explorations Fonctionnelles, CHU Angers) L e réseau vasculaire est bien plus qu’un simple système de conduction de l’oxygène du poumon vers la périphérie et retour, grâce à la pompe cardiaque. Longtemps considérée comme un simple “tuyau” passif, l’artère est un organe “plastique” susceptible de remodelage ; l’endothélium vasculaire, un ensemble de cellules sécrétrices, interagissant fortement avec les cellules et les hormones circulantes ; la micro-circulation, un lieu d’échange essentiel entre le sang et les tissus et un régulateur puissant de la volémie et donc de la tension artérielle. Malgré cela, la pathologie vasculaire du sportif reste encore assez mal connue, à la fois par les difficultés diagnostiques persistantes dans le cadre de cette pathologie et par le fait que l’athérome, principale cause de pathologie vasculaire, est le plus souvent observée chez le sujet âgé en raison de son évolution lente. C’est oublier un peu vite que, d’une part, les perturbations du flux augmentent avec le débit au sein d’un vaisseau considéré et, d’autre part, qu’il existe de nombreuses maladies vasculaires non athéromateuses. Ainsi, des lésions artérielles “mineures”, qui resteraient longtemps asymptomatiques chez des sujets peu ou pas actifs peuvent, à la faveur de symptômes, se révéler chez des sujets modérément sportifs (joggers “du dimanche”) ou chez des athlètes de bon - voire de haut - niveau. Cette revue n’est sans doute pas exhaustive, mais se voudrait didactique pour guider le cardiologue dans sa démarche clinique. MOTS CLÉS Pathologie vasculaire, sport, douleur aiguë, douleur chronique, écho-Doppler, céphalée d’altitude, dissection aortique, syndrome des loges, scanner, IRM penser à une dissection artérielle (1-6). Un contexte particulier est celui des manipulations “ostéopathiques” du rachis cervical, au cours desquelles sont (heureusement rarement) observés des accidents vasculaires (7-9). Dans ce contexte particulier, il est difficile d’incriminer formellement le geste de manipulation comme cause de la dissection, dans la mesure où la motivation initiale de la consultation est souvent une douleur pré-existante, rapportée à un effort sportif ou à un faux mouvement. > Douleur aiguë Par douleur “aiguë”, on entend une douleur d’installation le plus souvent brutale, d’intensité variable, mais qui, surtout, apparaît à l’effort, au décours de celui-ci ou lors de mouvements et ne cède pas à la mise au repos. Tête et cou C’est le plus souvent lors d’un effort en résistance (effort “en force”), d’une poussée tensionnelle d’effort ou d’un mouvement brutal de la tête ou d’un choc direct (sports de combat), qu’est notée l’apparition d’une douleur qui, dans le domaine vasculaire, doit faire La douleur, souvent unilatérale et latérocervicale, peut rester isolée ou s’accompagner de signes cérébraux (dissection carotidienne) ou vertébro-basilaires (dissection vertébrale) d’intensité variable et qu’il faut rechercher lorsqu’ils restent discrets ou ont régressé. La présence d’un souffle à l’auscultation n’est absolument pas obligatoire en cas de dissection longue ou d’occlusion complète de l’axe vasculaire. L’examen de première intention est l’écho-Doppler suivi, le cas échéant, d’autres examens d’imagerie vasculaire si le diagnostic est confirmé ou >>> 25 Cardio&Sport • n°4 mise au point 03-cets4 mise au point 1/07/05 12:38 Page 26 >>> suspecté et/ou à la recherche de dysplasies des autres troncs. Les diagnostics différentiels sont nombreux, allant du simple “torticolis” à la pathologie bucco-dentaire. Un examen clinique complet de la tête et du cou et un bilan radiologique cervical permettent de faire, le plus souvent, la part des choses. La céphalée d’altitude dans les sports de haute montagne doit être citée dans cette revue sur le sport. Signe avant-coureur du mal aigu des montagnes, elle est très spécifique et bien connue des guides et accompagnateurs. Le traitement de la dissection est le plus souvent médical par anticoagulant, contrôle tensionnel, antalgiques et mise au repos. La reprise du sport dépend des séquelles éventuelles et du contexte d’apparition de la dissection (dysplasies artérielles…), mais la pratique des sports à risque de poussée tensionnelle (haltérophilie, sport de combat…) est a priori à déconseiller. Tronc Si la dissection aortique peut être le mode de révélation de l’athérosclérose chez des sportifs d’âge moyen, les maladies du tissu élastique ou conjonctif se compliquent volontiers d’anévrisme ou de dissection aortiques chez des athlètes plus jeunes (10-15). Il convient d’y penser chez les athlètes de grande taille (basket, volley-ball…). Dans ces deux situations, la dissection peut survenir lors d’un effort sportif banal. Dans le contexte des sports de vitesse, les décélérations ou les chocs violents peuvent être en cause (16, 17). Dominé par la douleur violente migratrice postérieure, le tableau clinique est le plus souvent bruyant, voire dramatique, parfois associé à des complications périphériques (troubles neurologiques centraux en cas de dissection des troncs supraaortiques, ischémie digestive et des membres inférieurs en cas de dissection étendue aux branches artérielles…). Le scanner injecté, surtout, ou l’IRM en urgence, posent le diagnostic. Parmi les diagnostics différentiels, on peut citer : l’embolie pulmonaire, l’infarctus du myocarde et la perforation digestive. Le traitement relève d’une hospitalisation urgente en milieu spécialisé. L’avenir sportif est à priori très largement compromis, sauf, peut-être, pour les sports cérébraux ou la pêche au coup… Membre supérieur La thrombophlébite d’effort est l’apanage des sports sollicitant les bras (natation, kayak). Quelques rares observations ont été faites au cours de traumatismes La douleur est le maître symptôme des pathologies vasculaires chez le sportif. Cardio&Sport • n°4 26 directs (18-20). L’épisode aigu est souvent, mais pas toujours, précédé d’un œdème d’effort récidivant du membre supérieur. L’œdème, la douleur et l’apparition brutale d’une circulation collatérale sous-cutanée doivent faire suspecter le diagnostic. L’écho-Doppler, voire la phlébographie, permettent d’affirmer le diagnostic et d’éliminer les diagnostics différentiels (syndrome de loge, contexte infectieux...). La fibrinolyse, en plus du traitement anticoagulant, est parfois proposée pour limiter les conséquences fonctionnelles à long terme, si l’athlète est vu précocement. A moyen terme, en cas de récupération ad-integrum de l’axe vasculaire, la levée chirurgicale du défilé thoraco-brachial, le plus souvent associé, est fréquemment proposée et, dans ce cas, la reprise du sport est en général obtenue sans problème (21). Membre inférieur • L’ischémie aiguë L’ischémie aiguë par décollement d’une plaque ou hémorragie sous-intimale, chez le sportif occasionnel d’âge moyen, n’est pas spécifique du sport. Par contre, la possibilité de complications vasculaires lors de traumatismes violents (cyclisme, sports de glisse...) ne doit pas être oubliée (22-24). • La pathologie veineuse La pathologie veineuse ne semble pas avoir de spécificité particulière, si ce n’est la possibilité de traumatismes directs des axes veineux lors des sports de combat, qui a été incriminée dans le développement ou la rupture de varices segmentaires. La déshydratation lors des pratiques d’exercice physique par forte chaleur, les transferts longs, la polyglobulie sévère, voire le dopage, pourraient être proposés comme facteurs aggravants de l’hyper-coagulabilité et augmenter le risque de thrombose, mais aucune étude ne semble conclure de façon for- 1/07/05 12:38 melle à un risque thrombotique veineux accru chez le sportif (25, 26). Enfin, un syndrome de loge aigu, venant compliquer un syndrome de loge chronique, est une éventualité rare qui doit être connue. • L’occlusion Le diagnostic ne pose en général aucun problème en cas d’occlusion fémorale brutale, avec douleur de mollet, pâleur, froideur, disparition des pouls et déficit sensitivo-moteur (d’autant plus qu’il s’agit de sujets jeunes, avec des artères plutôt en bon état). Par contre, plusieurs observations de douleurs atypiques (pseudo-sciatiques, douleurs lombo-fessières), liées à l’occlusion aiguë de troncs proximaux (iliaque primitive, voire interne) et non diagnostiquées ont été rapportées. Dans le syndrome de loge aigu, la normalité des pouls distaux est la règle et ne doit en aucun cas être utilisée comme un argument d’élimination. La mesure des pressions artérielles et/ou de loge et le Doppler vasculaire font le diagnostic. • Le spasme vasculaire Les diagnostics différentiels non vasculaires sont facilement éliminés. A l’inverse, un “spasme vasculaire”, qui peut survenir après des traumatismes même mineurs, peut parfois donner le change avec une ischémie sub-aiguë. De nature et de définition vagues, de durée parfois prolongée, ce “spasme” cède au réchauffement du membre et/ou aux vasodilatateurs. Le choix entre traitement médical, angioplastie ou chirurgie est guidé par le contexte clinique et la sévérité du tableau. L’avenir sportif est fonction des lésions associées, de la restitution ou non d’un axe vasculaire parfait et des séquelles post-ischémiques cutanées musculaires ou neurologiques éventuelles. Page 27 > Douleur chronique Par douleur “chronique”, on entend une douleur d’intensité variable liée à l’exercice. Elle apparaît à l’effort ou au cours de celui-ci et disparaît à sa diminution ou à son arrêt, pour réapparaître, le plus souvent, pour une intensité comparable si l’effort est repris. Tête et cou La céphalée réapparaissant à chaque effort chez le sportif relève du même bilan étiologique que chez les sujets non sportifs, à la recherche principalement d’une hypertension artérielle primitive ou secondaire (coarctation aortique méconnue, dysplasie des artères rénales…). Dans les sports susceptibles de donner lieu à des traumatismes cérébraux, la recherche d’une fistule posttraumatique (par exemple temporodurale) ne doit pas être oubliée. L’examen clinique et l’interrogatoire à la recherche de signes focaux, de troubles visuels, etc., peuvent orienter le diagnostic. Les examens complémentaires, guidés par l’examen initial, aident au diagnostic étiologique. Le Doppler vasculaire et une surveillance tensionnelle (mesure ambulatoire de la pression artérielle, épreuve d’effort…) sont souvent utiles. Les autres examens (échocardiographie, étude de la fonction rénale…) sont dictés par l’analyse du retentissement fonctionnel de l’hypertension artérielle. Les diagnostics différentiels, très nombreux (migraine, pathologies dentaire ou ophtalmique…), ne seront pas détaillés ici. Historiquement, les céphalées observées la nuit lors des polyglobulies majeures, ne sont plus courantes du fait des contrôles d’hématocrite régulièrement pratiqués. Un traitement symptomatique n’est pas satisfaisant tant qu’une cause organique n’a pas été formellement éliminée. En cas d’hypertension artérielle primitive, contrôlée sous traitement, les sports de “musculation” ou de “résistance” ne sont pas recom- mandés. L’activité physique en endurance, au contraire, ne pose pas de problème. Tronc Les douleurs d’effort Les douleurs thoraciques d’effort relèvent principalement, dans le domaine vasculaire, de l’angor d’effort. Le contexte sportif, les signes cliniques, les diagnostics différentiels et les traitements de l’angine de poitrine ne seront pas détaillés ici. Il faut se rappeler que l’on se doit de reproduire les symptômes et donc, que chez un sujet entraîné, il faut disposer d’un ergomètre permettant d’atteindre des puissances correspondant au niveau d’effort habituel. Les douleurs abdominales d’effort résulteraient, pour la plupart, d’une ischémie digestive qui serait liée à un vol vasculaire par les muscles actifs, au dépend des territoires splanchniques. Elle survient surtout au cours des sports de grande endurance, type marathon ou iron man en triathlon (27). La douleur abdominale peut s’accompagner de diarrhée et de vomissements. L’examen clinique au repos est en règle générale strictement normal. Un souffle dans la région épigastrique est souvent observé et rapporté à la présence d’une compression extrinsèque du tronc cœliaque par le ligament arqué du diaphragme. ● Les lombalgies et fessalgies Chez le sportif d’âge mûr, les lombalgies ou fessalgies d’effort doivent faire rechercher une ou des lésions sur les axes iliaques primitifs ou internes. Si la pathologie athéromateuse n’a pas de spécificité sportive, la possibilité de douleurs proximales d’origine vasculaire reste encore mal connue et doit sans doute, à ce titre, être citée dans cette revue (28). Les lésions hypogastriques peuvent être responsables de troubles sexuels. ● >>> 27 Cardio&Sport • n°4 mise au point 03-cets4 mise au point mise au point 03-cets4 mise au point 1/07/05 12:38 Page 28 >>> L’écho-Doppler peut confirmer la présence du ligament arqué ou d’une atteinte iliaque et élimine la possibilité d’une autre anomalie vasculaire ou non vasculaire. Les nombreux diagnostics différentiels de la pathologie digestive ne seront pas décrits ici. Dans le cadre des fessalgies et lombalgies d’effort, la pathologie rachidienne et, en particulier, la présence d’un canal lombaire étroit, sont souvent discutées. La prise en charge du ligament arqué a été presque abandonnée, sauf en cas d’amaigrissement sévère. Le traitement des douleurs abdominales d’effort est, en l’absence de cause objectivée, essentiellement symptomatique. Les lésions iliaques internes peuvent bénéficier d’une angioplastie souvent spectaculairement efficace. Membre supérieur Les syndromes Dans les sports sollicitant les avantbras (motocross, planche à voile…), la présence de douleurs récidivantes aux membres supérieurs peut révéler un syndrome de loge (29). L’apparition d’un syndrome du défilé thoraco-brachial pourrait être favorisée par les sports sollicitant la ceinture scapulaire, comme l’halthérophilie, le canoëkayak, le lancer, la natation (30, 31). Des micro-angiopathies digitales peuvent survenir comme complication des chocs répétés sur la paume de la main (pelotari à main nue). brachiaux, le caractère positionnel est souvent difficile à affirmer à l’interrogatoire. L’examen physique de repos, à distance de l’effort, est en principe normal dans ces deux syndromes. L’existence d’un syndrome de Raynaud sévère ou atypique peut être un mode de révélation d’un syndrome du défilé thoracobrachial ou de ses complications, mais peut aussi révéler des micro-angiopathies digitales traumatiques. Le diagnostic La mesure des pressions de loge au membre supérieur permet le diagnostic de syndrome de loge, à condition de reproduire le geste sportif qui induit la douleur. Les manœuvres classiques de provocation et l’écho-Doppler aident au diagnostic de syndrome du défilé et permettent de s’assurer de l’absence de complications vasculaires (anévrysme post-sténotique, embols vasculaires périphériques). ● ● Les symptômes La douleur, dans les syndromes de loge, s’accompagne d’un durcissement et de faiblesse anormale des masses musculaires et, parfois, de fourmillement aux extrémités. La douleur peut être retardée ou prolongée (quelques minutes) par rapport à l’effort. En règle symétrique, elle n’apparaît qu’après une période d’effort répété. Dans les défilés thoraco- ● Cardio&Sport • n°4 L’existence d’une hypertrophie musculaire très prononcée ou d’une douleur au repos doit faire évoquer la possibilité d’un syndrome de loge secondaire. Le défilé thoraco-brachial peut donner le change, voire s’associer aux pathologies canalaires (cubital au coude, canal carpien…) ou aux pathologies tendineuses des membres supérieurs. L’existence d’une douleur de repos ou d’une douleur provoquée à la palpation doit faire rechercher une telle association. L’aponévrectomie (ou aponévrotomie) dans le syndrome de loge et la levée chirurgicale de la compression, en règle associée à une ablation de la première côte dans le syndrome du défilé permettent, en l’absence de complication, une reprise d’activité sportive à l’identique. Les atteintes vasculaires sévères, dans le cadre des micro-angiopathies traumatiques ou emboliques, peuvent nécessiter une sympathectomie. Dans ce cas, la reprise du sport s’accompagne parfois d’une difficulté, voire d’une baisse de performance, chez certains 28 Le lancer favorise l’apparition du syndrome du défilé thoraco-brachial. sportifs, en raison de l’effet chronotrope négatif des sympathectomies des membres supérieurs. Membre inférieur Les syndromes Le syndrome de loge a souvent été décrit dans la loge antéro-externe chez le footballeur. Il est aussi rapporté comme très fréquent chez les patineurs et est souvent discuté chez les marcheurs et les coureurs à pied. Il peut toucher toutes les loges musculaires en jambe comme en cuisse (32, 33). L’endofibrose induite par l’exercice ne doit être évoquée que chez des sportifs de bon ou haut niveau d’entraînement, ayant un long passé sportif d’endurance. Si la majorité des observations concernent les cyclistes, toutes les disciplines d’endurance sont concernées (34, 35). Les autres pathologies, artériopathie athéromateuse ou non, artère poplité piégée, claudication veineuse, ne relèvent pas de contextes sportifs spécifiques. ● Les symptômes Dans le syndrome de loge, la tension douloureuse musculaire apparaît pendant et persiste quelques minutes après l’effort. Elle peut s’accompagner de troubles neurologiques transitoires. La présence de petites hernies musculaires d’effort, parfois confondues avec des varices, est un bon argument ● 1/07/05 12:38 en faveur du diagnostic. Au repos, le muscle est habituellement non douloureux à la palpation. On doit rechercher une cause locale (masse tumorale ou lésion osseuse), susceptible de donner lieu à un syndrome de loge secondaire. L’examen clinique de repos d’une endofibrose est généralement strictement normal et la présence d’un souffle n’a pas de caractère pathologique. Les symptômes cliniques sont souvent décrits comme une sensation de “grosse cuisse” ou de “jambe molle”. Ils surviennent exclusivement lors des efforts maximaux ou supra-maximaux (sprints, échappées) et disparaissent très rapidement dès que l’athlète “lève le pied”. La douleur de mollet à la marche, paradoxalement parfois absente lors de la course, est classiquement décrite comme un argument en faveur d’un piège poplité. L’impossibilité de réaliser 50 extensions consécutives sur la pointe des pieds a été proposée comme un test diagnostique de dépistage. A l’exception de l’artère poplitée piégée, la notion de “trigger d’intensité” et de sédation rapide à l’arrêt de l’effort sont de bons arguments pour une origine vasculaire aux douleurs chroniques des membres inférieurs, même si le siège de la douleur est parfois atypique (claudication proximale). Un piège diagnostique est la possibilité de douleurs vasculaires atypiques dans leur localisation (proximale) ou leur description (sciatalgie, douleur de hanche), résultant de lésions iliaques internes (ou primitives), évoquant une pathologie neurologique (canal lombaire étroit, sciatique) ou rhumatologique (pseudo-arthrose de hanche). Le caractère de la symptomatologie liée à l’effort et disparaissant à son arrêt, ainsi que la présence de facteurs de risques vasculaires chez un sujet d’âge mûr, doivent inciter à exiger de l’échographiste une analyse spécifique des iliaques primitives et internes. Page 29 Le diagnostic La mesure des pressions intra-tissulaires après l’effort est plus utilisée que la scintigraphie pour le diagnostic de syndrome de loge. Echographie et scintigraphie musculaires permettent d’éliminer une cause inflammatoire locale. Une élévation des CPK à distance (> 72 h) de tout effort doit faire discuter la possibilité d’une myopathie sousjacente. L’écho-Doppler est l’examen de première intention dans le diagnostic de l’artère poplitée piégée et peut être utile au diagnostic d’endofibrose entre des mains exercées. Pour l’endofibrose comme pour les autres lésions artérielles (inflammatoires ou athéromateuses), la mesure des index de pression de cheville à l’arrêt d’un effort, dont l’intensité a permis de reproduire la douleur, apporte le plus souvent un argument décisif pour l’origine vasculaire des symptômes. Les diagnostics différentiels, avec des pathologies non vasculaires, en particulier tendineuses, musculaires ou ostéo-articulaires, sont innombrables. Les périostites et fractures de fatigue sont, dans notre expérience, très souvent objectivées lors des scintigraphies osseuses, réalisées chez les patients qui nous sont adressés pour suspicion de syndrome de loge. Ils ne remettent pas en cause la réalité d’un syndrome de loge secondaire éventuel, mais leur traitement en priorité semble préférable à une aponévrotomie de décharge. La présence d’une douleur exquise à la palpation et d’une douleur au choc par percussion de l’os dans son grand axe doit les faire rechercher. Le syndrome de Maigne est un diagnostic différentiel classique de l’endofibrose. Le concept de plicature iliaque développé par les auteurs hollandais ne doit sans doute pas être confondu avec une endofibrose (36). Actuellement, nous ne retenons pas comme pathologique un simple allongement artériel. ● Le traitement chirurgical des syndromes de loge et de l’artère poplitée piégée permet en règle générale une reprise du sport sans séquelle. Pour l’endofibrose, comme pour les autres lésions artérielles pariétales, le traitement est la chirurgie ou… l’abstention. Les gestes d’angioplasties ne sont pas recommandés dans le cadre de l’endofibrose. Les patients opérés courent le risque de récidive ou de sténose anastomotique. Dans la majorité des cas, la reprise du sport permet d’atteindre des performances identiques, voire supérieures, aux performances pré-opératoires. Si les lésions artérielles résultent d’un athérome débutant, la prise en charge médicale des facteurs de risque est essentielle. > En conclusion La douleur reste le maître symptôme des pathologies vasculaires chez le sportif. Elle ne doit cependant pas masquer la possibilité d’autres signes cliniques, parfois isolés et révélateurs de troubles vasculaires, comme une hypertension artérielle (coarcation, dysplasies), une dyspnée (hypertension artérielle pulmonaire), une fatigabilité (claudication proximale), un œdème (obstacle veineux), voire des pathologies nettement plus exceptionnelles telles que le pseudo-purpura rhumatoïde embolique (defilé thoraco-brachial) ou une dysphagie (lusoria), etc. Au total, quand faut-il penser à une pathologie vasculaire ? Toujours ! Dès lors qu’un symptôme lié à l’exercice reste inexpliqué, pour éviter un diagnostic retardé. Ainsi, le retard diagnostique moyen des maladies vasculaires du sujet jeune est de plus de deux ans. Que faire si on suspecte une pathologie vasculaire ? Adresser le patient à un correspondant expérimenté en pathologie vasculaire chez le sportif, car les problèmes de diagnostic restent encore souvent nombreux, même en cas de forte suspicion clinique. ❚ >>> 29 Cardio&Sport • n°4 mise au point 03-cets4 mise au point 1/07/05 12:38 Page 30 mise au point 03-cets4 mise au point Bibliographie 1. Gibbs JW 3rd, Piantadosi CA, Massey EW. Internal carotid artery dissection in stroke from SCUBA diving: a case report. Undersea Hyperb Med 2002 ; 29 (3) : 167-71. 2. Cheshire WP. Headache and facial pain in scuba divers. Curr Pain Headache Rep 2004 ; 8 : 315-20. 3. Milas ZL, Dodson TF, Ricketts RR. Pediatric blunt trauma resulting in major arterial injuries. Am Surg 2004 ; 70 : 443-7. 4. Payton TF, Siddiqui KM, Sole DP, McKinley DF. Traumatic dissection of the internal carotid artery. Pediatr Emerg Care 2004 ; 20 : 27-9. 5. Pary LF, Rodnitzky RL. Traumatic internal carotid artery dissection associated with taekwondo. Neurology 2003 ; 60 : 1392-3. 6. 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Sports Med 2004 ; 34 : 427-42. 1/07/05 12:37 Page 31 Dépistage cardiovasculaire Consensus européen pour les jeunes sportifs analyse d’article 03-cets4-analyse Corrado D, Pellicia A, Bjornstad HH et al. Cardiovascular pre-participation screening of young competitive athletes for prevention of sudden death : proposal for a common European protocol. Eur Heart J 2005 ; 26 : 516-24. Sur les terrains de sport, l’accident cardiovasculaire a souvent une issue et des conséquences dramatiques. Les groupes européens de Cardiologie du Sport et des Maladies du Myocarde et du Péricarde de la Société Européenne de Cardiologie viennent de proposer un consensus sur les modalités d’un dépistage cardiovasculaire chez les jeunes sportifs (< 35 ans), suivant un entraînement régulier et/ou participant à des compétitions. Pr François Carré (CHU Pontchaillou, >>> Rennes) MOTS CLÉS Accident cardiovasculaire, mort subite, activité sportive, jeune sportif, dépistage, consensus européen, bilan cardiovasculaire, ECG B ien que relativement rare, l’accident cardiovasculaire touche surtout les hommes et concerne, dans l’immense majorité des cas, un cardiaque ignoré, chez qui le risque de mort subite lors de la pratique d’une activité sportive intense est nettement majoré (x 2,5). Il est donc logique de réfléchir aux possibilités d’amélioration du dépistage de ces sujets à risque. C’est dans cette optique que les groupes européens de Cardiologie du Sport et des Maladies du Myocarde et du Péricarde de la Société Européenne de Cardiologie viennent de proposer un consensus sur les modalités d’un dépistage cardiovasculaire chez les jeunes sportifs. > L’hétérogénéité des modalités En effet, une grande hétérogénéité règne actuellement, selon les pays, dans ce domaine. Rappelons qu’en France, toute personne désireuse de participer à une compétition doit être En France, toute personne désireuse de participer à une compétition doit être en possession d’un certificat de non contre-indication, daté de moins d’un an et établi par un médecin. en possession d’un certificat de non contre-indication, daté de moins d’un an et établi par un médecin. Aucun protocole précis du bilan n’est imposé dans ce cadre. Un arrêté du ministère de la Jeunesse et des Sports, publié au Journal Officiel en février 2004, définit le contenu obligatoire du bilan minimal dont doivent bénéficier les sportifs avant leur inscription sur les listes de haut niveau ou espoir. Ces listes sont établies par la fédération dont dépend le sportif et cela concerne entre 13 et 14 000 sujets. Dans le >>> 31 Cardio&Sport • n°4 analyse d’article 03-cets4-analyse 1/07/05 12:37 Page 32 >>> domaine cardiovasculaire, ce bilan doit comprendre un examen clinique biannuel, un électrocardiogramme de repos annuel, un échocardiogramme transthoracique de repos une fois dans la carrière (deux si le premier examen a été fait avant 15 ans), une épreuve d’effort au moins tous les 4 ans. Cela ne concerne pas les ligues professionnelles (football, rugby, cyclisme, tennis, golf…), qui ne dépendent pas du ministère des Sports et qui ont leur propre règlement médical. > Le modèle italien Le consensus proposé dans l’European Heart Journal s’est largement inspiré de l’expérience italienne dans ce domaine. En effet, depuis 25 ans, la loi italienne impose le contenu du bilan médical, qui doit être réalisé par des praticiens spécialisés en méde- Tableau 2 • Signes à rechercher à l’examen physique. Signes musculosquelettiques et/ou oculaires évocateurs d’un syndrome de Marfan ● Asymétrie des pouls radiaux et fémoraux ● Clicks méso ou télésystoliques ● Souffles cardiaques marqués (systolique ou diastolique > 2/6) ● Arythmie cardiaque ● Pression artérielle > 140/90 mmHg au moins à 2 mesures ● cine du sport, chez tout sujet désirant prendre une licence sportive. Différentes études ont montré l’efficacité supérieure du bilan médical imposé en Italie au simple interrogatoire et examen physique proposé en Amérique du nord. Ainsi, la cardiomyopathie hypertrophique (CMH), dont l’incidence dans la mort subite des sujets jeunes non sportifs est voisine en Italie et en Amérique du nord, Tableau 1 • Antécédents et signes fonctionnels à rechercher à l’interrogatoire. Interrogatoire dirigé Antécédents familiaux Famille proche Mort subite ou accident cardiaque précoce est exceptionnellement en cause chez les jeunes sportifs italiens, à l’inverse de leurs homologues américains. Bien que le maître examen diagnostique de la CMH soit l’échocardiographie transthoracique, sa réalisation systématique sur de grandes populations ne paraît pas actuellement raisonnable, vu son coût. L’expérience italienne, basée sur l’ECG de repos 12 dérivations, a montré chez les jeunes sportifs (0,07 %) une prévalence de la CMH proche de celle de l’échographie (0,1 %) utilisée en Amérique du nord chez des jeunes sujets de race blanche. Ainsi, par rapport aux seuls interrogatoire et examen physique, l’association systématique d’un ECG de repos chez les jeunes sportifs améliore de 77 % l’efficacité de la détection de la CMH. (< 55 ans hommes et < 65 ans femmes) Cardiomyopathie > L’intérêt de l’ECG Syndrome de Marfan L’intérêt de l’ECG à visée diagnostique est aussi bien reconnue dans d’autres pathologies potentiellement létales chez le jeune sportif, comme les syndromes du QT long, du QT court, de Brugada, de Wolf-Parkinson-White, la maladie de Lenégre et, à un moindre niveau, la maladie arythmogène du ventricule droit et la cardiomyopathie dilatée. Avec la CMH, les pathologies citées constituent près de 60 % des causes de mort subite chez le jeune sportif et la meilleure connaissance des signes électrocardiographiques de certaines d’entre elles récemment décrites devrait permettre d’améliorer Syndrome de QT long Syndrome de Brugada Arythmies sévères Maladie coronaire Autre maladie cardiovasculaire sévère Antécédents personnels et signes fonctionnels Cardiopathie Syncope ou malaise Palpitations ou irrégularités cardiaques Douleur ou gêne thoracique à l’effort Dyspnée inappropriée à l’effort Fatigue inappropriée à l’effort Cardio&Sport • n°4 32 1/07/05 12:38 Page 33 leur détection chez les jeunes sportifs. L’ECG de repos est moins performant pour détecter la maladie coronaire et l’anomalie de naissance des artères coronaires. > Le protocole de dépistage Ainsi, le protocole de dépistage des maladies cardiovasculaires proposé ici comprend un interrogatoire dirigé, qui précisera les antécédents familiaux et personnels, ainsi que les signes fonctionnels (Tab. 1), un examen physique qui conserve sa place irremplaçable avec mesure de la pression artérielle (Tab. 2) et un ECG 12 dérivations de repos. Connaissant les dates d’apparition, mais aussi la possible évolution dans analyse d’article 03-cets4-analyse le temps des signes électrocardiographiques de ces pathologies, il est proposé que l’ECG de repos 12 dérivations soit réalisé systématiquement à partir de 12-14 ans et répété tous les 2 ans. Avant cet âge, dans les intervalles et en l’absence de signes évocateurs, l’examen clinique (Tab. 1 et 2) devra bien sûr être réalisé avant la délivrance d’une licence sportive. Une attitude appropriée aux données du bilan médical et de l’ECG 12 dérivations est proposée sur la figure 1. Comme le soulignent les auteurs, une bonne connaissance du praticien de la médecine du sport, mais aussi des signes cliniques et électrocardiographiques évocateurs des pathologies cardiovasculaires cités, ne pourra qu’améliorer l’efficacité de ce dépistage. Figure 1 • Diagramme illustrant le protocole de dépistage des pathologies cardiovasculaires chez les jeunes sportifs proposé par Corrado et al. Le protocole de dépistage devrait permettre de détecter les pathologies cardiovasculaires chez le jeune sportif. Compétiteurs entre 12 et 35 ans Bilan médical Antécédents familiaux et personnels (Tab. 1) Signes fonctionnels (Tab. 1) Examen physique (Tab. 2) ECG de repos 12 dérivations à répéter tous les 2 ans En Europe, par rapport au seul examen médical, la majoration du coût du protocole proposé serait d’environ 10 euros, ce qui reste modéré vu son apport. > En conclusion Normal Pas de contreindication à la compétition Anormal Cœur “sain” Examens complémentaires ciblés Pathologie cardiovasculaire Attitude adaptée aux recommandations 33 La mise en place progressive de ce protocole dans les pays de la communauté européenne devrait permettre de détecter des pathologies cardiovasculaires latentes et potentiellement graves chez le jeune sportif. Elle ne permettra cependant pas de prévenir tous les accidents potentiels. Ainsi, pour le groupe de consensus les recherches doivent se poursuivre en particulier par l’évaluation précise du rapport coût efficacité de l’échocardiogramme transthoracique et par la tenue d’un registre international des morts subites observées dans cette population. ❚ Cardio&Sport • n°4 1/07/05 12:41 Page 35 XVe Journées Européennes de la Société Française de Cardiologie, Paris 2005 Les points forts des deux sessions des dernières Journées Européennes de Cardiologie concernant les relations entre le système cardiovasculaire et l’activité physique vous sont résumées par deux des intervenants, Marc Ferrière de Montpellier et Hervé Douard de Bordeaux. Dr Marc Ferrière (Service de Cardiologie B, Montpellier) Pr Hervé Douard (Hôpital Cardiologique, Pessac) > Exercice physique sur ordonnance Alors que le précédent ministre de la Santé, Mr Douste-Blazy, venait d’aborder largement le thème de la prévention cardiovasculaire dans son discours d’inauguration, l’atelier de travail sur l’exercice physique sur ordonnance pour les patients cardiovasculaires s’est déroulé devant une audience fournie. De l’intérêt de l’ordonnance Le but de cette session était de montrer l’apport complémentaire que l’ordonnance personnalisée peut apporter aux recommandations de pratique d’une activité physique. Ces recommandations sont bien diffusées, mais d’ordre général et global, elles sont, hélas, peu suivies par les patients dans leurs applications quantitatives, qualitatives et, surtout, dans la durée. L’ordonnance établit une prescription personnalisée d’une thérapeutique (ici non pharmacologique) dans le but d’obtenir un gain thérapeutique (justifié idéalement par la médecine basée sur les preuves), ou sur les symptômes. Elle prévoit une posologie, un mode d’administration et est renouvelé à intervalle régulier, jamais au-delà de 6 mois, MOTS CLÉS Exercice physique, ordonnance, hypertension artérielle, diabète, insuffisance cardiaque, prévention primaire, coronaropathies, recommandations, contre-indications, sport permettant ainsi de juger de l’efficacité et de la compliance au traitement et permettant un ajustement en fonction d’un objectif. L’ordonnance doit pouvoir aider à l’application et donc diastolique, optimisant ainsi les résulà l’efficacité des recommandations tats du traitement antihypertenseur. de bonne pratique d’une activité phy- Les meilleurs résultats sont obtenus sique. pour une durée d’activité de 120 à Quatre thèmes majeurs ont été déve- 150 minutes par semaine, dans le but loppés lors de cet atelier : l’hyperten- de dépenser au moins 2 000 kcal par sion artérielle, le diabète sucré à haut semaine en plus des activités habirisque cardiovascutuelles. La bicyclette laire, l’insuffisance semble plus efficace Le programme cardiaque et la préque la marche et le ONE-HTA vention primaire des jogging. Si l’intensité correspond à maladies cardiovasde l’exercice influe peu une prescription culaires. sur les chiffres systoinformatisée et liques, une intensité personnalisée de modérée paraît plus L’hypertension l’activité physique efficace sur les chiffres Dans le cadre de l’hychez l’hypertendu. diastoliques. Le propertension, le Pr gramme ONE-HTA Xavier Girerd (Pitiéproposait au médesalpêtrière, Paris) a présenté le programme, ONE – HTA, cin, à partir de données médicales et correspondant à une prescription personnelles, recueillies par quesinformatisée et personnalisée de l’ac- tionnaires et analysées par tivité physique et de conseils nutri- l’Institut Français de la Condition tionnels chez l’hypertendu. Une Physique et du Mode de Vie, une presméta-analyse de 53 études a montré cription personnalisée de conseils de qu’une activité physique régulière de nutrition et de pratique d’activité phytype aérobie induisait, en moyenne, sique. Des 372 hypertendus recrutés une baisse de 3-4 mmHg sur la PA (âge moyen 55 ans), 67 % étaient systolique et de 2 à 3 mmHg sur la PA sédentaires et 32 % très sédentaires. >>> 35 Cardio&Sport • n°4 congrès 03-cets4 congres congrès 03-cets4 congres 1/07/05 12:41 Page 36 >>> Un programme d’activité personnalisé présenté par le médecin traitant devrait permettre d’améliorer l’observance individuelle de l’hypertendu. La validation scientifique de l’efficacité de ce programme doit être étudiée prochainement. Le diabète à haut risque cardiovasculaire Richard Brion (hôpital Desgenettes, Lyon) est à l’origine d’une consultation de prescription de l’exercice physique pour les patients à haut risque cardiovasculaire et, plus particulièrement, les diabétiques de type 2. Il est prouvé que ces sujets, qui pratiquent moins d’activité physique que la population générale, présentent des altérations de la typologie musculaire et une capacité physique altérée. La prescription banale, non personnalisée, d’une activité physique est peu efficace. La consultation, mise en place à Lyon, repose sur une analyse des facteurs de risque et des handicaps, une identification des habitudes personnelles, de l’environnement familial, social et économique. Après synthèse de ces données, une ordonnance personnalisée d’activité physique est remise au patient et diffusée à tous les acteurs médicaux ou paramédicaux. Actuellement, sont observés 100 % de motivation en fin de consultation, 100 % de compréhension du bénéfice de l’activité physique et 43,7 % de poursuite de l’activité physique à 16 mois. L’analyse des causes d’échec a révélé que 66,7 % des patients auraient souhaité reprendre avec un “entraîneur” et que l’anxiété et l’obésité sont associées à un plus fort taux d’arrêt. L’insuffisance cardiaque Le bénéfice de la pratique d’une activité physique adaptée chez l’insuffisant cardiaque a été précisé par Jean-François Aupetit (Saint-Joseph, Lyon). Deux aspects prédominent : Cardio&Sport • n°4 qu’une diminution de la progression d’une part, la notion de décondide l’index intima-média de 40 % sont tionnement réversible et, d’autre part, rapportés. Plusieurs études, réalisées la valeur pronostique sur la mortasur de grandes populations, ont monlité. Ainsi, le muscle de l’insuffisant tré une diminution de 50 % d’appacardiaque présente des anomalies rition de nouveaux cas de diabète énergétiques d’origine multifacto(type 2) et de 60 % de syndrome rielle, qui sont réversibles avec un métabolique. Enfin, une baisse de la reconditionnement adapté à l’aptiCRP a aussi été récemment démontude individuelle. Aujourd’hui, le trée. Après 75 ans, la pratique d’une “frein” à la prescription d’activité phyactivité physique régulière augmente sique chez ces patients doit être levé. de 53% le nombre d’années en bonne En effet, après réadaptation cardiosanté. Une activité intense n’est pas vasculaire chez le coronarien, la plus efficace qu’une activité modéconsommation maximale d’oxygène rée. Trois heures de marche active est augmentée de 13 % et la durée de par semaine, une l’exercice de 17 %. activité d’endurance Dans le même temps, dépensant au moins cet entraînement Un programme 4,5 METs, suffisent s’accompagne d’une d’activité pour observer des baisse de la mortalité personnalisé, effets positifs. de 20 % et de la mort présenté par subite de 37 %. Chez le médecin traitant, Ainsi, l’ordonnance médicale a pour buts l’insuffisant cardiaque, devrait permettre de personnaliser la les premiers résultats d’améliorer prescription de l’actimontrent un risque l’observance vité physique, d’éviter relatif de mortalité individuelle les surdosages en abaissé de 35 % par de l’hypertendu. fonction des facteurs le réentraînement. de risque, d’améliorer L’innocuité de cette la compliance, gages du succès de prescription a été confirmée et l’intoute thérapeutique. Un bénéfice aussi dication est reconnue pour les insufimportant, prouvé scientifiquement, fisants cardiaques de classe NYHA II ne peut se satisfaire de simples recomou III. En l’absence, actuellement, de mandations appliquées par un petit proposition consensuelle sur la posonombre de patients et pour un suivi logie et le mode d’administration, il de courte durée. Si des consultations est recommandé une prescription d’activité physique, telle que celle personnalisée et non contraignante. ouverte par Richard Brion se développent, si des programmes d’acLa prévention primaire compagnement et de conseils des En prévention primaire également, sujets à risque cardiovasculaire, tels l’activité physique modérée et réguque celui proposé par Xavier Girerd, lière a fait ses preuves. Marc Ferrière se mettent en place et si, comme l’a (Montpellier) a rappelé les effets indiqué Jean-François Aupetit, la bénéfiques de cette pratique, qui rééducation des insuffisants cardiminue le risque d’apparition de diaques vient s’ajouter à celle des maladies cardiovasculaires. Ainsi, une coronariens, enfin, si la prévention baisse significative de l’apparition passe du stade des discours au stade d’une HTA est retrouvée chez la de la pratique, gageons que l’ensemble femme (-63 %), comme chez l’homme de la communauté médicale, si rapide (-82 %). Une baisse du LDLc et une à prescrire les nouveaux traitements, hausse significatives du HDLc, ainsi 36 1/07/05 12:41 Page 37 prescrira réellement l’activité physique (dont les niveaux de preuve d’efficacité sont exceptionnels), avec la même réflexion et la même conviction, permettant une efficacité prolongée. C’est ce qui est ressorti de cet atelier “écologique” (pas de cohortes d’animaux de laboratoire sacrifiés) et économique (marcheurs, cyclistes et joggeurs peuvent combler le gouffre de la sécurité sociale avec un matériel n’ayant pas besoin d’AMM !). > Sport et coronaropathies Si les bénéfices à moyen et long terme de l’exercice physique et sportif ne peuvent être remis en cause, il est aussi vrai que l’exercice physique intense constitue une “condition idéale” pour que le sujet à risque fasse un accident coronarien. Les facteurs de risque Les facteurs favorisant cet accident ont été rappelés par le Pr Machecourt (Grenoble) durant cette session. L’augmentation de la consommation en oxygène du myocarde, reflétée par les majorations chronotrope et tensionnelle, peut générer une ischémie en cas de coronaropathie méconnue, avec risque d’arythmie ventriculaire maligne. Sur une plaque coronaire, lors de l’exercice intense, le risque de rupture est augmenté par la dilatation des volumes cavitaires, qui crée une excursion, une élongation et des plicatures des coronaires épicardiques. La pulsatilité accrue induit des mouvements en “accordéon” à type d’allongement-raccourcissement, des coudures liées aux contractions myocardiques, qui contraignent mécaniquement les plaques coronaires. Par ailleurs, la rupture de plaque est favorisée par une augmentation de la pression interne vasculaire et les altérations des conditions rhéologiques. Enfin, sur certaines sténoses ou plaques vulnérables, la dysfonction endothéliale peut générer des rétrécissements par vasoconstriction plus ou moins spastique, favorisant l’accident coronarien aigu. Les accidents coronariens se manifestent cliniquement souvent en post-effort immédiat, en raison de la diminution du retour veineux et de la vasodilatation périphérique, responsables d’une hypotension et d’une hypoperfusion coronaire qui, associées à une imprégnation catécholergique majeure, sont susceptibles de déclencher une arythmie. Le Pr Machecourt a ainsi souligné l’importance des accidents coronariens survenus en montagne, notamment lors des descentes de la Vallée Blanche près de Chamonix, favorisés également par l’altitude, l’hypoxie et l’intensité de l’effort, souvent inhabituelles chez des sujets peu ou mal entraînés. Les ultrasons intra-coronaires (IVUS) restent un outil diagnostique d’exception, mais qui offrent des enseignements extrêmement riches sur les mécanismes des syndromes coronariens aigus. L’expérience du Pr Finet (Lyon) en ce domaine est majeure. S’appuyant sur une présentation iconographique particulièrement spectaculaire, il nous l’a rapportée avec le brio oratoire qui le caractérise. L’importance du substrat thrombotique, par rapport au contenu athéromateux de la plaque rompue, apparaît ainsi très variable selon les situations cliniques, pouvant remettre en question l’opportunité de certaines approches thérapeutiques, telle que le direct stenting, qui peut agir comme un véritable “presse-purée” sur de telles lésions. Les recommandations de contre-indications La deuxième partie de cette session était consacrée aux recommandations concernant les contre-indications à la pratique sportive en cas de coro- naropathie. Le Dr Brion (Lyon) a rapporté un travail de thèse lyonnais, constitué de différentes observations analysées par plusieurs “spécialistes” français de cardiologie du sport et leur attitude face à une reprise de l’activité sportive après un accident coronarien aigu. Ce travail souligne les très nombreuses discordances qui existent en ce domaine. La prudence, en raison des implications médicolégales, sous-entend la plupart des attitudes. L’absence de recommandations officielles détaillées, en dehors des sports de compétition, est l’un des facteurs de discordance, ainsi que la méconnaissance actuelle de l’évolutivité des coronaropathies. Actuellement, des recommandations nord-américaines existent (conférences de Bethesda 1994 et 2004) et viennent d’être remises à jour et publiées dans le J Am Coll Cardiol du 11 avril 2005. Elles sont basées sur l’évaluation du risque cardiovasculaire en deux groupes. Dans le groupe le moins à risque, seuls les sports de type IA ou IIA ne sont pourtant qu’autorisés. Ces références renvoient à la classification de Mitchell, établie selon le niveau faible, modéré ou élevé et le caractère dynamique (respectivement A, B, C) ou statique (respectivement I, II, III) de l’exercice physique. Cette classification, qui a le mérite d’exister, est cependant critiquable. En effet, elle méconnaît de nombreux sports plus spécifiquement européens. Par ailleurs, elle ne tient pas compte des facteurs psychologiques, des conditions de réalisation extérieure (température, altitude, milieu aquatique…), ni du risque cardiovasculaire pendant les périodes d’entraînement, qui peut solliciter le système cardiovasculaire d’une manière différente. Enfin, l’intensité individuelle de réalisation et la durée de l’exercice sont des facteurs non pris en compte dans cette classification. >>> 37 Cardio&Sport • n°4 congrès 03-cets4 congres congrès 03-cets4 congres 1/07/05 12:41 Page 38 >>> Les recommandations européennes, présentées oralement à Munich, doivent être publiées bientôt dans l’European Heart Journal. L’originalité des recommandations européennes repose sur l’évaluation du risque cardiovasculaire, qui est établi après stratification clinique et fonctionnelle (par épreuve d’effort). Elles différencient les athlètes ayant une coronaropathie connue, des athlètes avec une très forte prévalence potentielle de coronaropathie (mais sans événement clinique coronarien avéré), qui se réfère au logiciel d’analyse probabilistique SCORE, également utilisé dans la stratification du risque cardiovasculaire. Enfin, différentes situations cliniques impliquant une ischémie myocardique sont évoquées (ponts myocardiques, maladie de Kawasaki, anomalies de naissance coronaire, transplantations cardiaques…). Une probabilité faible de survenue d’événements cliniques liés à l’exercice inclut les sportifs coronariens sans sténose coronarienne résiduelle significative, avec une fraction d’éjection supérieure à 50 %, sans ischémie ni arythmie maligne ventriculaire à l’effort et avec une capacité d’effort conservée par rapport à la théorique. Même dans ces groupes à faible risque, seuls les sports de type IA et IB sont autorisés en compétition. En cas de probabilité élevée, la compétition est formellement contreindiquée, même pour des sports tels que le golf, le billard, le bowling… Chez les sujets indemnes d’accident coronarien, mais avec une prévalence significativement plus élevée que la normale, la plupart des sports restent autorisés en compétition, en excluant cependant les sports de type IIIA à IIIC. Tout test d’effort anormal (et malgré les nombreux faux positifs connus chez les sportifs de haut niveau) nécessite une évaluation non invasive complémentaire, voire coronarographique. Dans ces recommandations, il est également souligné l’absence d’intérêt des tests d’efforts de dépistage chez des athlètes entraînés asymptomatiques, sans facteur de risque et chez qui tous les sports de compétition sont autorisés. Rappelons qu’en France, dans le suivi des sportifs de haut niveau, listés par leur fédération respective, un test d’effort est cependant obligatoire tous les 4 ans. Les recommandations actuelles ne concernent que la pratique du sport en compétition. Des recommandations spécifiques françaises, qui auront pour mission de ne pas se limiter aux sports réalisés en compétition mais étendues à toute activité sportive de loisir, sont en cours de finalisation. ❚ nda age 17E CONGRÈS DU COLLÈGE NATIONAL DES CARDIOLOGUES FRANÇAIS (CNCF) 6-8 octobre 2005 Lyon 21 octobre 2005 et 16 décembre 2005 Paris - Déjeuner débat organisé par les laboratoires MENARINI le 7 octobre à 12h30 Thème : La rapidité d’action : un atout pour l’efficacité - Symposium MENARINI le 8 octobre à 9h30 Thème : Bêta-bloquants et qualité de vie Inscription Agence CCC 32 rue de Paradis - 75010 PARIS Tel. : 01 45 23 96 13 - Fax : 01 45 23 00 95 ● Cardio&Sport • n°4 JOURNÉES DES GROUPES DE TRAVAIL DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE CARDIOLOGIE 38 Renseignements Mme Elizabeth Fidon SFC 15 rue Cels 75014 Paris Tél : 01 43 22 29 71 - Fax : 01 43 22 63 61 E-mail : [email protected] Sites : http://www.sfcardio.fr/ ●