Forêt et aléas
climatique
Le fait d’effectuer une coupe rase, une plantation ou un semis engage l’avenir sur plusieurs
décennies. Or, des variations climatiques telles qu’elles sont évoquées dans différents médias
paraissent de nature à remettre en cause les efforts réalisés pour le constitution ou le maintien
d’un patrimoine. Afin d’apporter quelques éclaircissements au débat, nous nous pencherons
sur l’histoire du climat en distinguant les longues périodes, puis le climat passé et l’histoire de
la forêt en Limousin avant de réaliser un essai de prospective et de la discuter.
Le climat passé : les cycles longs
Entre la formation de la terre, il y a 4,6 milliards d’années et une première phase glaciaire
datant d’environ 2 milliards d’années, la climat de notre planète était en moyenne plus chaud
que maintenant avec sans doute de fortes nébulosités. L’apparition des premiers êtres date
d’environ 4000 millions d’années, et la production significative d’oxygène par la
photosynthèse apparaît probable vers 3500 millions d’années. A ce moment, le couplage
vivant-climat se met définitivement en place ; les êtres vivants ne cesseront plus de modifier
les conditions environnementales de leur propre existence. Vers deux milliards d’années,
apparaissent les cellules photosynthétiques et exigeant de l’oxygène libre. Les formes
primitives étaient les algues unicellulaires. Les algues multicellulaires apparaissent bientôt ;
ces formes primitives se divisent ensuite en deux grands groupes dont l’un est à l’origine des
animaux et l’autre des végétaux. Ainsi des faunes qui se complexifient avec le temps
apparaissent, se développent et, tout en fixant de grandes quantités de gaz carbonique,
oxygènent l’atmosphère terrestre. La réduction du taux des gaz à effet de serre par stockage
du carbone atmosphérique va réduire considérablement la température de la planète.
Cette première glaciation précambrienne a eu lieu il y a 2,3 milliards d’années et aurait duré
environ 300 millions d’années avant la réinstallation d’un climat chaud. Un second épisode
glaciaire apparaît vers la fin du précambrien, il y a environ 1 milliard d’années. Il durera
environ 400 millions d’années et se décompose en une succession de trois glaciations
d’environ 100 millions d’années chacune. La combinaison de facteurs astronomiques et la
traversée de nuages stellaires expliqueraient ces pulsations.
L’ère « primaire », le paléozoïque, période riche en évènements géologiques, biologiques et
des également climatiques, est caractérisé par des années de plus de 400 jours, un niveau des
mers supérieur de 600 mètres à celui qu’il est maintenant, une calotte glaciaire des l’actuel
Sahara, le pôle sud de la terre en Afrique de l’ouest, l’explosion exubérante de faunes riches
et complexes alternant avec des extinctions cataclysmiques, etc. Plus que jamais, le climat et
les êtres vivants interagissent au point de se façonner mutuellement.
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Vers environ –440 millions d’années, un refroidissement majeur d’origine inconnue provoque
un grand bouleversement biologique, avec des disparition importantes de familles tant
animales que végétales.
Cependant, cette extinction sera à l’origine d’un enrichissement de la biodiversité. Ce
phénomène, que l’on retrouvera par la suite, est schématiquement le suivant : les êtres vivants
tendent à se reproduire de façon exponentielle, mais ce taux de reproduction est peu à peu
ralenti par saturation de l’environnement (surpopulation des biotopes) ou sous la pression des
prédateurs, étant entendu que les espèces vivantes manifestent une tolérance plus ou moins
grande aux variations des conditions environnementales. Quand une catastrophe a entraîné un
appauvrissement apparent de la biodiversité, les niches inoccupées sont nombreuses et la
diversification biologique à ,partir d’espèces préexistantes mais alors peu représentées
rencontre moins d’obstacles.
Donc, après la catastrophe climatique évoquée précédemment, cette période a connu un
intense renouveau. C’est au dévonien, qui s’étend entre 408 et 360 millions d’années
environ, que les végétations continentales vont véritablement se développer, et ouvrir la voie à
des formes vivantes très diversifiées : c’est pendant cette période que la vie va véritablement
« trouver son chemin ».
A partir ce moment, il y a eu possibilité d’avoir une couverture végétale sur le sol, nous
avons eu un phénomène de « successions végétales ». La forêt avance ou recule donc en
fonction des variations climatiques. La série successionnelle ne s’arrête d’évoluer que si les
conditions écologiques ne changent pas. Ce qui n’empêche pas d’avoir plusieurs séries
simultanées : par exemple, les orages peuvent provoquer des incendies sur de grandes
surfaces…
Reprenons notre histoire de la planète. Vers 385 millions d’années avant notre ère, une
nouvelle catastrophe biologique survient dont les scientifiques ignorent la cause exacte. Pour
ce qui concerne la faune marine, l’extinction en masse concerne 21 % des familles, 50 % des
genres et environ 75 % des espèces. Le milieu récifal disparaît, mais quelques groupes
constructeurs subsistent : il va se reconstituer lentement. Ensuite, la vie renaît plus vivace
encore, tant sur la terre que dans les eaux. La régression des mers aboutit à la modification du
climat ainsi qu’à l’apparition de couches géologiques contenant de la houille.
Une nouvelle catastrophe a eu lieu à 248 millions d’années environ, avec une incertitude de
20 millions d’années ; les causes font l’objet de débats entre scientifiques. Cependant, les
chiffres sont très importants : environ 80 à 95 % des espèces pouvant être recensées
disparaissent. En 20 millions d’années, les vertébrés terrestres perdent 20 genres sur 38, et le
nombre de genres de reptiles passe de 28 à 12….
Dans un contexte de climat plutôt chaud et humide, la vie reprend ses droits, avec, entre
autres, l’apparition des dinosaures. Les feuillus apparaissent en transformant les paysages et
en modifiant les humus, créant ainsi les conditions pour que les faunes se diversifient. Les
températures moyennes régressent lentement et le niveau de l’océan mondial augmente.
Une dernière catastrophe majeure a eu lieu, il y a de cela 65 millions d’années avec de
nouveau des causes controversées, les deux principales retenues étant la chute d’un astéroÏde
au large du Yucatán ou les gigantesques épanchements de lave dans ce qui va devenir le
subcontinent indien. Elle élimine l’immense majorité des reptiles de la terre ainsi que de
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nombreuses autres formes de vie. En même temps, le niveau des océans s’effondre
brutalement de 240 mètres !
Les causes les plus vraisemblables sont connues ; elles sont sûrement conjuguées. Ainsi,
l’excès de spécialisation fragilise une espèce : la disparition brutale l’échelle des temps
géologiques) d’un type unique de proies entraîne la disparition de leur prédateur. Les
mouvements des continents, leur émergence, les surrections des montagnes ont pu aussi
modifier ou détruire un biotope. Toutefois, la cause majeur de ces extinctions est un
refroidissement climatique. Il aurait notamment frappé l’origine de la chaîne alimentaire
marine, le plancton, condamnant tous les organismes marins qui en étaient tributaires à
l’extinction.
De nouveau, le climat se réchauffe… Les continents prennent progressivement leur place
actuelle, avec des conséquences fortes en matière d’évolution des espèces qui prennent leur
physionomie actuelle. Cependant, ce climat restera chaotique, avec plusieurs périodes de
glaciation dont nous évoquerons les plus récentes dans les paragraphes suivants.
Les variations récentes du climat
Afin de comprendre ce qui risque de se produire au niveau de la planète, il convient bien de
procéder à l’examen de la situation actuelle. On n’utilise le thermomètre que depuis environ
un siècle et demi (les relevés les plus anciens dans le centre de l’Angleterre ne remontent qu’à
1659) ; il faut utiliser des méthodes indirectes de mesures.
Au cours du million d’années écoulé, une série de huit cycles d’alternance des périodes
glaciaires/interglaciaires a eu lieu, engendrée par les changements de l’orbite terrestre autour
du soleil. la dernière période interglaciaire l’holocène, dans laquelle nous vivons
actuellement- a débuté il y a quelque 10 000 ans. La fonte des glaces a provoqué une
élévation du niveau des océans de 120 mètres alors que les températures du début de la
période étaient généralement supérieures à celles du XXe siècle. Les observations semblent
montrer d’importantes oscillations thermiques au cours de l’holocène à l’échelle du
millénaire, et certains indicateurs montrent même des changements allant de 5 à 8 °C sur une
période de 1 500 années. Cependant, si on examine les 400 000 dernières années sur les
carottes de glace, l’holocène apparaît comme étant la période la plus chaude et la plus stable,
ce qui a naturellement eu des conséquences importantes sur le développement de la
civilisation.
Ce n’est qu’en arrivant au millénaire dernier que l’on a plusieurs tentatives de mise au point
sur une série de données sur la température du globe. Elles font l’objet de vives discussions
entre scientifiques.
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Reconstitution de la température annuelle moyenne de l'hémisphère Nord depuis Jésus-Christ.
L'axe horizontal représente la date, et l'axe vertical représente l'écart de la valeur de l'année
considérée avec la moyenne hémisphérique (nord) pour les années 1961 à 1990. Les
températures observées sont également reportées, en noir, à partir de 1860 (source Anders
Moberg, Dmitry M. Sonechkin, Karin Holmgren, Nina M. Datsenko & Wibjorn Karle´n.
Nature 27/1/2005)
Dans les grandes lignes, nous avons une stabilité, voire une légère augmentation jusqu’en l’an
1000, suivie d’une tendance à la baisse de l’an 1000 à l’an 1600, suivie d’une augmentation
s’accélérant au XXe siècle.
Les historiens du climat parlent de petit âge glaciaire pour la période qui s’étend grosso modo
de 1 400 à 1 900, attesté par diverses sources, cette période faisantt suite à « l’optimum du
haut Moyen Âge », qui a notamment rendu possible la colonisation du Groenland.
Les discussions sur les données disponibles montrent la nécessité d’une certaine prudence sur
les évolutions de température : nous sommes en train de sortir du Petit âge glaciaire, et le
climat a toujours varié. De plus, L’urbanisation croissante de la société a une influence sur les
données temporelles des postes météorologiques les plus anciens, car se retrouvant
progressivement en ville.
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Selon les villes (taille, caractéristiques architecturale, densité…),les maxima d'intensité de
l’excès de chaleur urbaine peuvent aller de 2°C à 12°C (dans des villes de plusieurs millions
d'habitants).
Le climat passé et l’histoire de la forêt en Limousin
L’analyse du pollen contenu dans les tourbières de la montagne limousine permet d’avoir
quelques indications sur la végétation à partir de 10.000 ans environ avant J-C. Il y avait
alors une steppe qui a été colonisée principalement par le bouleau, ainsi que de façon moins
importante par le pin. Le chêne et le noisetier font leur apparition vers 8.000 ans avant J-C.
L’orme s’installe aussi. Ces formations forestières subissent un bouleversement environ 5.000
ans avant J.-C., avec la mise en place d’une chênaie diversifiée contenant du tilleul, du frêne,
et de l’aulne, voire de l’érable ; elles indiquent une probable évolution climatique.
Le hêtre commence à arriver environ 3.000 ans avant J.-C. Sa dynamique est retardée par
rapport à l’Auvergne, progressive, tant pour des raisons climatiques qu’à la suite très probable
de défrichements à vocation pastorale vers environ 3.500 ans avant J.-C. Ces derniers sont
suivis d’une période de recul de l’activité humaine, liée probablement à un
refroidissement du climat, où la forêt recouvre très largement le territoire. Une forte emprise
agricole, initiée entre les IVe et IIe siècle avant notre ère se traduit par une progression de
terrains à vocation pastorale, les mises en culture étant ponctuelles.
Les défrichements se poursuivent pendant la période gallo-romaine. Le noyer et le
châtaignier apparaissent pour la première fois sur le plateau de Millevaches. Une phase de
déprise a lieu à la fin du IIIe siècle de notre ère, avec un retour à la forêt. Elle est assez courte,
puisqu’une reprise agro-pastorale a lieu à partir d’une période estimée au Ve siècle ; elle
s’intensifie à partir du VIe-VIIe siècle. Les surfaces cultivées notamment en seigle progressent.
A partir du Xe-XIIe siècle, il est possible d’avancer une hypothèse de déforestations régulières
et spécialisées ; le hêtre est alors exploité de préférence aux autres essences. L’activité
pastorale est alors largement dominante et suffisamment intensive pour causer, en raison d’un
début d’épuisement des sols, le développement considérable et général sur le plateau de
Millevaches de landes sèches à callune.
Un déclin de l’activité humaine est constaté entre la fin du XIIIe siècle et le début du XIVe
siècle. Après la guerre de cent ans, nous avons une emprise agricole croissante, qui utilise de
mieux en mieux les potentialités du territoire et qui atteindra son maximum à la fin du XIXe
siècle.
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