Apport de l`imagerie dans le bilan étiologique d`un tympan bleu

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Apport de l’imagerie
dans le bilan étiologique
d’un tympan bleu
S Jerbi Omezzine, Ch Hafsa, I Lahmar, N Driss, HA Hamza,
A Gannouni.
Service d’imagerie médicale CHU Tahar Sfar Mahdia-Tunisie
Service d’imagerie médicale CHU Fattouma Bourguiba MonastirTunisie
Service d’ORL CHU Tahar Sfar Mahdia- Tunisie
INTRODUCTION
La constatation d'une masse bleu rétrotympanique doit
imposer une exploration radiologique avant tout abord
chirurgical ou biopsique.
Les auteurs rappellent qu'en plus des tumeurs glomiques,
certaines anomalies vasculaires et variantes anatomiques
peuvent
se
manifester
par
une
masse
bleu
rétrotympanique ayant un impact chirurgical important
si elles sont méconnues.
Matériels et méthodes
Etude rétrospective de dossiers radio-cliniques de tympan bleu
explorée par TDM et IRM.
Résultats
Grâce à une technique tomodensitométrique rigoureuse comportant
des coupes fines millimétriques, la TDM en haute résolution et
l’IRM jouent un rôle très important dans la prise en charge de ces
affections.
Une
analyse
élaborée
des
différentes
lésions
élémentaires et leurs confrontations avec les données cliniques et
fonctionnelles permet d'éviter les méprises et les complications
graves, au cours des biopsies ou d'une chirurgie otologique.
LES TUMEURS GLOMIQUES
Les tumeurs glomiques sont des tumeurs bénignes rares à croissance
lente. Elles dérivent des cellules neuro-endocrines des paraganglions
extra-surrénaliens.
Deux formes peuvent se rencontrer au niveau du rocher : la tumeur
du glomus tympanique et la tumeur du glomus jugulaire.
Les acouphènes pulsatiles et un tympan bleu à l’otoscopie sont les
signes cliniques évocateurs.
L’imagerie en coupe permet de poser le diagnostic et de faire un
bilan d’extension.
La TDM permet d’identifier la masse hypervasculaire et de préciser
les destructions osseuses.
L’IRM permet une meilleure évaluation de la masse tumorale et un
bilan d’extension précis.
OBSERVATION N °1:
Patiente âgée de 56 ans hospitalisée pour hypoacousie
gauche avec bourdonnement d’oreille évoluant depuis
deux ans. L’examen otoscopique note un aspect rouge
bleuâtre de la membrane tympanique. Le reste de
l’examen est sans particularité.
L’audiogramme montre une surdité de transmission du
coté gauche. L’impédancemétrie trouve une courbe plate
avec un réflexe stapédien nul à gauche.
La TDM montre un
comblement de densité
tissulaire quasi-total de la
cavité tympanique gauche
et
des
cellules
mastoïdiennes.
L’IRM
confirme
la
présence d’une anomalie
de signal nodulaire hypo et
méso-tympanique gauche
faisant 11 x 4 mm, de
signal intermédiaire en T1,
en hyper signal T2, et
FLAIR avec prise de
contraste intense après
injection de Gadolinium. Il
s’y associe un comblement
inflammatoire des cellules
mastoïdiennes gauches.
La patiente était opérée, avec exérèse tumorale par voie
intraméatique.
L’examen histologique confirme le diagnostic de tumeur glomique
Les suites post opératoires étaient simples.
OBSERVATION N°2:
Patiente âgée de 52 ans hospitalisée pour cophose gauche,
bourdonnement d’oreille et épisodes vertigineux évoluant
depuis 3 ans. Elle se plaint également de céphalées, une
dysphagie et une baisse de l’acuité visuelle.
L’otoscopique montre un aspect rouge bleuâtre derrière la
membrane tympanique.
L’examen des paires crâniennes révèle une atteinte
gauche des nerfs V, VIII, X, XI et XII.
La TDM montre une
volumineuse lésion tissulaire
fortement rehaussée après
injection iodée de l’angle
ponto cérébelleux gauche
avec destruction osseuse des
Fenêtre osseuse
parois du foramen jugulaire
et ostéolyse extensive du
basi-occiput gauche.
APC
SPC
L’IRM
montre
volumineuse
une
masse
hétérogène occupant l’angle
ponto-cérébelleux gauche en
T1
hyposignal T1 et hypersignal
T2 contenant des hyposignaux
ponctiformes
et
prenant
fortement
le
produit
de
contraste.
L’alternance
de
zone de bas et de haut signal
donne l’aspect en poivre et
sel.
T1 + Gado
Discussion
Les tumeurs glomiques ou paragangliomes ou chémodectomes sont
des tumeurs rares d’origine ectodermique dérivant des crêtes
neurales à partir des cellules neuroendocrines des ganglions extra
surrénaliens formant les corpuscules glomiques.
Elles représentent 0,6% des tumeurs de la tête et du cou et sont les
tumeurs les plus fréquentes de l’oreille moyenne.
L’âge de découverte est de 40ans en moyenne avec une nette
prédominance féminine : sexe ratio 1/5.
Les localisations préférentielles sont le glomus jugulaire (50%), le
nerf de Jakobson (branche tympanique du IX)(20-30%) et le nerf
d’Arnold (branche auriculaire du X). Ces tumeurs sont souvent
pluri
compartimentales
(85%),
rarement
bilatérales
et
exceptionnellement multiples.
Il s’agit d’une tumeur bénigne à croissance lente mais très invasive.
Les tumeurs malignes avec dissémination secondaire sont plus rares.
C’est une tumeur hypervascularisée et très hémorragique. Sa matrice
fibreuse contient des cellules non chromaffines et de nombreux
vaisseaux avec des shunts artério-veineux pré capillaires.
L’extension se fait à travers les zones de moindre résistance, en
suivant les axes vasculaires et nerveux, formant des processus
jugulaires, tympaniques ou jugulo-tympaniques.
Des extensions exocraninnes cervicales ou endocrâniennes vers
l’angle pontocérébelleux peuvent parfois s’observer.
Sur le plan clinique, des acouphènes pulsatiles associées à un
tympan bleu à l’otoscopie sont très évocateurs.
L’audiogramme montre une surdité de transmission.
Un syndrome de l’angle pontocérébelleux peut se voir et témoigne
d’une extension endocrânienne.
Lorsque ces tumeurs sont sécrétantes (1 à 3% des cas), elles seront
responsables de palpitations, tachycardie et hypertension.
En imagerie, le couple TDM-IRM constitue le pilier du
diagnostic. Il permet un bilan d’extension précis.
Il est essentiel en préopératoire en particulier pour le choix de la
voie d’abord chirurgicale.
Schématiquement on distingue deux types de tumeurs glomiques
du temporal :
Tumeurs du Glomus Tympanique
Elle se développe à partir de petits corpuscules vasculaires
localisés le long du nerf de Jacobson au-dessus du nerf
glossopharyngien, au contact du promontoire. Elle peut être
punctiforme, à peine supérieure au millimètre ou au contraire
étendue au méso et à l’hypotympan, au rétro tympanum à la
trompe auditive. Ces lésions sont responsables d’acouphènes
par
leur
vascularisation
artérielle
et
se
singularisent
cliniquement par le caractère bleuté qu’elles donnent au
tympan par transparence.
La TDM avant injection IV de contraste iodé, montre une masse
bien limitée, siégeant au niveau de l’hypotympan le long du trajet du
nerf de Jacobson intra-pétreux mais pouvant occuper toute la caisse.
Le volume tumoral peut être surestimé par la présence d’une otite
associée. La tumeur se rehausse de façon intense, après injection
iodée intraveineuse. Cette masse peut éroder le promontoire,
déplacer les osselets vers le haut.
L’IRM montre un processus tumoral présentant un signal
intermédiaire en T1, intense en T2 et se rehausse de manière intense
après injection intraveineuse de gadolinium, permettant de
différencier
le
tissu
tumoral
des
réactions
avoisinantes qui gardent un signal inférieur.
inflammatoires
Les tumeurs glomiques tympaniques sont moins envahissantes que
les localisations jugulaires.
Le diagnostic différentiel devant cette masse vasculaire de
l’oreille moyenne, se discute avec une malformation vasculaire
intra-tympanique type carotide interne intra-tympanique ou avec la
procidence du golfe de la veine jugulaire interne.
Le diagnostic différentiel est plus difficile avec certaines lésions
tumorales rares de l’oreille moyenne (lésions angiomateuses,
méningiomes, tumeurs musculaires) qui se rehaussent nettement
après contraste iodé. Ces lésions ne présentent pas de spécificité de
siège au niveau de l’hypotympan.
Tumeurs du Glomus Jugulaire
Il s’agit d’une lésion en général beaucoup plus volumineuse que la
précédente développée à partir des corpuscules vasculaires situés au
niveau de l’adventice de la veine jugulaire interne. Elle peut
s’étendre à la cavité tympanique et dans toutes les directions de
l’espace avec possibilité de rupture méningée, lyse du plancher du
méat acoustique interne, voire du labyrinthe et extension par une
destruction du plancher tympanique vers l’oreille moyenne
La TDM permet d’objectiver une masse du foramen jugulaire, et
d’en apprécier l’extension. Avant injection iodée, la lésion apparaît
isodense au cervelet, parfois ponctuée de calcifications.
Ce sont surtout les signes indirects qui attirent l’attention, à type de
destruction osseuse des parois du foramen jugulaire qui parait élargi
et disparition de l’épine jugulaire. L’injection iodée rehausse
intensément la densité de la masse tumorale.
-
Le canal condylien antérieur peut être érodé par l’extension
tumorale.
- En cas d’extension tympanique, les coupes coronales montrent la
disparition du plancher de l’hypotympan et l’envahissement de
l’oreille moyenne par une masse refoulant et parfois érodant la
chaîne ossiculaire.
-L’oreille interne peut être envahie avec en particulier érosion du
tour basal de la cochlée.
En cas d’extension antérieure, le canal carotidien peut être érodé
successivement au niveau de ses segments vertical puis horizontal.
- En cas d’extension supérieure, le plancher du CAI peut être érodé.
En IRM, le signal tumoral spontané est inférieur ou égal au signal
du parenchyme cérébral en séquence pondérée en T1. En
pondération T2, la tumeur présente un aspect hétérogène associant
des zones de signal intense à des zones de signal plus faible, en
raison des phénomènes de flux au niveau des vaisseaux intratumoraux ainsi que la présence de fibrose. L’aspect réalisé dit en
« sel et poivre » est très caractéristique mais inconstant. La
réalisation de séquences rapides sensibles au flux confirme l’origine
vasculaire. L’injection IV de gadolinium montre un rehaussement
tumoral très intense.
Dans le cadre du bilan préopératoire, l’IRM assure un bilan
d’extension lésionnelle précis.
L’artériographie est réalisée essentiellement dans un but
thérapeutique
d’embolisation
préopératoire,
permettant
ainsi
d’individualiser les différents pédicules nourriciers provenant de la
carotide externe. La tumeur apparaît sous forme d’un blush intense
avec retour veineux précoce intense.
Le traitement est avant tout chirurgical, mais souvent difficile du
part la complexité de la vascularisation tumorale.
La radiothérapie peut être complémentaire en cas de récidive ou
palliative essentiellement chez le sujet âgé.
OTITE MOYENNE SEROMUQUEUSE
L’otite séromuqueuse est une otite chronique caractérisée par
l’inflammation et la métaplasie de l’épithélium d’oreille moyenne,
et accompagnée par une collection liquidienne dans les cavités
d’oreille moyenne sans signes ni symptômes d’infection aiguë.
C’ est une affection de l’enfant, puisque l’immense majorité des
patients est âgée de moins de huit à dix ans.
Les âges extrêmes que sont l’adulte et le nourrisson représentent
respectivement 10 et 20 % des cas. La bilatéralité est la règle chez
l’enfant puisque retrouvée dans 80 % des cas ; elle est d’autant plus
fréquente que l’enfant est jeune, tandis que chez l’adulte, elle
regroupe un tiers d’entre eux seulement.
Signes cliniques
Hypoacousie
L’otite séro muqueuse est la plus fréquente cause de surdité chez
l’enfant.
Otalgie
L’otalgie sans fièvre peut être un autre mode de révélation de l’otite
séromuqueuse. Il peut s’agir d’otalgies fugaces, durant quelques
minutes ou quelques heures, en particulier au cours des
rhinopharyngites. Ces douleurs peuvent réveiller l’enfant la nuit
mais, bien vite, après un cri, un mouchage ou un bâillement, celui-ci
se rendort instantanément. Ailleurs, la persistance de ces douleurs
doit faire penser à une surinfection d’épanchement.
Otites moyennes aiguës récidivantes
Des accès d’otites moyennes aiguës récidivantes peuvent révéler
une otite séromuqueuse. Ce tableau est très particulier au
nourrisson, mais pour porter le diagnostic d’otite séreuse sousjacente, il est indispensable d’examiner l’enfant en dehors de
l’épisode d’otite moyenne aiguë.
Autres symptômes
Concernant les autres symptômes, il arrive que les adultes et les
grands enfants signalent une sensation d’oreille pleine, de bruit
étouffé, de blocage, de liquide changeant de place, et de vertige
Diagnostic
Le diagnostic d’otite séromuqueuse est avant tout otoscopique.
L’examen audiométrique confirme le diagnostic, et surtout apprécie
l’importance de la perte auditive.
Otoscopie
Au cours d’une otite séromuqueuse, le tympan est pratiquement
toujours modifié. Il est parfois considéré comme normal lors d’un
examen rapide et sans grossissement, mais l’examen au microscope
ou à l’optique, éventuellement complété par le spéculum
pneumatique, montre toujours une anomalie.
Les modifications tympaniques portent sur sa couleur, sa texture et
sa mobilité.
L’aspect le plus habituel est celui d’un tympan qui perd sa semitransparence, prend un aspect plus épais, comme oedématié. Les
reliefs restent cependant bien visibles, à la différence de ce que l’on
observe dans les otites moyennes aiguës collectées.
Il existe presque constamment des vaisseaux radiaires à la périphérie
de la membrane tympanique, dans la région adjacente au conduit
auditif externe.
Un tympan bleu est généralement le témoin d’une longue évolution
avec constitution, dans les cavités de l’oreille moyenne, de
granulomes
à
cholestérine,
où
s’accumulent
des
dépôts
d’hémosidérine responsables de la couleur si particulière de
l’épanchement.
Examens audiométriques
L’impédancemétrie et l’audiométrie tonale permettent de confirmer
le diagnostic et de connaître exactement l’importance de
l’hypoacousie, ce qui est indispensable pour préciser les indications
thérapeutiques.
PROCIDENCE ET/OU ECTASIE
DU GOLFE JUGULAIRE
Le bulbe de la veine jugulaire présente à l’état normal une grande
variabilité anatomique, mesurant en moyenne 15 mm de largeur et
20 mm de hauteur avec une dominance du coté droit.
Il est limité en haut par un dôme formé par la pyramide pétreuse qui
représente le plancher de l’oreille moyenne.
Ce golfe est considéré comme ectasique lorsqu’il dépasse le plan de
l’annulus tympanique; il est alors situé 6mm à 18mm au dessus de la
portion horizontal du sinus sigmoïde.
Il peut aussi présenter une ectasie diverticulaire et selon sa direction
entrer en contact par des zones de déhiscence avec la chaîne
ossiculaire, la fenêtre ovale, les structures de l’oreille interne.
La symptomatologie est dominé par des acouphènes pulsatiles.
L’otoscopie peut montrer une masse bleuâtre retro-tympanique.
En pratique, l’ectasie du golfe de la jugulaire reste un diagnostic
d’élimination.
TDM
La TDM permet facilement le diagnostic en montrant un foramen
jugulaire large à bord régulier.
L’injection de PDC confirme le diagnostic en montrant une prise de
contraste intense et homogène en continuité avec le golfe de la
jugulaire et le sinus latéral.
TYMPAN BLEU
IDIOPATHIQUE
Conclusion
La constatation d'une masse bleu rétrotympanique doit
imposer une exploration radiologique avant tout abord
chirurgical ou biopsique.
L’imagerie joue un rôle déterminant dans le bilan
étiologique d’un tympan bleu.
Le
radiologue
doit
apporter
les
renseignements
nécessaires pour une prise en charge thérapeutique
optimale.
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