1
Introduction :
« La dictature par le tabou ». C’est la première page que le moteur de recherche nous propose
après avoir entré « tabou du Réchauffement Climatique » (noté RC par la suite). L’auteur
(Revengé, 2015) y explique comment « les écolos » imposent des comportements par une
dictature de l’interdit, sous peine de calamités : le climato scepticisme atteint son paroxysme.
Ici, point de tabou mais bien un hymne décomplexé à la théorie du complot. Affaire de
séduction : pour quelques personnes réfutant encore les preuves scientifiques, cette théorie
happe et détruit la théorie dominante. On démontera celle-là pour dégager celle-ci
.
Barthélémy (2012, dans Le Monde) rappelle que, d’après une étude de 2010 (Anderegg et al.),
97% des 1372 climatologues interrogés sont d’accord sur l’existence du RC. Pourtant, si
certains considèrent qu’on parle beaucoup du réchauffement climatique, qui se souvient avoir
récemment évoqué le sujet dans une conversation ? Peu, très peu de personne, et pour cause,
le phénomène est tabou (Marshall, 2014). Sans doute pouvons-nous dire que ce tabou existe
parce que le phénomène fait peur : il paraît lointain, abscons et incontrôlable. En ce sens, par
nécessité cognitive, nous sommes des climato sceptiques nés.
Mais pourquoi ? Comment en sommes-nous arrivés là ? Retour en arrière.
Plonger dans la relation Homme-Climat d’hier, pour mieux comprendre celle d’aujourd’hui et
avoir l’opportunité de modifier celle de demain. Nous partons donc sur les chemins croisés de
la climatologie historique et de l’étude de la représentation du climat. Les emprunter nous
rappelle que « L’Homme n’est pas un animal qui s’installe dans le monde sans le déranger, il
le modifie, il s’approprie sa condition. » (Le Breton, 2014). Ainsi, depuis toujours, nous
modifions notre environnement, ce qui provoque des changements climatiques. La conscience
du lien entre modifications locales des conditions météorologiques et activités humaines date
de l’Antiquité. Toutefois, il faudra attendre le XXème siècle pour voir revenir sur le devant de
la scène la préoccupation des Hommes pour l’impact qu’eux-mêmes peuvent avoir sur le
climat. Cela est doublement paradoxal : c’est dès le XIXème siècle qu’on observe l’émergence
du réchauffement climatique et des grandes avancées scientifiques sur la science du climat
(théorie de l’effet de serre, Fourier en 1824, lien CO2-fonte des glaces, Arrhenius, 1896 dans
Mouhot, 2014).
Ce décalage entre avancées scientifiques et prise en charge concrète n’a, depuis, cessé de
s’accroître. Mouhot (2014) fait d’ailleurs remarquer que si « la découverte du phénomène de
Formule inspirée de celle de Félix Fénéon, journaliste de la rubrique des faits divers au début du XXème siècle
et à retrouver dans la bibliographie finale dans l’ouvrage de Jean Paulhan.