T Conférence de DENIS MOREAU Samedi 22

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Conférence de DENIS MOREAU samedi 22 novembre 2014
Rencontre de formation pour les acteurs de la préparation au mariage de Haute-Savoie,
organisée par la pastorale de la famille du diocèse d’Annecy. Le conférencier, Denis
Moreau, professeur de philosophie à l’université de Nantes, auteur du livre
« Pour la vie ? court traité du mariage et des séparations » a développé deux thèmes :
« Choisis la vie : Comment parler du christianisme aujourd’hui ? » ;
« La bonne nouvelle du mariage catholique. »
Denis Moreau se présente comme un philosophe chrétien ; il est philosophe et non
théologien ; tout au long de sa conférence, il abordera les grands thèmes du Pari de
Pascal, des « transcendantaux », le vrai, le bon, le bien, des bonnes nouvelles à annoncer
« la joie, la mort, le salut », et enfin terminera par un éloge du mariage catholique !
Postulat de départ : le christianisme correspond à notre désir, comment réussir sa vie ?
Gardons la structure du « Pari » de Pascal : « Vous avez deux choses à perdre: le vrai et le
bien, et deux choses à engager: votre raison et votre volonté, votre connaissance et votre
béatitude ; et votre nature a deux choses à fuir: l'erreur et la misère. Votre raison n'est
pas plus blessée, en choisissant l'un que l'autre, puisqu'il faut nécessairement choisir.
Voilà un point vidé. Mais votre béatitude? Pesons le gain et la perte, en prenant choix
que Dieu est. Estimons ces deux cas: si vous gagnez, vous gagnez tout; si vous perdez,
vous ne perdez rien. Gagez donc qu'Il est, sans hésiter. »
En choisissant le christianisme, je choisis la vie, le christianisme étant une réponse
privilégiée à la vie ; c’est la réponse, mais pas automatique, à la question « comment
vivre heureux ? ». Pourquoi pas automatique ? Car on est marqué par le Jansénisme. Le
Christianisme est audible et désirable, c’est pourquoi il faut insister sur la joie, et non
sur les côtés pénibles de devoir. Le christianisme, un produit de marketing ? Pourquoi
pas ! Il propose des « transcendantaux », le bon, le vrai, le bien qui sont réversibles et
convertibles ! Un dogme se doit d’annoncer une vérité qui fait du bien ; parce que c’est
vrai, alors c’est également bon et bien.
Le christianisme est montré sous l’angle de la MORALE (morale et éthique). La morale
peut être interprétée comme un devoir, ou comme l’accomplissement de soi. Kant parle
de prescriptions morales comme d’un devoir, une éthique du devoir, faite d’interdits. La
morale indique ce qui est bon que nous fassions, c’est une éthique de la « VERTU », qui,
elle, est une disposition à faire le bien.
Nous constatons donc deux éthiques : l’éthique du devoir et l’éthique de la vertu. Il s’agit
là d’une même morale présentée sous deux aspects.
L’Eglise Catholique a trop présenté l’éthique du devoir. La morale n’est pas à changer,
c’est le mode qui doit changer. Par exemple, « Humanae Vitae » est un texte qui
s’apparente plus à l’éthique du devoir qu’à l’éthique de la vertu. Les enfants sont les
fruits et les moyens de l’épanouissement des couples ; ils enrichissent le couple ; ils sont
bons pour les parents. L’enfant est à présenter sur le mode « éthique de la vertu ». Tout
est dans la façon de présenter le contenu.
LA JOIE, LA MORT, LE SALUT : bonnes nouvelles à
annoncer.
Le christianisme, choisi comme style de vie et d’existence, conduit à la joie. Il devrait
être le contraire des rabat-joie et de la tristesse ! « Pour que j’apprenne à croire à leur
Sauveur, il faudrait que leurs disciples aient un air un peu plus sauvés » (Ainsi parlait
Zarathoustra)….
LA MORT : on assiste à une peur et un refoulement de la mort, qui, elle, se voit,
cependant, partout (films, TV, nouvelles…). Mais , aborder ma mort, ta mort (de celle ou
de celui que j’aime) fait peur , on n’en parle pas, car la mort est la fin de tout, donc sans
espérance. Alors que pour les chrétiens, le Christ a vaincu la mort : le SENS et le cœur de
la foi chrétienne, c’est qu’il est ressuscite.
La bonne nouvelle, c’est que la mort n’est pas la fin; ce qui apprend à vivre sans avoir la
peur de la mort chevillée au corps toute la vie, nous savons que nous reverrons ceux que
nous aimons. On peut admirer le courage des athées à supporter la mort sans au-delà, ni
espérance.
LE SALUT : « salut » « soteria » interpellation des grecs entre eux invoque l’arrachement
au péril ou l’octroi d’un bien. Croire au salut, c’est croire en la possibilité de s’en sortir :
la conception du salut actuelle est le « self-help », qui fait croire qu’on peut se sauver soimême…Le christianisme dit qu’on ne s’en sort pas tout seul : la Parole, les sacrements,
l’Eglise, les frères… sont participants du salut. La notion de salut a du sens pour
beaucoup de contemporains.
Exemple : sur 251000 mariages, 164000 divorces : soit on entérine, soit on s’étonne, on
cherche à comprendre, on sait qu’on peut soi-même être menacé aussi par le divorce. On
peut même parler de forces puissantes de décomposition du couple*. Les jeunes de 18 à
25 ans se posent la question du « pourquoi se marier si c’est pour divorcer ». La
résignation est terrible, mais c’est là qu’intervient le SALUT, à savoir : au-delà de l’idée
d’être menacé, on peut trouver dans la vie de couple le lieu où l’on fait l’expérience
d’être sauvé. C’est un chemin de vie à trouver pour échapper aux puissances mortifères*
de négation du couple. On trouve ce chemin dans les enseignements du Christ et de
l’Eglise : le christ offre une voie de salut.
Denis Moreau parle, entre autre, du business du mariage et du divorce ; de tout ce qui
divise actuellement le couple (argent, internet, livres sur le divorce, business de la
séparation…) ainsi que de tout ce qui a apporté du progrès à l’homme : se marier par
amour, l’allongement de la durée de vie, la montée de l’individualisme (on ne fera plus
de « sacrifice » pour l’Etat, la famille, l’Eglise, les syndicats…), le salariat des femmes
(1966). Ces évolutions sont bonnes et non réversibles cependant on constate qu’elles
participent aussi à la fragilisation du lien conjugal.
AMOUR CONJUGAL
Est une composante d’Eros, d’Agapè et de Philia. Notre Dieu est un Dieu d’amour : là où
est la charité Dieu est présent (Ubi caritas et amor Deus ibi est). Les jeunes ne savent
pas trop qui est Dieu, cherchent un Dieu qui n’est pas l’idée qu’ils s’en font.
Ne pas hésiter à leur dire « vous croyez que vous vous aimez, donc vous croyez en
Dieu ». L’idée de Dieu n’a rien de farfelu ni d’extraordinaire ; il ne s’agit pas de banaliser
Dieu, mais de transmettre la part divine de l’amour.
ELOGE du MARIAGE CATHOLIQUE
Mariage catholique = bonne nouvelle ! (Mat 28-30)
Le mariage catholique est unique et indissoluble ; c’est le lieu où l’on fait rimer AMOUR
et TOUJOURS ; les jeunes qui se préparent ont donc frappé à la bonne porte : ne pas
hésiter à le leur dire ! C’est un projet qui ne demande pas d’ambition, c’est un beau défi :
vrai, grand, beau défi ! Il n’y a pas de plan B à l’horizon ; il faut se libérer du mariage en
permanence « sous la menace » ; il est soulageant de savoir que l’engagement est pris
ensemble par deux, en dépit de la faiblesse, la vulnérabilité ; d’où savoir se faire
accompagner par les amis, les mouvements, l’Eglise…
« Quelle conception avons-nous de la liberté ? Est-ce celle du taxi ( !) : il est vide, il ne
sait pas où il va, il est prêt à aller n’importe où avec n’importe qui…bref beaucoup
d’indifférence… Au contraire, la liberté dans le couple est une liberté éclairée (Jean VIII
32) « La vérité vous rendra libre ». L’adultère est fondamentalement mauvais : être
infidèle rend malheureux ; être infidèle est déstructurant. Le couple est le lieu de
l’épanouissement et de l’enrichissement moral car c’est un des lieux qui favorise le
développement de ce qu’il y a de bon en lui .
La fécondité est utile et rayonnante. (Cf « le Goût de la vie commune » de Claude Habib
Flammarion.)
Le pardon : pas de vie de couple sans pardon ; savoir pardonner comme savoir être
pardonné. Le couple est le lieu où l’on apprend à pardonner. IL n’y a pas le choix : pour
s’en sortir, il faut pardonner.
Le couple est une structure de grâce où se vit un chemin d’amélioration éthique et
réciproque.
Etude de St Paul aux Ephésiens chapitre XV : « femmes soyez soumises à vos maris ».
Il n’y a pas de soumission dans le couple ; cette assertion choque car elle est à sens
unique. Les époux doivent admettre d’apprendre l’un de l’autre. L’un doit OBEIR à
l’autre et réciproquement (« ob ire » = s’ouvrir à l’autre). Il s’agit là d’une injonction
douce et bienfaisante de la part de Paul (quand on l’explique !)
L’APRES MARIAGE
Ces couples que nous rencontrons ont la chance d’être préparés à leur mariage pour
partir sur de bonnes bases. L’Etat ne propose pas de formation, ce qui est un manque
sérieux.
Il est nécessaire de mettre en place un « après-mariage » pour aider les couples à
prendre soin de leur amour. On n’est pas chrétien tout seul, on est soutenu par une
communauté ; ainsi, pour réussir son mariage, il faut être plus de deux : amis ,
communautés, associations … Une des faiblesses du mariage républicain est ce manque.
De même qu’il y a des nuits de la Foi, il y a des nuits de l’amour : l’arme favorite du
diable (le diabolos = celui qui sépare) est le découragement.
« Le couple est le haut lieu de l’esprit : une vraie conversation entre l’homme et la
femme est le reflet de la sagesse humaine Finalement, c’est le couple qui sauvera
l’esprit. » (cf le philosophe Alain)
LE SACREMENT : ce sont des paroles et des gestes qui engagent dans un processus
bénéfique ; par exemple, la manne dans le désert est ramassée par les Hébreux chaque
matin : le geste est répété, il n’est pas fait une fois pour toutes. Le sacrement renforce
l’amour, donne la force aussi, car se marier c’est se rendre vulnérable. Les plus belles
choses dans notre vie se font en acceptant une certaine dose de vulnérabilité.
Anne Depardon
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