Radicalisation islamique et revendication socioculturelle "Un radical islamique est certainement un musulman mais un musulman n'est pas forcement un radical islamique". Ahmad Aminian Radicalisme • La recherche active et d’appui, par la menace, le recours à la violence ou à d’autres moyens antidémocratiques, visant des changement fondamentaux dans la société qui pourraient compromettre l’ordre juridique démocratique. Deux sortes de radicalisation islamique • 1- Externe: radicalisation islamique comme un phénomène interne aux pays musulmans: des radicaux contre le pouvoir musulman non démocratique ou contre les occupants occidentaux; • 2- Interne: radicalisation islamique dans les pays occidentaux exercés par les citoyens d’origine musulmane: les radicaux contre le pouvoir occidental démocratique; Ils n’ont pas les mêmes causes mais ils se renforcent. Il n’ont pas les mêmes conséquences mais se complètent; Radicalisation interne • Le ressentiment comme moteur de radicalisation; • L’idéologie comme fournisseur d’un « permis de tuer » • Internet est un élément clé de la radicalisation Les musulmans radicaux, pour qui l’Appel est un fondement , s’opposent aux valeurs et au pouvoir politique et économique de l’Occident; La genèse de la radicalisation islamique • L’intervention de l’armée soviétique en Afghanistan en 1979 • La révolution islamique en Iran • L’invasion des irakiens en Iran avec l’aide de l’Occident • La présence de l’armée occidentale au Liban • L’annulation de la victoire du FIS, courant islamique en Algérie • L’insurrection en Tchétchénie • L’invasion de l’Irak Islam • Il est simultanément une religion et un système sociétal et politique: théopolitique; • Il existe une consubstantialité entre l’espace religieux et l’espace profane; • Il a une vision moniste, totalitaire et totalisante du réel; • Il réunit en même temps le visible et l’invisible; • Il est un engagement; Musulman - Muslim • Le muslim ou le musulman est un individu qui en acceptant l’Islam entre dans un groupe de femmes et d’hommes dénommé « Umma »; • « Umma » évoque un corps constitué qui a une double caractéristique : il est d’une part une communauté spirituelle et d’autre part une société de citoyens. Il a simultanément une existence verticale et une existence horizontale. Musulman - Muslim • Chaque musulman, en respectant cette dualité constituante de l’Islam, devient un membre à part entière de l’Umma et l’égal de ses autres membres. • Aucune distinction raciale, ethnique, linguistique, culturelle, politique ou autre n’abolit cette égalité des membres et leur intervention dans la gestion de l’Umma. • Le seul critère distinctif est l’intégrité éthique et juste du sujet musulman. Musulman - Muslim • Ainsi, le mode de gouvernance de l’Etat et la forme même de l’État sont basés sur une « muslimcratie ». Ce sont des musulmans citoyens égaux qui ont le pouvoir de gérer la communauté-société musulmane. • Dans la perspective de la muslimcratie, c’est le musulman seul qui est le citoyen authentique et jouit de tous les droits. Les autres individus ou communautés sont définis par rapport à la constitution musulmane conçue comme universelle. Dominance de l’interprétation littérale • Ce courant en s’assimilant à la Charia et à l’Orthodoxie est devenu par ses moyens financiers multiples un pouvoir indétournable dans l’affirmation identitaire. • Renforcé grâce aux pays occidentaux par sa position politique : la guerre contre l’Union soviétique, la guerre en Tchétchénie, la peur de l’Iran révolutionnaire, la montée de l’autorité politique du chiisme en Iraq et au Liban ainsi que la guerre en Syrie. Interprétation littéraliste • • • • • Est conservatrice; Est traditionnaliste rigide; Est éthiquement puritaine; Est réactionnaire; Est soutenue idéologiquement par le Wahhabisme, Salafisme et certains courants des frères musulmans; En Belgique • Le mouvement littéraliste, salafiste et traditionnaliste islamique en profitant de sa situation géopolitique a donc pu devenir le courant le plus important en Belgique ou en Europe. • Il s’impose en tant que l’expression religieuse de la majorité des musulmans. • Ce qui lui fournit des atouts pour se définir comme le représentant authentique de l’islamité belge. Canalisation • Par son rôle très important dans la tradition culturelle islamique, le mouvement littéraliste a eu la possibilité malgré lui de canaliser la problématique identitaire des musulmans sunnites belges d’origine arabophone ou maghrébine vers des revendications socioculturelles conflictuelles. Méthode • Persistait à donner un appareil argumentatif traditionnaliste binaire axé sur les valeurs de la charia primaire orienté vers la Justice sociale. Cet appareil fut également renforcé par l’idéologie populiste gauchisante de type d’un socialisme vulgaire jihadiste. Diffusion de l’islamité littéraliste • La reconnaissance de l’Islam en Belgique en tant que culte; • Le financement des lieux de culte et de l’enseignement de la religion islamique par le pouvoir public; • Le soutien financier des pays arabes pétroliers et la main mise de ce courant sur la communauté musulmane sunnite pratiquante; • Le renforcement de ses assises sociales par des actions de bonne-œuvre; • La pénétration de la pensée binaire, traditionnaliste, idéologique et djihadiste dans les foyers et auprès des jeunes sans aucun esprit critique. La faille par laquelle ce courant s’est étendue • La traduction erronée de plusieurs termes islamiques en français formel à partir d’un champ sémantique démagogique; • L’ignorance et la méconnaissance profonde des acteurs politiques belges et européens des terminologies islamiques, ses champs de signification et son histoire; • Le profit tiré de la reconnaissance de l’Islam comme culte sans tenir compte de son corolaire consubstantiel qui est l’engagement social et politique; Conséquences • L’assimilation de l’église à la mosquée où on peut débattre des questions et des décisions autant d’ordre religieux que séculaires. • La mosquée symbolise donc l’islamité en tant qu’un espace sociocommunautaire, socioéducatif, sociopolitique et socioreligieux. • La topographie de la mosquée considérée par l’assimilation comme un lieu cultuel et sacré devient également un endroit idéal pour l’action et la gestion sociopolitique de la sociétécommunauté islamique; • La mosquée devient un endroit idéal pour la diffusion du courant littéraliste pour organiser des réseaux de charité ou d’enseignement auprès de la masse désœuvrée à la recherche de leur tradition culturelle et leur identité supposée corrompue par la société séculaire. Intensification • La combinaison du discours littéraliste avec manquements sociopolitiques et socioculturels cultive auprès des jeunes des idées subversives sans être contrecarrés par l’esprit critique; • On caresse ainsi l’autosuffisance et la fierté islamique, alimentées par des ressentiments et des injustices de la société séculaire, immorale symbolisée par une démocratie de double langage; • Le glissement de l’être blessé, la victime vers la radicalisation idéaliste et idéologique. Critiques • Cette situation dans l’espace belge de la reconnaissance de l’Islam en tant que culte ne favorise absolument pas l’approche dynamique et critique de l’histoire islamique et sa narration coranique, juridique, philosophique, mystique et scientifique au sein de la communauté – société islamique en Belgique. • La place privilégiée de l’islamité littéraliste dans le contexte de la reconnaissance de l’Islam comme culte fait oublier aux yeux du pouvoir la force socioculturelle et politique de l’Islam liée substantiellement à la parole coranique et sa civilisation sociocommunautaire. Conclusion • Il est impératif d’aider à l’établissement d’un espace belge d’humanisme musulman. C’est dans cet espace qu’il faut favoriser, parallèlement à l’approche littéraliste, la démarche socioreligieuse et socioéducative axée sur une approche dynamique et interprétative des textes fondamentaux pour les rendre compatibles et conformes à la démocratie. La création de cet espace, vu la dominance de l’islamité littéraliste, nécessite en premier lieu l’intervention financière du pouvoir public, comme il le fait pour l’aspect cultuel de l’Islamité belge. Cette attitude, ce soutien du pouvoir public favorisera l’émergence d’un cadre formé du point de vue théologique et philosophique ainsi que des associations réformistes islamiques pour impulser des changements qui viendront de l’intérieur. Ce cadre formé dans la logique de la présence de l’Islam en tant qu’ une force sociocommunautaire peut ainsi prendre parole dans les mosquées et dans divers lieux islamiques. Il est temps que les courants islamiques réformateurs puissent prendre parole à côté des littéralistes dans divers lieux socioreligieux, en l’occurrence dans les mosquées.