ETHIQUE PLANETAIRE
RELIGIONS DU MONDE
PAIX MONDIALE
PAIX MONDIALE
ETHIQUE PLANETAIRE
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A quoi bon une éthique planétaire?
Peut-on imaginer une partie de ballon
où tous les joueurs se mettraient à
courir en tous sens comme des fous, en
tapant au hasard sur la balle, sans sa-
voir comment construire leur jeu, et
sans connaître ce qu’il est permis ou
non de faire? Pour qu’un jeu loyal et
harmonieux soit possible et qu’il fasse
plaisir, des règles sont nécessaires. Il
faut des règles partout où des êtres hu-
mains vivent ensemble et cherchent à
atteindre ensemble un but déterminé.
Une classe d’école ne peut prospé-
rer que si les filles et les garçons font
preuve de fair play, si règne entre les
uns et les autres une atmosphère de
confiance et que nulle crainte de vol,
de racket ou de violence ne fausse les
relations – et si l’on se sent traité de
façon juste par l’enseignant. Pour cela,
il faut que des règles de conduite
soient acceptées par tous ceux qui
participent à la vie scolaire.
Dans une entreprise commerciale,
le gain est important, mais pour
qu’elle soit florissante, il faut des rela-
tions de confiance entre l’employeur
et le personnel, entre les employés
eux-mêmes et avec les clients de
l’entreprise. L’honnêteté est essen-
tielle dans les affaires, dans la comp-
tabilité et l’établissement des bilans,
tout comme des rapports de confiance
et une estime réciproque. Cela exige
des règles acceptées par tous dans les
affaires et dans le travail.
Une communauté ne peut subsister
que dans la mesure où elle dispose
d‘un ordre juridique stable: les diver-
gences peuvent être résolues sans re-
cours à la violence, les membres en-
tretiennent entre eux un rapport de
confiance, ceux qui assument une
charge le font honnêtement et régu-
lièrement, l’équilibre entre les divers
intérêts est recherché. Pour qu’une
communauté demeure soudée, il lui
faut impérativement un consensus sur
quelques règles élémentaires régissant
la vie en commun.
Entre les peuples, les nations et
les Etats, surgissent sans cesse des in-
térêts divergents, des priorités et des
rivalités. On ne parviendra à un équi-
libre équitable des divers intérêts et à
une paix durable qu’à la condition que
les relations ne soient pas régies par
la violence et que le dialogue et la
coopération remplacent l’agressivité et
la confrontation. Même la politique et
la diplomatie, au niveau local ou inter-
national, ont besoin de règles de bon
comportement.
Depuis qu’il existe des communautés
humaines, on a imaginé des modèles
de coexistence féconde et de vie indi-
viduelle satisfaisante. Toutes les cul-
tures ont développé des normes de
comportement qui correspondent à
une éthique élémentaire. Ce sont
avant tout les religions et les philoso-
phies qui ont formulé et systématisé
ces critères. Mais dans le monde plu-
raliste où nous vivons, aucune religion,
aucune philosophie ne peut, à elle
seule, imposer son éthique à l’ensem-
ble des sociétés. Il est néanmoins pos-
sible – et important – de découvrir et
de faire connaître ce qu’il y a de com-
mun dans l’éthique inhérente aux dif-
férentes religions et philosophies afin
de:
permettre à toute personne de
s’orienter;
assurer la cohésion de la société;
offrir aux nations et aux commu-
nautés religieuses une base pour
l’entente, la coopération et la paix.
Sur la base de ces normes – de ces
critères éthiques communs que nous
appelons éthique planétaire – les
hommes et les femmes de toutes
nations et de toutes cultures seront à
même de vivre ensemble et de colla-
borer en vue d’un monde plus paci-
fique et plus juste.
Qu’est-ce que l’éthique
planétaire?
Dès l’année 1990, dans mon livre Pro-
jet d’éthique planétaire, j’ai soumis à
l’opinion publique mes idées sur une
éthique planétaire. Sous la forme d’un
programme, j’y ai exposé l’idée que
les religions du monde n’apporteront
une contribution à la paix du monde
que dans la mesure où elles réfléchi-
ront à ce que leurs éthiques ont déjà
en commun: à savoir un consensus de
base relatif aux valeurs fondamentales,
aux normes incontournables et aux at-
titudes essentielles de la personne. Un
pas décisif a été franchi lors du «Parle-
ment des religions», un rassemble-
ment interreligieux qui a réuni 6000
personnes à Chicago en 1993 et au
cours duquel 200 délégués de toutes
les religions et de tous les continents
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signèrent la Déclaration pour une
éthique planétaire, que j’avais es-
quissée au travers d’un processus
de concertation interreligieuse. Elle
constitue, depuis lors, le document de
base en vue du développement de
l’idée d’une éthique planétaire.
Quatre convictions fondamentales
sous-tendent ce projet:
Pas de paix entre les nations
sans paix entre les religions.
Pas de paix entre les religions
sans dialogue entre les religions.
Pas de dialogue entre les religions
sans normes éthiques globales.
Pas de survie de notre planète
sans une éthique planétaire soute-
nue par l’ensemble des êtres
humains, croyants et incroyants.
La déclaration de Chicago résume en
premier lieu les points communs dans
l’éthique des religions à travers deux
principes:
1. Le principe d’humanité selon lequel
tout être humain doit être traité
humainement.
2. Pratiquement, toute culture et tou-
te religion connaît une seconde règle
qui développe ce principe de base:
c‘est la fameuse Règle d’or de la réci-
procité: «Ne fais pas à autrui ce que
tu ne voudrais pas qu’on te fasse.»
Ces deux principes impliquent des
orientations concrètes dans quatre
domaines vitaux; elles sont formulées
en termes d’exigences vis-à-vis de soi-
même:
S’engager en faveur d’une culture
de non-violence et de respect à
l‘égard de toute forme de vie.
S’engager en faveur d’une culture
de la solidarité et d’un ordre écono-
mique équitable.
S’engager en faveur d’une culture
de la tolérance et d’une vie de sin-
cérité.
S’engager en faveur d’une culture
de l‘égalité et d’un partenariat entre
homme et femme.
S‘appuyant sur la déclaration de Chica-
go, l’idée d’une éthique planétaire
s’est propagée dans divers domaines.
Les documents suivants sont détermi-
nants à cet égard:
1997: Proposition de l’InterAction
Council d’anciens chefs d’Etat et de
gouvernement en faveur d’une «Décla-
ration universelle des responsabilités
des personnes».
1999: «Appel à nos institutions
dirigeantes» du troisième Parlement
des religions du monde, au Cap.
2001: Manifeste en faveur du dia-
logue des cultures «Ponts vers l’ave-
nir» («Crossing the Divide»), élaboré
par un «Groupe de personnalités
de premier plan», convoqué par Kofi
Annan, secrétaire général de l’ONU,
pour 2001, Année internationale du
dialogue des cultures.
La Déclaration de Chicago et le Projet
d’éthique planétaire entendent susci-
ter une prise de conscience individuel-
le et collective en faveur de la survie
sur notre planète. La Fondation pour
une éthique planétaire, créée à Tübin-
gen en 1995, travaille activement à
l’avancement de cette prise de cons-
cience, et cela dans différents domai-
nes interculturels et interreligieux:
la recherche, la formation et les ren-
contres, au niveau national et inter-
national.
L’éthique planétaire
visualisée: l’exposition
«Religions du monde –
paix mondiale –
éthique planétaire»
Les instruments créés par la Fondation
pour une éthique planétaire – livres,
vidéos, CD-ROM, site Internet – consti-
tuent une contribution pédagogique à
cette mutation de la conscience; il en
va de même pour l’exposition «Reli-
gions du monde – paix mondiale –
éthique planétaire» dont rend compte
cette brochure.
Chacun sait que les normes éthiques
ne tombent pas du ciel, quand bien
même, de tous temps et dans différen-
tes religions, elles ont été et conti-
nuent d’être énoncées sous l’autorité
de révélations divines et rappelées à la
mémoire des êtres humains par les
porte-paroles de ces révélations. Au
cours de l’évolution humaine et à tra-
vers un processus socio-dynamique
très complexe, normes et valeurs
éthiques ont été élaborées par
l’homme lui-même. Plus précisément:
quand sont apparus des besoins hu-
mains, des urgences et des nécessités,
se sont alors imposés des régulateurs
du comportement humain: priorités,
conventions, lois, commandements,
préceptes et coutumes; en un mot des
impératifs éthiques spécifiques. C’est
ainsi que l’on retrouve dans des reli-
gions d’origine indienne ou chinoise
des éléments proclamés comme com-
mandements divins dans les textes de
la Bible hébraïque, du Nouveau Testa-
ment et dans ceux du Coran, donc
dans des cultures d’origine sémitique.
Tout cela est évoqué sur les six ta-
bleaux des religions que l’on appelle
communément les grandes religions du
monde, en raison de leur impact pra-
tique et de leur diffusion universelle.
Les six premiers panneaux montrent:
des portraits des grandes figures
fondatrices: Shiva, Confucius, le
Bouddha, Moïse, Jésus et Muhammad
(représenté par son nom calligraphié
car son image ne doit pas être repré-
sentée);
des textes sacrés centraux en rap-
port avec l’éthique des différentes reli-
gions;
un texte personnel caractérisant
l’essence de la religion concernée;
un petit glossaire accompagné
d’une orientation chronologique;
des images évoquant l’univers des
différentes religions, avec des portraits
de représentants et représentantes de
l’époque moderne.
En même temps, il convient de faire
ressortir clairement les normes
éthiques fondamentales communes
qui sous-tendent toutes ces religions.
Ce trait commun apparaît avec le plus
5
Hans Küng
de netteté dans le panneau de la
Règle d’or. On voit ici, dans des écri-
tures et sous des formulations diffé-
rentes, une norme semblable que
Confucius énonce déjà 500 ans avant
Jésus-Christ et qui devrait valoir non
seulement entre personnes isolées,
mais aussi entre groupements, entre
nations, ethnies et religions.
La Règle d’or est, en fait, une précision
du principe d’humanité, encore plus
fondamental qu’ont revendiqué de
tous temps les grands humanistes –
d’Emmanuel Kant jusqu’à Martin
Luther King, Nelson Mandela et Yehudi
Menuhin en passant par Henry
Dunant, Voltaire, Thomas Mann,
Hannah Arendt et Albert Schweitzer:
«Tout être humain – homme ou
femme, noir ou blanc, riche ou pauvre,
jeune ou vieux – doit être traité
humainement, et non de façon inhu-
maine ou bestiale.» Cette exigence est
fondée sur ce qui constitue réellement
l’élément commun à tout être humain,
à savoir le fait d’être humain; c’est en
même temps l’inaliénable dignité
humaine qui lui est inhérente et fonde
du même coup les droits humains.
Les quatre derniers panneaux dé-
veloppent et concrétisent ces deux
principes éthiques fondamentaux; ils
les traduisent en termes de notre épo-
que, de concert avec les quatre grands
commandements éthiques propres à
toutes les religions, tels que les for-
mule la Déclaration de Chicago. Il ap-
paraît clairement qu’ils n’ont rien de
fortuit, mais sont ordonnés aux domai-
nes décisifs de la vie et de la société
humaines.
L’éthique planétaire – tel est le fil
rouge, le dénominateur commun qui
donne à notre exposition son unité
thématique. A l’aide de ces douze ta-
bleaux, quiconque visite notre exposi-
tion peut discerner ce qui fait partie
de l’héritage éthique de l’humanité;
cela inclut aussi bien l’éthique huma-
niste des traditions séculières que
l’éthique des traditions religieuses.
La paix du monde ne sera promue que
grâce à une coalition d’hommes et de
femmes qu’inspire une préoccupation
éthique, que ce soit sur une base reli-
gieuse ou laïque.
L’éthique planétaire dans la
vie pratique: la Fondation
Ethique planétaire
La Fondation Ethique planétaire doit sa
création en 1995 au comte Karl Konrad
von der Groeben qui prit la décision,
après avoir lu le livre Projet d’éthique
planétaire, d’engager une somme
considérable pour la diffusion de l’idée
d’une éthique planétaire. Grâce aux re-
venus du capital de la Fondation, le
travail d’une petite équipe de cher-
cheurs œuvrant sous ma direction est
assuré pour une longue durée. Le tra-
vail trouve sa base et son programme
dans la Déclaration du Parlement des
religions du monde.
La Fondation est engagée dans trois
domaines:
1. Réalisation et promotion de la
recherche interculturelle et inter-
religieuse:
Recherche de base en théologie et
en sciences des religions, notamment
par la publication et la diffusion
d’ouvrages scientifiques (livres, arti-
cles) en vue d’une meilleure com-
préhension interculturelle et inter-
religieuse.
2. Engagement dans un travail de
formation interculturelle et inter-
religieuse:
Activités formatrices – enseigne-
ment, conférences – visant la diffusion
des résultats des travaux de recherche,
et en particulier de l’idée même d’une
éthique commune à toute l’humanité;
diffusion au niveau national et interna-
tional dans les universités populaires,
les académies, les écoles, les collèges,
les groupements, les partis et les asso-
ciations en tous genres.
Formation de personnes intéressées
par des rencontres, des conférences et
des exposés, des séminaires et des
ateliers, en vue d’un approfondisse-
ment du thème de l’éthique planétaire.
Prestations pour le grand public, au
service d’une éthique planétaire, à
l’aide des médias (articles de jour-
naux, interviews, radio et TV).
Production de moyens audio-
visuels, p. ex.: le projet multimédia
«Sur les traces des religions» (en
allemand: Spurensuche). Les religions
du monde en route» – comprenant
sept films vidéo, un livre explicatif et
un CD-ROM, ainsi que l‘exposition
«Religions du monde – Paix mondiale
– Ethique planétaire».
3. Réalisation et soutien des
rencontres interculturelles et
interreligieuses
Initiatives dans les domaines social,
politique et culturel, favorisant l’en-
tente entre les peuples (par exemple:
établir des mesures visant à dévelop-
per la confiance entre différentes reli-
gions).
Rencontre entre représentants de
différentes cultures et de différentes
religions (colloques, voyages d’étude,
congrès).
Développement du réseau de rela-
tions déjà établi.
Accès aux documents-clés et à la
littérature sur Internet:
site général www.weltethos.org
et site pour l’éducation
www.schule-weltethos.de
Depuis sa création en 1995, l’activité
de la Fondation s’est étendue dans
différents domaines de la société. Elle
suscite un vif intérêt, jusque dans les
milieux de l’ONU. D’autres fondations
d’éthique planétaire ont vu le jour
en Suisse en 1996, en République
tchèque en 1999, aux Pays-Bas en
2000, à quoi s’ajoute, en 2001, une
«Initiative Ethique planétaire» en
Autriche. L’écho positif que rencon-
trent les activités de la Fondation
montre qu’elle s’est attelée à une
tâche urgente: fournir un fondement
éthique à la mondialisation.
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