Feltesse_Aurélien_ CCA-Dauphine

publicité
Université de Paris-IX Dauphine
COMMENT ASSURER L’APPLICATION ET LE SUIVI
DE L’APPROCHE PAR COMPOSANTS PREVUE PAR
L’IAS 16 ET LE CRC 2002-10 ?
L’EXEMPLE D’EDF ET D’AUTRES GRANDS
GROUPES FRANÇAIS
______________________________
Mémoire de Master 2 CCA Apprentissage
Comptabilité Contrôle Audit
Présenté et soutenu par
Aurélien FELTESSE
Juin 2014
Directrice de mémoire : Madame Virginie SRECKI
JURY
Madame Virginie SRECKI
Professeur à l’Université de Paris IX-Dauphine
Monsieur Sébastien CHRIQUI
Maître d’apprentissage au sein du Groupe EDF
Madame Rouba CHANTIRI
Maître de conférences à l’Université de Paris IX-Dauphine
REMERCIEMENTS
Mes remerciements s’adressent en premier lieu à Monsieur Sébastien CHRIQUI, mon Maître
d’Apprentissage au sein du Centre des Services Partagés Comptabilité d’EDF (CSP-C). Je
tiens à le remercier pour sa confiance, ses conseils et ses encouragements qui m’ont permis de
progresser sans cesse durant ces deux dernières années. Son soutien m’a été précieux dans
l’élaboration de ce mémoire.
Je tiens à exprimer également toute ma reconnaissance à Monsieur Jean-Luc LAFON, exDirecteur Délégué du CSP-C, grâce à qui cette expérience a été rendue possible et sans qui la
qualité de ce mémoire aurait été difficilement atteinte.
Par ailleurs, je tiens à exprimer mon entière gratitude à Madame Virginie SRECKI, directrice
de ce mémoire, qui a su me guider dans mon travail et m'a aidé à trouver des solutions pour
avancer. Sa disponibilité et son expertise ont été précieuses pour la rédaction de ce mémoire.
Mes remerciements s’adressent aussi à toutes les personnes qui ont pris le temps de me
recevoir et de m’apporter leur vision sur l'approche par composants que ce soit :
-
Au sein d’EDF (Céline D., Olivier B., Bruno B., Jérôme B., Natacha B., Christophe B. et
Jean-François R.)
-
Ou à l’extérieur du Groupe EDF (Miriam B. de la SNCF, Daniel P. d’Areva, Pascale V.
d’Orange, Jean D. d’Air France et Vincent H. de La Poste).
Enfin, je tiens à remercier chaleureusement mon entourage personnel, et plus particulièrement
Juliette C. pour m’avoir supporté et soutenu pendant la rédaction de ce mémoire et pour ses
nombreux encouragements.
INTRODUCTION ...................................................................................................................................................... 1
CHAPITRE 1 – LES PROBLEMATIQUES LIEES A LA MISE EN PLACE ET AU SUIVI
D’UNE NOUVELLE NORME COMPTABLE ...................................................................................... 6
I.
PROBLEMATIQUES
GENERALES LIEES A LA DECLINAISON D’UNE NORME COMPTABLE AU SEIN
D’UN GROUPE ................................................................................................................................................ 7
A.
Comportements face au changement ........................................................................................... 7
B.
La nécessité d’accompagner le changement .............................................................................. 8
C.
Impacts de l’application des normes IAS/IFRS ........................................................................ 10
1.
Impacts d’ordre général ......................................................................................................................... 10
2.
Impacts spécifiques liés à l’IAS 16 ...................................................................................................... 11
PROBLEMATIQUES LIEES A LA MISE EN PLACE ET AU SUIVI DE L’APPROCHE PAR COMPOSANTS 13
II.
La mise en place de l’approche par composants : les options comptables laissées à
A.
la main des entreprises ......................................................................................................................... 13
1.
Identification des composants de première catégorie et seuil de significativité ............................ 13
a.
Position comptable .......................................................................................................................................... 13
b.
Position fiscale ................................................................................................................................................. 14
c.
Distinction entre erreur comptable et décision de gestion ........................................................... 15
Dépenses de première catégorie et reconstitution du coût d’origine .............................................. 17
2.
a.
Reconstitution du coût historique lors de la mise en place de l'approche par composants ..... 17
b.
Reconstitution du coût historique pour les composants non identifiés à l’origine ................... 20
3.
Dépenses de seconde catégorie et choix comptables et fiscaux ...................................................... 21
a.
Exposé des dispositions comptables et fiscales ..................................................................................... 21
b.
Exemple comparatif : les conséquences du mode de comptabilisation ..................................... 23
c.
Conclusions sur les conséquences de la comptabilisation en composant ou en provision des
dépenses de seconde catégorie .................................................................................................................. 28
AURELIEN FELTESSE
Le suivi de l’approche par composants ..................................................................................... 30
B.
1.
Gestion du périmètre des composants : dispositions théoriques...................................................... 30
2.
L’évolution des rapports organisationnels comptables / opérationnels .......................................... 31
3.
Proposition de guides méthodologiques pour les contrôles légaux liés aux dépenses de
gros entretien et grandes révisions ................................................................................................................ 32
CHAPITRE 2 – L’APPROCHE PAR COMPOSANTS DANS LES GROUPES FRANÇAIS –
EXEMPLES ET BONNES PRATIQUES .............................................................................................. 35
DESCRIPTIF DU CAS D’ETUDE ........................................................................................................... 36
I.
A.
EDF SA et l'approche par composants ..................................................................................... 36
1.
Présentation du Groupe EDF ................................................................................................................ 36
2.
L’application de l'approche par composants chez EDF SA ............................................................. 37
Composants de première catégorie ............................................................................................................ 38
b.
Composants de seconde catégorie.............................................................................................................. 39
Les entreprises du benchmark et l’approche par composants ............................................... 41
B.
II.
a.
1.
Les entreprises du benchmark .............................................................................................................. 41
2.
Informations comparables sur les entreprises du benchmark ........................................................... 45
GESTION DE L'APPROCHE PAR COMPOSANTS AU QUOTIDIEN ......................................................... 46
A.
Les problématiques rencontrées par les groupes lors de la mise en place de
l'approche par composants .................................................................................................................. 46
B.
Le suivi des composants chez EDF SA ...................................................................................... 48
1.
Les composants de première catégorie ................................................................................................ 48
a.
Contexte : les composants de première catégorie non identifiés à l’origine ............................. 48
b.
Processus de remplacement et de suivi des composants de première catégorie ....................... 49
c.
Reconstitution du coût d’origine des composants de première catégorie .................................. 55
2.
3.
Les dépenses de seconde catégorie ...................................................................................................... 57
a.
Calcul du coût des dépenses de révisions majeures ............................................................................. 57
b.
Procédures de suivi et de contrôle.............................................................................................................. 57
L’anticipation sur les projets innovants .............................................................................................. 59
AURELIEN FELTESSE
C.
Le suivi des composants au sein du benchmark ....................................................................... 60
1.
Exemple « d’industrialisation » de la démarche par composant ..................................................... 60
2.
Exemple de méthodologie de reconstitution du coût d’origine ....................................................... 61
D.
Les composants & les contrôles interne et externe .................................................................. 63
1.
Les missions d’audits internes sur l'approche par composants ........................................................ 63
2.
Les missions d’audits externes sur l'approche par composants ....................................................... 64
III. UNE DEMARCHE EN PERPETUELLE EVOLUTION............................................................................... 65
A.
B.
Gestion du périmètre des composants et sécurisation du suivi de la démarche .................. 65
1.
Gestion du périmètre des composants : dispositions pratiques ........................................................ 65
2.
Sécurisation de la démarche par composants dans le temps ............................................................ 66
Remise en cause des principes internes en place ..................................................................... 67
IV. LIMITES PRATIQUES DE L'APPROCHE PAR COMPOSANTS ET FACTEURS CLES DE SUCCES ............ 69
A.
Les installations complexes spécialisées (ICS) ........................................................................ 69
B.
Les facteurs clés de succès de l'approche par composants .................................................... 70
CONCLUSION GENERALE .............................................................................................................................. 73
AURELIEN FELTESSE
LISTE DES TABLEAUX
Tab. 1
Intérêts de l'approche par composants....................................................................................3
Tab. 2
Apports de l'étude menée par A. Couleau-Dupont et S. Demaria..........................................9
Tab. 3
Apports de l'étude menée par C. Simon.................................................................................9
Tab. 4
Options offertes pour la reconstitution du coût amorti.........................................................19
Tab. 5
Options offertes pour la comptabilisation des dépenses de seconde catégorie....................23
Tab. 6
Données d'exploitation clés d'EDF (2013)...........................................................................37
Tab. 7
Indicateurs financiers clés de la SNCF (2013).....................................................................41
Tab. 8
Indicateurs financiers clés d'Areva (2013)...........................................................................42
Tab. 9
Indicateurs financiers clés d'Orange (2013).........................................................................43
Tab. 10 Indicateurs financiers clés d'Air France (2013)....................................................................43
Tab. 11 Indicateurs financiers clés de La Poste (2013).....................................................................44
Tab. 12 Informations comparables sur le benchmark........................................................................45
LISTE DES FIGURES
Fig. 1
Distinction fiscale entre erreur et décision de gestion..........................................................15
Fig. 2
Résultat comptable selon mode de comptabilisation choisi.................................................27
Fig. 3
Audit sur composants : Informations généralement recherchées par les auditeurs..............32
Fig. 4
Audit sur composants : les moyens de se procurer l'information.........................................33
Fig. 5
Indicateurs financiers clés d'EDF (2013).............................................................................36
Fig. 6
Extrait document de référence de la SNCF (2013)..............................................................42
Fig. 7
Extrait document de référence d'Areva (2013).....................................................................42
Fig. 8
Extrait document de référence d'Orange (2013)...................................................................43
Fig. 9
Extrait document de référence d'Air France (2013).............................................................43
Fig. 10
Extrait document de référence de La Poste (2013)..............................................................44
Fig. 11
Logigramme de remplacement des composants chez EDF..................................................49
INTRODUCTION
Simplicité, comparabilité, transparence et richesse de l’information financière ; tels sont les
objectifs assignés aux règles comptables internationales IAS/IFRS mises en place en Europe
entre 2003 et 2005. Avec le développement des échanges internationaux et des exigences
d’information toujours plus grandes des marchés financiers, il est apparu comme primordial
d’uniformiser les référentiels comptables à l’échelle internationale afin que les entités
fournissent le même niveau d’information avec les mêmes méthodes de calcul.
En France, suite à l’adoption du règlement CE 1606/2002 par l’Union Européenne, les normes
IAS/IFRS s’appliquent de manière obligatoire aux comptes consolidés des sociétés cotées.
Pour les comptes consolidés des autres sociétés c’est le CRC 99.02 qui devra être appliqué. A
noter que les sociétés non cotées peuvent utiliser le référentiel IFRS sur option pour leurs
comptes consolidés. Dans le cadre de ce mémoire nous nous intéresserons aux sociétés qui
appliquent les normes IAS/FRS dans leurs comptes consolidés, et nous occulterons les
dispositions du CRC 99.02.
Enfin, pour les comptes sociaux de toutes les entreprises françaises (cotées ou non) ce sont les
dispositions du Plan Comptable Général (PCG) qui doivent s’appliquer.
La norme « IAS 16 – Immobilisations corporelles » (2003, mise à jour notamment en 2008)
mais aussi le « Règlement 2002-10 relatif à l’amortissement et à la dépréciation des
actifs » ont profondément modifié la manière de comptabiliser les actifs immobilisés.
Apparaît ainsi le principe comptable de l'approche par composants, qui revient à identifier au
sein d’une immobilisation (ex : un avion) :
- La structure (la carlingue de l’avion - amortissable sur 20 ans),
- Un composant de première catégorie (l’aménagement intérieur - amortissable sur 5 ans),
- Et, un composant de seconde catégorie (les dépenses d’entretien décennales amortissable sur 10 ans).
En d’autres termes, cette technique consiste à ventiler comptablement une immobilisation
amortissable en fonction des éléments qui la composent et qui ont une durée d’utilisation
différente de l’élément principal. Si l’on reprend notre exemple d’un avion : avant
AURELIEN FELTESSE
1 / 74
l’introduction du concept de « composant » il s’agissait d’une immobilisation unique amortie
sur la durée de vie de l’avion. Après l’introduction du concept dans les différents référentiels,
il s’agit de trois immobilisations différentes qui ont des durées de vie propres.
L’IAS 16 indique ainsi que :
« Des parties de certaines immobilisations corporelles peuvent exiger un
remplacement à intervalles réguliers. Par exemple, après un certain nombre d'heures
d'utilisation, il peut être nécessaire de renouveler plusieurs fois le revêtement
intérieur d'un four (...) Des immobilisations corporelles peuvent également être
acquises pour effectuer un remplacement se reproduisant moins fréquemment,
comme le remplacement des murs intérieurs d'un immeuble (...).
La poursuite de l'exploitation d'une immobilisation corporelle (...) peut être soumise
à la condition de la réalisation régulière d'inspections majeures destinées à identifier
d'éventuelles défaillances, avec ou sans remplacement de pièces (...) ».
Le règlement CRC 2002-10 (dont les dispositions sont aujourd’hui reprises dans l’article 3112 du PCG) indique quant à lui que :
« Les éléments principaux d’immobilisations corporelles devant faire l’objet de
remplacement à intervalles réguliers, ayant des utilisations différentes ou procurant
des avantages économiques à l’entité selon un rythme différent et nécessitant
l’utilisation de taux ou de modes d’amortissement propres, doivent être
comptabilisés séparément dès l’origine et lors des remplacements.
Les dépenses d’entretien faisant l’objet de programmes pluriannuels de gros
entretien ou de grandes révisions en application de lois, règlements ou de pratiques
constantes de l’entité, doivent être comptabilisées dès l’origine comme un
composant distinct de l’immobilisation, si aucune provision pour gros entretien ou
grandes révisions n’a été constatée. Sont visées, les dépenses d’entretien ayant pour
seul objet de vérifier le bon état de fonctionnement des installations et d’y apporter
un entretien sans prolonger leur durée de vie au delà celle prévue initialement, sous
réserve de répondre aux conditions de comptabilisation de l’article 311-1 ».
Bien que ces deux définitions puissent sembler complexes de prime abord, l’identification des
composants au sein des immobilisations corporelles ne doit pas être considérée uniquement
AURELIEN FELTESSE
2 / 74
comme une contrainte comptable. L'approche par composants présente, en effet, un grand
intérêt pour la gestion des immobilisations et des dépenses, élément souvent essentiel dans la
maîtrise des coûts. On peut ainsi citer les attraits suivants :
Ventiler comptablement les immobilisations (et donc les investissements) permet
d’optimiser la politique de gestion des immobilisations de l’entreprise en appréhendant
les remplacements futurs des composants.
Identifier des composants distincts de la structure contribue à fiabiliser la distinction
Intérêt
fiscal
entre les biens soumis à taxe foncière (immeubles bâtis au sens fiscal) et les matériels
non-soumis.
Distinguer des composants qui présentent une durée d’utilité potentiellement plus
Intérêt
financier
courte que l’immobilisation principale permet de les amortir sur leur durée propre (et
donc plus rapidement).
Avoir un découpage le plus fin possible de ses immobilisations permet à l’entreprise de
Intérêt
légal
sécuriser les données patrimoniales pour les contrôles externes (ex : contrôles des
commissaires aux comptes, ou contrôles fiscaux).
Mais le passage obligatoire aux normes IFRS pour les sociétés cotées européennes à partir du
1er janvier 2005 a été synonyme de « bouleversements » au sein de la filière comptable. C’est
pourquoi,
Les
Echos
Conférences,
le
cabinet
d’audit
PWC
(anciennement
PriceWaterhouseCoopers), et l’association nationale des Directeurs Financiers et de Contrôle
de Gestion (DFCG) ont mené une enquête en 2006 sur l’application des « nouvelles
dispositions comptables et fiscales sur les actifs ».
Philippe Bailly, alors Directeur Général de PWC Entreprises, s’exprime dans une interview
afin de donner les principales conclusions de l’enquête menée. Un an après la mise en place
obligatoire de l'approche par composants, il énonce le constat suivant : « Face à la complexité
des textes, les entreprises ont d’abord fait le choix de la simplification en matière
d’identification des composants et de calcul des amortissements (...) : 2/3 de celles qui
effectuent des dépenses de grandes visites ou de gros entretien ont choisi de les traiter comme
des composants et de les amortir comme des actifs (...). Leur objectif était de privilégier la
cohérence entre leurs comptes sociaux et leurs comptes consolidés IFRS (...) ».
AURELIEN FELTESSE
3 / 74
Tab. 1 - Intérêts de l'approche par composants
Intérêt
de gestion
Aujourd’hui, presque dix ans après l’application obligatoire de l'approche par composants en
France, la question est donc de savoir comment assurer la mise en œuvre et le suivi de cette
démarche. Après une décennie, les retours d’expérience sont-ils concluants ? Toutes les
entreprises ont-elles interprété de la même manière les dispositions légales ? L’information
financière est-elle aussi pertinente que l’auraient souhaité les législateurs ? Comment les
entreprises arrivent-elles à suivre les différents composants dans leur système d’information ?
Nous allons, dans le cadre de ce mémoire, tenter de répondre à toutes ces interrogations. Les
objectifs sont donc multiples :
-
Présenter les problématiques liées à la mise en place d’une nouvelle norme comptable,
et plus particulièrement l’approche par composants. La fiabilisation d’un changement
de méthode comptable présente, en effet, de nombreux enjeux.
-
Synthétiser au sein d’un même document les écrits les plus pertinents qui ont pu être
publiés depuis 2003 par rapport à l'approche par composants. Nous verrons ainsi
quelles sont les recommandations mises en avant par certains experts sur la démarche
par composants.
-
Apporter une vision nouvelle par rapport aux travaux déjà réalisés, à travers deux
axes majeurs :
o En se focalisant sur l’aspect « suivi » de l'approche par composants presque 10
années après la première application...
o ...et cela à travers une analyse comparative sur les méthodes et bonnes
pratiques mises en place par certains grands Groupes français tels qu’EDF, la
SNCF, Areva, Orange, Air France et La Poste. L'ensemble de ces Groupes
formera notre « cas d’étude ».
Pour réaliser ce travail, plusieurs démarches méthodologiques ont dû être menées :
-
Recherche de l’ensemble des textes légaux et règlementaires de niveau national et
international relatifs à l'approche par composants ;
-
Recherche de l’ensemble des avis du Comité d’Urgence du Conseil National de la
Comptabilité (CNC – devenu ANC depuis 2009), d’articles parus dans la presse
AURELIEN FELTESSE
4 / 74
spécialisée, d’études de grands cabinets d’audit, de thèses ou mémoires relatifs à la
démarche par composants.
-
Pour les informations relatives au Groupe EDF (entreprise d’accueil pour mon
apprentissage), collecte de l'ensemble des notes internes de doctrine, des documents de
travail et supports de présentation diffusés au sein de l'entreprise, et entretiens avec
des salariés émanant de la Doctrine et de la Comptabilité.
-
A partir des points clés identifiés lors de l'étude du Groupe EDF, rédaction d'un
questionnaire puis entretien physique ou téléphonique avec les équipes comptables ou
doctrinaires des Groupes du benchmark.
-
Collecte des documents de référence des entreprises du benchmark depuis 2003 et
sélection des informations pertinentes relatives aux composants.
Des informations complémentaires et détaillées sur la démarche méthodologique adoptée se
trouvent en Annexe 1.
L’ensemble de ces ressources ainsi qu’une réflexion personnelle ont permis d’aboutir à la
démarche suivante : après un rappel des problématiques comptables liées à la mise en place de
l'approche par composants (chapitre 1), nous nous intéresserons à l’application pratique de la
démarche par certains grands Groupes français appliquant le référentiel IAS/IFRS (chapitre 2).
AURELIEN FELTESSE
5 / 74
CHAPITRE 1 – LES PROBLEMATIQUES LIEES A LA MISE EN
PLACE ET AU SUIVI D’UNE NOUVELLE NORME COMPTABLE
Les objectifs de ce premier chapitre sont multiples.
Tout d’abord, comprendre comment les normes IAS/IFRS ont été mises en place dans les
organisations et avec quels impacts. Nous pourrons ainsi identifier le processus d’intégration
du changement, les paramètres à prendre en compte lors de telles évolutions de
l’environnement de travail, et les acteurs indispensables pour conduire le changement.
Ensuite, grâce à ces premiers éléments, nous pourrons contextualiser la mise en place de
nouvelles normes comptables via l’exemple de l’IAS 16, et plus spécifiquement de l'approche
par composants. Il sera alors utile d’étudier les problématiques liées à la mise en place et au
suivi dans le temps de la démarche.
AURELIEN FELTESSE
6 / 74
I.
PROBLEMATIQUES GENERALES LIEES A LA DECLINAISON
D’UNE NORME COMPTABLE AU SEIN D’UN GROUPE
Cette première section sera l’occasion d’étudier les problématiques qu’ont rencontrées les
entreprises lors de la mise en place des IAS/IFRS entre 2003 et 2005. Nous nous appuierons
principalement sur deux travaux :
-
Le processus de changement comptable normatif : une analyse des pratiques
organisationnelles qui est un manuscrit du GREDEG (Groupe de Recherche en Droit,
Economie, Gestion) de l’Université de Sofia Antipolis rédigé par Annelise CouleauDupont et Samira Demaria en 2009.
-
Le passage aux normes comptables IAS/IFRS : impacts organisationnels sur le
périmètre de la fonction comptable et financière qui est une thèse de doctorat de
l’Université de Paris IX-Dauphine, Mention Sciences de Gestion, présentée et
soutenue par Christian SIMON (03 décembre 2010).
A. COMPORTEMENTS FACE AU CHANGEMENT
Le changement peut être défini comme le passage d’un état A à un autre état B en raison de
facteurs qui font évoluer une situation donnée. La mise en place du référentiel IAS/IFRS entre
2003 et 2005 s’est apparentée à un vrai changement qu’Annelise Couleau-Dupont et Samira
Demaria caractérisent comme « prescrit ». Ce qualificatif est tiré de la typologie d’Autissier et
Moutot1 et se définit comme des mesures prises en réponse à des contraintes de
l’environnement technique ou réglementaire. L’Union Européenne, à l’origine de la
transposition des prescriptions de l’IASB, ayant un pouvoir réglementaire et coercitif les
entreprises concernées n’ont eu d’autre choix que de mettre en œuvre ce nouveau cadre
comptable.
Dans leur manuscrit, A. Couleau-Dupont et S. Demaria dressent, par ailleurs, le constat
suivant : « Devant une situation régie par l’incertitude, tel un changement normatif, les
1
« Méthode de conduite du changement » (2003, Editions Dunod) – Autissier, D., Moutot, J.-M.
AURELIEN FELTESSE
7 / 74
acteurs sont sensibles aux pressions exercées par le contexte institutionnel, ce qui les conduit
à adopter un comportement isomorphique ». En d’autres termes, devant le passage aux
normes IAS/IFRS, les entreprises semblent avoir opté pour les mêmes options, semblent avoir
travaillé par mimétisme afin de « s’assurer de la légitimité de leurs choix ».
C. Simon, dans sa thèse, complète ce constat en indiquant que la révolution a été opérée en
douceur et surtout sous la pression des « groupes d’influence de la communauté comptable
(association, consultants, commissaire aux comptes), [ce qui a façonné] la fonction financière
de manière linéaire ». Ainsi, le benchmark et la veille comptable semblent avoir été deux
outils fortement utilisés pour la mise en œuvre efficace des nouvelles normes.
B. LA NECESSITE D’ACCOMPAGNER LE CHANGEMENT
Comme tout changement, la mise en place d’un nouveau cadre règlementaire doit être menée
de façon structurée. Ainsi, un calendrier doit être élaboré, les impacts étudiés préalablement,
des acteurs clés identifiés, etc.
A ce titre, A. Couleau-Dupont et S. Demaria indiquent que « le changement de pratiques
comptables affecte un groupe de façon transversale, depuis la plus petite filiale jusqu’au siège
social. Les firmes ont été dans l’obligation d’organiser cette migration, d’adapter le Système
d’Information Comptable (SIC), de mettre en conformité le manuel groupe et les états
financiers avec les nouvelles normes. Pour réaliser cette tâche, les groupes ont dû développer
des projets internes mobilisant hommes et ressources ».
On comprend ainsi la réelle nécessité de préparer la conversion le plus en amont possible ; et
cela semble être passé par la mise en place d’équipe projets. Selon la typologie développée
par Gilles Garel, Vincent Giard et Christophe Midler2, le passage aux IFRS s’apparente à un
« projet de gestion d’opérations exceptionnelles, complexes et d’une certaine envergure ». Ce
type de projet est caractérisé par leur non récurrence, leur degré de complexité, une
mobilisation d’acteurs de différents services d’une entreprise, voire d’autres entreprises.
2
« Management de projet et gestion des ressources humaines » (Mai 2001) – Manuscrit du GREGOR de l’IAE
de Paris
AURELIEN FELTESSE
8 / 74
Des deux travaux cités en introduction de cette partie, nous pouvons tirer les conclusions
suivantes sur le processus de migration vers les normes IAS/IFRS.
L’étude de cas longitudinale menée auprès d’un laboratoire vétérinaire mondial coté au
second marché à la Bourse de Paris et les entretiens confirmatoires menées auprès de neuf
...que la conversion aux IAS/IFRS semble s’être faite en plusieurs phases :
- Un pré-diagnostic (2002-2003), destiné à « faire un inventaire de l’existant
pour identifier les écarts entre les pratiques actuelles et les normes IFRS ».
- Un diagnostic (2004, semestre 1), destiné à dresser les impacts comptables
et financiers liés à l’adoption du nouveau référentiel.
Calendrier
du projet
- Une préparation (2004, semestre 2), destinée à analyser « les différences
significatives entre les processus actuels et les nouvelles obligations liées
aux normes IAS/IFRS afin de refondre les procédures et d’adapter les SI ».
- Une conversion (2005-2006), qui consiste en un « déploiement et une mise
en œuvre du nouveau processus de consolidation et des états financiers
modifiés ».
...que la mise en œuvre des IAS/IFRS a été principalement menée par les
Acteurs
du projet
Tab. 2 - Apports de l'étude menée par A. Couleau-Dupont et S. Demaria
grand Groupes français par A. Couleau-Dupont et S. Demaria révèlent...
services consolidation des Groupes. « La structure organisationnelle retenue est
la suivante : un comité de pilotage, un groupe projet, des ateliers par normes ».
révèlent...
...que les travaux consacrés au passage aux IAS/IFRS n’ont été anticipé
Calendrier du
projet
que par 37% de l’échantillon. Presque deux tiers des entreprises de
l’étude ont débuté leurs travaux à partir de 2003. Ce qui semble conforme
aux conclusions présentées ci-dessus.
Accompagnement ...que 80% de l’échantillon a mis en place des formations spécifiques
des acteurs
avec l’aide principalement des BIG4.
AURELIEN FELTESSE
9 / 74
Tab. 3 - Apports de l'étude menée par C. Simon
Les études quantitatives menées par C. Simon auprès de trente Groupes du SBF 120
Les études quantitatives menées par C. Simon auprès de trente Groupes du SBF 120
révèlent... (suite)
...qu’en sus des acteurs internes du projet, 90% des entreprises de
l’échantillon se sont tournées vers des groupes ou organismes
Autres acteurs
du projet
professionnels (tels que le DFCG3 et l’APDC4) ou on assisté à leurs
séminaires spécifiques aux IFRS.
...que 100% des Groupes de l’étude ont fait appel à leurs commissaires
aux comptes pour les aider dans leur démarche de conversion.
C. IMPACTS DE L’APPLICATION DES NORMES IAS/IFRS
Une telle mobilisation de ressources comme nous venons de le souligner vient appuyer le fait
que l’adoption des normes IAS/IFRS a engendré de nombreux bouleversements
organisationnels au sein des Groupes concernées.
1. Impacts d’ordre général
Comme le souligne C. Simon, le rôle des états financiers a évolué et la manière d’enregistrer
en comptabilité les évènements économiques a changé. « L’enregistrement exhaustif des
évènements comptables, l’évaluation au coût historique des actifs, la comptabilisation des
provisions sur la base de risques parfaitement étayés, évalués et documentés, ne suffisent plus
désormais pour obtenir des comptes fiables et probants ».
L’importance donnée à la juste valeur et « à la prise en compte en comptabilité de risques,
d’aléas, de perspectives de développement » rendent obligatoire le rapprochement entre
comptables, contrôleurs de gestion, et opérationnels. Une circulation des informations entre
ces trois métiers semble indispensable pour obtenir des états financiers fiables. Il est donc
désormais nécessaire que ces acteurs « parlent le même langage », partagent les mêmes
codes : que les contrôleurs de gestion intègrent les contraintes normatives dans leurs
3
4
DFCG : Association Nationale des Directeurs Financiers et de Contrôle de Gestion
APDC : Association des Professionnels Directeurs Comptabilité & Gestion
AURELIEN FELTESSE
10 / 74
reporting, que les comptables se rapprochent des contraintes des directions Métier, et que les
opérationnels prennent en compte dans leur quotidien le besoin d’information exprimé par les
comptables ou les financiers.
Enfin, d’autres impacts organisationnels sont à souligner :
-
Les résultats de l’enquête quantitative de C. Simon montre que la moitié des Groupes
de l’échantillon a créé le poste de « Directeur de doctrine comptable » (ou
dénomination « équivalente) suite au passage aux IAS/IFRS.
-
Une enquête menée par KPMG et Cartesis en 2005 « souligne que le passage aux
normes IFRS a eu des répercussions organisationnelles majeures. Ainsi, 69% des
groupes interrogés affirment avoir dû adapter leur logiciel de consolidation et 62% ont
revu les procédures et l’organisation du reporting ». 5
2. Impacts spécifiques liés à l’IAS 16
Si l’on affine maintenant notre niveau d’analyse et que nous nous concentrons sur la norme
« IAS 16 – Immobilisations corporelles », des impacts plus spécifiques sont à noter.
Suite au constat que nous avons fait concernant le rapprochement des comptables avec les
opérationnels, C. Simon va plus loin en ce qui concerne l’IAS 16 indiquant ainsi un transfert
« vers les opérationnels des responsabilités qui étaient antérieurement assumées par des
comptables/fiscalistes. En particulier, l’intervention des opérationnels a été nécessaire
pour (...) valider la durée et le mode d’amortissement des immobilisations, voire chacune des
composantes des immobilisations ».
Par ailleurs, C. Simon note que les modifications les plus importantes du Système
d’Information sont en réalité liées à l'approche par composants, notamment en ce qui
concerne la « ventilation initiale et [la] comptabilisation des remplacements », mais aussi
concernant « les applications de suivi et de gestion des immobilisations ». Les nouvelles
applications doivent pouvoir faire face à une plus grande volumétrie de données liée à une
5
« Les choix d’options comptables lors de la première application des normes IAS/IFRS : Observation et
compréhension des choix effectués par les Groupes Français », thèse de doctorat S. Demaria (Octobre 2008)
AURELIEN FELTESSE
11 / 74
codification plus fine des catégories d’immobilisation, et à l’apparition de nouveaux sousgroupes d’immobilisations.
CONCLUSION SUR PARTIE 1 – CHAPITRE 1
A travers ces premiers paragraphes nous avons pu prendre conscience des bouleversements
engendrés par les IAS/IFRS : changement de philosophie dans la production de l’information
financière, création de nouveaux postes, intensification des échanges entre les acteurs,
transformation des pratiques organisationnelles, etc.
La mise en œuvre du nouveau référentiel s’est appuyée sur des groupes de travail dédiés afin
que chaque norme soit appliquée de la manière la plus fiable. Les objectifs assignés à ces
ateliers ont été notamment de se positionner sur des choix comptables complexes. Concernant
l’approche par composants, ces choix ont été nombreux comme nous allons le voir dans la
prochaine partie.
AURELIEN FELTESSE
12 / 74
II.
PROBLEMATIQUES LIEES A LA MISE EN PLACE ET AU SUIVI
DE L’APPROCHE PAR COMPOSANTS
Après ces premiers paragraphes sur les problématiques générales liées à la mise en place
d’une nouvelle norme comptable, intéressons nous maintenant aux difficultés pratiques
engendrées par l'approche par composants ; dans un premier temps lors de sa mise en place, et
dans un second temps lors du suivi des opérations d’investissements et de désinvestissements.
A. LA
MISE EN PLACE DE L’APPROCHE PAR COMPOSANTS
:
LES
OPTIONS COMPTABLES LAISSEES A LA MAIN DES ENTREPRISES
1. Identification des composants de première catégorie et seuil de
significativité
a. Position comptable
Selon l’annexe 2 de l’avis 2003-E du Comité d’Urgence (09/07/2003), dont les propositions
ont été reprises en grande partie dans le règlement 2003.07 (12/12/2003), il conviendra
d’appliquer une démarche méthodologique particulière pour identifier les composants de
première catégorie.
La première étape est d’ordre technique : « une étude préalable doit être faite par les services
techniques quant aux possibilités de ventilation des éléments principaux en composants et aux
fréquences de renouvellement ».
La seconde étape est d’ordre comptable. Elle consiste en un rapprochement des études
techniques avec l’historique comptable de la société et avec les normes en vigueur. Il s’agira
de vérifier que les propositions de découpage faites par le métier répondent à la définition
d’un composant6. Lors de cette étape, il faudra également étudier quels choix comptables ont
été faits par le passé ; la constitution de provisions pour grosses réparations ou des
remplacements déjà effectués pouvant influencer la décomposition.
6
Voir introduction, Art. 311-2 du PCG.
AURELIEN FELTESSE
13 / 74
Il est important de noter que l’avis 2003-E indique que « suivant la nature de l’activité et son
importance, un élément pourra être considéré comme un composant par une entreprise ou un
Groupe et pas pour une autre selon l’utilisation de l’immobilisation ».
Nous pouvons donc conclure que d’un point de vue comptable une certaine liberté est laissée
à l’entreprise sur ses choix de décomposition. L’avis du CNC comme le règlement :
-
ne se prononcent pas sur des seuils minimum d’identification,
-
ni sur des durées d’amortissement propres à chaque composant,
-
ni ne prescrivent de méthode particulière selon les secteurs d’activité.7
b. Position fiscale
L’administration fiscale prescrit quant à elle des mesures plus strictes sur la méthodologie
d’identification des composants de première catégorie afin de garantir la déductibilité des
amortissements.
Selon le BOI 4 A-13-05 du 30 décembre 2005, un composant ne sera identifié que s’il
« représente un élément substantiel de l’immobilisation ». Pour caractériser cette
substantialité, les entreprises pourront s’appuyer sur trois seuils de significativité. Ces seuils
représentent une « sécurité juridique pour les entreprises, qui ne seront pas tenues de justifier
de l’absence de décomposition des éléments inclus dans les seuils de tolérance ».
Ainsi, le composant :
-
Doit avoir une valeur significative ; c'est-à-dire une valeur unitaire supérieure à
500€. On retrouve ici le seuil de tolérance général relatif aux immobilisations.
-
Doit avoir une valeur relative significative par rapport à l’ensemble de
l’immobilisation ; « les éléments dont la valeur est inférieure à 15% du prix de
revient de l’immobilisation pour des biens meubles et 1% pour les biens
immeubles » peuvent ne pas être identifiés comme des composants.
7
L’avis 2004-11 du CNC apporte toutefois des précisions pour les organismes de logement social. Suite à des
études techniques, l’avis préconise « l’identification d’un nombre minimum de composants correspondant aux
éléments les plus fréquemment renouvelés pour les immeubles comptabilisés à l’actif ».
AURELIEN FELTESSE
14 / 74
-
Doit avoir une certaine importance au regard de l’activité de l’entreprise ; « lorsque
des éléments pris individuellement ne sont pas considérés comme principaux (...)
mais que l’entreprise dispose d’un grand nombre de ces éléments, elle peut
considérer nécessaire d’identifier un composant à raison de l’élément concerné ».
c. Distinction entre erreur comptable et décision de gestion
Comme nous venons de le voir, les entreprises disposent d’une certaine liberté dans le
découpage de leurs actifs immobilisés. Le danger réside alors dans un abus de ce pouvoir de
gestion, pouvant mener à une erreur comptable.
A l’occasion d’une intervention faite par le Club Fiscal de l’Ordre des Experts Comptables8
en juin 2007, le visuel suivant a été présenté.
Fig. 1 - Distinction fiscale entre erreur et décision de gestion
Ces distinctions, qui résultent de la Jurisprudence, permettent d’appréhender les impacts que
peut avoir une décision de gestion prise par l’entité. Ainsi, la Jurisprudence assimile les
8
Le Club Fiscal des Experts-Comptables, créé en 1993 par le Conseil Supérieur de l’Ordre, est une association
dédiée aux experts-comptables qui se trouvent isolés dans le cadre de leur exercice professionnel et veulent
développer une expertise fiscale.
AURELIEN FELTESSE
15 / 74
décisions de gestion irrégulières à des erreurs commises de mauvaise foi9, qui ne pourront être
rectifiées qu’à l’initiative de l’administration dans le cadre d’un contrôle fiscal.
Prenons l’exemple d’une filiale d’un groupe qui cherche à minimiser le résultat qu’elle doit
remonter afin de s’assurer de la perception d’une subvention en N+1 par la société mère. Elle
peut-être tentée de ne pas identifier des composants sur ses immeubles afin de constater le
coût des remplacements en charge ce qui diminuerait fortement son résultat N. Si
l’administration fiscale constate que ces remplacements auraient du faire l’objet de
composant, le groupe pourra être redressé pour cette décision de gestion irrégulière.
Lors de cette même présentation, les intervenants ont indiqué que malgré l’application
obligatoire de l'approche par composants pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier
2005, toutes les entreprises n’ont pas mise en œuvre la démarche :
-
Soit, car celle-ci n’était pas nécessaire au regard des seuils de signification ;
-
Soit, car une analyse détaillée n’a pas pu être menée par faute de temps ;
-
Soit, encore parce que le caractère obligatoire et l’ampleur de la nouvelle
réglementation n’ont pas été correctement appréhendés.
Dans les deux derniers cas, la non-mis en œuvre totale ou partielle de la règlementation pose
un problème lors du « rattrapage » de ces omissions.
 Si celui-ci est imposé par les circonstances (panne accidentelle, changement important
dans l’environnement technique, économique ou juridique), alors ce « rattrapage » sera
assimilé à un simple changement d’estimation (impact prospectif sur les comptes).
 Mais, si c’est l’entreprise qui souhaite reconsidérer la décomposition effectuée (ou son
absence), il s’agira alors d’une correction d’erreur (impact sur les capitaux propres). Les
experts-comptables alertent, par ailleurs, sur le fait que « passé 2006, il sera difficile pour
l’entreprise de se prévaloir d’une erreur. Le choix de ne pas comptabiliser un élément sous
forme de composant sera regardé comme une décision de gestion (irrégulière au plan fiscal
s’il s’agit d’une erreur comptable délibérée). »
9
« Un contribuable est de mauvaise foi à partir du moment où il commet une erreur en étant pleinement
conscient de la commettre : En connaissance de cause, il n’applique pas certains principes du droit fiscal
suffisamment connus ou bien déjà redressé, il persévère dans le même type d’erreur. » Extrait de la présentation
du Club Fiscal de l’Ordre des Experts Comptables (15/06/2007).
AURELIEN FELTESSE
16 / 74
2. Dépenses de première catégorie et reconstitution du coût d’origine
A côté des problématiques d’identification d’un composant que nous venons de voir, une
autre difficulté est à étudier ; c’est celle de l’évaluation du coût historique des composants non
identifiés à l’origine. Une entreprise se trouvera dans cette situation :
-
En cas de changement de méthode de comptable ; en d’autres termes, au moment
de la mise en place de l'approche par composants ;
-
Et en cas de changement d’estimation ; par exemple en cas d’évolution de son
contexte industriel qui va l’obliger à remplacer un composant qu’elle n’avait pas
prévu ou identifié à l’origine.
a. Reconstitution du coût historique lors de la mise en place de l'approche par composants
Comme nous l’avons vu en introduction, la mise en place de l’approche par composants
constitue un changement de méthode comptable. Selon les référentiels nationaux (Art. 314-1
du PCG) comme internationaux (IAS 8), ce type de changement a un impact rétrospectif sur
les comptes ; en d’autres termes, les nouvelles règles doivent être appliquées comme si elles
avaient toujours été appliquées par le passé. Pour cela, l’impact des changements est imputé
sur les capitaux propres et l’entité doit émettre des comptes pro forma afin d’assurer une
bonne lisibilité de l’information financière.
Cependant, pour ce qui concerne la première application de la démarche par composants, une
application prospective ou rétrospective des impacts pourra être utilisée selon la méthode de
reconstitution du coût historique qu’aura choisi l’entité (Avis n°2003-E du CU du CNC).
Nous allons décrire chacune des méthodes, pour lesquelles un exemple chiffré est disponible
en Annexe 1 de ce mémoire.
Méthode 1 – Reconstitution du coût historique amorti
Cette méthode consiste à reconstituer le coût réel historique des composants ainsi que les
amortissements qui auraient dû être appliqués. Cette reconstitution peut se faire :
AURELIEN FELTESSE
17 / 74
-
Soit, à partir des factures d’origine, ou afférentes au dernier remplacement. Il
conviendra alors de rechercher ces factures, de porter les montants des différents
composants à l’actif du bilan, puis de recalculer les amortissements sur ces valeurs
en fonction de la date d’acquisition et des nouvelles durées d’utilisation. A moins
qu’il y ait déjà eu des remplacements de composants, la valeur d’origine de
l’immobilisation ne peut être modifiée (aucune augmentation ou diminution de la
valeur brute inscrite à l’actif).
-
Soit, à défaut, à partir d’une décomposition en fonction de la répartition du coût
actuel. A partir de données techniques, les entreprises pourront ventiler les valeurs
brutes des immobilisations entre structure et composants selon la répartition du coût
actuel d’immobilisations récentes et similaires. Ces valeurs pourront être pondérées
par des coefficients traduisant les variations de conditions économiques et
d’évolutions techniques.
Pour conclure, il est important de noter que cette méthode rétrospective est compatible avec le
référentiel français et le référentiel IFRS.
Méthode 2 – Réallocation des valeurs comptables
La méthode de réallocation des valeurs comptables consiste à ventiler les valeurs nettes
comptables des immobilisations (contrairement à une ventilation des valeurs brutes que nous
avons vue dans la méthode 1). En prenant pour point de départ les VNC actuelles, on se rend
compte du caractère mixte de la méthode. En effet, celle-ci est à la fois rétrospective (au
niveau de la reconstitution des composants), et prospective (au niveau du calcul des
amortissements postérieurs à la date du changement). Sans impact sur les capitaux propres,
cette méthode plus simple à mettre en œuvre est toutefois incompatible avec IFRS 1.
Méthode 3 – Evaluation des actifs à la juste valeur
Cette troisième et dernière méthode consiste à déterminer le coût d’origine des composants en
utilisant la juste valeur de l’actif à la date de première application de l'approche par
AURELIEN FELTESSE
18 / 74
composants. La juste valeur fait ensuite l’objet d’une ventilation entre les différents
composants. Dans cette méthode, il n’y a pas de recalcul des amortissements constatés lors
des exercices précédents. L’impact qu’il pourrait y avoir sur les capitaux propres ne
découlerait que des variations de juste valeur qui pourraient être constatées.
Les justes valeurs constituent alors les nouvelles valeurs servant de base au calcul des
amortissements ; elles sont amorties sur les durées résiduelles restant à courir.
Il est important de noter que cette méthode est incompatible avec la règlementation française
qui ne reconnaît que les réévaluations globales de l’ensemble des immobilisations corporelles
et financières (Art. 350-1 du règlement 99-03 du CRC). Or, il s’agit ici d’une réévaluation
partielle.
Synthèse
En conclusion, ce tableau permet de résumer les options autorisées selon les référentiels :
Reconstitution du coût historique amorti :
- A partir des factures d'origine ou afférentes
au dernier remplacement
- A partir du coût actuel à neuf
Réallocation des
valeurs comptables
Evaluation des actifs à
la juste valeur
Référentiel français
AUTORISEE
AUTORISEE
Interdite
Référentiel IFRS
AUTORISEE
Interdite
AUTORISEE
Tab. 4 - Options offertes pour la reconstitution du coût amorti
Nous pouvons ainsi en déduire que la première méthode semble en pratique la plus simple
pour les Groupes français consolidés. Mais d’autres facteurs peuvent être pris en compte lors
du choix de la méthode ; un tableau plus détaillé des principales différences entre chacune des
méthodes est disponible en Annexe 2.
Enfin, comme le souligne le BOI 4 A-13-05 (30/12/2005) il ne faut pas oublier de considérer
les autres éléments du prix d’acquisition tels que « les frais d’acquisition ou les coûts des
emprunts [qui] devraient en principe (...) être affectés distinctement aux composants et à la
structure du bien décomposé (...) par affectation directe. Il sera cependant admis, par
simplification, que ces frais soient affectés à proportion de la valeur de chaque élément ».
AURELIEN FELTESSE
19 / 74
b. Reconstitution du coût historique pour les composants non identifiés à l’origine
Principes relatifs aux composants non identifiés à l’origine
Selon l’article 321-14-2 du PCG, « un composant séparé, qui n’a pas été identifié à l’origine,
doit l’être ultérieurement (...), y compris pour les dépenses d’entretien faisant l’objet de
programmes pluriannuels de gros entretien ou grandes révisions10». A noter que, l’IAS 16
adopte la même vision que le référentiel français.
Par conséquent, lorsqu’un nouveau composant sera identifié sur une immobilisation déjà mise
en service, il faudra reconstituer son coût historique (selon la méthode choisie par l’entité),
distinguer le composant dans le fichier des immobilisations afin de lui assigner un plan
d’amortissement propre qui courra jusqu’à la date de remplacement prévisionnelle.
Reconstitution du coût historique
Dans cette situation, l’entreprise va devoir faire un « rattrapage » du passé, c'est-à-dire
découper une immobilisation corporelle en composants dont elle n’a peut être pas forcément
les valeurs historiques individuelles.
L’IAS 16 indique à ce titre que « s’il n’est pas praticable pour une entité de déterminer la
valeur comptable de la partie remplacée, elle peut utiliser le coût de remplacement comme
indication de ce que le coût de la partie remplacée était au moment de son acquisition ou de sa
construction ». L’article 321-14-2 du PCG va dans le même sens puisqu’il indique que pour
les dépenses de seconde catégorie, notamment « le coût estimé (...) futur et identique, peut
être utilisé pour évaluer le coût du composant existant (...) ».
Nous verrons dans le second chapitre de ce mémoire qu’en pratique, la reconstitution du coût
historique de composants non identifiés à l’origine est assez complexe, notamment pour les
immobilisations dont les durées de vies s’étendent sur plusieurs décennies.
10
En normes françaises, cette option est permise seulement si aucune provision pour gros entretien ou grande
révision n’a été constatée.
AURELIEN FELTESSE
20 / 74
3. Dépenses de seconde catégorie et choix comptables et fiscaux
A côté des composants qui ont une substance physique, une matérialité et qui sont liés à des
dépenses de remplacement, les référentiels nationaux et internationaux identifient une autre
famille de composants appelés « dépenses de seconde catégorie ». Selon les textes, ces
éléments n’ont pas la même définition, et surtout peuvent ne pas être comptabilisés de la
même façon. Nous allons voir dans cette partie quels sont les choix de comptabilisation
offerts par les différents textes comptables et fiscaux, pour ensuite analyser un exemple, et
ainsi conclure sur les conséquences du mode de comptabilisation retenu.
a. Exposé des dispositions comptables et fiscales

Comme nous l’avons vu en introduction, l’IAS 16 désigne les dépenses de seconde catégorie
sous l’appellation « inspections majeures » et les définit comme tel :
« La poursuite de l'exploitation d'une immobilisation corporelle (...) peut être
soumise à la condition de la réalisation régulière d'inspections majeures destinées à
identifier d'éventuelles défaillances, avec ou sans remplacement de pièces
(...) Lorsqu’une inspection majeure est réalisée, son coût est comptabilisé dans la
valeur comptable de l’immobilisation corporelle à titre de remplacement, si les
critères de comptabilisation sont satisfaits. Toute valeur comptable résiduelle du coût
de la précédente inspection (distincte des pièces physiques) est décomptabilisée. »
Il ressort de cet extrait que pour les groupes soumis aux IFRS, les dépenses périodiques
permettant de contrôler le fonctionnement d’immobilisations corporelles doivent être
comptabilisées à l’actif de leurs comptes consolidés en tant que composant de
l’immobilisation concernée. Aucun autre traitement n’est possible.

L’article 311-2 du Plan Comptable Général (PCG), pour qui les dépenses de seconde
catégorie sont appelées « dépenses pour gros entretien ou grandes révisions » indique ceci :
« Les dépenses d’entretien faisant l’objet de programmes pluriannuels de gros
entretien ou de grandes révisions en application de lois, règlements ou de pratiques
constantes de l’entité, doivent être comptabilisées dès l’origine comme un
composant distinct de l’immobilisation, si aucune provision pour gros entretien ou
AURELIEN FELTESSE
21 / 74
grandes révisions n’a été constatée. Sont visées, les dépenses d’entretien ayant pour
seul objet de vérifier le bon état de fonctionnement des installations et d’y apporter
un entretien sans prolonger leur durée de vie au delà celle prévue initialement, sous
réserve de répondre aux conditions de comptabilisation de l’article 311-1 ».
A la lecture de cet article du PCG, nous pouvons conclure que la législation comptable
française est beaucoup plus précise lorsqu’elle définit les dépenses de seconde catégorie
puisqu’elle impose un certain nombre de critères cumulatifs. Cependant, dans leurs comptes
sociaux, les entreprises françaises peuvent opter pour une comptabilisation de ces dépenses
soit à l’actif, via un composant, soit au passif, via une provision.
Comme pour toutes les autres divergences entre normes françaises et normes IFRS, les
entreprises peuvent choisir des options différentes dans leurs comptes sociaux et dans leurs
comptes consolidés.

Enfin, bien que les dispositions du Bulletin Officiel des Impôts (BOI) 4 A-13-05 du 30
décembre 2005 s’inscrivent dans un objectif de « maintenir la connexion entre les règles
fiscales et comptables », pour l’administration fiscale :
« Ces dépenses d’entretien doivent demeurer des charges (...). Pour cette raison, la
durée d’amortissement des composants de « seconde catégorie » identifiés lors de
l’acquisition ou de la création de l’immobilisation (...) à laquelle ils se rattachent ne
doit pas être différente de celle de cette immobilisation. Dès lors, dans l’hypothèse
où l’entreprise aura choisi de considérer ces dépenses comme un composant, les
dotations excédentaires qui auront été constatées sur le plan comptable devront être
réintégrées extracomptablement.
(...) Pour les entreprises ayant opté pour la comptabilisation de ces dépenses sous la
forme d’une provision pour gros entretien, cette provision sera admise en déduction
dans les mêmes conditions que les anciennes provisions pour grosses réparations ».
Ces dispositions fiscales ajoutent donc encore une complexité lors du suivi de l’approche par
composants. Si l’entreprise ne souhaite pas de divergence de traitement entre comptes sociaux
et comptes consolidés, elle devra gérer une problématique fiscale. A l’inverse, si elle ne
souhaite pas avoir à suivre des retraitements fiscaux lourds, elle devra gérer une divergence
entre la comptabilité sociale et consolidée ; ce qui peut notamment engendrer des complexités
de suivi dans le système d’information.
AURELIEN FELTESSE
22 / 74
Nous pouvons donc conclure sur les options de traitement des dépenses de seconde catégorie
par ce tableau récapitulatif :
Référentiel IFRS
Composant
(Actif)
Référentiel PCG
Dispositions fiscales
Les amortissements sont déductibles à hauteur
de la provision qui aurait pu être constatée.
Obligatoire
Option comptable
Provision
(Passif)
Les dotations sont déductibles, et les reprises
imposables.
Interdite
Tab. 5 - Options offertes pour la comptabilisation des dépenses de seconde catégorie
Afin de mieux appréhender les impacts des différents modes de comptabilisation, il semble
pertinent d’exploiter un exemple concret.
b. Exemple comparatif : les conséquences du mode de comptabilisation
Pour cet exemple, nous partirons des hypothèses de l’exemple proposé par le BOI 4 A-13-05
du 30 décembre 2005. Nous allons toutefois modifier et compléter cet exemple afin de
pouvoir mener une analyse comparative pertinente.
Enoncé
Soit une entreprise A qui acquiert début N une immobilisation corporelle pour un prix
d’acquisition de 1 500 K€. La durée d’utilisation prévue est de 10 ans, pour une durée d’usage
identique. Ce bien nécessitera une dépense de gros entretien à mi-vie dont le montant évalué à
la date d’entrée du bien est de 200 K€ (les travaux seront réalisés début N+5).
Par hypothèse, ce composant d’entretien est rattaché à la structure du bien décomposé.
Nous allons voir comment cette immobilisation sera comptabilisée dans les comptes :
-
Consolidés établis selon les normes IFRS, puis dans les comptes
-
Sociaux établis selon les normes françaises. A cette occasion nous étudierons les deux
options permises par le référentiel français concernant les composants de 2nde catégorie.
Afin de pouvoir suivre la divergence de traitement entre les comptes sociaux et les comptes
consolidés, la lettre :
-
F (pour normes françaises) précèdera chaque numéro de compte dans les comptes
sociaux, et la lettre
-
I (pour normes IFRS) précèdera chaque numéro de compte dans les comptes consolidés.
AURELIEN FELTESSE
23 / 74
COMPTES CONSOLIDES SELON LES NORMES IFRS
Dans les comptes consolidés, l’entreprise n’a pas d’autre choix que d’enregistrer ces dépenses
à l’actif par le biais d’un composant de seconde catégorie. Ainsi, lors de la mise en service du
bien, c’est l’écriture suivante qui sera enregistrée :
I215x1
Installations techniques, matériels et outillage industriels (structure)
1300
I215x2
Installations techniques, matériels et outillage industriels (composant)
200
404x
Fournisseurs d'immobilisation
1500
Et les plans d’amortissement seront ceux-ci :
Structure
N
N+1
N+2
N+3
N+4
N+5
N+6
N+7
N+8
N+9
Dotation
130
130
130
130
130
130
130
130
130
130
Cumul
130
260
390
520
650
780
910
1040
1170
1300
VNC
1170
1040
910
780
650
520
390
260
130
0
Composant
N
N+1
N+2
N+3
N+4
Dotation
40
40
40
40
40
Cumul
40
80
120
160
200
VNC
160
120
80
40
0
Début N+5, lorsque la dépense de gros entretien survient, elle est immobilisée et la VNC du
composant remplacé est sortie de l’actif. Un plan d’amortissement spécifique est établi sur la
durée de vie résiduelle.
Composant
N
N+1
Dotation
40
40
40
Cumul
40
80
120
VNC
160
120
80
40
AURELIEN FELTESSE
N+2
N+3
N+4
N+5
N+6
40
40
40
40
40
40
40
160
200
40
80
120
160
200
0
160
120
80
40
0
24 / 74
N+7
N+8
N+9
COMPTES SOCIAUX SELON LES NORMES FRANÇAISES ET RETRAITEMENTS FISCAUX
Hypothèse 1 : L’entreprise opte pour l’enregistrement d’une provision
Dans les comptes sociaux, en optant pour une comptabilisation au passif des dépenses de gros
entretien, c’est l’écriture suivante qui sera enregistrée lors de la mise en service du bien :
F215
Installations techniques, matériels et outillage industriels
404x
1500
Fournisseurs d'immobilisation
1500
Et le plan d’amortissement de l’immobilisation sera celui-ci :
Structure
N
N+1
N+2
N+3
N+4
N+5
N+6
N+7
N+8
N+9
Dotation
150
150
150
150
150
150
150
150
150
150
Cumul
150
300
450
600
750
900
1050
1200
1350
1500
VNC
1350
1200
1050
900
750
600
450
300
150
0
C1
N
N+1
N+2
N+3
N+4
ParDotation
ailleurs, dans
cette100
hypothèse,
de N100
à N+4, 100
l’entreprise constatera l’écriture suivante :
100
100
Cumul
F681x
VNC
F1572
100
200
300
Dotations
aux
provisions
- Gros 400
entretien 500
400
300
200
100
0
Provisions pour gros entretien ou grandes révisions (200 / 5)
40
40
En N+5, les dépenses de gros entretien seront constatées en charge et la provision sera reprise.
F6152
Entretien et réparation sur biens immobiliers
F401x
F1572
200
Fournisseurs
200
Provisions pour gros entretien ou grandes révisions
F781x
200
Reprises sur provisions - Gros entretien
200
Il n’y a dans cette hypothèse aucun retraitement fiscal à faire. Les dotations liées à la
provision pour gros entretien sont déductibles, et la reprise de N+5 est imposable.
N
N+1
N+2
N+3
N+4
N+5
N+6
N+7
N+8
N+9
Dotation aux
amortissements
Structure
-150
-150
-150
-150
-150
-150
-150
-150
-150
-150
-1500
Provisions pour
réparation
Dotation
Reprise
-40
-40
-40
-40
-40
200
-200
AURELIEN FELTESSE
200
Dépenses
Résultat
d'entretien comptable
-200
-200
-190
-190
-190
-190
-190
-150
-150
-150
-150
-150
-1700
25 / 74
Retraitement fiscaux
Résultat
fiscal
-190
-190
-190
-190
-190
-150
-150
-150
-150
-150
-1700
Hypothèse 2 : L’entreprise opte pour l’enregistrement d’un composant
Dans cette hypothèse, il n’y a plus de divergence entre comptes sociaux et comptes
consolidés ; l’entreprise enregistre le composant dans les deux jeux de comptes.
→ Le traitement est identique à celui présenté pour les comptes consolidés.
Mais, comme l’administration fiscale ne reconnaît pas la comptabilisation comme composant
des dépenses de seconde catégorie, le composant ne peut faire l’objet d’un plan
d’amortissement propre. Des retraitements fiscaux sont donc à opérer.
Réintégration du sur-amortissement lié à l’indentification du composant de 2e catégorie
En fiscalité, la durée d’amortissement du composant ne doit pas être différente de la durée
d’usage de la structure (10 ans). Le montant de 200 K€ doit donc être amorti sur 10 ans ; soit
une dotation annuelle déductible fiscalement de 20 K€. De N à N+4, l’entreprise doit donc
opérer une réintégration extracomptable de 20 K€ (40 – 20).
Remplacement du composant
Lors du remplacement du composant, d’un point de vue fiscal, il convient de :
-
Réintégrer la VNC du composant ; ici égale à 0.
-
Déduire extracomptablement la valeur brute du composant remplaçant, ici 200 K€.
De plus, l’amortissement de la valeur brute du composant remplaçant au titre des années N+5
à N+9 ne peut être admis en déduction. Il conviendra ainsi d’opérer une réintégration
extracomptable pour le montant de l’amortissement (200 / 5 = 40).
Toutefois, le BOI 4 A-13-05 admet que l’amortissement non déductible du composant
d’origine (soit 5 x 20 = 100) vienne minorer le montant de cette réintégration de manière
étalée sur la durée résiduelle d’amortissement fiscal de la structure (ici, 5 ans).
→ La réintégration n’est donc plus que de 20 (soit 40 – 20).
AURELIEN FELTESSE
26 / 74
Dotation aux amortissements
Structure
(A)
N
N+1
N+2
N+3
N+4
N+5
N+6
N+7
N+8
N+9
-130
-130
-130
-130
-130
-130
-130
-130
-130
-130
-1300
Retraitement fiscaux
Dépenses
Déduction
Résultat Amortissement Réintégration Minoration de
Composant d'entretien comptable fiscalement
du surextracomptable
la réintégration
déductible amortissement
du nouveau
(B)
(C)
(D)
(E)
(F)
composant
-40
-40
-40
-40
-40
-40
-40
-40
-40
-40
-400
-170
-170
-170
-170
-170
-170
-170
-170
-170
-170
-1700
-20
-20
-20
-20
-20
20
20
20
20
20
40
40
40
40
40
300
-100
-20
-20
-20
-20
-20
-100
-200
-200
Résultat
fiscal
-150
-150
-150
-150
-150
-350
-150
-150
-150
-150
-1700
(A)
Amortissement de la structure sur 10 ans.
(B)
Amortissement du premier composant de 200 K€ de N à N+4, puis du second composant de 200 K€
également de N+5 à N+9.
(C)
L'entretien réalisé en N+5 est enregistré à l'actif du bilan, et non au compte de résultat.
(D)
La durée d’amortissement du composant ne doit pas être différente de la durée d’usage de la structure (10 ans),
soit un amortissement fiscalement déductible de 200 K€ / 10.
(E)
Différence entre l'amortissement enregistré en comptabilité et l'amortissement fiscalement déductible (40 - 20
de N à N+4, puis 40 - 0 de N+5 à N+9).
(F)
L’amortissement non déductible du composant d’origine (100), vient minorer la réintégration de manière étalée
sur la durée résiduelle d’amortissement fiscal de la structure (5 ans).
La fraction du prix d’acquisition de la structure considérée comme un composant de seconde
catégorie a bien été amortie fiscalement sur 10 ans (à raison de 20 K€ par an de N à N+9), et
les charges d’entretien ont bien été déduites fiscalement au moment où elles ont été engagées.
Conclusion sur l’exemple
Les deux courbes montrent le résultat comptable de l’entreprise selon la méthode choisie. La
courbe rouge (composant) montre bien que le coût total de l’actif a été linéarisé sur sa durée
d’utilisation (- 170 sur toute la période).
A l’inverse, la courbe bleue (provision)
-130
N
N+1 N+2 N+3 N+4 N+5 N+6 N+7 N+8 N+9
-140
permet de comprendre que cette option
est plus avantageuse fiscalement, car
elle permet de déduire plus vite les
-160
dépenses relatives à l’actif. Toutefois,
-170
chacune des deux méthodes présente
-150
-150
-150
-170
-170
-180
des complexités lourdes que celles-ci
soient d’ordre informatique ou fiscal.
-190
-190
-190
-200
Fig. 2 - Résultat comptable selon mode de comptabilisation choisi
AURELIEN FELTESSE
27 / 74
c. Conclusions sur les conséquences de la comptabilisation en composant ou en provision
des dépenses de seconde catégorie
A travers l’exemple étudié, nous avons pu déjà tirer quelques conclusions rapides ; il s’agit
maintenant de les approfondir grâce aux apports d’un mémoire présenté en 2007 pour
l’obtention du Diplôme d’Expertise Comptable par Christine Dorange. Cette dernière aborde
l’approche par composants à travers la problématique suivante : De la provision pour gros
entretien et grandes révisions à la mise en œuvre d’une approche par composant : un cadre
règlementaire structurant pour le passage aux normes internationales. Application au cas
particulier du matériel roulant ferroviaire.
A la fin de sa première partie relative au rappel du cadre règlementaire, l’auteur conclut sur
les conséquences à prendre en compte lors du choix d’une comptabilisation en composant ou
en provision des dépenses de seconde catégorie.
Selon elle, la première conséquence est d’ordre économique et financière. En effet, l’auteur
démontre à travers un exemple que la comptabilisation par une provision des dépenses de gros
entretien et grandes révisions « permet d’anticiper les dépenses d’entretien et donc de les
déduire plus rapidement ». La comptabilisation via une provision est donc plus éloignée de la
réalité économique, mais présente un avantage en termes de trésorerie : une diminution de
l’impôt via la déductibilité des dotations lors du calcul du résultat fiscal.
La seconde conséquence concerne l’organisation comptable. Lorsque l’entreprise opte pour la
comptabilisation en provisions des dépenses de gros entretien et grandes révisions, elle va
devoir gérer une divergence de traitement comptable entre les composants de première
catégorie et ceux de seconde catégorie. Selon l’auteur, cette situation présente « un risque de
confusion sur le terrain pour bien distinguer les opérations (imputations des heures de main
d’œuvre) ». Cette situation peut encore se complexifier si pour l’établissement des comptes
consolidés l’entreprise est soumise aux normes IFRS, selon lesquelles la comptabilisation
d’une provision pour les dépenses de seconde catégorie est interdite. Ainsi, elle devra gérer
une divergence supplémentaire, ce qui nécessite « un suivi comptable plus élaboré puisque
plusieurs systèmes de comptabilisation sont appliqués pour des [mêmes] dépenses de
travaux ».
AURELIEN FELTESSE
28 / 74
La troisième conséquence que note l’auteur concerne la fiscalité. En effet, comme nous
l’avons vu, l’administration fiscale n’admet pas la déductibilité des charges d’amortissement
lorsque les dépenses de seconde catégorie sont enregistrées comme un composant ; ce qui a
pour effet d’augmenter le résultat fiscal, et donc l’impôt qui y est attaché. Les entreprises
doivent donc être en capacité de mesurer l’impact fiscal de leur choix comptable.
Enfin, l’auteur recommande, en sus de l’étude d’optimisation fiscale que nous venons de
mentionner, qu’une étude d’impact sur les systèmes d’information soit menée. En effet, la
gestion d’une divergence de normes nécessite une adaptation de l’outil informatique afin de
pouvoir suivre et gérer les écarts de traitements. L’auteur donne l’exemple de la difficulté
suivante : si une entreprise a retenu la méthode rétrospective de calcul du coût pour les
comptes consolidés et la méthode prospective pour les comptes sociaux elle devra gérer des
valeurs brutes différentes et donc des amortissements distincts.
AURELIEN FELTESSE
29 / 74
B. LE SUIVI DE L’APPROCHE PAR COMPOSANTS
A travers les trois derniers paragraphes que nous venons d’étudier, nous avons pu
appréhender les problématiques auxquelles sont confrontées les entreprises lors de la mise en
place de l'approche par composants. Il convient de s’intéresser maintenant au suivi de cette
démarche dans le temps. En effet,
-
Le périmètre des composants peut évoluer dans le temps (§1),
-
La gestion des composants transforme durablement les rapports organisationnels (§2),
-
Et peut faire l’objet de contrôles légaux des commissaires aux comptes (§3).
1. Gestion du périmètre des composants : dispositions théoriques11
Comme énoncé précédemment, les entreprises peuvent être amenées à identifier des
composants sur des immobilisations déjà mises en service. Cette possibilité découle du
référentiel IAS/IFRS, mais aussi du référentiel national.
En effet, le paragraphe 51 de l’IAS 16 indique que « la valeur résiduelle et la durée d'utilité
d'un actif doivent être révisées au moins à chaque fin de période annuelle et, si les attentes
diffèrent par rapport aux estimations précédentes, les changements doivent être comptabilisés
comme un changement d'estimation comptable selon IAS 8 ».
Et le règlement 2002-10 du CRC (12/12/2002), indique que « toute modification significative
de l’utilisation prévue, par exemple durée ou rythme de consommation des avantages
économiques (...), entraîne la révision prospective de son plan d’amortissement ».
Par conséquent, les entreprises doivent s’interroger régulièrement sur les durées
d’amortissement de leurs immobilisations et peuvent ainsi être amenées à élargir le périmètre
des composants, c'est-à-dire à identifier de nouvelles familles de composants. C’est une
réflexion quasi-permanente que doivent mener les entreprises afin de créer de nouveaux
composants dès l’apparition de nouvelles contraintes économiques, techniques ou encore
règlementaires, et ainsi respecter les normes en vigueur.
11
Cette problématique sera abordée sous un angle pratique dans la cadre du chapitre 2.
AURELIEN FELTESSE
30 / 74
2. L’évolution des rapports organisationnels comptables / opérationnels
Dans un mémoire présenté en 2005 pour l’obtention du Diplôme d’Expertise Comptable,
Guylène Vallée aborde l’approche par composants à travers la problématique suivante : La
comptabilisation du grand entretien dans le secteur de l'aéronautique : la nécessaire
évolution des normes françaises dans le cadre de la convergence vers les normes
internationales.
Ce mémoire très technique sur le plan industriel est toutefois tourné vers un objectif
intéressant ; en effet, l’auteur note que : « Après la phase de réflexion pour redéfinir les
composants à activer (…), l’aventure comptable ne s’arrête (…) pas là : il faut faire vivre
l’approche par composants au quotidien ».
L’auteur du mémoire souligne ainsi que l’approche par composants nécessite : « (…) la mise
en place de nouvelles procédures pour assurer la remontée des informations tout au long de la
vie des composants et surtout de l’immobilisation à laquelle ils sont rattachés ». Est ainsi fait
le constat que les opérationnels, et les informations qu’ils communiquent aux services
comptables, prennent une place de plus en plus importante pour assurer la fiabilité de
l’information financière.
Dans le mémoire de Christine Dorange présenté en 2007 (voir chapitre 1, partie II, section A,
paragraphe 3, sous paragraphe c.), l’auteur conclut son travail sur le constat suivant : « On
assiste corrélativement à la mise en commun des connaissances des comptables et des
techniciens, à la mise en place de nouveaux modes de fonctionnement entre les différents
acteurs et à l’adaptation des règles écrites internes. »
Comme nous allons le voir dans le prochain chapitre, ce constat est encore valable
aujourd’hui en 2014. La comptabilité devant refléter au mieux les complexités industrielles,
les équipes comptables doivent s’adapter et élargir leur champ de connaissances.
AURELIEN FELTESSE
31 / 74
3. Proposition de guides méthodologiques pour les contrôles légaux liés
aux dépenses de gros entretien et grandes révisions
Dans son mémoire de 2007, Christine Dorange se concentre principalement sur les
composants de seconde catégorie et cherche à proposer un guide de contrôle de ces dépenses
au traitement particulier. Il est en effet important de comprendre l’importance de la correcte
application de l'approche par composants : il ne s’agit pas d’une démarche purement interne à
l’organisation dans la mesure où les commissaires aux comptes sont très sensibles au respect
du cadre normatif en vigueur.
L’apport de ce mémoire à la profession comptable réside dans la dernière partie, où l’auteur
propose des guides de contrôle des dépenses de seconde catégorie selon l’option comptable
choisie (provision ou composant).
L’auteur propose ainsi un certain de nombre de questions que doit se poser l’auditeur lors de
l’étude des dépenses de gros entretien et grandes révisions. Si le mode de comptabilisation
choisi est celui des composants, l’auditeur doit contrôler le périmètre des opérations et leur
évaluation, les durées d’amortissement retenues, il doit également recalculer les valeurs nettes
comptables, et mener un certain nombre de tests concernant le système d’information.
Pour chacune de ces thématiques, l’auteur du mémoire indique :
-
Les informations généralement recherchées par les auditeurs, et
-
Les contrôles possibles ou les moyens de se procurer l’information.
A titre d’exemple, pour les tests liés aux durées d’amortissement, les informations
généralement recherchées par les auditeurs relatives aux durées d’utilité des composants du
matériel roulant ferroviaire sont les suivantes :
Fig. 3 - Audit sur composants : Informations généralement recherchées par les auditeurs
AURELIEN FELTESSE
32 / 74
Ces informations peuvent être obtenues par les auditeurs selon les moyens suivants :
Fig. 4 - Audit sur composants : les moyens de se procurer l'information
Si le mode de comptabilisation choisi est celui des provisions, l’auditeur doit contrôler le
périmètre, la programmation et le coût des opérations en sus de mener un certain nombre de
tests concernant le système d’information. Les contrôles liés aux provisions étant moins
importants (dans le cadre de ce mémoire), l’exemple relatif à la programmation des opérations
se trouve en annexe 3.
AURELIEN FELTESSE
33 / 74
CONCLUSION SUR PARTIE 2 – CHAPITRE 1
A travers cette seconde partie nous avons pu appréhender les différents défis que les
entreprises ont rencontrés lors de la mise en place de l’approche par composants. Comment
identifier les composants, comment reconstituer leur coût d’origine, comment comptabiliser
les dépenses de gros entretiens et grandes révisions sont autant de questions pour lesquelles
nous avons exposés les dispositions légales. Après, à chaque entreprise de justifier ses choix.
Cette seconde partie a été également l’occasion d’aborder la problématique du suivi de
l'approche par composants. Appliquer une telle démarche n’est pas une technique purement
comptable, elle touche l’ensemble de l’entreprise : directions métier, finance, informatique.
Les rapports organisationnels s’en trouvent ainsi modifiés, obligeant (ou permettant ?) une
plus grande communication entre les services.
Les bases conceptuelles liées à l'approche par composants étant posées, nous
pouvons maintenant nous concentrer sur l’application pratique de la démarche
dans certains grands Groupes Français.
AURELIEN FELTESSE
34 / 74
CHAPITRE 2 – L’APPROCHE PAR COMPOSANTS DANS LES
GROUPES FRANÇAIS – EXEMPLES ET BONNES PRATIQUES
Dans ce second chapitre, nous allons maintenant nous concentrer sur des données empiriques.
A travers l'étude des pratiques et de la méthodologie développée par EDF SA12, nous
chercherons à mener une analyse comparative. Grâce aux informations fournies par les
entreprises du benchmark13 nous pourrons mettre en avant certaines différences ou similarités
ainsi que certaines bonnes pratiques.
Pour rappel, les équipes doctrinaires ou comptables des entreprises suivantes ont pu être
rencontrées et interrogées sur leurs pratiques en matière de gestion des composants : SNCF,
Areva, Orange, Air France et La Poste.
Ce chapitre s'organisera autour de quatre sections nous permettant d’aborder successivement :
-
La description de notre cas d’étude,
-
La gestion de l'approche par composants au quotidien au sein des Groupes,
-
Les problématiques liées au suivi de la démarche dans le temps, et enfin
-
Les limites pratiques de l'approche par composants et les facteurs clés de succès.
12
Dans ce chapitre nous utiliserons le terme « Groupe EDF » lorsqu’il s’agit de données en provenance du
document de référence, et le terme « EDF SA » pour les informations spécifiques à l'approche par composants.
En effet, les différentes informations de ce mémoire sur les composants s’appliquent aux moyens de production
d’EDF SA (thermique, nucléaire et hydraulique).
13
Dans ce chapitre nous désignerons par le terme « benchmark » les entreprises interrogées hors EDF. Le terme
« cas d’étude » regroupera les entreprises du benchmark et EDF.
AURELIEN FELTESSE
35 / 74
DESCRIPTIF DU CAS D’ETUDE
I.
Dans cette première partie nous allons présenter les entreprises qui composent notre cas
d’étude en termes d’activités et d’application de l'approche par composants. Nous nous
attacherons ici aux seules informations contenues dans les documents de référence et nous
nous intéresserons successivement :
-
A EDF SA qui servira de référence principale, et qui pourra être comparé...
-
...aux entreprises de notre benchmark : SNCF, Areva, Orange, Air France et La Poste.
A. EDF SA ET L'APPROCHE PAR COMPOSANTS
1. Présentation du Groupe EDF
Le document de référence 2013 du Groupe EDF présente le Groupe comme « un énergéticien
intégré, présent sur l’ensemble des métiers de l’électricité : la production nucléaire,
renouvelable et fossile, le transport, la distribution, la commercialisation, les services
d’efficacité et de maîtrise de l’énergie, ainsi que le négoce d’énergie.
Il est l’acteur principal du marché français de l’électricité et détient des positions fortes en
Europe (Royaume-Uni, Italie, pays d’Europe centrale et orientale) qui en font l’un des
électriciens leader dans le monde et un acteur gazier reconnu ».
CA 2013
EBE 2013
Résultat global 2013
75.6 Mrd€ (+ 4 %)
16.8 Mrd€ (+ 5 %)
3.5 Mrd€ (+ 7 %)
Fig. 5 - Indicateurs financiers clés d'EDF (2013)
En France, les principaux modes de production d’EDF proviennent des énergies nucléaire,
thermique et hydraulique. En tant qu’entreprise industrielle, la gestion des installations de
production du Groupe EDF représentent un enjeu majeur ; le suivi et la planification des
investissements sont donc indispensables pour le Groupe.
AURELIEN FELTESSE
36 / 74
Le tableau ci-dessous donne un certain nombre d’informations importantes sur le « parc en
exploitation » français, c'est-à-dire sur les installations de production en service d’EDF SA.
Nucléaire
Thermique
Hydraulique
Installations
Exploitation de 19
centrales nucléaires, soit
58 tranches14
Exploitation de 32
tranches
Exploitation de 436
centrales hydrauliques
Puissance installée à
fin 2013
63 gigawatts
15 gigawatts
20 gigawatts
Âge moyen
28 ans
27 ans
69 ans
Durée
d’amortissement
40 ans
25 à 45 ans
75 ans
VNC des installations
26.6 Mrd€
Données
EDF SA
au 31/12/2013
10.5 Mrd€
Tab. 6 - Données d'exploitation clés d'EDF (2013)
Dans le cadre de notre étude et en raison des enjeux associés, nous accentuerons nos constats
sur les installations de production nucléaires, appelés Centres Nucléaires de Production
Electrique (CNPE).
2. L’application de l'approche par composants chez EDF SA
Le maintien des conditions optimales de sûreté et d’exploitation des CNPE est une nécessité
pour le Groupe EDF, qui selon le document de référence 2012 (page 45), « augmentera
constamment ses investissements dans le parc nucléaire d’ici à 2015 (...) La maintenance sera
ainsi privilégiée, avec une montée en puissance du programme de remplacement des gros
composants (3,4 à 3,6 milliards d’euros d’ici 2015) ».
Nous allons étudier dans cette partie les composants qu’a pu identifier EDF SA sur les CNPE.
14
Tranche : Unité de production d’électricité autonome. En France, une centrale nucléaire compte entre 2 et 6
tranches de production.
AURELIEN FELTESSE
37 / 74
a. Composants de première catégorie
Pour rappel l’IAS 16 définit les composants de première catégorie comme « des parties de
certaines immobilisations corporelles pouvant exiger un remplacement à intervalles
réguliers ».
Sur le domaine nucléaire, le document de référence 2013 du Groupe EDF (page 49)
mentionne notamment deux composants : les générateurs de vapeur15 et les transformateurs
principaux16.
Le Groupe indique que d’ici à 2015, « EDF vise à pérenniser son patrimoine technique et
industriel, par des actions tant techniques qu’organisationnelles et humaines. Les programmes
de rénovation ou de remplacement des gros composants des centrales comme (...) les
transformateurs ou les générateurs de vapeur se poursuivront. À fin 2013 :
-
le programme de remplacement préventif des pôles « cuirassés » de transformateurs
principaux se poursuit. À fin 2013, 44 pôles sur 174 ont été remplacés, soit plus de
25% du programme ;
-
entre 1990 et fin 2013, 25 tranches ont fait l’objet d’un remplacement de générateur de
vapeur, dont 3 en 2013 ».
Sur la seule famille des transformateurs principaux, on note déjà ainsi une certaine
volumétrie. En effet, les remplacements des 174 composants « transformateurs principaux »
sont à suivre de manière individualisée par les services comptables.
Suivre les remplacements de l’ensemble des composants identifiés par le Groupe sur les 58
tranches de production représente donc un travail important que nous détaillerons dans la
partie II de ce chapitre.
15
« Dans une centrale électronucléaire (...), la chaleur produite dans le cœur du réacteur est transmise via la
circulation d’eau dans un circuit fermé, dit circuit primaire, à un circuit secondaire dont l’eau, transformée en
vapeur, alimente des turbines pour la production d’électricité. L’interface entre le circuit primaire et le circuit
secondaire se présente sous la forme d’un grand nombre de tubes regroupés dans des appareils dénommés
générateurs de vapeur » Site internet de l’Institut de RadioProtection Nucléaire (IRSN).
16
Un transformateur principal a pour rôle d’adapter la tension électrique émanant de l’alternateur principal à la
tension du réseau.
AURELIEN FELTESSE
38 / 74
b. Composants de seconde catégorie
Pour rappel, le PCG définit les composants de seconde catégorie comme des « dépenses
d’entretien faisant l’objet de programmes pluriannuels de gros entretien ou de grandes
révisions en application de lois, règlements ou de pratiques constantes de l’entité ».
Sur le domaine nucléaire, le document de référence 2013 du Groupe EDF (page 48) définit un
certain nombre de dépenses d’entretien auxquelles le Groupe est soumis. A titre d’exemple, la
production électronucléaire fonctionne par cycle ayant une durée comprise en 12 et 18 mois.
À la fin d’un cycle de production, ont lieu des périodes d’arrêt permettant de remplacer une
fraction du combustible (...) et de réaliser les travaux de maintenance. Ces arrêts peuvent être :
-
Arrêt pour Simple Rechargement (ASR), durant lequel l’opération essentielle réalisée
est le déchargement du combustible usé et le rechargement du combustible neuf (durée
normative d’environ 35 jours) ;
-
Visite partielle (VP), consacrée au rechargement du combustible et à la maintenance
(durée normative de l’ordre de 70 jours) ;
-
Visite décennale (VD), dont le programme comprend des opérations de maintenance
lourdes, des inspections poussées ainsi que d’autres opérations spécifiques, dont la
rénovation des gros composants (durée normative de l’ordre de 110 jours). À l’issue
de chaque visite décennale, il revient à l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN)
d’autoriser le redémarrage du réacteur puis d’émettre des prescriptions techniques qui
conditionnent la poursuite de son exploitation pour une nouvelle durée de 10 ans.
Pour EDF SA, l’identification des composants de révision majeure résulte :
-
De l’existence d’une obligation réglementaire,
-
Dont le périmètre technique est stable, indépendamment de toute évolution normative,
-
Dont la fréquence de réalisation est définie et stable,
-
Et dont le coût est stable.17
Le cumul de ces critères conduit EDF à considérer les dépenses liées aux visites partielles et
aux visites décennales comme des composants pour les comptes consolidés.18
17
18
Informations non contenues dans le document de référence.
Informations non contenues dans le document de référence.
AURELIEN FELTESSE
39 / 74
Il est important de noter que pour les comptes sociaux, EDF SA a effectué un changement de
méthode comptable en 2012.
Le document de référence publié en 2012 (page 428) précise à ce titre que « jusqu’au
31/12/2011, EDF comptabilisait en charges, avec une provision pour gros entretien, les
dépenses d’inspections majeures des centrales. A compter du 1er janvier 2012, le mode de
comptabilisation est modifié, EDF optant pour une comptabilisation sous forme de
composant ».
Cette décision est motivée par un élargissement des opérations de maintenance à réaliser,
notamment dans le cadre des troisièmes visites décennales (pour les centrales nucléaires les
plus anciennes). Ainsi, le champ d’activation des dépenses n’est plus seulement restreint aux
seuls contrôles prescrits par la règlementation, mais a été élargit à d’autres dépenses
nécessaires à la poursuite de l’exploitation. La comptabilisation de ces dépenses en composant
conduit à fournir une meilleure information financière.
Pour rappel, selon le PCG, cette modification du mode de comptabilisation constitue un choix
irréversible pour EDF.
L’état de variation des provisions pour autres charges indique que la provision aux réparations
et à l’entretien s’élevait à 239 millions d’euros (document de référence 2012, page 461). Dans
la mesure où il s’agit d’un changement de méthode comptable, il convient d’appliquer
l'approche par composants de manière rétrospective c'est-à-dire comme si la méthode avait
toujours été appliquée. La provision constatée jusqu’en 2011 a donc été entièrement reprise
par les capitaux propres au 1er janvier 2012.
AURELIEN FELTESSE
40 / 74
B. LES ENTREPRISES DU BENCHMARK ET L’APPROCHE PAR COMPOSANTS
Dans cette partie nous allons maintenant présenter les entreprises qui composent notre
benchmark. Ces entreprises seront présentées dans l’ordre chronologique de déroulement des
entretiens, qui ont tous pu être réalisés en avril 2014.
Pour rappel, la méthodologie de recherche utilisée est la suivante : à partir des points clés
identifiés lors de l'étude d’EDF SA, j’ai rédigé un questionnaire d’entretien. Ce questionnaire
a ensuite été soumis lors d’entretiens physiques ou téléphoniques aux équipes comptables ou
doctrinaires des Groupes du benchmark. Le questionnaire d’entretien se trouve en Annexe 4
de ce mémoire.
1. Les entreprises du benchmark
Notre benchmark est constitué de grands groupes français ayant en 2013 un chiffre d’affaires
moyen de 34 Mrd€ avec un effectif moyen de 150 000 personnes. L’activité d’EDF SA étant
difficilement comparable à celles d’autres acteurs en France, et l'approche par composants
concernant principalement les entreprises d’une certaine taille, nous avons privilégié une
étude comparative basée sur la taille des entreprises plutôt que sur leur secteur d’activité.
Nous allons décrire chacune des entreprises en termes d’activité et de communication
financière effectuée sur l'approche par composants. Pour cela nous avons sélectionné les
informations pertinentes contenus dans les documents de référence 2013.
Société National des Chemins de fer Français (SNCF)
Le Groupe SNCF est une entité constituée d’un
Etablissement Public Industriel et Commercial (EPIC)
et de filiales privées dont l’objectif est de « rendre
simple et fluide le transport de personnes et de
marchandises ». Le Groupe a ainsi transporté 127,5
Activité
Transport
ferroviaire
CA consolidé 2013
32.2 Mrd€
Résultat global 2013
- 0.2 Mrd€
Effectif 2013
244 000
Immobilisations
corporelles 2013
15 Mrd€
millions de voyageurs en 2012 et 34 milliards de tonnes
de marchandises/km en 2010.
Tab. 7 - Indicateurs financiers clés de la SNCF (2013)
AURELIEN FELTESSE
41 / 74
Dans son document de référence 2013 (pages 73/74), le Groupe SNCF fournit notamment les
informations suivantes sur l'approche par composants :
Fig. 6 - Extrait document de référence de la SNCF (2013)
Areva
Areva est un Groupe industriel français du secteur de l'énergie. Ses activités sont
essentiellement liées à l'énergie nucléaire (de l’extraction de minerai d'uranium au recyclage
des combustibles usés, en passant par la construction de réacteurs), et aux énergies
renouvelables (dont notamment l’éolien, les bioénergies, et le solaire).
Ci-dessous, quelques éléments chiffrés sur le Groupe et sur l'approche par composants tirés du
document de référence 2013 (page 283).
Activité
Energie
CA consolidé 2013
9.2 Mrd€
Résultat global 2013
- 0.5 Mrd€
Effectif 2013
45 000
Immobilisations
corporelles 2013
11.4 Mrd€
Fig. 7 - Extrait document de référence d'Areva (2013)
Tab. 8 - Indicateurs financiers clés d'Areva (2013)
AURELIEN FELTESSE
42 / 74
Orange
Orange est l’un des principaux opérateurs de télécommunication dans le monde. « Présent
dans une trentaine de pays, le Groupe servait plus de 236 millions de clients au 31/12/2013 ».
Depuis quelques années, le Groupe élargit ses activités notamment à la vente de contenu
(musique, cinéma, téléchargement) et à l'e-commerce. Ci-dessous, quelques éléments chiffrés
sur le Groupe, et un extrait du document de référence 2013 (page 195) sur les composants.
Activité
Opérateurs de
télécommunication
CA consolidé 2013
40.9 Mrd€
Résultat global 2013
1.4 Mrd€
Effectif 2013
165 000
Immobilisations
corporelles 2013
23.2 Mrd€
Fig. 8 - Extrait document de référence d'Orange (2013)
Tab. 9 - Indicateurs financiers clés d'Orange (2013)
Air France
Le groupe Air France-KLM est une alliance franco-néerlandaise regroupant deux compagnies
aériennes principales : Air France et KLM. Les activités principales du Groupe sont le
la maintenance et l’entretien aéronautique.
Le groupe Air France-KLM est le 5e
transporteur aérien mondial et le 1er
groupe mondial pour l'activité cargo.
Activité
Transport
aérien
CA consolidé 2013
25.5 Md€
Résultat global 2013
- 1.4 Mrd€
Effectif 2013
65 000
Immobilisations
corporelles 2013
Document de référence 2013 (page 180)
9.4 Mrd€
Tab. 10 - Indicateurs financiers clés d'Air France (2013)
AURELIEN FELTESSE
Fig. 9 - Extrait document de référence d'Air France (2013)
transport de passagers (80% CA), de fret,
Cellule : Correspond à l’ensemble de l’avion hors équipements et
propulseurs. La cellule est donc constituée de la voilure, du fuselage,
du train d'atterrissage, de l'empennage horizontal et de la dérive.
43 / 74
La Poste est une des plus vieilles institutions françaises
(XVIe siècle). Ayant pris la forme d’une société
Activité
Courrier, colis,
banque
CA consolidé 2013
22.1 Mrd€
Résultat global 2013
0.6 Mrd€
Effectif 2013
266 000
Immobilisations
corporelles 2013
5.9 Mrd€
anonyme depuis 2010, le Groupe est présent sur
plusieurs métiers : services postaux, banque et opérateur
de téléphonie mobile. La Poste reste toutefois investie
de quatre missions de services publics et est l’un des
principaux employeurs de France après l’Etat.
Dans son document de référence 2013 (pages 385/386), le Groupe La Poste fournit les
informations suivantes sur l'approche par composants :
Fig. 10 - Extrait document de référence de La Poste (2013)
AURELIEN FELTESSE
44 / 74
Tab. 11 - Indicateurs financiers clés de La Poste (2013)
La Poste
2. Informations comparables sur les entreprises du benchmark
A ce stade, nous comprenons que toutes les entreprises de notre benchmark ne donnent par le
même niveau d’information concernant l'approche par composants. Ainsi, les entretiens
physiques ont permis d’en apprendre plus sur la gestion et le suivi des composants dans
chacun des Groupes.
Toutefois, comme nous le verrons au cours des prochaines sections, les informations fournies
lors des différents entretiens sont difficilement comparables. En effet, la richesse créée par
l’hétérogénéité des activités des entreprises du benchmark implique des contextes industriels
particuliers. Pour cette raison, l'approche par composants n’a pas pu être appliquée selon les
mêmes modalités dans chacune des entreprises de notre échantillon.
Pour la suite de notre étude, et pour des raisons de confidentialité, les propos des informants
seront restitués anonymement en faisant référence aux groupes A à E (ces lettres n’ont aucun
lien avec l’ordre chronologique des entretiens, ni avec les initiales des Groupes).
Le tableau ci-dessous résume quelques informations comparables que nous avons pu obtenir
lors des entretiens. Nous reviendrons avec plus ou moins de détails sur ces informations.
Groupe B
Groupe C
Groupe D
Groupe E
EDF
Traitement des
composants de 2nde
catégorie en NF
Provisions
Provisions
Composants
Pas
d'information
Pas
d'information
Composants
Nombre de composants
identifiés en moyenne
sur les actifs industriels
3
4
3
Pas
d'information
Pas
d'information
Entre 5 et 15
selon les unités de
production
Regard des commissaires
sur l'approche par
composants
Faible
Très fort
Fort
Faible
Fort
Très fort
CONCLUSION SUR PARTIE 1 – CHAPITRE 2
Cette première partie introductive nous a permis d’aborder le cadre de notre étude à partir
d’informations publiées. Nous avons ainsi pu dresser le constat que les Groupes ne souhaitent
pas fournir le même niveau d’information sur l'approche par composants. Nous verrons au fil
des parties suivantes si ce choix est motivé par l’importance que les Groupes y apportent ou
par d’autres critères.
AURELIEN FELTESSE
45 / 74
Tab.12 - Informations comparables
sur le benchmark
Groupe A
II.
GESTION DE L'APPROCHE PAR COMPOSANTS AU QUOTIDIEN
Après cette présentation de notre cas d’étude, intéressons nous maintenant à l'approche par
composants telle qu’elle est réellement mise en pratique dans les Groupes interrogés. Nous
étudierons ainsi :
-
Quelles problématiques ont été gérées lors de la mise en place des composants,
-
Comment les composants sont suivis aujourd’hui au sein d’EDF SA,
-
Comment les composants sont suivis aujourd’hui au sein du benchmark,
-
Comment les composants sont suivis aujourd’hui par les auditeurs internes et externes.
A. LES
PROBLEMATIQUES RENCONTREES PAR LES GROUPES LORS DE LA
MISE EN PLACE DE L'APPROCHE PAR COMPOSANTS
Au sein du Groupe A, des études ont été menées en 2004 avec les commissaires aux comptes
pour déterminer le schéma de qualification des dépenses. Un logigramme permet aux
comptables de savoir si des dépenses doivent être immobilisées ou rester en charges.
Lors du passage aux IAS/IFRS, le Groupe A a mis en place des groupes de travail par norme
ou groupe de normes. Ainsi, à partir des données relatives aux matériels, l’équipe projet IAS
16 a mené des actions de communication afin de recueillir des informations d’ordre technique
sur les matériels identifiés comme significatifs (en fonction des valeurs absolues mais aussi
des valeurs unitaires moyenne des matériels de chaque catégorie).
Suite à ces études, le Groupe A a identifié trois actifs supplémentaires devant faire l’objet
d’une approche par composants (les immeubles faisant déjà l’objet d’une décomposition
comptable). Sur les autres matériels du Groupe, l’approche de comptabilisation en vigueur à
l’époque a été maintenue. Toutefois, les durées d’utilité de ces matériels ont fait l’objet d’une
revue afin de redéfinir une durée d’utilité plus proche de la réalité technique et économique.
AURELIEN FELTESSE
46 / 74
Dans une note interne, le Groupe A indique que la mise en place de l'approche par
composants a ainsi engendré les problématiques suivantes :
-
« La physionomie actuelle du parc des actifs industriels19 va fortement évoluer à
l’avenir, ce qui va entraîner une revue systématique des plans d’amortissement et de la
décomposition en composants.
-
Le système d’information (SI) et de gestion comptable des matériels doit être adapté à
la problématique de gestion des composants et d’investissements / désinvestissements
par composants.
-
La Doctrine comptable du Groupe doit prendre en compte ces nouveaux aspects afin
de communiquer des informations précises et fiables aux acteurs responsables de la
gestion et de la comptabilisation des biens ».
Pour le Groupe C, les principaux problèmes étaient également d’ordre informatique, le parc SI
étant caractérisé par un nombre important d’applicatifs développés en interne. Une grande
réorganisation de l’entreprise est intervenue en même temps que les évolutions normatives, ce
qui a, dans les faits, facilité la transition.
Par ailleurs, les services de comptabilité du Groupe C ont dû adopter une certaine pédagogie
pour expliquer au métier quels étaient les impacts des normes dans leur quotidien (pointage
des activités sur des projets, etc.).
Enfin pour EDF SA, les problématiques ont été là encore liées au système d’information. Le
Groupe a ainsi été confronté à la problématique suivante : la gestion des remplacements des
composants n’était pas assurée par l’application IRIS20 pendant une période transitoire.
Les comptables devaient donc assurer un suivi très précis pour toutes les écritures liées à
l'approche par composants (nous verrons à ce titre et de manière détaillée dans le prochain
paragraphe quelles sont les étapes comptables du processus de remplacement d’un
composant).
19
Actif industriel : Ce terme désignera de façon générique l’actif principal ayant fait l’objet d’une
décomposition ; comme par exemple les avions pour Air France, les centrales pour EDF, etc.
20
IRIS : Immobilisations Regroupées Inventoriées sous SAP. Il s’agit du module FI-AA : Comptabilité des
immobilisations (Asset Accounting) de SAP qui a été adapté aux caractéristiques du Groupe EDF et qui permet
de gérer les immobilisations depuis la mise en service jusqu’au retrait.
AURELIEN FELTESSE
47 / 74
B. LE SUIVI DES COMPOSANTS CHEZ EDF SA
Dans cette partie nous nous intéresserons au suivi pratique des composants chez EDF SA.
Nous étudierons dans un premier temps les composants de première catégorie pour nous
concentrer ensuite sur les dépenses de seconde catégorie.
1. Les composants de première catégorie
Pour EDF, l’approche par composants est conditionnée par un contexte industriel particulier.
C’est pourquoi, le processus de remplacement des composants nécessite un suivi précis et une
méthodologie de calcul détaillée et uniforme dans le temps.
a. Contexte : les composants de première catégorie non identifiés à l’origine
Comme nous l’avons vu dans le premier chapitre de ce mémoire, les textes comptables
préconisent l’identification des composants dès l’origine, c'est-à-dire lors de la mise en
service de l’immobilisation (ou rétroactivement lors de leur première mise en œuvre).
Chez EDF SA, cette décomposition n’a pas pu être réalisée. Sur la partie nucléaire, par
exemple, toutes les installations de production ont été mises en service entre 1977 et 1999,
c'est-à-dire bien avant l’application obligatoire de l'approche par composants.
Lors de la première application de la démarche en 2005, il a été décidé de n’identifier les
composants qu’à partir du moment où la décision de remplacement serait prise. En effet la
volumétrie, le haut degré de complexité des installations et la difficulté de reconstitution des
valeurs d’origine à partir de contrats multi-installations et multiservices ont rendu impossible
l’initialisation de tous les composants en même temps sur l’ensemble du périmètre d’EDF SA.
Ainsi, les composants sont identifiés au fur et à mesure de l’adoption de plans de
remplacements (ou plans d’investissements). En pratique, les équipes d’ingénierie établissent
en accord avec l’exploitant des centrales un planning de remplacements des composants en
lien avec les prévisions budgétaires du plan à moyen terme (PMT) établi sur l’année en cours
plus trois ans.21
21
La problématique des remplacements selon un planning d’investissements sera approfondie dans les prochains
paragraphes.
AURELIEN FELTESSE
48 / 74
b. Processus de remplacement et de suivi des composants de première catégorie
Le logigramme ci-dessous décrit de manière simplifiée les différentes étapes du processus de
remplacement des composants.22
Fig. 11 - Logigramme de remplacement des composants chez EDF
Acteurs hors comptabilité
Instance de validation
Comptabilité / Contrôle de
Gestion
Services de comptabilité (CSP-C)
Services de comptabilité (CSP-C)
Processus Synthèse 22
Processus Immobilisations 22
Directoires techniques
Elaboration et validation du
1 programme de remplacement sur
horizon long terme
2
3
Unités d'ingénierie
- Rédaction et validation d'une
synthèse de chacun des projets
- Découpage des projets en lots
et élaboration des contrats
Instance commune
Ingénieurs / Producteurs
Elaboration d'un planning de
référence prévisionnel (horizon
PMT) à partir du corps
d'hypothèses
5
4
A partir du programme prévisionnel :
- Calcul de la valeur nette comptable des
composants à remplacer
- Elaboration des plans d'amortissements
des composants à remplacer
- Chiffrage de l'impact des amortissements
accélérés sur le compte de résultat N
6
- Réception du planning validé
- Prise en compte des modifications
éventuelles
- Demande d'initialisation ou de recalage
des dates de remplacement dans le SI
Présentation et validation en
instance du planning de
remplacement prévisionnel
8
22
7
- Initialisation du composant dans le
système d'information
- Recalage des dates de remplacement
9
- Mise en sevice du composant remplaçant
- Retrait du composant à remplacer du
fichier des immobilisations
Suivi des initialisations et des demandes de
recalage de date
Voir annexe 5 sur l’organisation en Centre de Services Partagés Comptabilité (CSP-C) adoptée par EDF.
AURELIEN FELTESSE
49 / 74
Etapes 1 à 3
Sur le plan technique, les projets sont positionnés dans un planning prévisionnel couvrant
toute la durée de leur réalisation. Ainsi, les opérationnels anticipent les remplacements sur un
horizon de plusieurs dizaines d’années.
A la suite de cela, les unités d’ingénierie vont rédiger pour chaque famille de composants une
« Fiche Synthèse d’Affaire » dans laquelle seront indiquées les unités concernées, les
motivations de remplacements, les enjeux liés ainsi qu’une répartition par année des
remplacements à effectuer et des dépenses prévisionnelles.
A partir de ces documents, un planning de remplacements des composants sur l’horizon
moyen terme va pouvoir être établi à l’attention de la comptabilité. En effet, sur le plan
comptable, c’est un horizon à 4 ans (soit l’année en cours plus 3 ans) qui sera retenu. Bien
qu’il puisse être impacté par les aléas techniques et l’évolution de l’environnement industriel,
cet horizon temporel s’impose pour EDF SA comme le plus fiable en termes de qualité des
prévisions. Chaque année un planning de remplacements des composants est établi courant
mai puis est mis à jour en septembre.
Etape 4
C’est d’abord un planning de remplacements prévisionnel qui est envoyé au processus
Synthèse du CSP-Comptabilité. Ce dernier doit alors comparer le nouveau programme de
remplacements avec le dernier reçu. Plusieurs situations peuvent alors se produire.
CAS 1 – PROGRAMMATION NON IDENTIFIEE, A INITIALISER
Cette situation se produit lorsque le planning de remplacements reçu fait apparaître des
composants qui n’ont jamais été identifiés ; ils sont donc à « initialiser ».
Par ce terme, il faut comprendre l’action d’individualiser le composant à remplacer dans un
compte d’immobilisation distinct du compte d’immobilisation de la tranche de production
dans lequel il se trouvait depuis l’origine. Il faudra bien sûr en faire de même avec les
amortissements relatifs au composant.
AURELIEN FELTESSE
50 / 74
Afin que les explications technico-comptables qui suivent soient plus explicites, nous allons
étudier le cas suivant : Soit la tranche de production « BAL3 » mise en service en 1984 et
amortie sur 40 ans. En 2014, les équipes techniques décident que le composant « LCR » doit
être remplacé en 2016. Voici les différentes étapes à respecter :
1) Diminuer la valeur brute de l’immobilisation BAL3 pour un montant égal à la
valeur brute d’origine du composant à remplacer LCR.
Cette opération de « bascule » n’est pas si simple car historiquement nous n’avons pas
de découpage précis des éléments constituant le coût d’origine global de la tranche de
production. La valeur brute du composant à remplacer est alors déterminée à partir du
coût de remplacement actuel. Nous approfondirons cette problématique dans le prochain
sous paragraphe (c. Reconstitution du coût d’origine des composants de 1ère catégorie).
Nous considérerons ici que ce composant a une valeur brute d’origine de 240.
23
Compte
ETI 23
215002
C30111
215001
C30101
Libellés
LCR - Composant à remplacer
Débit
Crédit
240
BAL 3 - Tranche de production
240
2) Diminuer les amortissements cumulés de l’immobilisation BAL3 pour un montant
égal aux amortissements du composant à remplacer LCR.
Les amortissements affectés au composant lors de ce retraitement sont calculés à partir
du pourcentage d’amortissement de la tranche de production. Ce taux est en fait le
rapport entre les amortissements cumulés et la valeur brute d’une tranche. Dans notre
exemple, BAL3 est amortie à hauteur de 75 %. On considère en pratique que le
composant a subi le même rythme d’amortissement ; ainsi :
-
Les amortissements cumulés de LCR sont donc de 180 (240 x 75%), et
-
La VNC de LCR sera donc égale à 25% de sa valeur, soit 60.
Compte
ETI 23
281502
C30101
281502
C30111
Libellés
Amortissements LCR - Composants à remplacer
Amortissements BAL 3 - Tranche de production
23
Débit
Crédit
180
180
Les ETI (Elément Technique d’Immobilisation) sont des familles d’immobilisations dans le système
d’information. Ces regroupements sont réalisés en fonction de caractéristiques techniques et d’amortissements
communes afin de faciliter le suivi des immobilisations. Ainsi à chaque famille de composant correspond un ETI.
AURELIEN FELTESSE
51 / 74
3) Etablir le plan d’amortissement du composant à remplacer.
Selon les textes comptables, une immobilisation est amortie sur sa durée d’utilité pour
l’entreprise. Par conséquent, les composants à remplacer doivent être amortis jusqu’à la
date prévisionnelle d’achèvement de leur remplacement ; il s’agira d’amortissements dit
« accélérés ».24
Dans notre exemple, la VNC de LCR sera amortie de manière accélérée jusqu’en 2016,
soit 20 d’amortissements par an de 2014 à 2016. A la date de remplacement, le
composant à remplacer LCR aura ainsi une VNC nulle.
En étalant la VNC sur 3 ans par voie d’amortissements, on évite de générer, dans le
compte de résultat, une charge de 60 en une seule fois (lors du remplacement).
CAS 2 – DECALAGE DE PROGRAMMATION
En raison de la complexité industrielle de l’activité, des composants déjà identifiés peuvent
subir des modifications de leur date de remplacement. Celle-ci peut être anticipée (en raison
d’évènements techniques non prévisibles – ex : fortuits, ou en raison d’évolution
règlementaire ou de sûreté), ou au contraire être retardée.
Selon l’article 322-4 du PCG, toute modification significative de l’utilisation prévue, par
exemple durée ou rythme de consommation des avantages économiques attendus de l’actif,
entraîne la révision prospective de son plan d’amortissement. Par conséquent, si la date de
remplacement d’un composant est modifiée, le plan d’amortissement doit en subir les effets.
Si l’on poursuit notre exemple, nous pouvons prendre l’hypothèse qu’en 2015, il est
finalement décidé que le composant LCR ne sera pas remplacé en 2016 mais en 2017. Le plan
d’amortissement doit donc être revu de manière prospective.
En 2015, la VNC du composant LCR sera de 40 (60 – 20). Cette VNC doit être amortie
jusqu’à la nouvelle date de remplacement ; soit 13.3 d’amortissements par an de 2015 à 2017.
24
Les amortissements accélérés des composants à remplacer sont déductibles fiscalement sauf cas
manifestement abusifs (ex : si l’entité a cherché à différer irrégulièrement une fraction de l’amortissement en
contravention avec les dispositions de l’article 39B) – BOI 4 A-13-05 du 30 décembre 2005
AURELIEN FELTESSE
52 / 74
CAS 3 – ANNULATION DE LA PROGRAMMATION SANS AUTRE VISIBILITE SUR L’HORIZON PMT
Enfin, il peut aussi s’avérer qu’un composant soit « sorti » du planning de remplacements.
Dans cette hypothèse, le métier considère finalement que le composant ne sera pas remplacé
dans l’horizon PMT. Il conviendra alors de recaler la date de fin d’amortissement du
composant sur la date de « fin de vie » de la tranche. Si en 2016 une telle décision est prise
pour le composant LCR, alors sa VNC de 26.7 (40 - 20 - 13.3) sera amortie de manière
linéaire jusqu’en 2024 (date de fin d’amortissement de BAL3).
Etape 5
Grâce aux plans d’amortissements des composants nouvellement identifiés en N, le processus
Synthèse est en mesure de présenter dans un comité décisionnel les impacts des nouvelles
initialisations sur le compte de résultat N. Ces impacts correspondent à la différence entre :
-
La dotation aux amortissements linéaires qui aurait été constatée si le composant avait
continué à être amorti sur la durée de vie de la tranche, et
-
La dotation aux amortissements accélérés du fait de la décision de remplacement.
Si l’on reprend les hypothèses initiales de notre exemple, l’impact de l’initialisation du
composant LCR sur le compte de résultat 2014 est égal à :
-
La dotation linéaire qui aurait été constatée quoiqu’il arrive : 240 / 40 ans = 6,
MOINS
-
La dotation « accélérée » liée à la détermination d’une date de remplacement : 20,
Soit une diminution du résultat de 14.
Sur la base de ces informations financières, et en concordance avec de nombreux critères
techniques, le planning de remplacement va être validé par le contrôle de gestion.
Etapes 6 et 7
A partir du planning de remplacements définitif, le processus Synthèse du CSP-Comptabilité
va procéder aux ajustements éventuels par rapport au planning prévisionnel. Ensuite,
l’ensemble des demandes d’initialisations et de recalages de date de remplacement est envoyé
au processus Immobilisations. Les demandes sont assignées d’un « indice de priorité » afin
AURELIEN FELTESSE
53 / 74
que les requêtes les plus urgentes soient prises en compte dans le système d’information avant
la clôture semestrielle (ou annuelle). Il est important de noter que :
-
Les demandes sont parfois très nombreuses ; la volumétrie nécessite donc un certain
temps de traitement par le processus Immobilisations ;
-
Et, dans un logique de fast close25, l’application IRIS n’est plus accessible à partir du
15 du dernier mois de la période (soit le 15 juin, ou le 15 décembre); ce qui nécessite
une réactivité importante du processus Immobilisations dès réception des demandes.
Etape 8
Au fil de l’eau, le processus Synthèse vérifie si les demandes envoyées au processus
Immobilisations ont été correctement traduites dans le système d’information.
Etape 9
Lors du remplacement d’un composant, le composant à remplacer (dont la VNC est
normalement égale à zéro) doit être retiré du fichier des immobilisations et le composant
remplaçant est inscrit à l’inventaire des immobilisations pour une durée de vie correspondant
à la durée de vie résiduelle de la tranche.
25
« La notion de fast close consiste à réaliser en quelques jours une clôture comptable quelle qu’en soit la nature
(mensuelle, trimestrielle, semestrielle ou annuelle). Les délais de clôture raccourcis doivent également aller de
pair avec des informations sûres et de qualité » – Source : www.petite-entreprise.net/
AURELIEN FELTESSE
54 / 74
c.
Reconstitution du coût d’origine des composants de première catégorie
Comme nous l’avons déjà évoqué, il est difficile d’établir aujourd’hui le coût initial d’un
composant d’une tranche de production que l’on change ou modifie, car ce coût était intégré
la plupart du temps dans un contrat global d’approvisionnements et montage.
Pour EDF SA, la reconstitution du coût d’investissement initial d’un matériel est donc
obtenue à partir du coût actuel de remplacement retraité comme cela est prévu par les
référentiels comptables (voir chapitre 1, partie II, section A, paragraphe 2, sous-paragraphe
b.). On distingue :
-
Les composants dont on peut estimer avec précision la valeur de remplacement
actuelle (valeur opposable). Pour ces composants, EDF SA a déterminé à partir
d’études techniques un coût normatif exprimé en euros constants.
-
Les composants dont la valeur de remplacement n’est pas homogène sur le parc en
exploitation compte tenu de spécificités techniques industrielles. Ces composants
font l’objet d’étude au cas par cas.
La méthodologie de détermination du coût d’origine est réalisée à partir :
-
Des coûts du matériel neuf en excluant si nécessaire certains coûts qui n’ont pas été
subis lors de la mise en service initiale,
-
Et en tenant compte de l’évolution technologique, et des variations des conditions
économiques, c'est-à-dire l’évolution du taux d’inflation.
Analyse du coût de remplacement actuel du matériel
Le coût de remplacement du matériel neuf est décomposé en :
-
Coût de l’ingénierie,
-
Coût de démontage,
-
Coût du matériel neuf comprenant éventuellement le surcoût dû à un changement
de technologie,
-
Coût de montage comprenant les surcoûts liés à l’environnement modifié depuis la
construction initiale (tranche en exploitation, intervention en zone contrôlée,
exigences liées à la qualité ainsi qu'à l'hygiène et la sécurité), et
-
Coût lié aux travaux préparatoires liés à l'environnement.
AURELIEN FELTESSE
55 / 74
Les différents coûts mentionnés ci-dessus sont approfondis en faisant l'analyse sur plusieurs
paliers26 ou tranches, en fonction des changements déjà réalisés.
Reconstitution du coût initial
Là encore, prenons l’exemple du composant LCR de la tranche BAL3 pour tenter de
comprendre comment a été calculée la valeur brute de 240 que nous avons utilisé
précédemment.
Le calcul du coût du matériel à neuf peut inclure un surcoût dû à un changement de
technologie. En d’autres termes, on remplace un composant par un matériel plus performant et
donc plus onéreux.
Prenons l’hypothèse qu’un composant LCR de nouvelle technologie dit LCR+
coûte aujourd’hui 720. Les études techniques ont montré que ce coût à neuf inclus
un surcoût qui permet d’admettre raisonnablement que le composant LCR+ coûte
1.5 plus cher que le composant LCR initial. En excluant le saut technologique, on
obtient un coût de 480.
Par ailleurs, les conditions économiques entre l’année de mise en service de l’unité de
production et la date de remplacement ont fortement évolué. En effet, l’inflation a fortement
progressé sur ces 40 dernières années et il convient de se repositionner aux conditions
économiques initiales.
Prenons l’hypothèse que ce coût soit exprimé en euros 2014 et que le coefficient
IPCHF27 calculé par l’INSEE nous indique qu’1€ de 1984 (année de mise en
service de BAL3) représente 2 € aujourd’hui. Il faut donc désactualiser le coût de
480 précédemment trouvé, et nous obtenons une valeur brute à l’origine de 240.
L’ensemble de ces démonstrations permet de comprendre la complexité du processus de
remplacement des composants de première catégorie. Ces traitements sont lourds, marqués
par des enjeux financiers importants et nécessitent donc un suivi rigoureux et opposable aux
instances de contrôle.
26
Palier : On classe les CNPE par palier, c'est-à-dire par modèle de réacteurs aux caractéristiques identiques. En
raison d’aspects technologiques différents les 19 CNPE d’EDF sont répartis en 6 paliers.
27
IPCHF : Indice des Prix à la Consommation Harmonisé en France
AURELIEN FELTESSE
56 / 74
2. Les dépenses de seconde catégorie
Intéressons nous maintenant aux composants de seconde catégorie, et plus particulièrement à
la méthodologie de détermination des dépenses de révisions majeures pour EDF SA. Nous
verrons ensuite comment ces coûts sont suivis.
a. Calcul du coût des dépenses de révisions majeures
Les coûts normatifs de chaque activité de révision majeure sont évalués sur la base d’enquêtes
conduites auprès de plusieurs CNPE. Ils intègrent le périmètre technique des contrôles et
tiennent compte du palier technique ainsi que des marchés de réalisation des travaux déjà
conclus.
Plusieurs facteurs peuvent impacter les coûts normatifs :
-
Le palier technique : la conception des matériels est différente selon les paliers.
-
Les marchés de réalisation des travaux : le coût observé d’une opération soustraitée peut être différent de celui d’une opération réalisée en interne.
-
La durée des arrêts de production de l’installation : un arrêt de tranche plus court
est plus onéreux (travail de nuit, travail les jours non ouvrés, etc.).
-
La localisation géographique du CNPE : les frais de déplacement et la proximité
des sous-traitants peuvent varier.
b. Procédures de suivi et de contrôle
Comme nous avons pu le voir lors de la description des dépenses de gros entretien et grande
révision immobilisées chez EDF SA, de lourdes contraintes règlementaires encadrent les
contrôles. Si on ajoute à cela le fait que ces interventions nécessitent l’arrêt total d’un moyen
de production pendant 2 à 3 mois, on comprend aisément les enjeux financiers qui pèsent sur
le suivi budgétaire et comptable de ce type de dépenses.
C’est pourquoi, EDF SA a mis en place une procédure particulière de suivi et de contrôle des
composants de seconde catégorie.
AURELIEN FELTESSE
57 / 74
Au début d’une année, le Contrôle de Gestion de la Division communique aux comptables
1)
en charge des immobilisations les budgets notifiés aux Unités relatifs aux activités de
requalification des dépenses investies afin d’alimenter un « Tableau de suivi des
affaires » (TSA).
Au cours de la révision majeure, une revue des dépenses (y compris des entités prestataires)
2)
enregistrées dans l’ERP sur le projet est réalisée par l’Unité (autocontrôle) afin de s’assurer
que les dépenses qui y figurent sont correctement imputées : imputation sur le code projet
approprié, dépenses faisant bien partie du périmètre des dépenses capitalisables, coût
enregistré approprié, etc.
A l’issue de la révision majeure, les comptables du processus Immobilisations réalisent une
3)
revue des écarts supérieurs à 10% entre les montants des dépenses attendues (budget notifié
issu du TSA) et les montants des dépenses réelles.
Le contrôle de gestion produit une analyse dans laquelle il explique les écarts : soit en
termes de variations de prix (liée par exemple à un changement de fournisseur), soit en
termes de variation de périmètres (liée à une nouvelle obligation réglementaire).
Cette revue est ensuite archivée par le service comptable dans le dossier de l’immobilisation.
Lors de la mise en service du composant relatif à la requalification concernée (correspondant
4)
à la date de recouplage28 de la tranche), toutes les dépenses liées à des travaux effectués
doivent être enregistrées, si besoin en établissant des charges à payer.
28
Date de recouplage : Date à laquelle une tranche de production est de nouveau raccordée au réseau et est en
mesure de fournir de l’électricité.
AURELIEN FELTESSE
58 / 74
3. L’anticipation sur les projets innovants
Assurer le suivi de l'approche par composants au quotidien passe aussi par l’anticipation des
mises en service, et plus particulièrement sur les projets impliquant des immobilisations
innovantes pour l’entreprise. Dans cette situation, il semblerait que la bonne pratique utilisée
par les Groupes du benchmark soit la constitution de groupes de travail dédiés.
On comprend ainsi l’intérêt d’EDF SA d’avoir mis en place des groupes de travail pour les
centres de production à mettre en service. Ces instances vont chercher à statuer sur un
découpage des immobilisations en composants qui permettra :
-
De faciliter la lecture des biens patrimoniaux et de donner une cohérence d’ensemble
au patrimoine de Groupe.
-
De traduire la durée d’utilité des composants et ainsi d’engendrer des dotations aux
amortissements en adéquation avec la réalité économique.
-
D’appréhender les remplacements comptables des composants créés.
-
D’établir des déclarations fiscales fiables, contribuant ainsi à l’exactitude des charges
dans le compte de résultat.
En raison de leurs rôles importants, les Groupes de travail (répartis en « lots ») mobilisent un
nombre conséquent d’acteurs. L’anticipation des travaux permettra de décrire les points de
méthode, de traiter les problématiques doctrinales et fiscales, et de réaliser une étude détaillée
des coûts afin de faciliter le geste de mise en service comptable et le suivi budgétaire.
Ces instances nécessitent donc une diversité d’acteurs aux compétences spécifiques :
-
Le maître d’œuvre ; en tant que constructeur, il dispose de la connaissance technique
et du détail des coûts des installations.
-
Le maître d’ouvrage ; en tant que futur propriétaire, il doit pouvoir se prononcer sur la
finesse du patrimoine qu’il souhaite obtenir.
-
La doctrine, qui doit traiter les points de doctrine comptable et fiscale et rester en
veille pour toute question nouvelle.
-
La comptabilité, qui doit être garant de la méthode et exprimer ses besoins pour
assurer une mise en service dans les délais et dans le respect des différents référentiels.
-
La direction des achats qui pourrait disposer de données qui ne figurent pas sur les
contrats.
AURELIEN FELTESSE
59 / 74
C. LE SUIVI DES COMPOSANTS AU SEIN DU BENCHMARK
La section précédente nous a permis de comprendre comme étaient suivis les composants
chez EDF SA. Intéressons nous maintenant à notre benchmark à travers deux
problématiques : le contexte de décomposition, et la méthodologie de reconstitution du coût
d’origine.
1. Exemple « d’industrialisation » de la démarche par composant
Contrairement à EDF SA, le contexte du Groupe C est caractérisé par une forte homogénéité
des installations et une faible complexité industrielle, permettant ainsi au Groupe :
-
De ne distinguer que trois composants sur les actifs industriels,
-
Et d’opérer ce découpage dès la mise en service de l’actif, sans forte incertitude
temporelle. Nous ne sommes donc pas dans une logique de « rattrapage du passé »,
mais de gestion du quotidien.
Autre exemple, le Groupe B. Celui-ci n’a pas attendu la mise en place des normes IFRS pour
décomposer ses actifs industriels. Dès les années 90’, le Groupe a procédé à un découpage
précis de ses actifs. Ceux-ci étant standardisés et nombreux, le Groupe B est en mesure
d’identifier dès l’origine les mêmes composants selon une même répartition.
Ainsi sur son principal actif industriel, le Groupe B identifie :
-
Une structure amortie sur une durée comprise entre 20 et 25 ans.
-
Un composant de première catégorie amorti sur une durée comprise entre 7 et 10 ans.
-
Deux composants de seconde catégorie amortis respectivement sur 4 et 6 ans.
A noter que pour le Groupe B, l’enregistrement de composants de seconde catégorie se
justifie par les instructions et recommandations fournies par le constructeur dans les manuels
d’utilisation et d’entretien, et par les règles de sécurité internes que se fixe le Groupe soit
volontairement, soit sur recommandations d’organismes internationaux.
Comme pour EDF SA, le Groupe B est contraint d’organiser ces entretiens sous peine de ne
plus pouvoir exploiter les actifs concernés.
AURELIEN FELTESSE
60 / 74
Les révisions majeures de ses actifs sont planifiées selon un programme prévisionnel sur 2
ans. Pour le Groupe B, l’occupation des lieux d’entretien et les coûts liés à la non-utilisation
de l’actif concerné sont des critères majeurs dans la détermination du planning.
Par ailleurs, en raison d’une divergence de traitement comptable des révisions majeures entre
les comptes consolidés (composant) et les comptes sociaux (provision) le Groupe B doit
déterminer deux coûts d’acquisition lors de la mise en service d’un actif. Fortement motivée
par des raisons de déductibilité fiscale, cette divergence entraîne un état du patrimoine
différent selon les jeux de comptes et oblige les comptables à une plus grande vigilance dans
le suivi des investissements / désinvestissements. Ainsi, pour chaque actif industriel, le
Groupe B dispose d’un classeur Excel détaillant les étapes de calcul du coût d’acquisition
dans les deux référentiels.
2. Exemple de méthodologie de reconstitution du coût d’origine
Pour reconstituer le coût d’origine de composants identifiés après la mise en service de
l’immobilisation principale, nous avons vu précédemment qu’EDF SA partait du coût de
remplacement actuel.
Il en est de même pour le Groupe C. En effet, dans une note interne (encore en mode projet),
le Groupe C décrit les opérations liées aux composants, et notamment la méthodologie à
adopter pour le calcul du coût d’origine des composants non identifiés lors de la mise en
service de l’actif.
De cette situation, il en découle les deux cas suivants :
-
« Si le coût de l’élément est connu, il convient alors de calculer la valeur nette
théorique de cet élément, compte tenu de son utilisation passée ;
-
Si le coût de l’élément à remplacer n’est pas connu, sa valeur nette est estimée à
partir du coût de remplacement, net d’amortissement et corrigé des effets monétaires,
qui constitue une indication du coût de l’élément à remplacer lors de son acquisition
ou sa construction, ajusté pour tenir compte de l’amortissement ».
AURELIEN FELTESSE
61 / 74
Le Groupe A quant à lui répartit le coût global de l’immobilisation selon des pourcentages
déterminés par les études de 2005. Ainsi, sur un actif X, le Groupe A considérera que :
-
80% du coût global constitue la structure (amorti sur 15 ans),
-
10% le composant 1, et
-
10% le composant 2
(amortis tous les deux sur environ 7 années).
Cette méthodologie présente l’intérêt d’une plus grande simplicité. Elle ne pourra toutefois
être appliquée que si les études menées sont correctement justifiées par des éléments probants
qui n’évolueront que de manière très faible dans le temps. La décomposition doit, par ailleurs,
être revue périodiquement par les commissaires aux comptes.
AURELIEN FELTESSE
62 / 74
D. LES COMPOSANTS & LES CONTROLES INTERNE ET EXTERNE
En complément du guide méthodologique proposé par Christine Dorange (voir chapitre 1,
partie II, section B, paragraphe 3), nous allons voir quels contrôles sont réalisés en pratique
par les auditeurs internes et externes lorsqu’ils s’intéressent à l'approche par composants.
1. Les missions d’audits internes sur l'approche par composants
Chez EDF SA, les missions d’audit interne sur les composants ont pour objectifs de :
-
S’assurer que l’instruction d’un dossier relatif à un composant est conforme à
l’application de la norme IAS 16 ;
-
Vérifier le dispositif en place en termes d’organisation et de contrôles permettant de
sécuriser le processus : définition et respect du rôle des différents acteurs (voir
chapitre 2, partie II, section B, paragraphe 1, sous-paragraphe b.) ;
-
Analyser le circuit (instructions et décisions) au regard de la doctrine ayant permis la
qualification en gros composants ;
-
S’assurer de la bonne justification de la méthode de reconstitution du coût initial (pour
le composant à remplacer), de calcul du coût de remplacement (pour le composant
remplaçant), et des amortissements accélérés (pour le composant à remplacer) ;
-
Vérifier la qualité de l’imputation comptable (transfert de propriétaire entre le maître
d’œuvre et le maître d’ouvrage, mise en service) et fiabilité du fichier des
immobilisations dans le système d’information dédié.
Pour mener à bien de telles missions, les auditeurs internes s’appuient sur une démarche
méthodologique classique :
-
Définition de l’échantillon d’analyse,
-
Premiers tests de cohérence et demande de pièces justificatives,
-
Rencontre et entretien avec l’ensemble des acteurs du processus,
-
Recoupement des différentes informations et tests complémentaires.
AURELIEN FELTESSE
63 / 74
2. Les missions d’audits externes sur l'approche par composants
Sauf interventions spécifiques effectuées lors de mise en place de la démarche par
composants, il semble que les travaux des auditeurs sur les composants s’inscrivent
aujourd’hui dans le cadre de leurs « travaux classiques » sur les immobilisations. Rappelons
toutefois que pour 4 des 6 Groupes de notre cas d’étude, le regard des commissaires aux
comptes sur l'approche par composants est jugé comme Fort, voire Très fort.
Pour le Groupe C, les auditeurs se concentrent :
-
Principalement sur les types de charges qui ont été activées (justification, montant,
etc.), et le niveau des charges (vérification de la cohérence et de la stabilité des devis) ;
-
Mais aussi sur les process de production comptable, les amortissements comptabilisés,
le taux d’actualisation, les retraitements liés aux divergences IFRS / Normes françaises
(dans la mesure où les normes françaises présentent un risque fiscal).
D’après le Groupe E, les CAC concentrent également leur intervention sur les amortissements
accélérés. Notons que le patrimoine du Groupe E est marqué par une hétérogénéité des actifs
liée à l’utilisation de technologies différentes. Ainsi une revue annuelle du patrimoine est
réalisée en interne afin de mesurer le risque d’obsolescence des actifs : un changement de
technologie pourrait contraindre le Groupe à amortir plus vite les actifs. Par conséquent, les
auditeurs peuvent être amenés à vérifier les raisons ayant pu motiver des amortissements
accélérés sur certains composants.
Enfin, notons que pour les Groupes concernés, la plupart des calculs préparatoires se font
quasi-manuellement. Chaque composant à remplacer ou remplaçant nécessitant la prise en
compte de nombreuses hypothèses, les calculs ne peuvent donc pas être automatisés dans le
SI. Par conséquent, lors de leurs interventions, les CAC vont tester la fiabilité des fichiers de
travail ainsi que la cohérence de ces derniers avec les données saisies dans le SI.
CONCLUSION SUR PARTIE 2 – CHAPITRE 2
De cette partie, nous pouvons tirer l’enseignement suivant : l'application de l’approche par
composants est fortement corrélée à un contexte industriel. Alors que les Groupes ont
rencontré des problématiques similaires en 2003/2005, il semble qu’aujourd’hui chacun tente
d’assurer un suivi des composants le plus fiable possible au regard des moyens alloués.
AURELIEN FELTESSE
64 / 74
III. UNE DEMARCHE EN PERPETUELLE EVOLUTION
Maintenant que nous avons décrit les différentes problématiques du suivi quotidien de
l'approche par composants, nous allons nous rendre compte que la démarche n’est pas figée.
En effet, il semble important pour les Groupes de s’assurer de la cohérence de leurs choix
dans le temps. Nous allons pouvoir ainsi nous intéresser :
-
Aux moyens disponibles pour « sécuriser » l'approche par composants, et
-
A la décision de remise en cause des principes internes prise par certains Groupes.
A. GESTION
DU PERIMETRE DES COMPOSANTS ET SECURISATION DU SUIVI
DE LA DEMARCHE
1. Gestion du périmètre des composants : dispositions pratiques
Sur des installations complexes, l'approche par composants ne peut être figée dans le temps.
En effet, des évolutions technologiques ou des contraintes techniques peuvent amener les
Groupes à élargir le périmètre des composants. Les référentiels comptables indiquent à ce titre
que les entités doivent se réinterroger annuellement sur la durée de vie de leurs actifs (voir
Chapitre 1, partie II, section B, paragraphe 1).
Les décisions d’élargissement du périmètre des composants doivent bien sûr être justifiées au
regard de l’activité afin de ne pas être considérées comme des décisions de gestion irrégulières.
A titre d’exemple, chez EDF SA, le périmètre des composants est établi en concertation entre
le département de Contrôle de Gestion de la Division (thermique, nucléaire ou hydraulique),
la Direction Financière et le Département Normes & Doctrine du service de Comptabilité. A
partir d’études techniques et en respect des critères comptables, de nouveaux composants
peuvent être identifiés.
Chaque projet d’identification d’un nouveau composant nécessite l’instruction d’un dossier,
dont l’aboutissement sera formalisé par une note de doctrine interne. Avant 2009, la logique
était de faire une note globale pour tous les composants, avec mise à jour dès nouvelle
identification.
AURELIEN FELTESSE
65 / 74
Mais avec l’élargissement du périmètre des composants au cours des dernières années, il a été
décidé de rédiger une note unique par famille de composants. Ce document :
-
Rappelle les règles comptables en vigueur,
-
Donne un descriptif technique du matériel concerné et du contexte de remplacement,
-
Etablit et justifie le coût normatif du nouveau composant (dépenses prises en compte
ou exclues, année d’expression des euros constants),
-
Aborde des problématiques spécifiques au matériel le cas échéant, et enfin
-
Décrit le traitement comptable à appliquer lors des opérations de remplacement.
La note de doctrine d’un composant servira de référence, notamment pour les comptables
pour le calcul du coût de remplacement d’origine, des amortissements accélérés, des
modalités de comptabilisation, etc.
2. Sécurisation de la démarche par composants dans le temps
Grâce à la partie 2 du présent chapitre (Gestion de l'approche par composants au quotidien),
nous avons pu comprendre le degré de complexité du processus de remplacement des
composants. Face à cela, les Groupes ont dû mettre en place des « parades ».
Les outils informatiques
En raison de la spécificité des calculs liés à l’identification des composants, les Groupes
(souvent limités par les fonctionnalités offertes par leur ERP) sont contraints de réaliser
l’ensemble des calculs de façon manuelle, via Excel. Dans la mesure où pour chaque
composant les hypothèses à retenir sont nombreuses, il est indispensable pour les Groupes de
sécuriser leurs fichiers de travail afin de les rendre opposables aux différents contrôles.
Chez EDF SA, un fichier sera décrit comme « opposable » s’il permet de remonter à
l’information source de manière claire et rapide. Ainsi, tous les fichiers de travail doivent :
-
Être uniformisés, c'est-à-dire fonctionner selon la même logique et les mêmes critères,
-
Prévoir l’ensemble des hypothèses possibles tout en restant faciles d’utilisation,
-
Être pérennes et évolutifs ; c'est-à-dire permettre une utilisation des fichiers sur
plusieurs années.
AURELIEN FELTESSE
66 / 74
Notons que le Groupe C dispose quant à lui d’un outil informatique dédié qui permet de gérer
les plans d’investissement et de mises en service sur des horizons de 1 à 5 ans. L’outil aide
ainsi à la définition du programme de production immobilisée.
Mode opératoire et formation
La continuité et la cohérence de l'application de la démarche dans le temps ne peut être
assurée que si les différents acteurs qui participent au processus sont correctement formés et
informés. Tous les mouvements de personnel doivent être anticipés afin que les futurs acteurs
en charge du dossier soient à même de comprendre la démarche et de la reproduire dans le
respect des différents référentiels.
Cette « transmission de savoir » passe par des formations orales, mais aussi la rédaction de
modes opératoires. Chaque fichier de travail doit pouvoir être pris en main rapidement et sans
transformation par un successeur. La rédaction de notes décrivant les différents traitements
comptables à mener est une nécessité pour assurer une cohérence de l'approche par
composants au fil des années.
La mise à jour des référentiels
Comme nous l’avons vu pour EDF SA, chaque composant fait l’objet d’une note de doctrine
spécifique. Le contexte économique ou industriel pouvant évoluer, chaque note est rédigée
avec une obligation de révision périodique. Cette spécificité « contraint » les services
doctrinaires et comptables à s’interroger de manière régulière sur l’actualité des principes
prescrits par une note.
B. REMISE EN CAUSE DES PRINCIPES INTERNES EN PLACE
Lors des entretiens réalisés, deux Groupes m’ont fait part des problématiques actuelles qu’ils
cherchent à solutionner.
Un référentiel qui ne semble plus correspondre aux réalités techniques actuelles
Les acteurs du Groupe A rencontrés ne sont pas satisfaits de l’application de l’IAS 16 faite
par le Groupe depuis 2005, et notamment de l'approche par composants. C’est pourquoi, un
AURELIEN FELTESSE
67 / 74
groupe de travail a été lancé en 2014 afin de se réinterroger sur l’interprétation du cadre
normatif ; l’esprit de l’IAS 16 est-il correctement appliqué par le Groupe ? Les décisions de
décomposition faites en 2005 répondent-elles vraiment aux réalités techniques actuelles ?
L’équipe projet mise en place aura pour objectif de revoir et de faire évoluer les règles
internes relatives à l'approche par composants : seuil d’identification de composants, durée
d’utilité, famille de composants identifiés, etc.
Un référentiel trop détaillé qui complexifie le suivi des composants
Comme le Groupe B, le Groupe E n’a pas attendu l’apparition de l'approche par composants
dans les référentiels IFRS et PCG pour appliquer une telle démarche. En effet, dans les années
90’ alors que le Groupe subit une transformation organisationnelle importante (changement de
forme juridique) il a été exigé de dresser un bilan exhaustif et détaillé du patrimoine.
C’est pourquoi le Groupe E dispose depuis plus de 20 ans d’un référentiel Groupe très
détaillé, très précis (presque pièce par pièce), avec une déclinaison par pays. Ainsi, le nombre
d’immobilisations aujourd’hui en service atteint presque le seuil des 2 millions.
Et même si cette décomposition est fortement appréciée lors des inventaires, un tel découpage
impose un lourd suivi lors des opérations d’investissements. Aujourd’hui, les équipes
comptables du Groupe E s’interrogent sur le niveau de décomposition des immobilisations
dont l’entreprise a réellement besoin. Une recherche du bon équilibre entre niveau
d’information nécessaire et complexité du suivi doit être menée, le tout sans mettre en péril la
qualité des inventaires.
CONCLUSION SUR PARTIE 3 – CHAPITRE 2
La première application de l'approche par composants datant maintenant depuis presque 10
ans, les défis que doivent surmonter les Groupes aujourd’hui tournent autour du suivi de la
démarche dans le temps. Alors que certains Groupes cherchent à sécuriser le processus de
remplacement, d’autres remettent en cause les principes existants.
La dernière partie de ce mémoire sera justement l’occasion d’étudier un moyen de
contournement de l'approche par composants pour les Groupes voulant revenir en arrière,
mais aussi les prérequis organisationnels pour les Groupes qui au contraire, veulent
poursuivre et sécuriser la démarche.
AURELIEN FELTESSE
68 / 74
IV. LIMITES PRATIQUES DE L'APPROCHE PAR COMPOSANTS ET
FACTEURS CLES DE SUCCES
Dans la dernière partie de ce mémoire, nous allons nous intéresser aux limites de l'approche par
composants et plus particulièrement aux moyens comptables permettant d’y déroger. Nous
verrons ensuite quels sont les facteurs indispensables permettant d’assurer le succès d’une
démarche par composants pour les entités souhaitant améliorer ou sécuriser leur démarche.
A. LES INSTALLATIONS COMPLEXES SPECIALISEES (ICS)
Pour le Groupe D, l'approche par composants n’est que peu utilisée. En effet, en raison de son
activité le Groupe considère pour ses actifs industriels être en présence d’Installations
Complexes Spécialisées (ICS). Le plan comptable général de 1982 définissait les ICS
« comme des unités complexes fixes d’usage spécialisé pouvant comprendre des
constructions, matériels ou pièces qui, même séparables par nature, sont techniquement liées
pour leur fonctionnement et que cette incorporation de caractère irréversible rend passibles du
même rythme d’amortissement ».
Comme le note le BOI 4 A-13-05 du 30 décembre 2005, les ICS « ne sont pas expressément
visées dans les règlements CRC n°2002-10 et 2004-06. L’article 311-2 du PCG précise
seulement que lorsque des éléments constitutifs d’un actif sont exploités de façon
indissociable, un plan d’amortissement unique est retenu pour l’ensemble de ces éléments ».
La norme IAS 16 précise quant à elle qu’une « partie significative d'une immobilisation
corporelle peut avoir une durée d'utilité et un mode d'amortissement identiques à la durée
d'utilité et au mode d'amortissement d'une autre partie significative de la même
immobilisation. Ces parties peuvent être regroupées pour déterminer la dotation aux
amortissements ».
Le principe des ICS va donc à l’encontre des règles relatives à l'approche par composants.
C’est pourquoi, le Comité d’urgence du CNC a précisé « qu’il demeure possible de pratiquer
l’amortissement sur une durée et un mode unique pour l’ensemble d’une installation
complexe spécialisée quand ses éléments constitutifs sont exploités de façon indissociable,
AURELIEN FELTESSE
69 / 74
c’est-à-dire qu’aucun remplacement n’est prévu, ni prévisible lors de la comptabilisation
initiale de l’immobilisation. Il est précisé que cette situation devrait rester exceptionnelle en
pratique » (avis n° 2005-D du 1er juin 2005).
Ainsi, une note de doctrine interne du Groupe D définit les ICS comme « un ensemble intégré
technologiquement dont, toutes les parties ne peuvent fonctionner qu’ensemble. Un ICS ne
doit pas faire l’objet d’une décomposition en composants ».
Cette même note précise qu’un composant ne sera identifié que s’il représente plus de « 10%
de la valeur de l’immobilisation auquel il est rattaché et est supérieur à 5 million d’euros en
valeur absolue (...) Ce seuil pourra être abaissé en fonction de la taille des unités ».
Dans les faits, malgré une forte pression des commissaires aux comptes dans les années
2003/2005, le Groupe D n’a recours à l'approche par composants que dans très peu de cas.
Cette décision de gestion se justifie :
-
Par la nature très spécifique des actifs,
-
Et par l’absence de plus value économique de la démarche pour le Groupe. Adopter
l'approche par composants de manière globale engendrerait une trop grande
complexité
en
matière
de
suivi
des
opérations
d’investissements
et
de
désinvestissements et une montée de version trop coûteuse du système d’information.
B. LES FACTEURS CLES DE SUCCES DE L'APPROCHE PAR COMPOSANTS
Le Groupe C souligne que l’identification de composants aux durées de vie propre permet
d’avoir une vision plus économique des comptes. Mais mettre en place une approche par
composants et la suivre dans le temps nécessite un certain nombre de prérequis
organisationnels.
L’ensemble des entretiens menés auprès des Groupes de notre cas d’étude nous permettent
ainsi de proposer quelques préconisations, quelques recommandations afin d’assurer la
fiabilité, la stabilité et la pérennité de la démarche pour l’organisation.
AURELIEN FELTESSE
70 / 74
L’anticipation
Comme nous avons pu le voir, l’identification de composants après la mise en service d’une
immobilisation rend le processus de suivi des remplacements beaucoup plus complexe. C’est
pourquoi, il faut identifier au plus tôt les composants. Pour cela :
-
Des études poussées doivent être menées sur les durées de vie technique des différents
éléments des immobilisations existantes, et
-
Des plannings d’investissements fiables doivent être élaborés. Il faudra trouver un
horizon temporel qui soit adapté à la complexité industrielle de l’organisation.
D’autre part, comme nous avons pu le voir dans la partie dédiée à la sécurisation du processus
de remplacement (chapitre 2, section III, paragraphe B, sous-paragraphe 2) des groupes de
travail doivent être mis en place afin d’anticiper leur mise en service comptable de la manière
la plus pertinente.
La communication et la fiabilité des données
En tant que fonction support, les services comptables ne sont que des opérateurs au service de
l’entreprise. Ils sont donc dépendants des informations que les autres départements leur
transmettent. Ainsi, une comptabilité ne peut être sincère et représenter une image fidèle de
l’entreprise que s’il existe une communication suffisante entre les acteurs.
Cette communication doit surtout être fiable et pertinente. Les données transmises doivent
être à jour, disponibles facilement et précises. Ces qualités sont primordiales dans le cadre de
l'approche par composants car un planning d’investissements incomplet pourrait entraîner la
non-prise en compte en comptabilité d’évènements économiques majeurs pour l’entreprise.
A titre d’exemple, les services de comptabilité du Groupe C souligne que le découpage d’une
immobilisation en composants est facilité par le dialogue permanent avec les opérationnels, et
surtout avec les fournisseurs auxquels on demande un certain niveau de détail des montants
facturés.
AURELIEN FELTESSE
71 / 74
Le respect du rôle de chacun
Comme le remarque le Groupe C, il ne faut pas oublier que le métier travaille selon une
logique de productivité et d’efficacité opérationnelle. Il ne doit pas être encombré de
procédures comptables. C’est la comptabilité qui est au service de l’opérationnel et non
l’inverse. Cela peut, par exemple, être problématique pour l’évaluation des dépenses de
seconde catégorie. En effet, lors de révision d’une installation la main d’œuvre représente une
part importante du coût. Il est donc nécessaire de mettre en place un pointage des activités des
opérationnels qui soit précis sans être trop lourd dans leur travail quotidien. En pratique, il
faut que l’organisation trouve le bon équilibre.
La connaissance de l’organisation
Aujourd’hui, le comptable ne peut se contenter de connaître les référentiels normatifs en
vigueur. Il doit connaître les réalités du métier de son entreprise pour pouvoir appliquer
correctement les normes. Le comptable doit acquérir des connaissances techniques pour
comprendre les problématiques des opérationnels et traduire le plus justement leurs activités
en comptabilité. Pour les composants, cet aspect est essentiel car c’est avant tout des réalités
techniques (avaries, fortuit, défaut de fabrication, entretien, réparation) qui conditionnent la
durée de vie des matériels, et donc leur remplacement.
Les outils
Enfin, le dernier prérequis pour qu’une démarche par composants puisse être suivie
facilement est lié aux outils informatiques. En cas de forte volumétrie de données, les services
de comptabilité doivent pouvoir trouver une vraie aide dans des logiciels performants,
adaptés, et faciles d’utilisation. Les traitements manuels doivent être minimisés afin de
garantir une cohérence et une sécurisation des données.
CONCLUSION SUR PARTIE 4 – CHAPITRE 2
La dernière partie de ce mémoire aura été l’occasion d’ouvrir des pistes de réflexion aux
Groupes qui souhaitent pérenniser l'approche par composants ou au contraire l’éviter tout en
restant dans la légalité. Encore une fois, c’est le contexte industriel qui déterminera l’utilité
pour un Groupe d’appliquer ou non l'approche par composants.
AURELIEN FELTESSE
72 / 74
CONCLUSION GENERALE
Réponse aux objectifs
Les objectifs fixés en introduction de ce mémoire étaient nombreux et ambitieux mais semblent
avoir été atteints. Les études théoriques puis empiriques de l'approche par composants ont
permis d’avoir un aperçu complet de la démarche en adoptant une vision comparative entre
plusieurs Groupes. Nous ne nous sommes pas contentés de dresser une liste de concepts mais
nous avons étudié de manière pratique la gestion et le suivi des composants afin de dresser
quelques préconisations. Ainsi, une entité voulant mettre en place une démarche par
composants, un auditeur désirant améliorer sa technique d’audit, ou encore un étudiant
souhaitant parfaire ses connaissances sur les composants pourrait trouver dans ce mémoire un
certain nombre de points pertinents, et de pistes de réflexion.
Il semble que pour les entreprises, l’aspect « suivi » au quotidien de l'approche par composants
présente un réel enjeu car les impacts financiers sont importants, notamment pour des Groupes
comme EDF. Des outils de travail fiables (logiciel dédié par exemple) et surtout une
communication permanente entre les différents services est indispensable. L'approche par
composants fait ainsi partie des normes qui ont modifié les rapports organisationnels.
Limites du cas d’étude
On peut toutefois remettre en cause l’échantillon étudié. En effet, aucun groupe de taille
intermédiaire n’entre dans le cas d’étude, aucune comparaison intrasectorielle n’a pu être
menée et la majeure partie des Groupes ont été ou sont encore des EPIC (Etablissements
Publics Industriel et Commercial). Si l’on souhaitait approfondir le travail, c’est sûrement sur
ces limites qu’il faudrait se concentrer. Mais, on peut aussi considérer que c’est l’hétérogénéité
des Groupes qui composent le benchmark qui rend ce mémoire pertinent. Sans cette diversité
d’applications de l'approche par composants, nous n’aurions peut-être pas eu une vision aussi
riche des interprétations d’une norme comptable.
AURELIEN FELTESSE
73 / 74
Et maintenant ?
Lorsque j’ai décidé de mener l’étude interentreprises, c’était dans l’objectif de pouvoir trouver
dans d’autres Groupes des bonnes pratiques transposables chez EDF. Finalement, les entretiens
m’ont fait prendre conscience que les normes IFRS sont interprétées par les entreprises en
fonction de leur contexte industriel et/ou en fonction de leurs politiques commerciales. Chaque
Groupe est ainsi caractérisé par un certain nombre de contraintes et d’enjeux qui ne vont pas
tous dans le même sens que l'approche par composants.
Pour certains Groupes, la gestion des composants n’est pas seulement une obligation comptable
mais aussi une aide dans la planification des investissements, un moyen d’anticiper et de lisser
les charges dans le temps. Pour d’autres, les composants ne sont qu’une contrainte SI,
consommateurs de temps et sans plus value. Mais alors on peut se poser la question suivante,
notamment au vue du niveau de détail des documents de référence : l'approche par composants
enrichit-elle vraiment l’information financière ?
AURELIEN FELTESSE
74 / 74
ANNEXES
Annexe 1
Méthodologie de recherche
Annexe 2
Les méthodes de reconstitution du coût d’origine des composants lors du
changement de méthode comptable
Annexe 3
Impacts de la première application de la nouvelle règlementation sur
l'approche par composants
Annexe 4
Exemple de questions que doit se poser l’auditeur lors de la vérification de
la programmation des opérations
Annexe 5
Questionnaire d’entretien
Annexe 6
L’organisation en Centre de Services Partagés Comptabilité (CSP-C)
adoptée par EDF
CONFIDENTIEL
I
ANNEXE 1 – METHODOLOGIE DE RECHERCHE
La démarche méthodologique adoptée pour la rédaction de ce mémoire s’est faite en trois temps :
-
Collecte de tous les écrits pertinents sur l'approche par composants ;
-
Collecte des informations relatives aux Groupe EDF ;
-
Collecte des informations relatives aux Groupes du benchmark.
1. Collecte de tous les écrits pertinents sur l'approche par composants
Afin de garantir l’actualité, l’exactitude ainsi qu’une certaine exhaustivité dans nos propos, il
a été nécessaire de multiplier les sources d’information au sens propre : bibliothèques
universitaires, bibliothèque de l’Ordre des Experts Comptables, et inévitablement Internet.
Grâce à cela, les supports d’information ont été nombreux : textes légaux et règlementaires,
revues et ouvrages professionnels, supports de présentation de l’OEC, presse spécialisée,
ouvrages de comptabilité générale, papiers de recherche, mémoires d’expertise comptable,
thèses de doctorat, etc. Plus d’une trentaine de documents ont ainsi été présélectionnés.
Après collecte de ces informations, une hiérarchisation et un tri des informations a été opéré
afin d’éviter les doublons, les imprécisions, les sources « hors-sujets » ou « obsolètes ». Notre
état de l’art a ainsi été « réduit » à 23 documents.
2. Collecte des informations relatives aux Groupe EDF
Au sein d’EDF, la collecte des informations s’est faite à deux niveaux :
-
Il a fallu dans un premier temps récupérer l’ensemble des documents internes : notes
de doctrine, supports de présentation pour réunion et documents de travail. Grâce à
cela et avec les recherches réalisées à l’étape 1, il a été aisé d’identifier les points clés
attachés aux composants et de commencer à percevoir les réels enjeux. Une première
version d’un questionnaire d’entretien a ainsi pu être rédigée.
CONFIDENTIEL
II
-
Ce questionnaire a été « testé » auprès de six acteurs du Groupe émanant soit des
équipes doctrinaires, soit des équipes comptables. Ces entretiens ont pu mettre en
évidence quelques limites : un nombre trop important de questions et un vocabulaire
trop marqué par les termes utilisés au sein d’EDF. Le questionnaire a donc été remis
en forme suite aux différents constats afin d’aboutir à la version définitive se trouvant
en Annexe 5. Mais ces entretiens ont rempli un autre objectif : collecter les points de
vue du terrain, c'est-à-dire de salariés qui ont réellement participé à la mise en place,
au développement et au suivi de l'approche par composants au sein du Groupe.
3. Collecte des informations relatives aux Groupes du benchmark
Après avoir pris contact avec des interlocuteurs susceptibles de répondre au questionnaire, il a
été indispensable de se renseigner plus en détail sur leur entreprise (actualité, poids des
immobilisations, enjeux du secteur, informations publiées sur l'approche par composants, etc.)
afin de pouvoir « piloter » les entrevues.
A noter que pour mener ce type d’entretien et arriver à obtenir des informations d’un
interlocuteur soumis à aucune contrainte, il est indispensable de savoir écouter et de faire
comprendre à l’intéressé qu’il peut lui aussi retirer un gain de l’entrevue. Sur la base d’une
«.stratégie donnant-donnant » (une information contre une autre), il faut convient alors de se
détacher du questionnaire afin d’accroître la liberté et la spontanéité des échanges.
CONFIDENTIEL
III
ANNEXE 2 – LES METHODES DE RECONSTITUTION DU COUT D’ORIGINE DES
COMPOSANTS LORS DU CHANGEMENT DE METHODE COMPTABLE
L’exemple proposé ci-dessous est un extrait de la Revue Française de Comptabilité (RFC) de
Mars 2005 (N°375). Cet article de P. SCHEVIN s’intitule Réflexion - L’amortissement par
composants.
Enoncé
Soit une immobilisation acquise 100, il y a 4 ans, et amortissable sur 10 ans. Elle va être
décomposée en la structure (durée d’amortissement inchangé), et en un composant A (qui doit
être renouvelé tous les 6 ans).
Les amortissements antérieurement pratiqués s’appliquaient à l’immobilisation dans sa
globalité et s’élève à [ 100 x 4 / 10 ] = 40.
Méthode 1 – Reconstitution du coût historique amorti
A partir des factures d’origine, ou afférentes au dernier remplacement
A partir des factures d’origine, l’entité va décomposer l’immobilisation en une structure de
valeur d’origine 73, et un composant A d’une valeur d’origine 27. Le supplément
d’amortissement va être porté en déduction des capitaux propres.
A partir de la répartition du coût actuel
D’après l’entité, le composant A sur une immobilisation neuve identique représente 30 % du
montant total de l’immobilisation. Là encore, le supplément d’amortissement sera porté en
déduction des capitaux propres.
CONFIDENTIEL
IV
Méthode 2 – Réallocation des valeurs comptables
D’après l’entité, le composant A représente 30 % du montant total de l’immobilisation, avec
une durée de vie résiduelle de 2 ans. Cette méthode prospective n’a pas d’impact sur les
capitaux propres.
Méthode 3 – Evaluation des actifs à la juste valeur
L’entité détermine les valeurs d’origine et les valeurs de remplacement suivantes :
La variation de valeur de l’actif qui découle de cette méthode est portée en capitaux propres.
Conclusion
Cet exemple permet de comprendre que les différentes méthodes sont plus ou moins difficiles
à mettre en place et laissent plus ou moins de place à l’expertise de l’entreprise. Par ailleurs,
comme le montre le tableau ci-dessous, le choix de l’entité pour l’une des méthodes n’aura
pas les mêmes implications.
Impacts sur les
capitaux propres
CONFIDENTIEL
Méthode 1
A
Méthode 1
B
Méthode 2
Méthode 3
- 7,2
-8
Pas d’impact sur les
capitaux propres
+ 9,87
V
ANNEXE 3 – IMPACTS DE LA PREMIERE APPLICATION DE LA NOUVELLE
REGLEMENTATION SUR L'APPROCHE PAR COMPOSANTS
Le tableau proposé ci-dessous est un extrait du Mensuel de l’ordre des experts-comptables :
« Science - Indépendance - Conscience » de Janv. 2006 (N°238). Cet article de L. LEVESQUE
s’intitule Les nouvelles règles comptables : la convergence plan comptable/IFRS en marche.
Méthode rétrospective de
reconstitution du coûts historiques
Méthode prospective de
réallocation des valeurs nettes
Autorisée dans les comptes
individuels ?
Oui
Oui
Autorisée dans les comptes
consolidés des sociétés non cotées ?
Oui
Oui
Autorisée dans les comptes
consolidés des sociétés cotées ?
Oui
Non
(non compatible IFRS)
Evaluation de l’impact de la première
application
Rétrospective
Prospective
Comptabilisation de l’impact
Capitaux propres à l’ouverture de 2005
Compte de résultat de l’exercice
2005
Impact fiscal
Oui, mais possibilité d’opter pour
l’amortissement dérogatoire
Non
Obligation de présenter des comptes
pro forma en annexe
Oui (Art. 130-5 du PCG)
Non
Information en annexe
Oui
Oui
Les immobilisations dont les VNC est
nulle sont-elles concernées ?
Oui
Non
Amortissement des biens
décomposables
CONFIDENTIEL
- Ventiler les valeurs d’origine des
immobilisations entre les différents
composants
- Ventiler les valeurs nettes
comptables à l'ouverture entre les
- Déterminer un plan d’amortissement différents composants
pour chaque composant
Déterminer
un
plan
- Recalculer les amortissements des d'amortissements pour chaque
années antérieures de chaque composant composant déterminé sur la base de
tels qu’ils auraient été pratiqués si cette sa valeur nette comptable et de la
nouvelle méthode avait toujours été durée d'utilisation réelle restant
appliquée
- Pas de modification des
- L’écart sur amortissements de la amortissements antérieures, donc
structure et de certains composants peut pas d'écarts
faire
l’objet
d’un
amortissement
dérogatoire
VI
ANNEXE 4 – EXEMPLE DE QUESTIONS QUE DOIT SE POSER L’AUDITEUR LORS DE
LA VERIFICATION DE LA PROGRAMMATION DES OPERATIONS
Extrait du mémoire « De la provision pour gros entretien et grandes révisions à la mise en
œuvre d’une approche par composant : un cadre règlementaire structurant pour le passage
aux normes internationales. Application au cas particulier du matériel roulant ferroviaire »
de Christine Dorange (2007) afin d’illustrer le guide de contrôle qu’elle propose.
Les informations généralement recherchées par les auditeurs relatives à la programmation des
opérations de grande révision
Contrôles possibles liés à la programmation des opérations de grandes révisions
CONFIDENTIEL
VII
ANNEXE 5 – QUESTIONNAIRE D’ENTRETIEN
Date : _____________________________
Interlocuteur : _____________________
Entreprise : ________________________
Fonction : _________________________
Prise de connaissance de l’organisation
Périmètre des opérations
Dépenses de première
catégorie
Année de première application de la démarche par
composants
Périmètre des composants de première catégorie à
la clôture de l'exercice 2013
Mode de comptabilisation (composant ou provision)
en IFRS et en NF
Dépenses de seconde
catégorie
Motivation du mode de comptabilisation
Un changement de méthode est-il intervenu depuis
la première application des IAS/IFRS ?
Ces dépenses résultent-elles d'une obligation légale,
règlementaire ou contractuelle ?
Programmation des remplacements / des investissements
Comment est identifiée une affaire de l’expression du besoin à la mise en
service du composant remplaçant ?
(conception d’un programme, validation des investissements,
comptabilisation des opérations de mise en service / hors service, suivi des
traitements)
Quelle est la documentation relative aux dates de programmation ?
Existe-t-il un programme de remplacement / d’investissement ?
Si oui, sur quel horizon temporel ?
Avec quelle périodicité, ce programme est-il revu ?
CONFIDENTIEL
VIII
L'initialisation des composants à remplacer et la mise en service des
remplaçants
Quelle est la méthode de calcul du coût d'origine des composants à
remplacer ?
Quels sont les paramètres à prendre en compte ?
Existe-t-il des coûts de référence ou chaque remplacement est unique ?
Si coût de référence, sont-ils exprimés en euros constants, ou en euros
courants ?
Comment suivez-vous la correcte initialisation des composants à
remplacer et leur mise hors service ?
(manuellement /outil SI, comptables/équipe dédiée, périodiquement/au
fil de l’eau)
Le suivi de l’approche par composants
Rencontrez-vous/Avez-vous rencontré des difficultés dans la mise en
place/dans le suivi de l'approche par composants ?
(problématiques industrielles, informatiques, comptables,
organisationnelles)
Dans votre activité, l'identification de composants sur un type de biens
peut-elle être généralisée à tous les biens de même nature ?
Sur quels points les auditeurs internes / externes
se concentrent-ils lors de leurs interventions sur les composants ?
Sur des projets innovants, avez des groupes de travail pour assurer une
identification dès l'origine de composants ?
Disposez vous d'autre(s) initiative(s) / outil(s) / groupe(s) de travail pour
assurer le suivi de la démarche par composant ?
CONFIDENTIEL
IX
ANNEXE 6 – L’ORGANISATION EN CENTRE DE SERVICES PARTAGES
COMPTABILITE (CSP-C) ADOPTEE PAR EDF
En 2009, le Groupe EDF a pris la décision de réorganiser les fonctions supports afin de les
regrouper au sein d’une direction unique : la Direction des Services Partagés (DSP).
Ainsi, la DSP est divisée en quatre centres dont le Centre des Services Partagés Comptables
(CSP-C) qui agit comme un prestataire comptable externe. Pour l’ensemble de ses clients (les
divisions et les directions opérationnelles d’EDF SA), le CSP-C :
-
Produit et arrête les comptes dans le respect des délais et des normes comptables
édictées par la Direction Financière,
-
S'assure de la qualité des comptes et des dispositifs de contrôle de son périmètre,
-
Contribue à la gestion des référentiels et à l'amélioration des performances de la filière.
Le CSP-C est notamment composé du :
-
Processus Synthèse ; En s’appuyant sur l’ensemble des contributions des processus
opérationnels, il coordonne les opérations de clôture, de contrôle et d'analyse des
comptes. II est l'interlocuteur privilégie du contrôle de gestion des Directions et des
Divisions clientes et de la Division Comptabilité Consolidation du Groupe.
-
Processus Immobilisations ; son objectif est d'assurer, pour le compte des Directions
d'EDF S.A., avec un haut niveau de performance : la mise à jour du patrimoine de
l'entreprise, un suivi des affaires d'investissement, la gestion comptable des stocks
(hors combustibles), et des opérations du domaine de la fiscalité.
CONFIDENTIEL
X
BIBLIOGRAPHIE
CONFIDENTIEL
XI
Textes législatifs et règlementaires
1. Règlement IFRS
-
Norme comptable internationale 16 – Immobilisations Corporelles, Journal official de
l’Union Européenne (L.320/72) – 29 novembre 2008
2. Principaux règlements du CRC et avis du CNC intégrés au PCG
-
Règlement n°2002-10 du CRC du 12 décembre 2002 relatif à l’amortissement et la
dépréciation des actifs.
-
Avis du Comité d’urgence du CNC 2003-E du 9 juillet 2003 concernant les modalités
de première application de la comptabilisation par composants et des dispositions
transitoires prévues à l’article 15 du règlement n°2002-10 du CRC relatif à
l’amortissement et la dépréciation des actifs.
-
Règlement CRC 2003-07 du 12 décembre 2003 modifiant l’article 15 du règlement
n°2002-10 du CRC relatif à l’amortissement et la dépréciation des actifs.
-
Règlement CRC 2004-06 du 23 novembre 2004 relatif à la définition, la
comptabilisation et l’évaluation des actifs
-
Article 311-2 du PCG du 1er janvier 2005 relatif aux conditions de comptabilisation
des composants
-
Avis du Comité d’urgence du CNC 2005-D du 1er juin 2005 afférent aux modalités
d’application des règlements n°2002-10 relatif à l’amortissement et la dépréciation des
actifs et n°2004-06 relatif à la définition, la comptabilisation et l’évaluation des actifs.
3. Textes fiscaux
-
Bulletin officiel des impôts 4 A-13-05 du 30 décembre 2005
-
Dispositions relatives aux frais d’entretien et de réparation, Lefebvre fiscal 2013
CONFIDENTIEL
XII
Revues professionnelles et supports de présentation de l’OEC
-
Revue Française de Comptabilité n°375, P. SCHEVIN (Mars 2005), Réflexion L’amortissement par composants,
-
Revue Fiduciaire Comptable n°335 (Janvier 2007), Les modifications du plan
d’amortissement
-
Science – Indépendance – Conscience n°238, L. LEVESQUE (Janvier 2006), Les
nouvelles règles comptables : la convergence plan comptable/IFRS en marche
-
Support de présentation de l’OEC, E. VANEL, D. DEPAËPE et G. PICAULT (Juin 2007),
Plus-values, amortissements et provisions : où en est-on un an après ?
Article de presse
-
Philippe Bailly (Novembre 2006), Comment les entreprises ont-elles appliqué en 2006
les nouvelles dispositions relatives aux Actifs dans leurs comptes sociaux ?
Ouvrage professionnel
-
Dossiers pratiques Francis Lefebvre (Juin 2006), Amortissements, nouveau régime,
comptabilisation par composants, Editions Francis Lefebvre
Ouvrages de comptabilité générale
-
O. BARBE et L. DIDELOT (2013/14), Comptabilité approfondie, Editions Nathan
-
B. CASPAR et G. ENSELME (2012), Manuel de comptabilité approfondie, Editions Litec
Rapports annuels
-
Document de référence d’EDF des années 2003, 2012 et 2013.
-
Document de référence des entreprises du benchmark des années 2012 et 2013.
CONFIDENTIEL
XIII
Mémoires d’expertise comptable
DORANGE Christine, « De la provision pour gros entretien et grandes révisions à la mise en
œuvre d’une approche par composant : un cadre règlementaire structurant pour le passage aux
normes internationales. Application au cas particulier du matériel roulant ferroviaire » – 2007.
VALLEE Guylène, « La comptabilisation du grand entretien dans le secteur de l'aéronautique :
la nécessaire évolution des normes françaises dans le cadre de la convergence vers les normes
internationales » – 2005.
Thèses de doctorat
SIMON Christian, « Le passage aux normes comptables IAS/IFRS : impacts organisationnels
sur le périmètre de la fonction comptable et financière », Université de Paris IX-Dauphine,
Mention Sciences de Gestion – Décembre 2010
DEMARIA Samira, « Les choix d’options comptables lors de la première application des
normes IAS/IFRS : Observation et compréhension des choix effectués par les groupes
français », Université de Sofia Antipolis, Mention Sciences de Gestion – Octobre 2008
Papiers de recherche
COULEAU-DUPONT Annelise et DEMARIA Samira, « Le processus de changement comptable
normatif : une analyse des pratiques organisationnelles », GREDEG (Groupe de Recherche en
Droit, Economie, Gestion) de l’Université de Sofia Antipolis – Février 2010
GAREL Gilles, GIARD Vincent et MIDLER Christophe, « Management de projet et gestion des
ressources humaines », GREGOR (Groupe de Recherche en Gestion des Organisations) de
IAE de Paris – Mai 2001
CONFIDENTIEL
XIV
Téléchargement