Le Continu et le Discret 109
conscience simple dotée toutefois d’un certain sens physique dira plutôt que
le fer n’est pas le fer, mais que c’est une forme qui apparaît comme le résultat
d’un certain assemblage d’électrons, de protons et de neutrons… à savoir que
le fer est simplement une scène où trois acteurs principaux jouent leur rôle.
Ces mêmes acteurs forment ailleurs une autre représentation, dans
l’aluminium par exemple, et une autre encore dans le soleil. Pour la simple
conscience physique, le fer n’est pas le fer et le soleil n’est pas le soleil, ce
sont des scènes particulières du grand spectacle qui nous entoure, dans lequel
les rôles sont répartis et le scénario établi. Nous devons admettre que les
acteurs principaux, comme d’ailleurs toute la suite des figurants, ne forment
pas la scène à eux seuls : ils ne sont, comme dans toute pièce, que le moyen
grâce auquel la scène se joue et nous apparaît. L’électron, le proton et le
neutron ne choisissent pas tous seuls leurs états mais ces états se réalisent en
eux, à savoir, les états leurs adviennent de l’extérieur, ils les subissent (cf. le
modèle de Bohr). Regardant ce spectacle, la conscience simple comprend que
les solutions scéniques sont déterminées par certaines règles de dramaturgie.
Cette dramaturgie possède dans sa base, les nombres ainsi que leurs relations
(évidemment arithmétiques) et ce sont justement ces nombres et leurs rela-
tions qui harmonisent tous les phénomènes : les scènes ne sont pas occasion-
nelles, elles sont arrangées. C’est à dire que l’organisation du monde (cos-
mos = ordre) relève des nombres et non des participants. Des physiciens
contemporains, comme les émules de Bohr, pourraient dire que : « Le nombre
est l’essence de toutes choses et l’organisation de l’univers présente en géné-
ral dans ses déterminations un système harmonique de nombres et de rela-
tions entre ces nombres. » En réalité, cette assertion se réfère au système
quantique pythagoricien et on la trouve dans la Métaphysique d’Aristote [3].
Le système pythagoricien commence par le nombre Un. C’est nécessaire
car si l’on veut comprendre la singularité (une chose), Un est la première
catégorie de la pensée. Un doit être actif selon soi et pour soi car, à l’instar
du nombre quantique principal, il représente le monde. « Les pythagoriciens
affirmaient que les éléments (les attributs) des nombres sont d’être soit pairs,
comme l’infini, soit impairs comme le fini et, en même temps que Un est à la
fois pair et impair, car Un ajouté au pair produit l’impair et ajouté à
l’impair il produit le pair … Un tire son origine des deux parités, ainsi que
les nombres le font de Un. » [3]
Les nombres ont des caractéristiques, mais elles sont statiques et ne peu-
vent à elles seules se transformer en une autre. Comme le pair se transforme
en impair en ajoutant (en faisant agir) Un et inversement, il en résulte néces-
sairement que c’est Un qui est actif et qui doit contenir en soi les deux carac-
téristiques. Il est en soi en même temps pair et impair. Il n’est donc pas sim-