Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Ferrorésonance dans les réseaux par Christophe KIENY Chef du Groupe Matériels Bobinés à la direction des Études et Recherches d’Électricité de France et Abdelkader SBAÏ Maître assistant à l’École Normale Supérieure d’Enseignement Technique de Tunis 1. 1.1 1.2 D 4 745 - 3 — 3 — 3 — — — 3 4 4 2. 2.1 2.2 2.3 2.4 Classification des régimes ferrorésonnants..................................... Régime fondamental (normal ou ferrorésonnant).................................... Régime sous-harmonique........................................................................... Régime quasi périodique ............................................................................ Régime chaotique........................................................................................ — — — — — 5 5 6 6 6 3. 3.1 Modélisation. Cadre mathématique adapté à ce phénomène..... Modélisation ................................................................................................ 3.1.1 Traitement numérique des équations différentielles....................... 3.1.2 Recherche des régimes permanents................................................. Théorie des bifurcations ............................................................................. 3.2.1 Notions sur les bifurcations............................................................... 3.2.2 Différents types de bifurcation .......................................................... Mise en équations du régime permanent et méthodes numériques...... 3.3.1 Méthodes de Galerkine et des fonctions descriptives..................... 3.3.2 Point fixe de l’application de Poincaré.............................................. 3.3.3 Méthode de collocation...................................................................... 3.3.4 Méthodes des perturbations.............................................................. — — — — — — — — — — — — 7 7 7 7 8 8 8 9 9 10 10 10 — — — — 11 11 12 12 — — — — 13 14 15 15 3.2 3.3 4. 4.5 4.6 4.7 Situations réelles pouvant donner lieu à la ferrorésonance sur un réseau............................................................................................. Circuit série monophasé avec transformateur de tension ....................... Transformateur condensateur de tension ................................................. Poste en piquage ou en antenne sur une ligne à double terne ............... Renvoi de tension sur une ligne longue ou reprise de service sur un réseau très capacitif......................................................................... Système déséquilibré à neutre isolé.......................................................... Système déséquilibré à neutre raccordé à la terre ................................... Transformateurs raccordés à un réseau à neutre isolé ............................ 5. Conclusion ................................................................................................. — 16 Références bibliographiques ......................................................................... — 16 4.1 4.2 4.3 4.4 D 4 745 3 - 1996 Exemple simple de ferrorésonance..................................................... Mise en équations. Courbes caractéristiques ........................................... Constatations ............................................................................................... 1.2.1 Multiplicité des solutions. Valeur critique de la tension. Branche de solution............................................................................ 1.2.2 Dépendance et sensibilité aux conditions initiales.......................... 1.2.3 Sensibilité au paramètre tension. Phénomène de saut................... Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 745 − 1 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX ____________________________________________________________________________________________________ a ferrorésonance est un phénomène de résonance non linéaire qui peut affecter les réseaux de transport et de distribution de l’électricité. Elle désigne tous les phénomènes oscillatoires, le plus souvent périodiques, qui se manifestent dans un circuit électrique composé d’une part d’une ou de plusieurs inductances non linéaires (comportant des matériaux ferromagnétiques saturables) et d’autre part d’un réseau comprenant au moins une capacité alimentée par une ou plusieurs sources de tensions généralement sinusoïdales. La propriété essentielle et caractéristique d’un tel phénomène est de présenter au moins deux régimes stables pour une même excitation. Classiquement, en électrotechnique, on considère que les caractéristiques électriques des composants sont linéaires et, alors, le régime permanent atteint est unique et indépendant des conditions initiales. Ici, la présence d’inductances aux caractéristiques non linéaires peut conduire à des comportements radicalement différents et même surprenants pour les électrotechniciens non avertis. Plusieurs régimes permanents différents peuvent apparaître dans un circuit donné en fonction des conditions initiales (flux rémanent, instant d’enclenchement, etc.). Généralement, l’un d’eux est celui que l’on attend habituellement et les autres sont anormaux et parfois même dangereux pour le matériel électrique, car ils présentent des surtensions ou des surintensités. Le phénomène a déjà été observé de nombreuses fois dans des réseaux, et il est ainsi possible de classifier les comportements que l’on rencontre le plus souvent. Nous verrons au paragraphe 2 que des régimes périodiques de période multiple de celle de la source (par exemple 3 fois celle de la source) et même des régimes non périodiques peuvent apparaître. Les circuits typiques pouvant donner lieu à la ferrorésonance sont également connus par expérience et sont répertoriés. Une première distinction mérite d’être faite dès à présent. Un circuit ferrorésonnant est dit série, lorsque la capacité principale du réseau linéaire est en série avec l’élément non linéaire ; il est dit parallèle lorsque la capacité est en parallèle avec l’élément non linéaire. Au paragraphe 4, nous présentons ces circuits types, en indiquant à chaque fois quelles sont les méthodes d’étude adaptées pour prédire leur comportement et quelles sont les solutions pratiques généralement mises en œuvre pour éliminer les gênes dues à la ferrorésonance dans chaque cas. Comme nous l’avons déjà fait remarquer, les méthodes de calcul, basées sur l’approximation linéaire utilisée habituellement par les électriciens, ne permettent pas d’analyser ou de prédire un comportement ferrorésonnant dans un circuit. C’est essentiellement pour cela, mais également parce que le phénomène est rare, que la ferrorésonance est mal connue. Des progrès récents dans le domaine des mathématiques et de l’analyse numérique nous permettent maintenant de disposer du cadre mathématique et des outils numériques adaptés à son étude. Notre connaissance du phénomène a ainsi progressé. Au paragraphe 3, nous présentons ces théories et ces outils qui permettent de mieux comprendre et d’étudier plus finement la ferrorésonance. Commençons d’abord, paragraphe 1, par étudier un cas simple qui va nous permettre de mieux comprendre ce qu’est la ferrorésonance. Il s’agit du circuit électrique le plus simple présentant ce phénomène surprenant. Précisons tout de même que, malgré sa simplicité, ce circuit est représentatif de la situation réelle suivante : un transformateur de tension bobiné mis hors tension par un disjoncteur présentant une capacité entre ses contacts ouverts. Le circuit obtenu est formé d’une source de tension (le réseau amont), d’une capacité (le disjoncteur) et d’une inductance non linéaire (l’enroulement primaire du transformateur de tension). La méthode de calcul que nous utilisons est très simple, mais les résultats qu’elle donne et que nous présentons sont tout de même représentatifs de ce qui peut effectivement se passer avec le transformateur de tension. L D 4 745 − 2 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ___________________________________________________________________________________________________ 1. Exemple simple de ferrorésonance Considérons le circuit de la figure 1, comprenant l’enroulement primaire d’un transformateur alimenté par une source de tension sinusoïdale de valeur efficace E par l’intermédiaire d’un circuit RC, exemple bien connu de la ferrorésonance série en monophasé. La courbe de saturation du transformateur, en coordonnées V, I, (V et I en valeurs efficaces), est donnée par la figure 2. On note que la courbe de saturation est constituée de trois branches caractéristiques : — une branche OA sensiblement rectiligne où la loi de variation de V (I) est pratiquement linéaire ; ici, le transformateur n’est pas saturé, il se comporte comme une inductance constante égale à sa valeur à l’origine L = L0 ; la relation V (I) s’écrit : V = L0 ω I avec ω la pulsation de la source ; — une deuxième branche BC sensiblement rectiligne où le transformateur est très saturé ; dans cette zone, tout se passe comme si le fer se comportait comme l’air (la perméabilité relative µ r tend vers l’unité), le transformateur est de nouveau équivalent à une inductance constante L = Ls ; la loi de variation de V (I) est pratiquement : V = V 0 + Ls ω I — une troisième branche AB intermédiaire appelée coude de saturation où la relation V (I) n’est pas linéaire ; en particulier, on ne peut plus définir une inductance constante équivalente au transformateur. Figure 1 – Schéma d’un circuit ferrorésonnant série simple FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX 1.1 Mise en équations. Courbes caractéristiques Pour simplifier l’explication, nous négligeons pour le moment toutes les pertes (R = 0) et nous supposons que la source de tension est sinusoïdale et idéale. De même, nous négligeons les harmoniques et admettons que les composantes fondamentales de v et i dans leur décomposition en série de Fourier sont en quadrature de phase (pertes nulles). En notations complexes, l’équation du circuit de la figure 1 s’écrit alors : E = VC + V avec VC = – j XC I (1) où XC = 1/C ω est la réactance de la capacité C, ce qui donne, en faisant intervenir les modules de ces grandeurs, c’est-à-dire les valeurs efficaces : E = V – XC I (2) et on peut écrire : E (I) = V – XC I Nous pouvons donc facilement tracer la courbe E (I) à partir de V (I) et VC = XC I. La valeur efficace E de cette grandeur E (I) est représentée sur la figure 3a. Notons que la courbe E (I) présente deux zones quasi linéaires : — pour les valeurs de I qui ne saturent pas le transformateur ; — pour les valeurs de I le saturant complètement. Le point M0 caractérise le passage du courant d’un état inductif à un état capacitif. Lorsque E (I) est positif (V < VC ), E et V sont alors en opposition de phase. L’existence du point M0 dépend évidemment de la valeur de la capacité C du condensateur pour une fonction V (I) donnée. À cause des pertes (quoique faibles dans un circuit ferrorésonnant), la courbe E (I) réelle est légèrement décalée. En particulier, le point M0 ne correspond pas à une tension d’alimentation rigoureusement nulle. La source fournit l’énergie nécessaire à l’équilibre des pertes. Pour simplifier nous assimilons ces pertes à celles dissipées dans la résistance R constante placée en série dans le circuit (figure 1). Dans ces conditions, la nouvelle courbe E (I) est représentée sur la figure 3b. Intéressons-nous aux points de fonctionnement correspondant à diverses valeurs de la tension source E. On peut construire la courbe I (E) (figure 4) à partir de la courbe E (I) (figure 3b) en échangeant simplement les axes. On obtient une courbe, dite courbe en S typique de la ferrorésonance que l’on retrouve par différentes méthodes. Son analyse va nous permettre de faire certaines constatations (§ 1.2) qui illustrent des comportements typiques et des notions générales pour la ferrorésonance. 1.2 Constatations 1.2.1 Multiplicité des solutions. Valeur critique de la tension. Branche de solution Figure 2 – Courbe de saturation d’un transformateur dans le plan tension efficace-courant efficace en négligeant les harmoniques Selon les valeurs de E (figure 4), il existe plusieurs types de comportements. — Si E est petit, il n’existe qu’un seul point de fonctionnement possible (M1 pour E = E1) et la figure 4 montre que le courant est sensiblement proportionnel à la tension E. Ici, le transformateur n’est pas saturé ; il se comporte comme une inductance linéaire équivalente à son inductance à l’origine. Le régime obtenu est appelé régime normal. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 745 − 3 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX ____________________________________________________________________________________________________ — Il existe une première valeur critique E2 de la tension source pour laquelle on observe deux points de fonctionnement en M2 et en A. Le régime correspondant au point de fonctionnement M2 est un régime normal ; par contre, celui correspondant au point A est un régime ferrorésonnant ; il caractérise la tension source minimale au-delà de laquelle la ferrorésonance risque d’apparaître. — Pour E > E2, nous avons trois solutions possibles (M3, M3’, M3’’ pour E = E3). M3 correspond à un régime normal, M3’’ à un régime ferrorésonnant ; M3’ est une solution du système mais elle correspond à un régime instable. Elle ne se maintient pas en régime permanent dans le circuit réel ; la moindre perturbation la fait disparaître et le régime permanent qui se stabilise est le régime normal ou le régime ferrorésonnant. — Une nouvelle valeur critique de la tension source correspond à deux points de fonctionnement B et M4 pour E = E4. Le point B correspond à la limite. — Pour E > E4, nous ne trouvons qu’un seul point de fonctionnement (M5 pour E =E5) et le régime ne peut être que ferrorésonnant. Le transformateur est très saturé ; il se comporte comme une inductance dans l’air. On voit que les valeurs E2 et E4 de la tension d’alimentation sont des valeurs limites ou valeurs critiques du paramètre tension d’alimentation. Les solutions correspondantes situées aux points A et B sur la courbe sont appelées points limites. Ces points divisent la courbe en trois branches : de l’origine au point B, nous avons la branche normale, de B à A une branche instable et au-delà de A, la branche ferrorésonnante. 1.2.2 Dépendance et sensibilité aux conditions initiales Figure 3 – Courbes de tension en valeurs efficaces On voit sur cet exemple simplifié mais réaliste que plusieurs régimes stables peuvent exister en régime permanent dans un circuit ferrorésonnant. Les solutions M3 et M3’’ obtenues pour la même excitation E3 en sont un exemple. L’une ou l’autre des 3 solutions M3, M3’ ou M3’’ apparaît selon la valeur des conditions initiales (charge de la capacité, flux rémanent à l’instant d’enclenchement, etc.). On peut définir une frontière pour les conditions initiales. Si l’on est d’un côté de cette frontière, on converge vers la solution M3 ; si l’on est de l’autre, on se stabilise sur la solution M3’’. La solution M3’ correspond à un point de cette frontière. On comprend dès à présent que, au voisinage du point M3’, la solution est très sensible aux conditions initiales. La grande sensibilité aux conditions initiales est une caractéristique de la ferrorésonance. 1.2.3 Sensibilité au paramètre tension. Phénomène de saut Figure 4 – Points de fonctionnement correspondant à diverses valeurs de la tension efficace source E D 4 745 − 4 Nous pouvons étudier comment le système se comporte lorsque l’on fait varier lentement sa tension d’alimentation (figure 4). En partant de la tension nulle, le point représentatif de la solution passe successivement par les points M1, M2, M3. Dans cette zone, le point solution dépend continûment de la valeur du paramètre tension. Il en est de même sur la branche ferrorésonnante. Lorsque l’on arrive au point B, et que la tension d’alimentation dépasse la valeur critique E4, le point représentatif de la solution ne peut rester au voisinage de B, mais saute au point M4. Physiquement, il y a une variation brutale de l’amplitude du courant : on parle de phénomène de saut. De même, en partant de la branche ferrorésonnante, lorsque la tension d’alimentation devient inférieure à la valeur critique E2, l’amplitude du régime solution chute brutalement et le point représentatif du régime passe de A en M2. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ___________________________________________________________________________________________________ FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX Figure 5 – Influence de la résistance sur le phénomène de ferrorésonance On voit ainsi que le phénomène dépend continûment du paramètre tension, sauf en des valeurs critiques où son comportement est très sensible à la valeur de ce paramètre. Nous avons expliqué ce phénomène pour le paramètre tension d’alimentation. Il est similaire pour un autre paramètre comme la résistance représentant les pertes. La figure 5, construite à partir de plusieurs courbes I (E) pour différentes valeurs R de la résistance, illustre cela. On note que le phénomène de ferrorésonance est atténué lorsque les pertes augmentent et même que les phénomènes de saut et de multiplicité de solutions disparaissent pour une valeur critique de R (cas R > R4). Cette discussion, sur un exemple simple avec une modélisation simplifiée, permet de comprendre l’essentiel des caractéristiques de la ferrorésonance. Mais le phénomène est de nature plus complexe que dans cet exemple. En particulier, les régimes pouvant apparaître sont de natures variées ; nous allons, paragraphe 2, en donner une classification. 2. Classification des régimes ferrorésonnants Un certain nombre de cas de ferrorésonance sont apparus dans des réseaux électriques et on dispose d’enregistrements de signaux (tensions, courants...) en fonction du temps, effectués à ces occasions. Des essais spécifiques sur maquettes et des simulations numériques ont également permis de constituer cette base d’exemples [3] [7]. L’analyse de ces différents signaux permet de classifier les signaux observés en 4 types distincts pour le régime permanent. La classification des signaux est faite en régime permanent, c’est-à-dire après extinction du régime transitoire. Habituellement on ne parle de ferrorésonance au sens strict que pour des phénomènes qui se maintiennent en régime permanent. Néanmoins, certaines opérations sur le réseau électrique peuvent donner lieu à un phénomène pas nécessairement stable et qui n’existe qu’en régime transitoire [35]. C’est le cas d’amplification des harmoniques à l’enclenchement d’un ou plusieurs transformateurs. Des surtensions dangereuses peuvent se maintenir plusieurs secondes puis disparaître et le système retourne à l’état normal (figure 6). On parle alors de ferrorésonance transitoire. Il est clair qu’il est difficile de distinguer un régime transitoire normal dans un système non linéaire, d’un régime transitoire ferrorésonnant ; la distinction est très qualitative. Figure 6 – Enregistrement d’un régime ferrorésonnant transitoire Cela dit, plaçons-nous dans une situation de ferrorésonance que l’on puisse considérer comme permanente et mesurons, en un point du circuit, la tension et le courant. Ceux-ci peuvent évoluer suivant quatre régimes que l’on peut caractériser chacun : — soit par le spectre des signaux qui est le diagramme d’amplitude des fréquences contenues dans le signal tension V (t ) ou courant I (t ) mesuré ; — soit par une image stroboscopique obtenue en mesurant les valeurs instantanées de la tension et du courant à un instant donné de la période fondamentale du réseau et en reportant le point correspondant dans le plan V, I. La figure obtenue à l’écran d’un oscilloscope (comme pour une figure de Lissajous) permet de reconnaître rapidement le type de comportement. Les quatre types de comportement ou types de signaux de ferrorésonance que l’on rencontre sont les suivants : — régime fondamental (normal ou ferrorésonnant) ; — régime sous-harmonique ; — régime quasi périodique ; — régime chaotique. 2.1 Régime fondamental (normal ou ferrorésonnant) C’est le plus simple : tension et courant ont pour période fondamentale celle du réseau, tout en comportant chacun plus ou moins d’harmoniques. Le spectre des signaux est un spectre de raies formé du fondamental et de ses harmoniques ; l’image stroboscopique se limite à un point. Ce type de régime apparaît dans deux situations typiques : le régime normal et le régime ferrorésonnant fondamental. Le régime normal est voisin de la solution obtenue en hypothèse linéaire. Si on néglige la non-linéarité de l’élément saturable, ce qui est légitime lorsque l’amplitude des signaux est faible, on trouve que toutes les grandeurs varient sinusoïdalement dans le temps, comme en régime linéaire. Du fait de la présence de la non-linéarité, il y a une légère déformation des signaux, une distorsion, mais les signaux restent à la même fréquence que celle de la source (figure 7). Pour les régimes ferrorésonnants fondamentaux, les signaux sont toujours périodiques de même fréquence f que la source, mais la distorsion est non négligeable (figure 8). L’amplitude de la tension est importante de sorte que l’élément non linéaire est saturé. Le spectre est formé de raies aux fréquences f, 2f, 3f... En général, le régime est symétrique et on ne trouve que les harmoniques impairs ; mais des régimes dissymétriques peuvent exister. L’image stroboscopique est toujours un point, mais ce point est Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 745 − 5 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX ____________________________________________________________________________________________________ éloigné de celui représentant le régime normal qui existe dans le même circuit. L’un ou l’autre régime apparaît selon les conditions initiales comme nous l’avons indiqué dans l’introduction et au (§ 1.2.2). Si l’on fait varier continûment un paramètre du système comme la tension d’alimentation, dans un circuit où un régime normal et un régime ferrorésonnant peuvent exister comme dans l’exemple du paragraphe 1, le passage d’un type de régime à l’autre se fait brutalement. La distinction entre le régime normal et le régime ferrorésonnant est parfois délicate à faire ; dans le cadre de la théorie des bifurcations, la notion de branche de solution sera introduite au 3.2.1, ce qui va permettre de mieux préciser cette distinction. 2.2 Régime sous-harmonique Ce type de régime se rencontre fréquemment dans les circuits ferrorésonnants. Il s’agit, pour un circuit passif alimenté par une source périodique de période T, d’un régime stable de période nT avec n entier (par exemple une période 3 fois plus longue pour un régime sous-harmonique 3) (figure 9). Le spectre d’un tel régime est un spectre de raies, formé d’un fondamental, à une fréquence f/n (où f est la fréquence de la source), et de ses harmoniques. La fréquence f de la source fait partie du spectre, c’est l’harmonique n du spectre. À cette fréquence, de l’énergie est apportée par la source au système, ce qui maintient l’oscillation. En stroboscopie, on voit n points. 2.3 Régime quasi périodique Ici encore on a à faire à un spectre de raies, mais le régime n’est plus périodique (figure 10) ; les fréquences présentes dans le spectre ne sont plus du type nf, c’est-à-dire fondamental et harmoniques, mais on peut trouver deux fréquences f et f’ telles que la fréquence de chaque raie présente dans le spectre puisse s’écrire sous la forme : fr = nf + mf’ Si l’on observe le phénomène en stroboscopie, l’image obtenue est une courbe fermée (figure 11) formée d’un nombre infini de points distincts. 2.4 Régime chaotique On l’appelle aussi régime irrégulier (figure 12). Il se présente avec un spectre de fréquences continu ; il y a bien des fréquences privilégiées, mais le spectre ne s’annule sur aucune plage de fréquences. En stroboscopie, les points de l’image se répartissent sur tout l’écran, ou plus exactement dans un sous-ensemble de l’écran appelé attracteur étrange (voir la notion d’attracteur, § 3.2.1) ; c’est un objet fractal [21] de dimension non entière K avec 1 < K < 2. Figure 7 – Enregistrement d’un régime normal fondamental Figure 9 – Enregistrement d’un régime sous-harmonique 3 (harmonique 1/3) Figure 8 – Enregistrement d’un régime ferrorésonnant fondamental Figure 10 – Enregistrement d’un régime quasi périodique D 4 745 − 6 (3) avec n et m entiers. f/f’ est un nombre réel non fractionnaire (f et f’ sont incommensurables). Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ___________________________________________________________________________________________________ FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX Cette formulation du problème permet d’étudier le comportement dynamique des variables en simulant pas à pas dans le temps les équations représentatives du système. La méthode dite de simulation numérique en transitoire fournit la réponse transitoire et la solution correspondant à des grands temps (en régime permanent) pour des valeurs des paramètres fixés et des conditions initiales données. Figure 11 – Image stroboscopique d’un régime quasi périodique Figure 12 – Enregistrement d’un régime chaotique 3. Modélisation. Cadre mathématique adapté à ce phénomène 3.1 Modélisation 3.1.1 Traitement numérique des équations différentielles La modélisation d’un circuit ferrorésonnant conduit à un système d’équations différentielles non linéaires dépendant du temps t et de divers paramètres physiques. Ce système peut être présenté sous la forme (4), qui est une forme générale pour tout système dynamique : dX ------------ = F ( X, t, λ ) (4) dt X ∈ n (avec espace des réels est le vecteur dont les composantes sont les variables d’état (flux, tensions et courants) apparaissant sur le réseau ; la dimension de ce vecteur dépend de la finesse de la modélisation, λ ∈ p est le vecteur contenant les paramètres du réseau (longueur des lignes, impédances, tension d’alimentation, etc.), F est une fonction dépendant explicitement du temps, du fait de la présence d’un terme représentant généralement la tension d’alimentation (terme de forçage périodique) sous forme d’une fonction périodique généralement sinusoïdale. La présence de transformateurs, dont les caractéristiques ne sont pas linéaires, rend F non linéaire par rapport à ses variables Xi , 1in. Les résultats obtenus sont quantitatifs. En effet, il est possible de modéliser le circuit dans ses moindres détails et les résultats que l’on obtient sont directement les tensions et les courants dans les différentes branches du réseau. Malgré ces avantages, la méthode n’est pas pour autant dénuée d’inconvénients. Elle conduit en effet à des calculs de plus en plus lourds à mesure que l’on représente de plus en plus finement le réseau. Pour obtenir de bons résultats, il faut souvent travailler avec un pas de calcul très petit (10 à 50 µs). Comme les phénomènes de ferrorésonance sont longs à se stabiliser, il faut simuler le phénomène sur plusieurs secondes. De ce fait, les temps de calcul sont longs et les études sont chères. De plus, il faut tenir compte des différentes conditions initiales dont chaque combinaison nécessite une simulation à part. Comme déjà mentionné (§ 1.2.3), un autre problème inhérent au phénomène de ferrorésonance est la grande sensibilité des résultats aux paramètres du circuit. Pour mener à bien une étude, il faut tester un grand nombre de variantes, sachant que l’on n’aura jamais une garantie totale d’absence de risque, même si la simulation n’a rien fait apparaître (si les cas dangereux ne font pas partie des cas testés). Par ailleurs, il faut des modèles de composants valides pour ces niveaux de surtensions et ces formes d’ondes, ce qui n’est pas forcément facile. Il est donc nécessaire de prendre des marges sur les valeurs limites de paramètres, délimitant la zone où l’on est certain que la ferrorésonance n’existe pas ou n’est pas gênante. Pour contourner ces inconvénients et particulièrement les régimes transitoires longs, on a cherché des méthodes qui calculent directement le régime permanent sans passer par la simulation du régime transitoire. 3.1.2 Recherche des régimes permanents Pour l’étude des systèmes dynamiques, les mathématiciens ont toujours porté beaucoup d’intérêt au comportement asymptotique pour des temps longs, ce que nous appelons le régime permanent. Les formulations utilisées généralement pour le déterminer conduisent à une équation du type : G (Y, λ) = 0 où Y est le vecteur inconnu et λ le vecteur paramètre. Nous présentons quelques-unes de ces méthodes de mise en équation du régime permanent au paragraphe 3.3. Dans cette recherche directe de solutions en régime permanent, on obtient des solutions stables, c’est-à-dire qui se maintiennent effectivement dans le système physique, et des solutions instables qui existent comme solution de (5), mais qui, comme solution de (4), ne se maintiennent pas en régime permanent et à la moindre perturbation évoluent vers une solution stable. La connaissance du régime permanent pour une valeur des paramètres de l’étude est certes intéressante pour l’exploitant du réseau électrique mais insuffisante. Une vision globale du comportement du système pour l’ensemble des valeurs possibles des paramètres s’impose, ce qui permet en particulier d’estimer quelles sont les marges disponibles entre le cas étudié et les solutions dangereuses voisines. Grâce aux développements mathématiques récents, particulièrement dans l’étude des systèmes dynamiques non linéaires, il est possible d’avoir une telle vision. Les phénomènes de saut, de multiplicité des solutions pour un même jeu de paramètres, de sensibilité Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 (5) D 4 745 − 7 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX ____________________________________________________________________________________________________ aux conditions initiales, etc., sont des éléments caractéristiques des bifurcations. Le cadre mathématique dans lequel il faut se placer pour comprendre la ferrorésonance est donc celui de la théorie des bifurcations (§ 3.2) ou théorie des catastrophes. Cette théorie, cherchant à étudier qualitativement les différents types de solutions d’un système dynamique, a permis un progrès spectaculaire dans la compréhension du phénomène de ferrorésonance. périodique, il s’agit d’une courbe fermée et pour les régimes quasi périodiques d’une surface similaire à un tore. Ces ensembles sont appelés les attracteurs du système. Pour les régimes chaotiques, l’attracteur existe, mais a une structure très complexe que nous ne détaillons pas ici ; on l’a baptisé attracteur étrange. Pour les systèmes à forçage périodique, on se place souvent dans l’espace des points obtenus par stroboscopie, c’est-à-dire à t = KT (avec K nombre entier), appelé coupe de Poincaré ; l’attracteur d’une solution périodique est un point et c’est une courbe fermée pour une solution quasi périodique. 3.2 Théorie des bifurcations ■ Bassin d’attraction 3.2.1 Notions sur les bifurcations Le type de solution du système différentiel qui régit un circuit ferrorésonnant dépend des valeurs des paramètres. Pour les valeurs critiques des paramètres où les solutions changent de type (avec la classification du paragraphe 2) ou ne dépendent plus continûment des paramètres, on parle de singularité ou de bifurcation [17] [18] [19] [21]. On désigne donc sous le nom de bifurcation tout changement qualitatif dans la nature des solutions d’un système d’équations quand un ou plusieurs paramètres traversent certaines frontières dans leur espace de variation. Un point de cet espace où survient un tel événement est, par définition, un point de bifurcation. Le résultat fondamental de la théorie des bifurcations est que le nombre des bifurcations élémentaires pouvant exister est limité et que chaque type de bifurcation est répertorié. Pour la ferrorésonance, quatre types de bifurcations apparaissent principalement : les points limites (également appelés points de retournement ou bifurcations col-nœud), les bifurcations vers le tore, les bifurcations fourches et plus rarement le doublement de période. Avant de détailler ces différentes bifurcations (en dehors du doublement de période), nous allons présenter quelques autres notions mathématiques indispensables pour mieux comprendre la théorie des bifurcations. ■ Diagramme de bifurcation Pour bien visualiser une bifurcation, on se place dans un plan où l’abscisse est l’amplitude d’un paramètre du système et l’ordonnée l’amplitude d’une variable d’état de ce système ou d’une combinaison d’entre elles. Pour une valeur du paramètre, chaque solution en régime permanent est représentée par un point. Lorsque l’on fait varier le paramètre, chacun de ces points décrit une courbe ou, plus exactement, une branche. Comme un système dynamique peut avoir plusieurs régimes permanents pour une valeur de paramètre, ici, il peut y avoir plusieurs branches. L’ensemble ainsi obtenu est appelé diagramme de bifurcation. La courbe en S de la figure 4 en est un exemple. Les points où les branches se rejoignent ou se croisent sont des points de bifurcation. ■ Lignes de bifurcation Dans une équation décrivant un système physique, on trouve différents paramètres (longueurs des lignes, impédances, tensions d’alimentation, etc. dans le cas d’un système électrique). En se limitant à deux paramètres, la théorie prévoit qu’il existe différentes zones dans le plan des paramètres où différents types de solutions peuvent exister. La limite de ces zones est appelée ligne de bifurcation. On peut aussi les définir comme courbes représentant les valeurs critiques d’un paramètre en fonction d’un autre paramètre. ■ Attracteur Les solutions en régime permanent d’un système dynamique peuvent être périodiques, quasi périodiques ou chaotiques comme nous l’avons vu au paragraphe 2. Pour être complet, il faut également citer la solution stationnaire, mais on ne peut pas la rencontrer dans un circuit électrique avec une alimentation périodique. Lorsque la solution a atteint son régime permanent, les variables d’état du système restent incluses dans un sous-ensemble de l’espace des phases (ou espace des variables d’état). Pour une solution stationnaire, cet ensemble se limite à un point ; pour une solution D 4 745 − 8 L’aboutissement à une solution permanente ou une autre du système différentiel (4) dépend des conditions initiales de X. Si ces conditions initiales sont trop éloignées de l’attracteur A d’un régime permanent, alors la solution réelle ne converge pas vers A. On peut ainsi définir un bassin d’attraction, zone autour de A à laquelle X doit appartenir pour que la solution se stabilise sur A. Une solution instable à un bassin d’attraction de volume nul. Les limites de ce bassin sont des variétés invariantes (sousensemble de l’espace ayant des propriétés d’invariance par rapport à l’équation). On observe en pratique, dans le cas d’un système de dimension 2, que ces variétés invariantes sont des courbes extrêmement complexes et enchevêtrées (figure 13). 3.2.2 Différents types de bifurcation ■ Bifurcation col-nœud Une telle bifurcation, caractérisée par l’apparition ou la disparition d’un couple de points fixes stable et instable, se produit lorsque la courbe X = f (λ) (représentative du vecteur d’état en fonction du paramètre) possède une tangente verticale, sans que de nouveaux embranchements apparaissent. Un exemple de diagramme de bifurcation de type col-nœud est représenté par la figure 14. Dans ce cas, le point limite est situé à l’origine (X = 0, λ = 0). Deux branches stationnaires émergent de ce point de bifurcation : l’une stable (trait plein renforcé), l’autre instable (tireté). ■ Bifurcation fourche Si, à partir d’un point fixe, deux autres points fixes apparaissent ou disparaissent, on parle alors de bifurcation fourche. Ce type de bifurcation se produit en un point singulier où deux courbes de solutions se rencontrent. Cette bifurcation est accompagnée de changements de stabilité. La figure 15 en donne un exemple. Au passage de λ par sa valeur critique (ici λ = 0), le point fixe stable se transforme en un point fixe instable et deux autres points fixes stables apparaissent. Par raison de symétrie (figure 15), les deux branches stables sont souvent superposées dans la représentation choisie (par exemple en valeurs efficaces). ■ Bifurcation de Hopf (cas stationnaire) et bifurcation vers le tore (cas périodique) Dans le cas stationnaire, la solution stable devient instable et une solution périodique apparaît. Sur la figure 16 est représenté un exemple de bifurcation de Hopf. Dans le cas périodique, ce type de bifurcation a lieu lorsqu’une solution périodique stable devient instable et le régime stable qui apparaît n’est plus périodique mais quasi périodique. La trajectoire de solutions s’enroule autour d’un tore ; cette bifurcation est souvent appelée bifurcation vers le tore. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ___________________________________________________________________________________________________ FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX Figure 14 – Exemple de diagramme de bifurcation pour une bifurcation col-nœud à l’origine Figure 15 – Exemple de bifurcation fourche Figure 13 – Différents bassins d’attraction de l’équation de Duffing [22] 3.3 Mise en équations du régime permanent et méthodes numériques Pour la ferrorésonance, deux procédés de mise en équations sont généralement adoptés. Le premier utilise une formulation en mode fréquentiel, le deuxième en mode temporel. En mode fréquentiel, nous disposons des méthodes de Galerkine et des fonctions descriptives pour traiter les systèmes obtenus. En mode temporel, nous avons les méthodes du point fixe de l’application de Poincaré et la méthode de collocation pour la formulation du problème périodique. Ces méthodes permettent de trouver un régime permanent pour un circuit et un jeu de paramètres donnés. Lorsqu’une solution a été trouvée, on utilise généralement une technique de continuation pour en trouver d’autres. Il s’agit de modifier légèrement un Figure 16 – Exemple de bifurcation de Hopf paramètre et de lancer une recherche itérative de solution en initialisant l’inconnue avec la valeur trouvée précédemment. De proche en proche, on peut construire une courbe X fonction d’un paramètre P (combinaison de paramètres de réseau). En utilisant la terminologie de la théorie des bifurcations, on construit un diagramme de bifurcation (§ 3.2.2). 3.3.1 Méthodes de Galerkine et des fonctions descriptives Nota : le lecteur pourra utilement se reporter dans ce traité aux références [33] [34]. La ferrorésonance est un phénomène souvent périodique ; c’est pourquoi on a cherché à développer des méthodes basées sur la décomposition des signaux en série de Fourier. Parmi ces méthodes, citons la méthode de Galerkine et celle des fonctions descriptives [12] [14] [15] [18] [28] [29] [30]. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 745 − 9 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX ____________________________________________________________________________________________________ ■ Dans la méthode de Galerkine, l’inconnue est le vecteur des composantes de Fourier du flux de chaque inductance non linéaire. Les équations du système résultent de l’application des lois de Kirchhoff pour chaque harmonique, à tous les nœuds auxquels sont raccordés les éléments non linéaires (transformateurs). Dans le cas d’un seul transformateur monophasé, cela fait apparaître l’impédance de Thévenin du réseau vu depuis le transformateur. S’il y a plusieurs non-linéarités (un transformateur triphasé ou plusieurs), cet équivalent de Thévenin est une matrice Z (f ) avec f la fréquence. L’intérêt de cette approche Z (f ) est de représenter tout type de réseau, même avec des lignes à constantes réparties et en tenant compte de l’effet de peau. Dans le cas d’un seul transformateur monophasé, l’équation électrique due à l’harmonique k s’écrit : Vk = jk ω Φk = Ek – Zk Ik (6) où Vk , Φk , Ek , Z k , et Ik représentent respectivement les composantes complexes harmoniques k de la tension aux bornes de l’élément non linéaire, du flux, de la tension d’alimentation, de l’impédance équivalente de Thévenin et du courant. Ik est une fonction du vecteur Φ. On obtient ainsi une équation du type (5) : G (Φ , P ) = 0 où le vecteur paramètre P est formé des impédances harmoniques du réseau et de la tension d’alimentation. Les paramètres étant fixés, on trouve une solution Φ à l’équation par une méthode itérative (généralement la méthode de Newton). Pour le même cas de ferrorésonance, on peut limiter la recherche de solution aux signaux n’ayant qu’une ou deux raies spectrales. Les équations sont alors suffisamment simples pour que l’on puisse en trouver graphiquement une solution : c’est la méthode des fonctions descriptives [12] [15] [18]. Généralement, dans ce cas, il est même possible de trouver toutes les solutions, d’un type donné, au problème. Ces solutions simplifiées peuvent servir pour initialiser la méthode de Galerkine. ■ La méthode de Galerkine, utilisée avec une technique de continuation, permet de tracer les diagrammes et lignes de bifurcation des solutions périodiques. On sait que ces courbes peuvent avoir des formes en S (cas de la ferrorésonance fondamentale, par exemple) avec des points limites (figure 17). Malheureusement, la méthode de Galerkine ne converge pas au voisinage d’un point limite. En particulier, on ne trouvera pas de solution voisine de 4 (figure 17) pour la valeur P5 du paramètre. La méthode pseudo-abscisse curviligne [14] [16] permet de résoudre élégamment ce problème. 3.3.2 Point fixe de l’application de Poincaré Le système ferrorésonnant est décrit par une équation différentielle [11] de la forme : dX (7) ----------- = F ( X, λ , t ) dt avec X vecteur d’état, t temps, λ paramètre. Le temps intervient généralement dans la représentation de la source d’alimentation, c’est-à-dire par une fonction périodique de période T. L’étude du comportement de ce système revient à étudier l’application qui à X (0) lui associe X (T ), état du système à l’instant T. On notera cette application appelée application de retour ou application de Poincaré. Pour qu’un système ayant un état initial X soit périodique, il faut et il suffit que (X) = X, c’est-à-dire que X soit le point fixe de l’application de retour. L’équation caractérisant les régimes périodiques recherchés est donc : (X ) – X = 0 (8) elle est de la forme voulue (5) et elle est continue. Pour résoudre cette équation, on utilise une méthode itérative telle que la méthode de Newton. La fonction ( X ) est calculée simplement par une méthode de simulation en pas à pas dans le temps (méthodes de Runge-Kutta, des trapèzes, etc.). 3.3.3 Méthode de collocation Cette méthode [24] est très similaire à la méthode de Poincaré, si ce n’est que l’inconnue est la solution X (t ) sur une période discrétisée en temps et pas uniquement X (0). Cela permet d’utiliser une méthode de résolution d’équations différentielles plus performante. La contrainte X (0) = X (T ) doit bien sûr être imposée. 3.3.4 Méthodes des perturbations Figure 17 – Diagramme de bifurcation en S D 4 745 − 10 Ces méthodes [4] [13] [20] [23] sont souvent utilisées par les mathématiciens pour étudier des équations non linéaires. Ici, on traite une équation différentielle non linéaire. Le principe consiste à simplifier l’équation en faisant disparaître certains termes, en annulant certains paramètres. On peut par exemple faire disparaître de l’équation les termes représentant les pertes, ou la tension d’alimentation. On cherche ensuite à résoudre complètement la nouvelle équation (appelée équation idéale) ainsi simplifiée (par une solution analytique par exemple). Enfin, on réintroduit les termes annulés dans l’équation en les considérant comme petits. L’équation obtenue est appelée équation perturbée. On peut alors faire un développement limité ou une linéarisation de l’équation perturbée autour de la solution de l’équation idéale. On arrive ainsi à trouver la solution du système réel (perturbé) avec une certaine précision. Heureusement, dans beaucoup de cas le système réel est effectivement voisin du système idéal. Pour l’équation de Duffing, représentant la ferrorésonance série, on peut légitimement négliger les pertes et la tension d’alimentation dans un premier temps ; les solutions réelles sont obtenues par perturbation des solutions du système idéal autonome (sans terme dépendant du temps comme la tension alternative) et sans pertes, qui s’étudie simplement. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ___________________________________________________________________________________________________ FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX 4. Situations réelles pouvant donner lieu à la ferrorésonance sur un réseau La ferrorésonance peut se produire dans des circuits monophasés ou polyphasés. Les configurations de circuit y donnant lieu sont bien connues et répertoriées [3] [7]. On distingue les configurations dites série, où on trouve un condensateur en série entre l’élément non linéaire et la source de tension, des configurations dites parallèles où la capacité responsable de la ferrorésonance est en parallèle avec l’élément non linéaire. Nous citons ici les cas de ferrorésonance qui se présentent sur un réseau de transport et de distribution d’électricité : — circuit série monophasé avec transformateur de tension ; — transformateur condensateur de tension (TCT) ; — poste en piquage ou en antenne sur une ligne à double terne ; — reprise de service ou renvoi de tension sur une ligne longue ; — système déséquilibré ; — système à neutre isolé. Nous allons examiner en détail tous ces cas ; nous indiquerons en particulier les méthodes d’analyse (§ 3) les mieux adaptées à leur étude ainsi que les solutions pratiques utilisées pour chaque cas. 4.1 Circuit série monophasé avec transformateur de tension ■ Circuit Il s’agit en général d’un ou de plusieurs transformateurs de tension raccordés à un tronçon de barre par l’intermédiaire d’un disjoncteur ouvert (figure 18). C’est la capacité Cd de répartition de tension entre les chambres du disjoncteur qui est l’élément capital faisant apparaître la ferrorésonance. La figure 18a représente schématiquement la configuration d’une phase d’un réseau à haute tension. La figure 18b représente le schéma équivalent ; l’ensemble constitue alors un diviseur capacitif et peut donner lieu à des phénomènes de ferrorésonance [8] [9]. Dans le schéma de la figure 18a, la capacité C t est constituée par l’ensemble des capacités à la terre shuntant effectivement le transformateur de tension (capacité propre du transformateur, capacité vers la terre d’une phase du tronçon de réseau délimité d’une part par le disjoncteur ouvert et d’autre part par le sectionneur ouvert, etc.). ■ Type de ferrorésonance Le schéma de la figure 18b alimenté par une tension Vn peut se transformer, par application du théorème de Thévenin, en celui de la figure 18c. Cette figure nous montre que le comportement de l’ensemble peut être étudié en alimentant sous tension réduite V1 l’appareil couplé en série avec un condensateur adéquat (de capacité C t + Cd). Il s’agit donc ici de ferrorésonance série. À l’ouverture du disjoncteur sur une valeur crête de tension (situation probable car le courant dans le disjoncteur s’annule), deux phénomènes se produisent : — le maintien d’une alimentation à fréquence industrielle de l’ensemble de la capacité Ct et du transformateur à travers la capacité Cd ; la tension aux bornes du transformateur passe de la valeur Vn (tension nominale) à la valeur : V1 = Vn Cd /(Cd + C t ) Figure 18 – Ferrorésonance monophasée dans un transformateur de mesure de tension en série avec un disjoncteur ouvert le transformateur étant non saturé ; — la décharge de la capacité C t à travers l’inductance L du transformateur. Dans un tel schéma, si la décharge de la capacité C t dans L provoque la saturation de cette inductance, un phénomène de relaxation peut apparaître, correspondant à des échanges d’énergie électrostatique et d’énergie magnétique entre les capacités C t et Cd d’une part et l’inductance L d’autre part. Si les pertes engendrées au cours de cette opération (pertes cuivre et fer dans L et pertes diélectriques dans C t et Cd) sont compensées par l’énergie apportée par la source de tension, le phénomène de relaxation est entretenu et peut donner lieu à des régimes de ferrorésonance généralement périodiques du type fondamental ou sous-harmonique. Si le régime est fondamental (à la même fréquence que la source), les surtensions sont importantes et peuvent entraîner une destruction rapide du transformateur par claquage diélectrique. Dans le cas de ferrorésonance sous-harmonique, la fréquence de l’oscillation étant faible, la tension est généralement faible aussi, alors que le flux dans le transformateur dépasse légèrement le niveau de saturation ; les risques sont alors plus thermiques que diélectriques. ■ Moyens d’étude La simulation transitoire (§ 3.1.1) peut être utilisée, compte tenu de la simplicité de comportement du circuit. La méthode des perturbations (§ 3.3.4) permet d’avoir une bonne vision globale des phénomènes, mais manque un peu de précision [13] [20] [27]. Vu le caractère périodique de la ferrorésonance rencontrée dans ce type de configuration, c’est la méthode de Galerkine [9] (§ 3.3.1) qui est bien adaptée à une étude précise de ces cas. Couplée avec la méthode de la pseudo-abscisse curviligne pour déterminer les zones d’existence et de stabilité des régimes, elle permet de prédire avec précision si la ferrorésonance risque d’apparaître ou non pour une configuration de ce type. Les paramètres influents sont les pertes fer et cuivre du transformateur, les valeurs des capacités et le flux de saturation magnétique du transformateur. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 745 − 11 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX ____________________________________________________________________________________________________ ■ Solutions pratiques Dans le cas de poste équipé de disjoncteurs à plusieurs chambres avec des capacités de répartition de la tension de plusieurs centaines de picofarads, ces régimes ferrorésonnants apparaissent si les transformateurs de tension n’ont pas été étudiés spécifiquement pour. Il s’agit, pour ce type d’appareil, d’une ferrorésonance série monophasée où des régimes sous-harmoniques risquent souvent de se stabiliser. Ce phénomène apparaît généralement pendant les essais de tenue au court-circuit du secondaire, au moment de l’ouverture du court-circuit. Pratiquement, on sait bien se prémunir contre de telles situations. Il s’agit de construire des transformateurs ayant suffisamment de pertes. Si on se rend compte dans une installation existante que le phénomène risque d’apparaître, on peut équiper les postes en question d’un dispositif d’amortissement constitué généralement d’une résistance en série avec une inductance saturable le tout placé au secondaire du transformateur (figure 19)[9]. ■ Moyens d’étude La simulation transitoire (§ 3.1.1), les méthodes de Galerkine et des fonctions descriptives (§ 3.3.1), de même que les méthodes de bifurcation (§ 3.2) peuvent être appliquées efficacement à l’étude de ce type de ferrorésonance. 4.2 Transformateur condensateur de tension ■ Circuit Une solution économique pour le passage de la haute à la basse tension est d’utiliser un diviseur de tension capacitif et un transformateur, l’ensemble étant appelé un transformateur condensateur de tension (TCT), figure 20. ■ Type de ferrorésonance Cet appareil présente à lui seul toutes les conditions nécessaires à l’apparition de la ferrorésonance (condensateurs et éléments non linéaires). De plus, la présence de deux non-linéarités rend délicate la tâche du constructeur qui, malgré tout, doit concevoir un réducteur précis et sûr, donc exempt de régimes ferrorésonnants. Figure 19 – Schéma électrique d’un transformateur de tension avec circuit d’amortissement ■ Solutions pratiques Dans la conception normale, l’inductance L est accordée avec les capacités C à la fréquence de travail. Pour éviter la ferrorésonance, il faut que ce système reste légèrement désaccordé et à prépondérance inductive vu du transformateur, même en cas de saturation. 4.3 Poste en piquage ou en antenne sur une ligne à double terne ■ Circuit Il s’agit généralement de transformateurs de puissance ou de tension montés en piquage sur un terne d’une ligne à double terne dont l’un est sous tension et l’autre ouvert. Le transformateur peut être raccordé à la ligne ouverte par l’intermédiaire d’un disjoncteur dont un, deux ou trois pôles restent fermés (défaillance du disjoncteur) ; un exemple d’une telle situation est illustré par la figure 21a. Un autre cas peut se présenter, le transformateur étant raccordé en antenne au bout d’une ligne ouverte longeant une deuxième ligne sous tension (figure 21b). Le transformateur peut être relié en extrémité de ligne ou en un point quelconque de la ligne (poste en piquage alimenté d’un seul côté). ■ Type de ferrorésonance Dans ce cas, le couplage capacitif avec le deuxième circuit de la ligne supposée sous tension peut donner naissance à un phénomène de ferrorésonance de type série [4] [5] [13]. En effet, en l’absence de transformateur, il y a, par influence de la ligne sous tension, une tension induite sur la deuxième ligne ; pour certaines valeurs des capacités de couplage Cc entre conducteurs des deux lignes et C t entre conducteurs du tronçon ouvert et la terre ; cette tension est capable de maintenir le transformateur en régime ferrorésonnant. Cette capacité de couplage est en série avec l’élément non linéaire ; il s’agit donc d’une ferrorésonance série. En général, cette ferrorésonance est triphasée mais, dans le cas où un seul pôle du disjoncteur DP reste fermé, une seule phase est affectée par le phénomène et, par conséquent, moyennant une modélisation adaptée, peut être analysée comme un circuit série monophasé. Les régimes sont du type sous-harmonique ou fondamental comme pour toutes les ferrorésonances séries. Un exemple spectaculaire s’est produit aux États-Unis sur un réseau THT avec des transformateurs 525/230 kV [2]. Il a été observé une tension 12 fois supérieure à celle qui aurait existé par simple couplage capacitif sur la ligne ouverte avec transformateur déconnecté, tension nettement supérieure à la tension nominale. Un exemple de surtension est représenté sur la figure 22. On note les fortes surtensions en régime ferrorésonnant. Figure 20 – Schéma électrique d’un transformateur condensateur de tension D 4 745 − 12 ■ Moyens d’étude Pour les cas entièrement triphasés, on utilise généralement les outils de simulation en transitoire (§ 3.1.1). La méthode de Galerkine (§ 3.3.1) peut aussi être employée pour le calcul de la ferrorésonance triphasée périodique. Pour les cas se ramenant à un circuit ferrorésonnant monophasé, toutes les méthodes s’appliquent, en particulier la méthode des perturbations (§ 3.3.4). Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ___________________________________________________________________________________________________ FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX Figure 23 – Schéma équivalent d’un circuit ferrorésonnant parallèle (modèle avec deux capacités) 4.4 Renvoi de tension sur une ligne longue ou reprise de service sur un réseau très capacitif Figure 21 – Exemples d’alimentation de transformateur en piquage ou en antenne sur une ligne à double terne dans un cas d’apparition de ferrorésonance possible Figure 22 – Régime ferrorésonnant dans un poste en piquage sur un terne d’une ligne à double terne ■ Solutions pratiques Une structure de poste en coupure permet d’éviter de rendre le phénomène improbable (il faut une double défaillance de disjoncteur pour que la ferrorésonance apparaisse). Comme le tronçon de ligne, sur lequel le transformateur est en piquage ou en antenne, est déconnecté du réseau dans les configurations où la ferrorésonance apparaît, on choisit d’installer une protection qui met le circuit à la terre en cas de ferrorésonance. La détection du phénomène se fait généralement en mesurant : — les surtensions et, dans ce cas, la mise à la terre est immédiate ; — la distorsion de la tension et la mise à la terre est alors temporisée. Ce principe permet de protéger le matériel pour les différents types de régime pouvant apparaître, en particulier les régimes sousharmoniques [5]. ■ Circuit Il s’agit ici de ferrorésonance parallèle [4] [10] [11] [20] [23] car la capacité responsable de la ferrorésonance est en parallèle avec l’élément non linéaire. Les situations pratiques rencontrées sont généralement triphasées, mais on peut imaginer des cas monophasés. Les études sur modèle réduit se font souvent avec un circuit monophasé. La figure 23 donne un exemple de modélisation dans un cas monophasé. On y retrouve un modèle d’alternateur pour la source, une cellule en Π pour la ligne et une inductance saturable pour le transformateur. Les cas de ferrorésonance rencontrés dans les réseaux peuvent apparaître dans les procédures de renvoi de tension sur une ligne longue depuis une source hydraulique, pour tous les cas d’antennes longues alimentant un transformateur de grande puissance, ou lors de reprise de service sur un réseau très capacitif comme un réseau de câbles de grande agglomération, ou un réseau étendu de pays en voie d’industrialisation. Dans tous les cas, pour que le phénomène apparaisse, il faut que l’impédance de court-circuit du réseau soit faible devant la puissance nominale des transformateurs à vide alimentés et que la fréquence propre du circuit sans les non-linéarités soit faible. Les cas critiques apparaissent lorsque cette fréquence est proche d’un harmonique de rang assez bas de la tension d’alimentation. De plus, il faut bien sûr que le réseau soit très peu chargé. ■ Type de ferrorésonance Les régimes rencontrés sont de deux types : permanent ou transitoire. Les cas les plus critiques du point de vue des paramètres du réseau peuvent se maintenir en régime permanent et apparaître spontanément lors d’une petite variation d’un paramètre (cf. solutions pratiques). Les régimes ferrorésonnants transitoires peuvent apparaître dans des situations moins critiques mais ne se déclenchent qu’à l’occasion de manœuvres violentes comme des enclenchements brusques de transformateurs. Les régimes de ferrorésonance (permanent ou transitoire) sont généralement harmoniques, c’est-à-dire fondamentaux, avec de fortes amplitudes d’harmoniques dans le spectre, mais également quasi périodiques [11]. Dans les cas de ferrorésonance harmonique, le phénomène peut être interprété comme une résonance du réseau (source + ligne) excitée par les courants harmoniques des éléments non linéaires. De plus, du fait de la présence des non-linéarités, cette fréquence de résonance du réseau dépend de l’amplitude de l’oscillation, et on peut assister à un phénomène de synchronisation de l’oscillation sur un harmonique de la fréquence de la source d’alimentation. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 745 − 13 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX ____________________________________________________________________________________________________ Les amplitudes des surtensions vont de quelques pour-cent à 100 pour-cent, voire plus. Les régimes transitoires sont longs et peuvent atteindre des durées de l’ordre de la minute. 4.5 Système déséquilibré à neutre isolé ■ Moyens d’étude Pour ce type de phénomène en régime permanent, seules les méthodes issues de la théorie des bifurcations (§ 3.2) donnent réellement satisfaction bien que, actuellement, elles n’aient été appliquées que sur des modèles monophasés simplifiés [23] [31]. Dans la mesure où des régimes quasi périodiques peuvent apparaître, les méthodes fréquentielles (§ 3.3.1) sont à utiliser avec prudence. Par contre, si on s’intéresse uniquement aux régimes harmoniques, la méthode de Galerkine est intéressante, même en régime transitoire. Des méthodes de perturbations (§ 3.3.4) basées sur la formulation en équations différentielles ont également été utilisées [4] [20]. Les simulations numériques (§ 3.1.1) et sur modèle physique réduit sont de bons outils, mais il faut toujours faire de nombreuses simulations, compte tenu de la sensibilité des régimes aux paramètres. La fréquence de résonance du réseau, la puissance nominale des transformateurs et la charge du réseau sont les paramètres les plus importants à prendre en compte pour estimer le type de régime pouvant apparaître. ■ Circuit On risque de rencontrer ce système au moment des travaux sous tension ou en cas de fusion de fusible sur des réseaux à moyenne tension. Le phénomène apparaît lorsqu’une phase d’une ligne ou d’un câble n’est plus alimentée directement par le réseau, mais au travers d’un transformateur de puissance à neutre isolé situé en aval (figure 26). ■ Solutions pratiques La meilleure solution consiste à éviter de se trouver dans une situation à risques. Dans les cas extrêmes, on peut résoudre le problème en connectant une charge résistive au réseau. Pour les cas transitoires, les disjoncteurs à résistance d’insertion éliminent le phénomène également. Moyennant une marge de sécurité raisonnable, un critère pratique permet d’estimer la zone à risques. Devant être simple, ce critère est exprimé en fonction de deux paramètres principaux : la fréquence propre du réseau et le rapport de la puissance nominale P t des transformateurs cibles (c’est-à-dire du transformateur vers lequel on renvoie la tension) à la puissance de court-circuit Pcc du réseau [10]. La tension d’alimentation est un paramètre essentiel dans un renvoi de tension. Le principal effet d’une augmentation de la tension est une augmentation du courant magnétisant des transformateurs. Tout se passe comme si les transformateurs étaient plus puissants ou plus nombreux. De ce fait, le deuxième paramètre retenu n’est plus le simple rapport de puissance mais Figure 24 – Critère de ferrorésonance permanente en cas de mise sous tension progressive P t (U/Un)9/Pcc avec U tension d’alimentation réelle et Un tension nominale. L’application de ce critère à des cas pratiques (figure 24) a permis de proposer les règles suivantes pour les comportements permanents (c’est-à-dire mise sous tension progressive du réseau) : — si la fréquence de résonance est inférieure à 100 Hz (en pratique inférieure à 110 Hz), on limite le rapport Pt (U/Un)9/Pcc à 10 ; — si la fréquence de résonance est supérieure à 100 Hz, le rapport limite est plus important mais n’a pas été établi clairement. En pratique, aucun problème n’a été rencontré. Figure 25 – Critère de ferrorésonance transitoire à l’enclenchement Pour les régimes transitoires, toujours dans le cas d’un réseau isolé sans charge, le critère est exprimé par le rapport Pt /Pcc (figure 25) et la valeur limite typique est de 5 % si la fréquence de résonance est dans la plage 120-400 Hz [31] [32]. Ce rapport augmente avec la fréquence au-dessus de 400 Hz de 2 % pour 100 Hz. Pour les fréquences propres inférieures à 120 Hz, la valeur limite est nettement plus faible, mais là aussi sa valeur n’a pas été établie. Ce phénomène de surtension transitoire disparaît dès que la charge du réseau dépasse une certaine valeur : en pratique les risques sont éliminés lorsque la charge raccordée au réseau a une puissance égale ou supérieure à 10 % de P t . Figure 26 – Transformateur de puissance couplé en triangle alimenté sur deux phases au travers d’un câble D 4 745 − 14 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ___________________________________________________________________________________________________ La capacité du câble de la phase 1 est en série avec les branches magnétisantes du transformateur et les sources de tension des phases 2 et 3. Le couplage électrique est en triangle mais peut être également en étoile à neutre isolé. L’alimentation peut aussi être établie sur une seule phase. ■ Type de ferrorésonance Comme le montre la figure 26, il s’agit d’une ferrorésonance série [1] mais pas de type monophasé. Les régimes rencontrés sont de type fondamental, sous-harmonique et chaotique (§ 2). La tension aux bornes du câble peut, si certaines conditions sont remplies, atteindre des valeurs dangereuses (2 à 3 fois la tension nominale) pour le matériel et le personnel. ■ Moyens d’étude Ces phénomènes sont peu étudiés. Pour les prédire, on peut utiliser la méthode des fonctions descriptives (§ 3.3.1) et la simulation numérique (§ 3.1.1). L’utilisation de la théorie des bifurcations (§ 3.2) est possible mais n’a pas encore été entreprise. ■ Solutions pratiques Les résultats d’étude, issus principalement de l’application de la méthode des fonctions descriptives (validée par la simulation numérique), ont permis d’énoncer une règle pratique qui consiste à interdire les manœuvres monophasées sur des ensembles câbles-transformateurs dès que la longueur du câble dépasse une valeur critique fonction de la puissance du transformateur [25]. Pour un transformateur de 100 kVA, cette longueur est de quelques mètres. FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX 4.7 Transformateurs raccordés à un réseau à neutre isolé ■ Circuit Les inductances non linéaires sont souvent des transformateurs de tension (figure 28). La présence de capacité entre primaire et secondaire de transformateur d’alimentation, modélisé par une capacité entre le neutre de la source et la terre sur la figure, peut avoir une influence sur l’apparition du phénomène de ferrorésonance [6]. ■ Type de ferrorésonance Des oscillations du point neutre de la source peuvent prendre naissance (figure 29). Elles peuvent se traduire, en représentation de Fresnel, par une simple translation du point neutre dans le plan de référence de la source (figure 29a) ou par une rotation de l’affixe de celui-ci (figure 29b). Le neutre est alors le siège d’oscillations à la fréquence de la source ou à une fréquence sous-harmonique ou harmonique et dont l’amplitude peut atteindre la tension simple. Mais le phénomène le plus fréquent est le régime quasi périodique stable. 4.6 Système déséquilibré à neutre raccordé à la terre ■ Circuit La figure 27 illustre une telle configuration. Elle ne diffère de la situation précédente que par la connexion du neutre à la terre. Nous la présentons car c’est un cas de ferrorésonance potentielle, mais les valeurs des paramètres y conduisant sont très exceptionnelles. Connecter le neutre à la terre apparaît comme une solution, mais il faut signaler que l’ouverture d’un pôle de disjoncteur fait apparaître de fortes surtensions liées à l’impédance homopolaire du transformateur [26] ; de plus, le transformateur se sature et peut donner lieu à un circuit ferrorésonnant parallèle. Figure 27 – Transformateur à neutre raccordé à la terre alimenté sur deux phases au travers d’un câble ■ Type de ferrorésonance Les régimes susceptibles d’apparaître sont harmoniques ou quasi périodiques (§ 2), comme pour la ferrorésonance parallèle. ■ Moyens d’étude La simulation numérique (§ 3.1.1) et la théorie des bifurcations (§ 3.2) sont souvent utilisées pour l’analyse de ce type de ferrorésonance. Il est nécessaire de modéliser finement le transformateur pour que le phénomène puisse être étudié correctement par simulation. ■ Solution pratique Il faut que la surtension calculée sans saturation soit limitée à 20 % ou 30 % de la tension nominale pour avoir une bonne chance de ne pas accrocher la ferrorésonance. Figure 28 – Transformateurs de tension raccordés à un réseau à neutre isolé Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 745 − 15 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 FERRORÉSONANCE DANS LES RÉSEAUX ____________________________________________________________________________________________________ ■ Moyens d’étude La simulation transitoire (§ 3.1.1), les essais et la théorie des bifurcations (§ 3.2) peuvent être appliqués à l’étude de ce phénomène. ■ Solution pratique Pour éliminer ce phénomène, une solution pratique est d’introduire des pertes. On peut, par exemple, coupler les secondaires en triangle avec une résistance dans le triangle ou raccorder le neutre du transformateur d’alimentation à la terre à travers une résistance. 5. Conclusion Figure 29 – Déplacement du point neutre dans les régimes ferrorésonnants de réseaux à neutre isolé. Représentation de Fresnel Le phénomène de ferrorésonance, comme tous les phénomènes non linéaires, est assez complexe. Comme son apparition est rare, il est mal connu. En se plaçant dans le cadre mathématique des bifurcations, une bonne partie des comportements surprenants peuvent être expliqués. Des outils numériques issus des travaux mathématiques récents existent et permettent d’étudier numériquement de tels circuits. Il n’en reste pas moins que, compte tenu de la sensibilité du phénomène aux valeurs des paramètres, il est toujours nécessaire de faire une étude paramétrique large et de prendre des marges de sécurité importantes pour pouvoir garantir la non-apparition de phénomènes dangereux par apparition soit de surtension, soit de surintensité. 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