Cours III. 9. PHILOSOPHIE I SCEPTICISME II PHILOSOPHIE III

Cours III. 9.
PHILOSOPHIE
(SCIENCE)
D
OUTE ET
C
ERTITUDE
OU
E
NTENDEMENT ET
R
AISON
PLAN
I
NTRODUCTION
: Q
U
EST
-
CE QUE LA
V
É
RIT
É
?
I SCEPTICISME
A. EXPOSÉ
1
.
1
.
POSITIVISME
1.
2
. RELATIVISME
2. SCEPTICISME
B. CRITIQUE
II PHILOSOPHIE
1. PHILOSOPHIE contre SCIENCE
2. IDÉE
DE LA
PHILOSOPHIE
A. CONCEPT
B. MÉTHODE
C. SYSTÈME
3. " LE SYSTÈME DE LA SCIENCE " (HEGEL, Préface Phén. E.)
III HISTOIRE DE LA PHILOSOPHIE
1. PHILOSOPHIE ANTIQUE
2. PHILOSOPHIE MODERNE
3. PHILOSOPHIE CONTEMPORAINE
C
ONCLUSION
: P
OURQUOI
P
HILOSOPHER
?
1
INTRODUCTION
Forgée par le mathématicien grec Pythagore, l’expression philo-sophos signifie l’ami de la sagesse.
Celle-ci incluant en elle un sens à la fois pratique (comportement raisonnable) et théorique
(connaissance rationnelle), on définira la philo-sophia par une double exigence : un idéal de vie et un
idéal de pensée ou de savoir -les écoles de philosophie de l’antiquité ne furent-elles pas
indissolublement des écoles de vie et de pensée (pythagorisme, platonisme, épicurisme, stoïcisme…) ?
Et Socrate, la figure même du «sage», ne reste-t-il pas un modèle tant de conduite que de méditation ?
C’est en tout cas à ces deux titres qu’il a inspiré son disciple Platon, le « père de la philosophie » :
le premier auteur d’un système philosophique, ses prédécesseurs ne nous ayant légué de toute façon
qu'une oeuvre fragmentaire, et de facture plus littéraire que proprement philosophique.
Comme la première détermination présuppose néanmoins la seconde –comment prétendre à une vie
sage en l’absence d’une détermination conceptuelle précise de ce qu’est ou n’est pas la « sagesse » ?-,
on commencera forcément en philosophie par la Connaissance.
" Désir de connaître et amour du savoir, ou philosophie, c’est bien une même chose ? " (Platon)
Et puisque la vérité est l’idéal de tout savoir, le philosophe poursuit nécessairement cette dernière.
Avec les différentes sciences constituées / positives (mathématique, physique, anthropologie etc.),
la philosophie partage la volonté d’accéder à un savoir véritable soit le désir de vérité. C’est même là
son exigence fondamentale et inconditionnelle.
" La vérité, dont la poursuite était pour ce naturel une obligation absolue et totale " (idem
1
).
En deçà de tout agir, technique ou politique, et gouvernant ce dernier, le philosopher relève
prioritairement sinon exclusivement d’une activité théorétique normée par le Vrai.
"
La
Sagesse
est
une
science
(…).
C’est
aussi
à
bon
droit
que
la
Philosophie
est
appelée
la
science
de
la
vérité." (Aristote
2
)
A ce titre il répond à la vocation spécifique de l’homo sapiens dont le propre n’est pas de vivre mais
de s’interroger sur sa vie, en vue de comprendre le comment (conditions ou contexte) et le pourquoi
(raison ou sens) de son existence.
" Par la sagesse on n’entend pas seulement la prudence dans les affaires, mais une parfaite connaissance de
toutes les choses que l’homme peut savoir " (Descartes).
Mais quelle science ou vérité poursuit au juste le philosophe, étant entendu que les sciences
proposent déjà un certain nombre de vérités, que ce soit sur l’espace ou le nombre (mathématique),
la nature (physique) ou la société (anthropologie), en quoi elles font déjà partie de la sagesse ?
" Toutes les sciences ne sont rien d’autre que la sagesse humaine, qui demeure toujours une et toujours la même,
si différents que soient les objets auxquels elle s’applique, et qui ne reçoit pas plus de changement de ces objets
que la lumière du soleil de la variété des choses qu’elle éclaire " (idem
3
).
Or précisément si toutes les disciplines scientifiques répondent effectivement à un même projet, elles
reposent sur une base commune et tissent nécessairement des liens entre elles. On ne saurait s’adonner
à l’une, sans être renvoyé aux autres. Quiconque est en route vers la vérité se doit donc de les étudier
toutes, sous peine de faillir à sa tâche.
" Car la philosophie s’étend à tout " (Kant
4
).
Procéderait-on autrement qu’on se condamnerait à manquer la vérité, et, au lieu de celle-ci, on ne
saisirait que des vérités partielles, contrairement à l’intention philosophique même.
Séparées les unes des autres, les vérités scientifiques se rapportent en effet à des objets déterminés et
dont on peut faire l’expérience. Elles portent alors infailliblement la marque de la relativité, ne valant
que par référence au domaine concerné (théorèmes mathématiques, lois physiques, interprétations
historiques) et sous réserve du bien fondé de leurs présuppositions (axiomes, hypothèses ou choix).
Ce faisant elles partagent avec le sens commun la postulation d’une extériorité entre le discours ou les
formules qu’elles énoncent et l’objet dont ils sont censés révéler la vérité, laissant ainsi ouverte la
question d’une vérité interne : absolue ou totale dans laquelle l’énonciation coïnciderait avec l’énoncé.
1
Rép. II. 376 b et VI. 490 a
2
Méta. A. 2. 982 a 1 - α. 1. 993 b 20
3
Principes de la Philosophie Lettre-Préf. p. 557 et R.D.E. I p. 37 ; cf. égal. Spinoza, T.R.E. § 16 note
4
Logique Introd. III p. 23
2
" Habituellement, nous nommons « vérité » l’accord d’un objet avec notre représentation. Nous avons dans
ce cas comme présupposition un objet auquel la représentation que nous en avons doit être conforme. –
Au sens philosophique, par contre, vérité signifie, si on l’exprime d’une façon générale abstraitement,
accord d’un contenu avec lui-même. C’est ainsi une tout autre signification du terme « vérité » que celle qui a
été mentionnée précédemment." (Hegel)
Une telle Vérité relèverait logiquement d'un " Savoir absolu " (idem
5
).
Pour avantageuses voire indispensables que soient ces vérités produites par l’entendement
scientifique, tant pour la connaissance que pour l’action, elles ne sauraient néanmoins satisfaire
pleinement la raison humaine qui, au-delà des vérités mondaines et/ou relatives, aspire à une Vérité
totale, trans-mondaine / absolue ou «première». Et c’est tout naturellement que l’étude de celle-ci
s’appellera Onto-logie (Aristote) -Science de l’Être- ou Monado-logie (Leibniz) –Science de l’Unité-,
par opposition aux sciences positives qui traitent des multiples étants.
" Il y a une science qui étudie l’Être en tant qu’être, et les attributs qui lui appartiennent essentiellement.
Elle
ne
se
confond
avec
aucune
des
sciences
dites
particulières,
car
aucune
de
ces
autres
sciences
ne
considère
en général
l’Être en tant qu’être, mais, découpant une certaine partie de l’Être, c’est seulement de cette partie qu’elles
étudient l’attribut : tel est le cas des sciences mathématiques. Et puisque nous recherchons les principes premiers
et les causes les plus élevées, il est évident qu’il existe nécessairement quelque réalité à laquelle ces principes
et ces causes appartiennent en vertu de sa nature propre. " (Aristote)
Ou encore, puisque cette science revient à s’interroger sur ce qui est commun et à l’origine de tous
les étants, on la nommera " la Science … [ou] la Philosophie première " (idem
6
).
Plus : ce sont les raisons scientifiques elles-mêmes qui nous poussent à une telle recherche,
des vérités particulières n’ayant point de sens hors de leur rapport à une Vérité universelle : une partie
renvoie à la totalité dont elle fait partie et qui lui confère sa signification.
"
Car
l’expérience
ne
satisfait
jamais
pleinement
la
raison
;
elle
nous
renvoie
toujours
plus
loin
la
réponse
à
nos questions
et s’il s’agit d’une solution complète, nous laisse toujours déçus " (Kant).
Contrairement aux disciplines scientifiques qui s’intéressent à des vérités partielles/ régionales, l’étude
philosophique ambitionne la saisie d’une vérité globale : totale ou universelle. Le terme même de
sagesse / sapience n’inclut-il pas en lui l’idée de complétude ou de perfection, par opposition au
caractère inachevé de tout savoir déterminé ? Tout en voisinant avec les sciences, la Philosophie s’en
démarque par sa visée dune vérité intégrale / finale.
Pour autant que l’on y tend à une Vérité « au-delà » des vérités scientifiques, et comme ces dernières
concernent le monde, soit des objets qui s’inscrivent dans le champ de notre expérience, le savoir
philosophique relève d’une " connaissance, non pas physique, mais méta-physique, ce qui signifie au
delà de l’expérience " (idem). Le nom de Métaphysique, qui ne fut au point de départ qu’un titre
circonstanciel proposé par un éditeur des écrits d’Aristote, pour faire suite à sa publication de la
Physique, et qui a été repris par la tradition, -tant par Descartes en ses Méditations métaphysiques,
Spinoza (Pensées métaphysiques), Leibniz (Discours métaphysique), que par Kant dans les
Prolégomènes à toute métaphysique future qui pourra se présenter comme science-, a fini justement
par s’imposer et traduit assez bien ce qui est ici en cause.
" En ce qui concerne le nom de la métaphysique, il n’y a pas lieu de croire qu’il soit du hasard puisqu’il
convient si exactement à la science en question : car puisque la nature se nomme φύσις et que d’autre part nous
ne
pouvons
parvenir
aux
concepts
de
la nature qu’au moyen de l’expérience, la science qui vient ensuite s’appelle :
métaphysique (de µετά, trans et physica). C’est une science qui se trouve pour ainsi dire en dehors du domaine
de la physique, au-delà de celui-ci. (…) La métaphysique c’est la philosophie par excellence, la vraie !" (idem
7
)
L'homo sapiens peut donc être également et à bon droit qualifié d’homo metaphysicus :
"L’homme est un animal métaphysique" (Schopenhauer
8
).
Englobant toutes les (autres) vérités, la Vérité métaphysique se confond avec une vérité unique :
absolue dont dépendraient toutes les (autres) vérités (relatives). Partant l’objet de la Sagesse : l’Absolu
s’avère identique à celui de la " Théologie " : Dieu, selon la terminologie aristotélicienne habituelle.
5
E. I. § 24 add. 2 p. 479 (cf. égal. § 213 add. p. 615) et Phén. E. (DD) VIII.
6
Méta. Γ.1. 1003a20-27 et E.1 1026a15-30 ; cf. égal. Descartes, Med. prima philo. et Husserl, Philo. première
7
Prolég. § 57 pp. 138-139 ; § 1 p. 20 et Leçons, Heinze XIV p. 666 (in Progrès n. 5. p. 119)Log. IV p. 34 ;
cf. égal. Progrès méta. Préf. p. 10 et Suppl. I. pp. 78-79 et Husserl, I.L.T.C. Sec.I. chap. III. § 20 p. 143
8
M.V.R. Suppl. chap. XVII p. 851
3
Rien d’étonnant que les grands philosophes aient été préoccupés, à l’instar de Descartes, par
la " question de Dieu " voire, tel Spinoza, aient débuté leur œuvre par " De Deo "
9
.
" L’idée même de la philosophie est cette signification [l'Absolu], c’est la nature de Dieu comprise.
Ainsi ce que nous nommons l’Absolu a le même sens que le terme Dieu." (Hegel)
Et l’auteur de La Science de la Logique ira jusqu’à qualifier son oeuvre de " représentation de Dieu ".
La Philosophie s’apparente ainsi davantage à l’Art et à la Religion qu’au savoir scientifique, tel qu'on
l'entend usuellement du moins.
Seulement alors que ceux-ci se contentent d’une intuition externe (image) ou interne (sentiment) de
l’Absolu, ce qui les conduit à le finitiser ou relativiser, celle-entend le saisir par la pure pensée,
moyen le plus adéquat à son appréhension véritable.
"
La
philosophie
a
le
même
objet
et
poursuit le même but que l’art et la religion ; mais elle est le moyen le plus éle
d’appréhender l’Idée Absolue, car c’est le concept qui constitue ce moyen." (idem
10
)
En effet seule la pensée ou la raison est en mesure de « comprendre » la raison ultime de tout et à bâtir
un Savoir total, en lieu et place d’une représentation imagée ou ressentie de la Totalité.
" La mathématique, la science de la nature, les lois, les arts, la morale même, etc. ne remplissent pas encore
entièrement l’âme, il y reste toujours un espace jalonné pour la seule raison pure et spéculative ; (…)
La
philosophie
est
l’unique
science
qui
sache
nous
procurer
cette satisfaction intime, car elle referme, pour ainsi dire,
le cercle scientifique et procure enfin aux sciences ordre et organisation <Zusammenhang>." (Kant
11
)
Aussi pour éviter toute équivoque, plutôt que Ontologie, Métaphysique ou Théologie, on baptisera
la Philosophie « Raison » ou « Science » des sciences :
" la science d'une science en général (…) une science de toutes les sciences." (Fichte
12
)
Et on l’intitulera indifféremment Critique de la Raison pure (Kant), Doctrine / Théorie de la Science
(Fichte), Système de la Science ou Encyclopédie des sciences philosophiques (Hegel).
"
Les
Grecs
lui
ont
donné
le
nom
de
philosophie
;
correctement
traduit
selon
son
sens
originel,
ce
terme
est
un
autre
nom
pour
la
science
universelle,
la
science
du
tout
du
monde,
de
l’unique
totalité
qui
embrasse tout ce qui est." (Husserl
13
)
Tous les philosophes authentiques s’accordent en tout cas sur cette volonté « scientifique » ou
« totalisante » de la Philosophie et visent ainsi une Rationalité / Réflexion intégrale : la Pensée de la
pensée ou le Savoir du savoir. Ils partagent donc le même postulat : celui de la rationalité du réel.
" Ce qui est rationnel est réel, et ce qui est réel est rationnel." (Hegel
14
)
Entre eux il y a plus qu'un consensus nominal.
Mais si tous conviennent du but et de son soubassement, il n’en va pas, semble-t-il, de même de
sa réalisation. En témoignerait la diversité voire la divergence des systèmes philosophiques, à quoi
se résumerait l’histoire de cette discipline d’après Descartes et Kant.
" Il ne s’y trouve encore aucune chose dont on ne dispute, et par conséquent qui ne soit douteuse ".
" Le champ de bataille où se livrent ces combats sans fin, voilà ce qu’on nomme la Métaphysique."
15
Au point que l’on pourrait remettre en cause jusqu’à la pertinence même de la discipline ici en cause.
Avec son « objet » ne toucherions-nous pas aux " bornes " ou aux " limites " de la raison humaine
16
?
Si tant d’esprits éminents n’ont pu s’accorder sur les questions philosophiques, ne faudrait-il pas y voir
le signe du caractère insoluble pour nous de ces dernières ?
En dépit de sa « nécessité », la philosophie semblerait vouée à l’impossible : elle passerait
les capacités de notre esprit. Partant on désespérera de sa possibilité même et on la considérera comme
"la science que nous cherchons" (Aristote) ou "la « terre promise »" (Husserl)
17
mais jamais conquise.
9
Aristote, Méta. E. 1. 1026 a 19 ; Descartes, Méditations Dédicace p. 257 et Spinoza, Éthique I.
10
Ph.R. Introd. 3
è
sec. pp. 33-34 ; S.L. Introd. p. 35 et III. 3
è
sec. chap. III p. 550 ;
cf. égal. H.Ph. Ph. M.A. pp. 999 et 1005 ; vide Cours Religion p. 3
11
Prolég. App. p. 179 - Logique Introd. III p. 27
12
Sur le concept de la D.S. ou de ce que l’on appelle philosophie 1
ère
sec. § 1 p. 36 - 2è sec. § 3. p. 46
13
Crise hum. europ. et philo. I. in Crise sc. europ. et phén. tr. Annexes p. 355 ; cf. égal. ibid. II. 12. pp. 75-76
14
E. Introd. § 6 R. ; cf. Spinoza, É. II. Prop. VII ; Leibniz, P.N.G. 7. et Husserl, I.D.P. I 4è sec. chap. II p. 458
15
Descartes, D. M. 1
ère
par. p. 130 et Kant, C.R.P. Préf. 1
ère
éd. p. 29 ; cf. égal. Méthod. transc. chap. IV. p. 636
16
C.R.P. Log. transc. chap. III. p. 265 et Méthod. transc. chap. I. 2è sec. p. 575 ; cf. égal. Prolég. Concl.
17
Aristote, Méta. A. 2. 983 a 22 ; K. 1. 1059 a 40 et Husserl, P.M.I.D. 7 p. 209 in Idées III
4
"
Par
la
suite
nul ne doit s’étonner de ce que cette reine des sciences qui nous est venue sous le nom de philosophie
première
et
qu’Aristote
a
souvent
appelée science désirée, recherchée (ζητούµένη), demeure aujourd’hui au nombre
des sciences à rechercher encore." (Leibniz
18
)
Le constat leibnizien sera réitéré par Kant :
" Jusqu’ici il n’y a pas de philosophie que l’on puisse apprendre ; car où est-elle ? Qui l’a en sa possession,
et à quel caractère la reconnaître ? On ne peut qu’apprendre à philosopher ".
Et que dire aujourd’hui la discipline philosophique souffre du plus grand des éparpillements ou
morcellements tant des matières envisagées (épistémologie, philosophie politique, esthétique etc. …),
des écoles (matérialisme, idéalisme, scepticisme, déconstructionnisme, empirisme logique, etc. …),
que des maîtres dont on se réclame (Kant, Hegel, Nietzsche, Heidegger, Wittgenstein etc. …) ?
"
Il n’est pas à vrai dire possible de retenir dès maintenant les noms des philosophes modernes considérés comme
remarquables
et
durables,
car
ici
tout
est
pour
ainsi
dire
mouvant.
Ce que l’un construit, l’autre le jette à bas." (idem)
Plutôt que de continuer à se bercer de l’illusion d’une Vérité métaphysique absolue, ne resterait qu’à
se résigner à en abandonner définitivement le projet ou le questionnement, et à apprendre, avec
l’empirisme, le positivisme et/ou le scepticisme, à se contenter des seules interrogations et lois :
vérités-vraisemblances scientifiques et/ou des espérances morales ou religieuses.
Une telle éventualité est cependant exclue, le philosopher étant, nous l’avons dit, consubstantiel à
l’homme et lié à l’insuffisance du savoir scientifique et du sentiment religieux.
" La métaphysique est une connaissance rationnelle spéculative tout à fait à part, qui s’élève entièrement
au-dessus des leçons de l’expérience, en ne s’appuyant que sur de simples concepts (et non en appliquant comme
les mathématiques ces concepts à l’intuition), et où, par conséquent, la raison doit être son propre élève.
Cette
connaissance
n’a pas encore été assez favorisée du sort pour pouvoir entrer dans le sûr chemin de la science,
et pourtant elle est plus vieille que toutes les autres sciences, et elle subsisterait toujours, alors même que
celles-ci disparaîtraient toutes ensemble dans le gouffre d’une barbarie dévastatrice." (idem)
Alors force est de reposer une dernière fois la question de la possibilité du Discours philosophique,
c’est-à-dire du Savoir absolu, soit de l’accès par l’Homme à la Vérité.
Qu’est-ce que l’Absolu / la Sagesse ou la Vérité ? Sont-ils seulement accessibles à l’Homme ?
" Une métaphysique est-elle possible ? " (idem
19
)
Ou devrait-on se résoudre à n’en rien pouvoir «dire» et laisser chacun se prononcer dessus à sa guise,
sans la moindre possibilité d’arbitrer entre des opinions différentes ?
"
La
tâche
que
le
philosophe
s’impose,
le
but
de
sa
vie
en
tant
que
philosophe,
c’est
une science universelle du monde,
un savoir universel, valable de façon ultime, l’universum des vérités en-soi du monde, du monde en-soi.
Qu’en est-il de ce but et de son accessibilité ? " (Husserl
20
)
Bref : la Philosophie existe-t-elle autrement qu’en intention et peut-elle dépasser son nom d’amour
du savoir, pour devenir savoir réel / véritable, comme n’ont cessé de le proclamer les philosophes,
du passé comme du « présent » ?
" Contribuer à rapprocher la philosophie de la forme de la science pour qu’elle puisse déposer son nom
d’amour du savoir et devenir savoir effectif – c’est là ce que je me suis proposé." (Hegel
21
)
En d'autres termes : le Langage ou le Savoir (philosophique) peut-il se réfléchir totalement lui-même ?
Question à la fois banale ou générale car elle intéresse tout un chacun, nul n’échappant aux
interrogations métaphysiques, et fondamentale ou radicale : d’elle dépend notre « sort » même
d’animal pensant ou « sage ».
" Une vie à laquelle l’examen fait défaut ne mérite pas qu’on la vive " (Platon).
" Mais existe-t-il meilleure récompense que le savoir ?" (Aristote)
" Or, c’est proprement avoir les yeux fermés, sans tâcher jamais de les ouvrir, que de vivre sans philosopher " (Descartes)
22
.
18
De la réforme de la philo. première et de la notion de substance p. 323 ; cf. égal. N.E. IV. VIII. § 9 p. 381
19
C.R.P. Méthod. tr. chap. III. p. 625 ; Log. Introd. IV p. 34 (cf. égal. Prolég. § 4 p. 27 ; Sol. qu. g
ale
p. 162
et Leç. 1765-6 in O. ph. I. p. 515) ; C.R.P. Préf. 2
nde
éd. pp. 40-41 (cf. égal. Méthod. transc. chap. III. p 627 ;
Prolég. Sol. question g
ale
p. 160) et Prolég. Question g
ale
p. 27
20
La Crise des sc. europ. et la phén. transc. III. B. 73. p. 298 ; cf. égal. Log. for. et log. transc. § 80 p. 270
21
Phén. E. Préface I p. 21 ; cf. égal. Husserl, La philosophie comme science rigoureuse
22
Platon, A.S. 38a, Aristote, Probl. XXX 11 et Descartes, P.P. Let.-Préf. p. 558 ; vide Cours Introd. g
ale
2. p. 21
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