Ils étaient quatre
Texte (publié chez L’Instant
Même) : Mani Soleymanlou et
Mathieu Gosselin, en
collaboration avec les interprètes.
Mise en scène : Mani
Soleymanlou.
Une production d’Orange noyée
présentée à la Petite Licorne du
9 mars au 3 avril.
THÉÂTRE
Mani Soleymanlou s’affranchit de sa trilogie «ethno-identitaire» avec «Ils étaient
quatre»
9 mars 2015 | Alexandre Cadieux - Collaborateur | Théâtre
Photo: Pedro Ruiz Le Devoir
Mani Soleymanlou est épaulé à l’écriture par le comédien et auteur Mathieu Gosselin.
En solo dans Un, un duo pour Deux et quarante-trois personnes firent
Trois ; sur la scène d’Ils étaient quatre, ils seront quatre… et des
poussières. Pour s’affranchir de sa trilogie « ethno-identitaire », Mani
Soleymanlou rameute ses vieux amis et monte sur le fil fragile de
l’autofiction, épau à l’écriture par le comédien et auteur Mathieu
Gosselin (La fête sauvage, Province).
Les quatre du titre, ils veulent moins se battre que faire la fête… mais
peut-être n’est-ce pas si éloigné ? Ils ont atteint la trentaine, ont des
carrières, sont pères ou en voie de l’être… Sortir jusqu’à pas d’heure et
boire comme des trous, serait-ce leur tentative un brin dérisoire de
résister à l’inéluctable ? Ils s’appellent Éric (Bruneau), Guillaume (Cyr), Jean-Moïse (Martin) et Mani, mais ce
ne sera pas vraiment eux sur la scène de la Petite Licorne ; plutôt proches, mais pas tout à fait.
Se battre, mais contre quoi? | Le Devoir http://www.ledevoir.com/culture/theatre/433899/theatre-se-battre-mais-co...
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« Après la trilogie, très autobiographique, j’avais envie personnellement de prendre cette idée du spectacle
identitaire, de la passer au hachoir et de voir ce qu’on peut faire avec », explique Soleymanlou, qui a ressorti
de ses cartons un vieux projet collectif datant du passage des quatre amis à l’École nationale de théâtre.
« J’étais tanné d’être seulement dans la vérité de la chose, je voulais m’amuser un peu, aller plus loin. C’est
une façon de poursuivre et, en même temps, d’effacer un peu, de passer à autre chose. »
Oeil extérieur et scribe, Mathieu Gosselin a pour sa part joué à l’enquêteur-sociologue : « J’ai rencontré les
gars individuellement, jai posé les mêmes questions à tout le monde, on a longuement discuté. M’appuyant
sur les transcriptions de ces rencontres, j’ai essayé de construire des monologues ou des scènes, en
raboutant des extraits. Ce qui ressortait beaucoup là-dedans, cétait la place de l’homme ; on ne sait plus
trop où se “pitcher” par rapport à certains modèles, entre l’homme rose et le pourvoyeur. »
Double jeu
Jonglant un temps avec lie d’une pièce-documentaire sur lhomo quebecus, les deux compères se sont
finalement rabattus sur un double jeu aux ambivalences condes : entre réali et fiction, entre narration et
interprétation. « On part de qui on est, d’une partie de notre vérité, mais celle-ci est complètement
exacerbée », poursuit Mani Soleymanlou.
Le procédé peut renforcer le côté archétypal des personnalités, mais les créateurs nient toute volonté de
représentativité. Sans prétendre à l’échantillonnage exemplaire, il y a tout de même quelque chose de
rationnel dans le propos, non ? « Oui, par la force des choses. Il y a une forme de vide, de manque que
l’on peut ressentir quand on passe le cap de la trentaine, un sentiment de perte irrédiable, avec les
angoisses un peu tabou liées à la paternité, à l’argent… »
Mais le propos d’Ils étaient quatre s’est aussi modelé sur les réalités de la condition masculine de notre
univers contemporain et les nombreux débats sur l’hypersexualisation et la notion de consentement, par
exemple. « Et au-delà de tout ça, il demeure des thèmes qui, malgré tout, traversent le temps : la
conscience de vieillir, notre rapport aux femmes… La vision qu’on en a change avec les années, mais c’est
toujours là », résume Mathieu Gosselin.
Se battre, mais contre quoi? | Le Devoir http://www.ledevoir.com/culture/theatre/433899/theatre-se-battre-mais-co...
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Ils étaient quatre réunit les comédiens Guillaume Cyr, Éric Bruneau,
Jean-Moïse Martin et Mani Soleymanlou, ce dernier étant également l'auteur
de la pièce.
PHOTO BERNARD BRAULT, LA PRESSE
Publié le 08 mars 2015 à 10h00 | Mis à jour le 08 mars 2015 à 10h00
Ils étaient quatre: portrait de génération
Jean Siag
La Presse
Après avoir abordé les thèmes de l'exil et de l'identité, Mani Soleymanlou a eu envie de
raconter cette histoire de «quatre gars dans un party» imaginée il y a 10 ans dans les
murs de l'École nationale de théâtre avec ses trois amis: Éric Bruneau, Guillaume Cyr et
Jean-Moïse Martin. Ils étaient quatre (à La Licorne, du 9 mars au 13 avril), c'est eux,
mais grossis à la loupe, dans un portrait de la génération des trentenaires.
Mani Soleymanlou
Il a écrit ce texte avec Mathieu Gosselin. Quatre amis dans la trentaine y font le récit d'un
soir de party. Le texte a été actualisé pour refléter la «réalité» des quatre interprètes qui
jouent ici leur propre rôle. Même si tous leurs traits ont été volontairement «exagéré.
Son «personnage» de séducteur maladroit est obsédé par le sexe. «Au fond, on évoque
différents thèmes: l'argent, le cul, la famille, la quête de bien-être. C'est un peu le portrait
d'une génération, estime Mani Soleymanlou, qui signe aussi la mise en scène. Une
génération qui doit composer avec la pression de la performance, la réussite, les excès.
Je voulais parler d'autre chose que d'identité culturelle.» Ils étaient quatre est le premier
volet d'une trilogie. Le texte rappelle la célèbre phrase de la série Seinfeld: «It's a show
about nothing.» Il sera suivi de Cinq à sept, qui mettra en scène quatre filles. Le dernier
volet réunira les huit acteurs le soir du party.
Éric Bruneau
«On joue avec la réalité, nous dit Éric Bruneau, qui non seulement a étudié à l'École nationale avec ses partenaires de scène, mais qui a aussi partagé un appartement
avec eux. Oui, je m'appelle Éric et je joue à la télé, mais ça reste une partition écrite. C'est drôle parce qu'on peut se permettre de dire des choses qu'on ne dirait pas
autrement, justement parce qu'on est amis. Mais même si la ligne est mince, ce n'est pas du théâtre documentaire.» L'ie de ce party est née à l'École, mais
aujourd'hui, Éric Bruneau estime que l'exercice scolaire de 20 minutes a été poussé beaucoup plus loin. Son personnage jette un regard parfois critique sur la société.
«Il a un besoin de fuite face à la pression. Il parle aussi d'argent, parce qu'il en fait beaucoup, contrairement à Jean-Moïse, par exemple. Il parle aussi de la manière
de trouver sa place.» Son personnage est heureux, même s'il se questionne beaucoup.
Jean-Moïse Martin
À
36 ans Jean-Mse Martin est le doyen du quatuor. Son parcours a été plus cahoteux que celui de ses collègues. En fait, beaucoup de gens l'ont découvert le mois
dernier dans la pièce Un tramway nommé Désir. «Mon personnage me représente un peu, dit-il. Je n'ai pas travaillé autant qu'Éric, Guillaume ou Mani. Après l'École,
j
e n'étais pas sûr de savoir ce que je voulais faire. J'ai beaucoup fait la fête, je ntais pas vraiment centré. Donc, oui, mon personnage me ressemble,me si ce
n'est pas tout à fait moi non plus.»me s'il a joué dans plusieurs productions avant le Tramway, son plaisir de jouer est récent. «Tout est fonction des rencontres
qu'on fait», indique-t-il. Son personnage reflète un peu cette réalité, même s'il est pas mal plus «excessif» dans Ils étaient quatre. «N'emche, nous dit le codien,
c'est vrai qu'on aime faire la fête, tous les quatre. On s'est même demandé pourquoi on avait besoin de faire ça pour exister. On a ce besoin d'euphorie.»
Guillaume Cyr
Le personnage de Guillaume Cyr partage deux réalités avec son alter ego sur scène: il vient d'avoir un enfant et il habite sur la Rive-Sud. «Même pour nous, c'est
parfois mélangeant, ce qui est vrai et ce qui ne l'est pas, avoue le comédien. Mais c'est sûr que Guillaume est le gros nounours sentimental de la gang. Contrairement
à moi, il a de la difficulté à vivre avec son statut dere. Il aimerait continuer à s'amuser comme un enfant.» Le fameux party est le prétexte pour révéler «le monstre
intérieur» des quatre personnages. «C'est une soirée qui ne se déroule pas comme prévu et où toutes nos insatisfactions et nos colères vont exploser. C'est un portrait
très cru et pas nécessairement flatteur de l'homme trentenaire.» Ses partenaires de scène, qu'il a connus à l'École nationale, sont encore aujourd'hui ses meilleurs
amis. «On ne s'est jamais quittés, on s'est vus tomber. Ce spectacle est un peu une célébration de notre amitié.»
© La Presse, ltée. Tous droits réservés.
Ils étaient quatre: portrait de génération | Jean Siag | Théâtre http://www.lapresse.ca/arts/spectacles-et-theatre/theatre/201503/07/01-...
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JOURNAL MÉTRO 22 MARS 2015
Ils étaient quatre, cette soirée-
Par Natalia Wysocka
Dans Ils étaient quatre, il y a plein de choses. Quatre gars,
oui. Mais aussi une recette de cuisine («Réserve les
lardons!»), des gros tubes de club (Turn Down for What!)
et des éclairages incroyables. «Heille, on a des LASERS!»
lance Mani Soleymanlou. Ouaip. Des lasers.
Lorsqu’on arrive à La Licorne, deux heures avant qu’ils
montent sur scène, Mani Soleymanlou et Éric Bruneau
sont déjà là depuis un moment. Et ils tripent. «Tous les
jours, on arrive tôt, on boit des cafés, on parle. C’est
comme si on s’en allait jouer au hockey!» lance Éric.
«C’est vraiment rock!» concède son comparse.
Si l’ambiance est aussi «rock», c’est peut-être qu’avec cette pièce – qu’il a coécrite avec Mathieu Gosselin, en
collaboration avec les trois autres acteurs qui y jouent, soit Éric, Guillaume Cyr et Jean-Moïse Martin Mani
Soleymanlou n’a pas voulu faire «du théâtre avec trois accents circonflexes». «Du théâââââtre», comme dit
Éric Bruneau. Pas plus qu’il n’a voulu – «surtout pas!» faire un «portrait de génération». Et ce, même si
avant que la pièce prenne l’affiche, on a beaucoup répété que c’est exactement ce qu’elle serait. «Ouain…
c’est des affaires qui restent avec les demandes de subventions et les communiqués envoyés un an d’avance!
sourit Mani S. En fait, la pièce, c’est plutôt un portrait de quatre amis. De quatre archétypes.» «De quatre
humains de 30 ans», ajoute Éric.
Des «humains» qui portent, soit dit en passant, les vrais prénoms des acteurs. Et qui sont proches de leur vraie
«personnalité». Y a Mani, le type auquel on a collé le sceau «Théâtre identitaire». Et Éric, «Monsieur TVA».
C’est grossi, c’est juste inspiré de faits réels, on le sait. Reste que, nous-même, à quelques reprises pendant la
discussion, on s’enfarge entre la réalité et la fiction : «À un moment donné dans la pièce, Mani, tu affirmes,
euh, j’veux dire, ton personnage…»
Le créateur, qui a déjà exploré le procédé du «je» dans Un, Deux et Trois, doit être habitué. N’empêche. Ici, il
dit «je» dans un tout autre style. Plus rigolo. Qui lui permet de se moquer de lui-même, de ses potes et de
quelques lieux communs. Comme ces : «On était vraiment une graaaande famille!» que les artistes lancent
souvent lorsqu’ils sont interrogés sur leur expérience de tournage.
Parlant de lieux, dans Ils étaient quatre, la fameuse «chambre des manteaux» qu’on retrouve dans chaque
party de maison joue un rôle important. C’est un point de référence, estime Mani Soleymanlou. «La chambre
des manteaux, c’est cliché. Dès qu’on dit ça, tout le monde sait de quoi on parle et peut imaginer le reste.»
Le reste de la soirée, s’entend. De cette soirée qui est au cœur de l’intrigue, qui dérape totalement, et dans
laquelle beaucoup reconnaîtront le déroulement plus ou moins «normal» d’une grosse fête. À savoir l’arrivée
un peu malaisante. Le copain un peu trop intense. Le moment où quelqu’un hurle «shooters!». L’autre où
quelqu’un sort la poudre. La discussion foireuse sur la politique (et la péréquation) qui s’ensuit. La toune triste
qu’on met aux petites heures sur «repeat» en sanglotant comme des caves.
«Si on s’appelait Paul, Pierre, Jean et Steve, ç’aurait juste été l’histoire de quatre amis weird qui font la fête.
Les gens auraient juste fait “Ah”.» Mani Soleymanlou, expliquant pourquoi les quatre gars d’«Ils étaient le
même nombre» s’appellent Mani, Éric, Guillaume et Jean-Moïse
D’ailleurs, la musique, omniprésente, a été composée pour l’occasion par Philippe Brault, qui agrémente sa
trame de gros succès populaires. «On voulait du hip-hop, l’énergie qui s’en dégage», note Soleymanlou. Autre
élément fort présent : les substances toxiques, dont la MDMA, qui «enlèvent du sérieux et permettent aux
personnages de dire des choses qu’ils ne diraient pas autrement». Un «bon moteur narratif», estime Éric
Bruneau. Un bon moteur de danse aussi. «C’est vrai que je danse plus quand je suis un peu parti!» lance son
collègue.
Agrémentée de chorégraphies déchaînées, donc, la pièce devient l’occasion d’explorer les codes sociaux d’une
soirée, de décortiquer les stratégies de drague, les faux pas. Mani Soleymanlou, qu’on voit sur scène vêtu d’un
hip pull marqué Plateau (acheté «à la boutique Fake, sur Rachel», précise-t-il), cite à ce sujet le bouquin The
Game : Penetrating the Secret Society of Pickup Artists. «Ça existe réellement, des gens qui voient une soirée
de même, comme quelque chose de compliqué! Moi-même, quand j’étais à l’université, JAMAIS je n’aurais
pu prendre une bière si je n’étais pas fraîchement rasé et bien habillé. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus
simple. Parce que j’ai vieilli et j’ai réalisé que ‘sti que c’est une perte de temps!»
«C’est une parole qui existe difficilement. D’aborder la question du salaire, de nommer ça…! Je trouvais ça
intéressant d’en parler. Et je sens chaque fois que le public fait “oh…”» Éric Bruneau, sur le thème de
l’argent, abordé dans Ils étaient quatre
N. B.: Comme chaque fête a besoin de son roi, chaque pièce de théâtre a besoin d’un King des assistants à la
mise en scène, rappelle Mani. En l’occurrence, Jean Gaudreau, «un être formidable qu’on ne nomme jamais
assez souvent. En fait, qu’on ne nomme jamais.» On en profite pour le saluer.
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