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ACTES DU COLLOQUE
9 et 10 avril 2013
A I F R I S S S
Association Internationale de Formation et de Recherche
en Instruction Spécialisée, Santé et Social - FR
www.aifrisss.org
RENDRE COMPTE DE SA PRATIQUE.
POUR QUI, POURQUOI, COMMENT ?
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RENDRE COMPTE DE SA PRATIQUE.
POUR QUI, POURQUOI, COMMENT ?
Les praticiens des secteurs éducatif, sanitaire et social usent de techniques diverses pour rendre compte de leurs
pratiques. Le compte qui est rendu de l’activité professionnelle, dans ces professions, n’est pas un supplément à
la pratique mais constitue une dimension de cette pratique. Les praticiens rendent compte à leurs responsables,
aux collègues, aux formateurs, aux usagers des services dans lesquels ils exercent, à leur administration ou à leur
tutelle. Le destinataire de l’écrit influe sur les propriétés du « texte » par lequel il est rendu compte. L’adresse, en
effet, conditionne l’expression à la fois sur le plan mantique et sur le plan formel. L’interrogation portant sur la
pertinence du « texte » par rapport au « contexte » et au destinataire est l’un des axes principaux du colloque.
Ces productions narratives, ces comptes rendus, prennent des formes diverses dont certaines ont des
dénominations normalisées comme cahiers de transmission, rapports, bilans d’activité, récits de pratiques,
journaux de bord, retours d’expériences, analyses de pratiques professionnelles, pour n’en citer que quelques-
unes. Les formes du « rendre compte », les dispositifs de production narrative constituent l’un des impensés de la
formation.
Œuvrer à mieux théoriser ces pratiques constitue un autre des axes et des objectifs du colloque qui s’adresse
autant aux praticiens qu’aux formateurs et à aux chercheurs.
Les récentes lois qui encadrent les secteurs sanitaire, social et éducatif préconisent les dispositifs d’évaluation
interne et accordent une place prépondérante aux diverses formes du « rendre compte ». Aussi y a-t-il urgence à
intégrer dans les dispositifs de formation initiale et continue une préparation spécifique à cet exercice
professionnel. En particulier les formes et les procédures des évaluations préconisées par ces textes demandent
que la dimension qualitative soit davantage prise en compte par les professionnels.
Objet du colloque
Le colloque s’est donné comme objectifs :
1. de procéder à un recensement ordonné des différentes formes que prennent, dans l’exercice
professionnel, les récits écrits ou oraux et les comptes rendus de pratiques.
2. de décrire et d’analyser les circonstances de la production de ces récits : spontanés ou imposés, réguliers
ou occasionnels, formalisés ou informels, immédiats ou différés, etc.
3. d’analyser les effets produits par ces productions sur le destinataire, que ces effets soient réels ou
supposés.
4. d’analyser et d’évaluer les effets de ces productions sur les pratiques professionnelles des acteurs
individuels ainsi que sur l’évolution des pratiques institutionnelles.
5. de repérer, d’identifier et, chaque fois qu’il est possible, de dégager des règles de fonctionnement de la ou
des « grammaires » du récit d’expérience.
Comité scientifique
Jacques Berton, Formateur-Enseignant IRTS Aquitaine
Richard Etienne, Professeur d'Université Emérite en Sciences de l'Education Montpellier
Rémi Hess, Professeur d'Université en Sciences de l'Education Paris 8
Michel Laforcade, Directeur ARS Aquitaine
Jean-Louis Le Grand, Professeur d'Université en Sciences de l'Education Paris 8
Dominique Millet, ex Professeur d’IUFM
Bernard Séguier, ex Directeur d’Instituts de Formation
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RENDRE COMPTE DE SA PRATIQUE.
POUR QUI, POURQUOI, COMMENT ?
Conférences
L’évaluation comme élément moteur de la formation
initiale et continue.
Richard Étienne
Culture de l’évaluation : histoire, enjeux, réalités
contemporaines
Michel LAFORCADE
Le journal comme espace du « rendre compte »
Rémi HESS
Rendre compte pour se rendre compte.
Histoires de vie et analyse de la pratique professionnelle
Bruno Hubert
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Conférence de Richard Étienne
Professeur d'Université Emérite en Sciences de l'Education Montpellier
L’évaluation comme élément moteur
de la formation initiale et continue
Introduction
Remarques liminaires : l’origine commune du conte et des comptes, le computare ou le « penser
ensemble » ; le « ne pas s’en laisser conter » face au « rendre compte » et au « rendre des
comptes » et les rapports tendus entre évaluation et formation.
1. Le mur des évaluations
a. Le contrôle comme degré zéro de l’évaluation
L’intérêt pour le travail et la formation donne naissance au contrôle de la maîtrise par le chef
d’œuvre (contrôle de conformité).
Menace pour l’ordre social (interdiction des corporations lors de la première république) et le
développement économique par malthusianisme dans la production et la certification.
b. La naissance de l’évaluation « industrielle », un grand pas vers la
production en masse
La volonde production en nombre (manufactures) puis en masse impose une standardisation
des procédures et une parcellisation du travail (colbertisme et taylorisme).
La formation qui va avec est transmissive et son évaluation repose sur la note avec ses deux
avantages : classement et rangement (Barbier, 1984).
c. La rétroaction de la certification et la mise en danger des acteurs
Le progrès social et l’élévation du niveau minent ce système à partir des années 1960.
La professionnalisation (Jorro, 2002) impose, à juste titre, de penser en termes de « savoir agir en
situation » et de « savoir le dire ».
L’universitarisation (Étienne et al., 2009) détermine une certification parcellisée en ECTS, crédits,
et formalisée en référentiels (Étienne, 2011).
La combinaison des deux produit...des « enseignants, des infirmières, des travaille
crédits ». Sont-ils pour autant compétents ? (Étienne, 2012d).
d. L’inventivité des acteurs
Ils substituent l’expérience et leurs critères pragmatiques à la liste officielle (Jean & Étienne, 2012)
Ils s’efforcent de mettre du liant et du lien là où l’institution découpe et fragmente (Marcel,
Fernandes & Gardiès, 2012) : portfolios de plus en plus électroniques.
Ils s’accrochent à l’idée qu’il est primordial de relativiser une pratique débutante (Périsset, 2012),
ce qui produit de l’hétérogénéité, du bigarré et non de l’uniforme.
Ils misent sur la subjectivité assumée des cits et s’efforcent «     »
(Foucault cité par Alin, 2012).
…/…
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2. Les promesses d’une évaluation-construction de la compétence par
l’accompagnement
L’écriture biographique résulte d’un consensus du terrain, si l’on respecte le droit à l’intimité (Cifali
& André, 2007).
L’   n’en finit pas d’être prometteuse
mais reste entravée par le manque de formation des formateurs (Chaliès & Durand, 2000 ;
Perrenoud, 2001).
La didactique professionnelle et la didactique des savoirs professionnels complètent le
renversement de l’ingénierie de formation à la rétro-ingénierie (Saujat, 2010).
L’évaluation prend une nouvelle valeur, celle du pilotage de son action individuelle et/ou collective,
avec une (auto-)prescription qui porte plus sur le résultat que sur la tâche (Leplat & Hoc, 1983).
3. Du Panopticon de Foucault (2003) à la multiplication des regards, un premier
pas vers l’humilité évaluative
L’époque de l’évaluateur susceptible de tout « surveiller et punir » semble révolue (échec de la
réforme française).
C’est un double effet
de la professionnalisation (maître de stage, tuteur, référent...)
et de l’universitarisation (au moins 1 évaluateur par UE...).
Les contraintes institutionnelles continuent à freiner la marche vers une évaluation collective et
coopérative de la compétence acquise, elle-même collective (Le Boterf, 1997).
 peut se détecter dans la multitude de précautions prises pour éviter l’échec :
dispositifs d’alerte, suivi personnalisé, multiplication des visites, etc.
4. Des effets constatés et contrastés dans les établissements et les institutions
Une recherche (Amiel, Étienne & Presse, 2003) a montré qu’une évaluation démocratique, liée au
projet et menée sur la base d’analyses de pratiques, de situations ou du travail permet de faire
«  ».
Le développement de savoirs disciplinaires sur cette base est également démontré (Robert, 2005)
Un établissement secondaire entier (Clisthène à Bordeaux) a dégagé un modèle d’enseignement
reposant sur l’évaluation de la compétence des élèves et des enseignants dans le cadre du socle
commun (Guédé, 2009).
Conclusion
Comme l’établissent les recherches, les dérives de l’évaluation ont mené les enseignants, les
personnels de santé et du social (entre autres) et leurs formateurs dans une impasse
prescriptive.
Tous sont touchés mais tous n’en meurent pas car ils inventent, ils bricolent, ils braconnent
(Jorro, 2002) de nouvelles pratiques autour de l’évaluation, notamment celles du pilotage (issue de
la navigation) et de l’accompagnement (inspirée du compagnonnage).
L’inventivi qui se révèle dans cette « posture réflexive » (Perrenoud, 2001) permet de belles
réalisations concrètes dans les établissements et en promet d’autres si on met fin à la dérive...
prescriptive !
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