Pratiques Judiciaires Master 2
MORT ET PHILOSOPHIE
PLAN
Préliminaires
Introduction
I. Circonscrire la représentation de la mort en tant qu’objet
A. La mort : une représentation sans objet
1. Mort objective
2. Mort subjective : conscience et existence
B. La mort : une problématique philosophique complexe
1. Le mort des uns et la vie de l’autre
2. La pensée de l’immortalité
II. Pénétrer la mort en tant que sujet
A. Les expériences de la mort
1. Les états de mort imminente
2. Les camps de concentration
B. La position des philosophes
1. La mort : un arrêt de la vie (Epicure)
2. Un passage vers l’au-delà (Platon)
Conclusion
Préliminaires :
Pour vous faire partager la difficulté d’appréhender le sujet, permettez-moi de vous faire une
petite lecture en préliminaire prise au hasard de mes recherches :
Le problème (de la mort) est-il le même selon que l'on considère l'aspect objectif ou l'aspect
subjectif de la mort?Qu'en est-il de la mort de l'autre ? La réponse est-elle la même selon
qu'on admet que l'autre est transcendant, dans l'extériorité ou que ma conscience porte l'autre
en elle ?Qu'est-ce qui disparaît quand je change ? Qu'est-ce qui demeure ? Peut-on alors dire
que je sais ce qu'est la mort puisque je deviens sans cesse autre que ce que j'étais ? Est-ce de
cette disparition dont parle le sujet: disparition du mouvement de l'existence, du sens, du
devenir passé comme histoire qui nous a fait ce que nous sommes, ou bien d'une disparition
totale de ce devenir autre, de cette existence toujours par-delà l'essence, de ce projet, de cette
temporalisation comme "avenir qui va au passé en passant par le présent" (Heidegger), qui
n'est que la condition du sens?Origine du sens: être orienté vers ce qui n'est pas encore, se
transcender vers le monde (projet), y introduire une signification: l'homme, romancier de sa
vie.
Je suis plus habituée au jargon et au raisonnement juridique qui me paraît moins abscond qu’à
la réflexion philosophique.
Je me retrouve donc comme un philosophe à qui il est demandé d’exposer la théorie des
contrats et l’essence du droit à des philosophes…Quel angle d’attaque prendre, sous quelle
lumière exposer les idées caractéristiques de ce domaine d’étude ? Cette demande dépasse
largement mes compétences…
Cette étude peut vous sembler superficielle dans le traitement du fond du sujet. Néanmoins,
les sources trouvées sur le sujet ne s’adressaient que rarement à un public de néophytes et
l’analyse philosophique, la démarche intellectuelle qui s’ensuit, peut s’avérer rapidement
ésotérique.
Introduction :
Après ces préliminaires, commençons donc par ce que nous avons appris : tentons de définir
les termes du sujet et de nous poser les bonnes questions :
Tout d’abord : qu’est-ce que la philosophie ? Nous allons la définir de manière négative : ce
n’est pas une science ni même une connaissance. Ce n’est pas non plus un savoir : c’est une
réflexion sur les savoirs disponibles. C’est pourquoi on ne peut apprendre la philosophie, qui
n’existe pas en tant que telle. On ne peut qu’apprendre à philosopher. Le philosophe dans sa
démarche intellectuelle va s’interroger sur sa propre pensée, sur la pensée des autres, sur le
monde, sur la société, sur ce que l’expérience nous apprend et sur ce qu’elle nous laisse
ignorer.
L’essence même de la philosophie et de l’art de philosopher est de « penser sa vie et de vivre
sa pensée » en harmonie. Philosopher est l’art de la réflexion humaine sur des questions que
lui seul dans le règne animal est amené à se poser du fait de son humanité. C’est une manière
de vivre sa vie au quotidien.
1
Il va orienter toutes ses forces pour penser mieux, plus fort, plus profond avec pour objectif
d’avoir une vie plus humaine, plus lucide, plus sereine…C’est ce que les philosophes
appellent la sagesse, qui serait un bonheur sans illusion, ni mensonges. « Le bonheur serait le
but, la philosophie le chemin’· .
Une fois que l’on a compris le sens de la démarche philosophique et ce qu’elle est sensée
nous apporter, on va tenter de mieux comprendre comment les philosophes ont appréhendé
une question centrale à la vie humaine : celle de la mort. Peut-on philosopher sans la mort ?
rien n’est moins sure ! C’est ce qu’affirmait Arthur Schopenhauer.
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Les objets de la philosophie sont innombrables. Rien de ce qui est humain ou vrai ne lui est
étranger. Cela ne signifie pas qu’ils soient tous d’égale importance. Kant, dans un passage de
son livre « La Logique » résumait le domaine d’intervention de la philosophie en quatre
questions : Que puis-je savoir ? Que dois-je faire ? Que m’est-il permis d’espérer, Qu’est-ce
que l’homme ? Elles débouchent toutes quatre sur une cinquième question, qui est sans doute
philosophiquement parlant la question principale : Comment vivre ? et donc pourquoi
mourir ?
La mort est le concept central de toute existence humaine et ce que les philosophes appellent
la finitude de l’homme est l’essence même de la philosophie.
La pensée de la mort est une pensée qui nous obsède, parce que le temps psychologique nous
travaille et nous inquiète. La mort est présente en arrière-fond de nos angoisses sourdes et
pourtant, même en y pensant souvent, nous y pensons sans savoir ce qu’elle représente.
« Quand on pense à quel point la mort est familière et combien totale est notre ignorance, ».
Devant la mort, chacun de nous se trouve pladans une situation paradoxale : obsédé par
une chose dont nous ignorons tout, tout en croyant en savoir assez pour la craindre ! Ce qui
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Une formation à l ‘esprit critique et à l’autonomie. Une méthode de pensée rigoureuse. Un art de la réflexion
enraciné dans une attitude d’étonnement de questionnement. (Jules Ferry introduction p.15-16)
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Arthur Schopenhauer, Suppléments, au Monde comme volonté et comme représentation, XL : « De la mort et
de ses rapports avec l’indestructibilité de notre être en soi »
n'a en fait aucun sens.
A quoi pensons-nous quand nous pensons à la mort ? Est-ce à la mort ou à tout autre chose ?
En pensant à la mort, nous pourrions ne formuler que nos regrets de la vie. L'idée de mort
pourrait être une simple image. La mort est-elle une certitude indéfinie dans le temps, mais
dont l’objet réel nous échappe ? La mort est-elle pensable ? La pensée de la mort peut-elle
avoir un objet dont la pensée puisse se saisir ? Que mettons-nous dans ce mot "mort"? Qu'est-
ce que nous projetons sur la mort ? Qu'est-ce nous connaissons de la mort?
Il nous faut dès à présent préciser les limites de nos propos : le thème de la mort couvre un
domaine problématique trop étendu qui nous oblige à faire des choix dans les thèmes abordés.
On a essa de s’en tenir qu’aux principales questions strictement philosophiques que pose la
mort. On ne retrouvera pas également dans le corps de ce sujet des citations de textes issus de
traditions étrangères à la philosophie et à la littérature occidentale.
Par même, le mot « mort » a un contenu très complexe. Il enveloppe des représentations
culturelles, l’expression psychologique de la peur de l’inconnu, des attentes religieuses, une
zone limite d’expérience qui inquiète et fascine, une représentation de la fin de l'existence.
Nous ne traiterons pas de ces différents aspects culturels, psychologiques, religieux de la mort
qui feront l’objet d’autres exposés.
Dans l’histoire de la philosophie, quelques grandes interrogations reviennent de manière à peu
près constantes : Qu’en est-il de l’être ? Qu’est-ce que l’esprit ? Quelles relations entretient-il
avec le corps ? Questions toujours formulées dans un certain contexte historique et culturel,
mais qui trouvent à chaque époque à s’exprimer. En revanche, on peine à identifier l’énon
précis d’un « problème philosophique de la mort »
On trouve presque toujours la question de la mort dans les livres de philosophie que j’ai pu
consulter (notamment les livres scolaires ou universitaires) mais le problème de la mort
semble privé d’une formulation déterminable. La mort ne se laisse pas problématiser dans les
termes d’une question unique dont l’énoncé traverserait les époques.
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La mort, du fait de sa définition polysémique, peut-elle être objet de philosophie ? C’est la
première interrogation à laquelle nous allons nous évertuer de répondre dans une première
partie (I). Nous verrons que la réponse à cette première question nous conduit à envisager
l’expérimentation la mort en qualité de sujet et de retracer ainsi les différentes pensées
philosophiques sur ce sujet (II.)
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Patrick Dupouey, la mort, textes choisis et présentés par P. Dupouey, Coll. Corpus, G Flammarion, 2004, p.20
I. Circonscrire la représentation de la mort en tant qu’objet
La mort désigne en général tout ce qui appartient à l’ordre du « jamais plus ». Elle est au
sein même de la vie ce qui ne reviendra pas, ce qui relève irréversiblement du passé et que
l’on a aucune chance de retrouver un jour. Il existe de nombreuses petites morts,
composant notre vie au quotidien. Et puis il existe : la mort, inéluctable de tout organisme
vivant. Même en ce sens définitive, qu’entend-on pas le mot : LA MORT.
Il n’existe donc pas une seule mort mais une multitude de situations qui ne saurait se
résumer à la seule fin de la vie biologique. Mais qu’est-ce que la mort ? personne ne le
sait et l’on ne le saura jamais ; S’il est bien une chose que l’homme ne maîtrise pas malgré
les progrès réalisés est la maîtrise de sa propre fin et l’appréhension qu’il peut en avoir. Il
semble cependant légitime de se poser la question de la mort et de sa définition en tant
qu’objet de représentation (A).
Il serait trop facile cependant de clore le débat sur la question de la mort en philosophie
sur le constat de l’ignorance du phénomène et de son objet. Nous essaierons de
circonscrire le périmètre de la mort sous l’angle de la mort des autres reflétant, par un
effet de miroir, sa propre mort et sur la question de l’immortalité qui renvoie la mort à la
vie, son pendant. (B)
A. la mort : Une représentation sans objet ?
Le philosophe André Comte-Sponville dans sa présentation de la philosophie définissait la
mort comme un objet nécessaire mais impossible. Nécessaire puisque toute notre vie en
porte sa marque, impossible puisqu’il n’y a rien, dans la mort, à penser. Qu’est-elle ? nous
ne le savons pas.
La première hypothèse concernant la question de l’impossibilité de saisir ce qu’est la mort
par la pensée ne saurait nous permettre nous empêcher de dire pourquoi elle est
impensable. En soi, la mort peut recevoir deux acceptations : une objective, l’autre faisant
appel à la conscience de sa mort et à la pensée que l’on peut en avoir, plus subjective.
1. Nous pouvons penser à la mort comme la fin objective de l’existence, c’est-à-dire à sa
fin biologique, ce qui demande une finition clinique précise, qui s’avère très difficile.
La mort serait l’idée d’un phénomène naturel, empiriquement observable et
biologiquement explicable dont on peut donner une description médicale et physiologique
mais aussi historique, économique et démographique, évènement qui concerne tous les
organismes vivants et s’appelle chez l’homme le décès. Est mort ce qui a cessé d’être.
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