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La langue basque et les langues ouralo-altaïques. 283
est le character indelebilis; 1 tellement indelebilis, que même dans les
langues altaïques qui en bien des points ont adopté la manière indo-
germanique et qui ont quitté plus ou moins la route altaïque, on ne
saurait les méconnaître, p. e. dans la langue hongroise; comme en
tongouse, samoyède, turc ... la langue hongroise dit halandó ember,
jó atya, nagy ház = homme mortel, bon père, grande maison, mais
ember halandó, atya jó, ház nagy = (l’)homme est mortel, le père est
bon, la maison est grande; et par conséquent au pluriel halandó
ember- ek (sans flexion de l'adjectif) = mortel homme- s = hommes
mortels, mais ember- ek halandó- k = hommes mortels = (les) hommes
sont mortels. Toujours on dit en hongrois: (az) atyá-nak (a) ház-a
= du père la maison- sa = la maison du père, impossible de dire:
(a) ház ou (a) ház-a (az) atyának; et ce caractère domine encore
toute cette langue comme il domine le samoyède, le tongouse, le mongol;
il n’est pas possible de poursuivre ici l'étude de ce point, je l’ai fait
souvent jusque dans les détails les plus minces; nous y reviendrons ça
et là. L’adjectif qui dans toutes les langues altaïques précède son
substantif est le régime adnominal du regens suivant (il a même
souvent la forme d'un véritable génitif), de sorte que grande maison
1 Dans toutes les langues altaïques il n’y a que ces deux principes par les-
quels tous les phénomènes sont explicables: on ne saurait assez insister sur ce fait.
Les rares exceptions ne sont qu’apparentes. Une de ces exceptions, ou plutôt la
seule qui puisse faire difficulté, c’est l’emploi de suffixes possessifs, où le principe de
dépendance semble être renversé. Il faudrait attendre la formule de moi-père au
lieu de père-mon avec le suffixe possessif; et en vérité la première formule est la
formule primitive; primitive et ferme à tel point que nous la trouvons encore par-
tout, et que nous la trouvons même là en finnois, samoyède, tongouse, turc, où le
substantif a déjà le suffixe possessif: de moi-père-mon; c’est-à-dire que l’ancienne
façon reste, quoique le suffixe possessif qui aime à la supplanter et à se mettre à sa
place ait été adopté au lieu du pronom adnominal (de) moi qui était placé en
tête de l’expression. Mais aussi l’emploi du suffixe possessif ne lutte point contre
la loi universelle rectum ante regens, car le génie du type altaïque ne voyait et ne
pouvait voir d’abord autre chose dans le suffixe possessif qu’une sorte de nomen
regens: mon posséder (du père) ou pour ainsi dire mei -tas (patris); c’est la même
chose que dans les formules dans la maison, près de la maison, qui servent de cas
obliques au substantif, mais qui sans aucun doute avaient primitivement la signi-
fication de; intérieur de la maison, voisinage de la maison.
Voir mes travaux ,,Der uralalt. Sprachstamm, das Finnische und das Japanische”,
,,Die Zugehörigkeit der finnischen Sprachen zum uralalt. Sprachstamm”, ,,Das Ural-
altaische und seine Gruppen”,
,,
Weiteres zur Sprachgeschichte”, ,,Samojedisch und
Finnisch“.