Sociologie Des inégalités aux formes multiples 23 I Qu’est-ce qu’une inégalité ? 1. Les inégalités sous le regard du sociologue et de l’économiste ●●Les inégalités désignent des différences perçues comme injustes dans la distribution des ressources sociales, qu’il s’agisse de ressources éco­ nomiques (le revenu et le patrimoine, notamment) ou sociales (l’accès aux soins, l’éducation, le logement, l’accès au pouvoir, etc.). La dif­ férence entre les sexes n’est pas en soi une inégalité ; elle le devient lorsque l’appartenance au genre féminin entraîne un salaire moins élevé ou un accès limité aux postes de représentants politiques. ●●Les inégalités sont étudiées par les sociologues comme par les écono­ mistes. Les premiers mettent en évidence les hiérarchisations sociales sur lesquelles elles reposent et les mécanismes de reproduction sociale qu’elles alimentent ; les seconds s’interrogent sur la répartition inégalitaire des richesses et cherchent à expliquer l’évolution des inéga­ lités économiques sur une longue période. 2. Les inégalités économiques ●●Les inégalités économiques concernent les revenus, les patrimoines, l’emploi et les salaires. ●●La répartition primaire des revenus – qui correspond à la participation directe ou indirecte des ménages à l’activité économique – génère des inégalités que le versement de revenus de transfert par les administra­ tion publiques atténue (allocations familiales, pensions de retraite, RSA). Pour les ménages, la majeure partie des revenus primaires correspond aux salaires versés aux salariés en contrepartie de leur travail. Moins bien connues, les inégalités de patrimoine sont plus marquées que les inégalités de revenus (le patrimoine qui désigne l’ensemble des biens possédés – appartement, objet d’art, placement boursier – est le résultat d’une accumulation de revenus au cours du temps). ●●Les inégalités devant l’emploi recouvrent plusieurs dimensions : vulnérabilité au chômage dont celui de longue durée, précarité, temps partiel subi. ●●Les inégalités économiques sont les plus médiatisées et les plus faciles à mesurer (la plupart peuvent s’exprimer de façon monétaire), mais il ne faudrait pas limiter la réflexion aux écarts de revenus. Les inégalités économiques constituent en effet la matrice d’autres inégalités. SES Tle ES 49 3. Les inégalités sociales ●●Les inégalités de revenus et de patrimoine donnent naissance à des inégalités sociales : inégalités d’accès au logement, inégalités d’accès aux soins, inégalités d’accès aux loisirs, etc. La précarité et l’inégal accès aux biens culturels peuvent entraîner des inégalités scolaires. II Un processus cumulatif 1. Des inégalités qui s’additionnent ●●Les inégalités font système : elles sont liées les unes aux autres par un réseau complexe d’interrelations et d’interactions. Causes et effets les unes des autres, elles se renforcent mutuellement (les inégalités dans l’accès au logement se répercutent ainsi dans de nombreux domaines). ●●On peut par exemple mettre en évidence la corrélation entre les inégalités dans le travail et toute une série d’inégalités plus ou moins directement liées à elles : les inégalités de mortalité selon les catégo­ ries socioprofessionnelles découlent ainsi des conditions de travail ; les inégalités de rémunérations professionnelles font naître des inégalités dans les conditions de vie. 2. Une polarisation de l’espace social ●●Le caractère cumulatif des inégalités génère des phénomènes de polarité. À une extrémité de l’espace social, les uns cumulent fortune, pouvoir et prestige tandis qu’à l’autre extrémité les autres cumulent les désavantages. À la pauvreté économique s’ajoute alors un moindre accès au savoir et au pouvoir. 3. Des inégalités qui se transmettent ●●Les inégalités peuvent aussi se transmettre de génération en génération, freinant les possibilités de mobilité sociale et entraînant la constitution de « lignées » semblables à celles observées dans les sociétés aristocratiques. Ce phénomène d’hérédité sociale est particu­ lièrement fort aux deux extrémités du spectre social. 50 SES Tle ES