L’évolution tardive du Système Solaire. A. Morbidelli1, 1OCA, B.P. 4229, 06304 Nice
Cedex 4 ; morby@obs-nice.
Introduction: Nous appelons `évolution tardive’
celle qui a eu lieu après la disparition du disque de
gaz. Nous présentons ici nos derniers résultats
concernant la formation des planètes telluriques et
l’origine du Grand Bombardement Tardif
Formation des planètes telluriques: Nous
avons effectué 8 simulations numériques du proces-
sus de formation, en partant d’un système de 25
embryons planétaires de masse Martienne, distribués
entre 0,5 et 4 AU [1]. Ces embryons sont initiale-
ment dans un disque de planétésimaux, ayant la
même masse totale et la même extension radiale que
le système d’embryons. Dans 4 simulations, Jupiter
et Saturne ont initialement leurs orbites actuelles, et
dans les 4 autres elles ont initialement des orbites
presque circulaires et co-planaires, plus rapprochées.
Fig. 1 : le distributions orbitales des planètes telluriques obte -
nus dans nos simulations CJS et EJS, comparées à celle du sys-
tème réel. La barre d’erreur horizontale de chaque planète repré-
sente leur excursion radiale entre périhélie et aphélie.
La Figure 1 montre les systèmes de planètes tel-
luriques ainsi obtenus. Dans le cas ou Jupiter et Sa-
turne ont orbites aussi excentriques que les orbites
actuelles (simulations EJS), les systèmes finaux de
planètes telluriques ont un déficit de moment cinéti-
que (AMD, défini comme la différence entre la com-
posante verticale du moment cinétique du système et
celle que le même système aurait si toutes les orbites
étaient circulaires et co-planaires) qui est inférieur à
celui des planètes telluriques de notre système so-
laire. C’est la première fois qu’un tel résultat est
obtenu. En effet, le AMD des nos planètes telluri-
ques est 7 fois plus petit que celui obtenu dans les
simulations précédentes [2] qui ne prenaient pas en
compte le rôle des planétésimaux. Pareillement, les
temps caractéristiques de formation des planètes
dans nos simulations sont de l’ordre de 30-40 Ma, 3
fois plus courts que dans [2] et en accord avec la
chronologie de formation du système Terre-Lune
selon le chronomètre Hf-W. Ces résultats montrent
l’importance des planétésimaux dans le processus de
formation des planètes telluriques. En effet, les pla-
nétésimaux amortissent continuellement les excentri-
cités et les inclinaisons des proto-planètes, par un
processus dénommé `friction dynamique’.
Les simulations dans lesquelles Jupiter et Saturne
ont initialement des orbites circulaires (simulations
CJS), en revanche, donnent des systèmes de planètes
telluriques avec un AMD qui est 50% supérieur au
AMD du système réel, et des temps d’accrétion
d’environ 100 Ma. Ces résultats apparemment néga-
tifs ne permettent toutefois pas d’exclure le caractère
circulaire des orbites initiales des planètes géantes. Il
est vraisemblable que, en prenant en compte dans les
simulations un plus grand nombre des planétési-
maux, ou en régénérant partiellement leur population
lors des collisions entre embryons, le AMD final des
planètes telluriques et les temps d’accrétion pour-
raient être en bien meilleur accord avec les contrain-
tes.
Fig.2. L’origine de la matière accrétée par les planètes telluri-
ques dans nos simulations. La taille de chaque camembert est
proportionnelle à la masse finale de la planète. L’échelle des gris
représente la distance héliocentrique originelle de la matière.
Une différence majeure entre les simulations EJS
et CJS est que dans le premier cas les planètes tellu-
riques accrètent de la matière seulement depuis la
région 0,5 – 2,5 UA, tandis que dans le deuxième cas
~ 15% de leur masse est accrété depuis la ceinture
externe des astéroïdes (Fig. 2). Le mécanisme propo-
dans [3] sur l’origine de l’eau par apport de chon-
SHORT TITLE HERE: A. B. Author and C. D. Author
drites carbonées est donc valable seulement dans
l’hypothèse Jupiter et Saturne étaient initialement
sur des orbites circulaires.
Nous remarquons que la théorie de formation des
planètes géantes prévoit que leur orbites étaient ini-
tialement circulaires, et que notre modèle sur
l’origine du bombardement tardif (voir ci-dessous)
implique également des conditions initiales comme
celles utilisées dans les simulations CJS.
Origine du grand Bombardement Tardif: Le
Bombardement Tardif est un évènement cataclysmi-
que qui s’est déclenché soudainement, 650 millions
d’années après la formation des planètes. Son inten-
sité était de ~ 20.000 fois celle du bombardement
actuel aux astéroïdes géocroiseurs, et il a perduré
environ 100 millions d’années. Ceci suggère que le
Système Solaire avant le bombardement tardif devait
être dans un état différent de son état actuel. En par-
ticulier, il devait y avoir un réservoir massif de petits
corps qui est soudainement devenu instable. Nous
avons construit le premier modèle réaliste de
l’ évolution du Système Solaire qui explique à la fois
les propriétés du bombardement tardif [4], la struc-
ture orbitale actuelle des planètes géantes [5] et
l’existence des astéroïdes Troyens de Jupiter [6].
Dans ce modèle, à la disparition du disque de gaz, les
planètes géantes du Système Solaire étaient sur des
orbites bien plus circulaires, co-planaires et rappro-
chées entre elles. En particulier le rapport entre les
périodes orbitales de Saturne et Jupiter était inférieur
à deux (il est presque égal à 2,5 actuellement). Le
système des planètes géantes était entouré par un
disque trans-Neptunien de planétésimaux, d’environ
35 masses terrestres (Fig. 3a). L’interaction entre
Neptune et ce disque a conduit les orbites des planè-
tes à s’écarter lentement (Fig. 3b). Ainsi, après un
temps très long (allant de 350 millions d’années à 1,2
milliards d’années selon nos simulations) Jupiter et
Saturne ont traversé leur résonance mutuelle 1 :2 (où
le rapport entre les périodes orbitales est exactement
égal à 2). La traversée de cette résonance a excité les
excentricités de Jupiter et Saturne, ce qui a déstabili-
le système des planètes géantes dans sa globalité
(Fig. 3c). Uranus et Neptune, devenues très excentri-
ques, ont pénétré dans le disque. L’interaction pro-
che de ces planètes avec le disque, d’une part a
conduit les planètes vers leurs orbites actuelles (Fig.
3d), d’autre part a dispersé le disque, dont une partie
des planétésimaux a pu percuter les planètes telluri-
ques, causant ainsi le bombardement tardif. Une
animation de ce processus peut être visualisée sur
http://www.obs-nice.fr/morby/stuff/LHBae2.AVI
.
Fig. 3. Quatre `images’ du système solaire selon notre modèle
sur l’origine du bombardement tardif [4]. (a) l’état initial ; (b)
juste avant le déclenchement de l’instabilité ; (c) au moment du
déclenchement quand les orbites planétaires deviennent excentri-
ques; (d) à la fin de l’évolution. les orbites planétaires sont repré-
sentées par des courbes fermées (rouge pur Jupiter, blanc pour
Saturne, mauve pour Uranus et bleu pour Neptune). Les planété-
simaux sont représentés par des points verts.
References :
[1]O’Brien D., Morbidelli A. et Levison H.F., Icarus,
2006, sous presse.
[2] Chambers, J.E. 2001, Icarus, 152, 205
[3]Morbidelli A., Chambers J., Lunine J.I., Petit
J.M., Robert F., Valsecchi G.B., et Cyr K.E. 2000,
Meteoritics and Planetary Science, 35, 1309
[4] Gomes R., Levison H.F., Tsiganis K., et Morbi-
delli, A. 2005, Nature, 435, 466
[5] Tsiganis K., Gomes R., Morbidelli A., et Levison
H.F. 2005, Nature, 435, 459
[6] Morbidelli A., Levison H.F., Tsiganis K., et Go-
mes R. 2005, Nature, 435, 462
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