Extraction d`inductances parasites et re

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Schedae, 2007
Prépublication n° 18
Fascicule n° 2
Extraction d’inductances parasites
et re-simulation pour circuits intégrés RF
Hugues Kampé
LaMIPS : Laboratoire de Microélectronique ENSICAEN NXP
NXP Chief Technology Office/Process & Library technology
NXP Semiconducteurs, 2 Esplanade Anton Philips, BP 20 000, 14906 Caen Cedex 9, France
[email protected]
Olivier Hubert, David Denis
NXP Chief Technology Office/Process & Library technology
NXP Semiconducteurs, 2 Esplanade Anton Philips, BP 20 000, 14906 Caen Cedex 9, France
Patrick Martin
LaMIPS : Laboratoire de Microélectronique ENSICAEN NXP
Résumé :
Les inductances parasites et le couplage inductif peuvent avoir un impact majeur sur les circuits
intégrés fonctionnant à des fréquences de l’ordre du GHz. La densité et la longueur croissante
des lignes d’interconnexion de ces circuits sont quelques tendances technologiques qui accroissent les effets inductifs. Ces effets doivent être considérés dans le processus de conception afin
d’évaluer et d’optimiser les performances des circuits avant leur fabrication. Deux approches
complémentaires répondent à ce besoin : la simulation électromagnétique et l’utilisation des
moteurs d’extraction d’éléments parasites. L’étude globale évalue et valide différents outils
d’extraction, tout en comparant leur vitesse, précision et capacité à intégrer de grands circuits.
Le moteur d’extraction présenté est Assura RCX-PL de Cadence. Il a été évalué sur des structures
relativement simples et bien connues : des lignes de transmission ; et aussi sur des cas plus
complexes : Oscillateur Contrôlé en Tension. Les résultats de mesures sont présentés.
Mots clés : inductance parasite, couplage inductif, extraction RLC, Assura RCX-PL.
Hugues Kampé, Olivier Hubert, David Denis, Patrick Martin
« Extraction d’inductances parasites et re-simulation pour circuits intégrés RF »
Schedae, 2007, prépublication n° 18, (fascicule n° 2, p. 87-94).
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Introduction
La réduction des dimensions de gravure des procédés CMOS et BiCMOS, la montée en
fréquence des applications et le nombre croissant de lignes d’interconnexions entre blocs,
imposent de prendre en compte l’effet du couplage inductif et des inductances parasites
[1] dans les circuits radio fréquence (RF).
Cet effet, conjugué à ceux des résistances et des capacités parasites, est critique aux
hautes fréquences (HF) – dès l’ordre du Giga Hertz – [2]. Il doit donc être considéré très tôt
dans le flot de conception afin d’évaluer avec précision les performances réelles des circuits RF avant fabrication.
Dans cette optique, deux types d’outils sont disponibles :
– Les outils électromagnétiques fondés sur les équations de Maxwell. Ils sont très précis,
mais les temps de calcul trop importants ne permettent pas de simuler un circuit complet.
– Les logiciels d’extraction d’éléments parasites qui utilisent des expressions analytiques. Ils sont un bon compromis entre précision et vitesse. Ils sont aujourd’hui capables d’extraire des inductances et des mutuelles inductances parasites, en plus des
résistances et capacités, sur des blocs fonctionnels complets.
Cette étude porte sur l’évaluation des inductances parasites dans les circuits RF, appliquée au cas des lignes de transmission représentatives des interconnexions dans le circuit.
L’outil utilisé est le moteur d’extraction d’éléments parasites Assura RCX-PL [3] de
Cadence.
La seconde partie présente le modèle utilisé pour les interconnexions étudiées. La
troisième met en évidence les effets à haute fréquence sur les interconnexions. La quatrième section illustre l’adéquation entre la théorie et les résultats fournis par l’outil et par
des mesures. Enfin, un aperçu des travaux autour du couplage inductif est présenté en
conclusion.
Lignes de transmission
L’étude des effets inductifs est réalisée sur des lignes de transmission représentatives des
interconnexions utilisées dans les circuits RF : figure 1. Elles sont de diverses dimensions,
formes, et couches métalliques dans la technologie BiCMOS QUBIC4G [4]. Ces lignes ont
été choisies suffisamment longues (supérieure à λ/2 à 50GHz) pour capturer toute l’information de phase et avoir une vue globale des pertes.
Largeur
masse
Largeur
ligne
Si gnal
Largeur Si gnal Largeur
li gne
mas se
Mx
Largeur Si gnal Largeur
mass e
ligne
Mx
espacement
espac ement
My
1.1. Ligne simple
Largeur
mass e
es pac ement
espacement
My
1.2. Ligne coplanaire en U
1.3. Lignes coplanaires en superposées
Fig. 1 : Lignes de transmission étudiées.
Pour étudier l’excitation et la propagation du courant et de la tension en haute
fréquence, des segments de ligne de dimensions négligeables comparées à la longueur
d’onde λ sont considérés, de façon à pouvoir négliger le temps de propagation du signal
le long de ces segments. Le modèle analytique retenu [5] est celui à éléments distribués,
fig. 2.
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Fig. 2 : Circuit équivalent d’un segment de ligne.
R, L, C et G sont respectivement la résistance, l’inductance, la capacité et la conductance distribués par unité de longueur. La constante de propagation du signal γ et
l’impédance caractéristique Zc de la ligne sont tels que :
γ = ( R + jwL )(G + jwC ) = (α + jβ )
2
2
Zc =
R + jwL
G + jwC
(1)
α est la constante d’atténuation du signa l,
β = 2π/λ est la constante de phase, w = 2f la pulsation.
Afin d’évaluer ces paramètres de lignes à partir des paramètres S provenant des
mesures ou de l’utilisation d’outils, les lignes sont assimilées à des quadripôles caractérisés
par leur matrice [ABCD].
Le passage de cette matrice [ABCD] à celle des paramètres S [7] donne :
2
B
2 (1 + S11 ) − S 12
= Z0
(1− S11 )2 − S12 2
C
2
Zc =
2
(2)
Z0 = 50Ω est l’impédance de référence.
Les éléments R, L, C et l’impédance totale Z de la ligne de longueur l, ainsi que
l’atténuation D en décibel du signal et son temps de propagation le long de la ligne (tpha)
exprimé en secondes sont aussi calculés à partir des paramètres S.
Z = γ .l .Z c
R = ℜeal (γ .l.Z c )
βl
(s )
2π f
20 −3
D=
10 α (dB / mm)
ln 10
tpha =
L = ℑmag (γ .l.Z c ) ω
C = ℑmag (γ .l / Z c ) ω
(3)
Ces paramètres sont utilisés pour caractériser les éléments parasites des interconnexions et comparer les outils.
Effets à haute fréquence
À basse fréquence (<100 MHz) la distribution de courant est uniforme dans la section de la
ligne. Quand la fréquence augmente, l’effet de peau provoque une diminution de la densité de courant au centre de la section. Cet effet est caractérisé à la pulsation ω par l’épaisseur de peau δ qui est la profondeur de pénétration à laquelle la densité de courant est
divisée par e2,71.
δ =
2
ωμσ
(4)
Avec σ = 1/ρ la conductivité du conducteur de perméabilité µ= 410-7.
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La figure 3 illustre la distribution de la densité de courant selon la section d’un conducteur. Le phénomène de peau est analysé selon qu’on observe cette distribution dans le
δ δ
sens de l’épaisseur ou de la largeur de la section.
paisseur du
conducte ur
=
+
Largeur
δ
δ 2δ δ
2δ
Fig. 3 : Distribution de courant à haute fréquence selon la section d’un conducteur.
Analysons la variation de cette densité lorsqu’on entre par deux faces opposées selon
la section. Afin de simplifier cette analyse, supposons uniforme la densité de courant sur
un élément de section d’épaisseur δ dans la direction observée.
Avec cette hypothèse,
– Si on peut distinguer plus de deux éléments de section d’épaisseur δ selon la direction
observée, la distribution de la densité de courant sera considérée non-uniforme :
l’impact de l’effet de peau est important ;
– Si on ne peut pas distinguer plus de deux éléments de section d’épaisseur δ selon la
direction observée, l’effet de peau aura un impact négligeable. La densité de courant
sera considérée uniforme.
Rappelons que cette subdivision de la section du conducteur en éléments d’épaisseur
δ dépend de la fréquence. En appliquant cette méthode, on observe que :
– Dans le sens de l’épaisseur du conducteur, le courant est uniformément distribué ;
– En observant dans le sens de la largeur du conducteur, la densité de courant varie.
Il en résulte une distribution non-uniforme de cette densité selon la section du conducteur, comme illustré figure 3. Une estimation de la résistance à basse fréquence (R DC),
à 50GHz (R50GHz) et de l’inductance L [6] est :
R DC = ρ
l
h*m
R50 GHz = ρ
l
2* h*δ
⎛
2l
m+ h T ⎞
L = 2 l ⎜ ln
+ 0 .25049 +
+ ⎟ nH
(5)
3l
4⎠
⎝ m+ h
l la longueur de la ligne, h son épaisseur, m sa largeur, 2*δ la largeur où circule le courant à 50GHz.
T est un paramètre dépendant de la fréquence, et qui est caractéristique de l’effet de
peau.
La résistance rencontrée par le flux d’électrons dans la section du conducteur augmente avec la fréquence, car la section traversée par le courant diminue. De même,
l’inductance L diminue, car le paramètre T diminue avec la fréquence. L’impact de cet effet
dépend de la géométrie de la ligne, mais aussi de son environnement.
En effet, le phénomène de peau est amplifié pour des conducteurs très proches – de
l’ordre du micron – par un autre phénomène appelé effet de proximité. La distribution du
courant dans un de ces conducteurs sera influencée par celle dans l’autre, et vice-versa. Le
courant ne circulera plus sur les deux côtés selon la section du conducteur : figure 3, mais en
majorité sur l’un des deux côtés (selon le sens du courant dans l’un et l’autre conducteur).
C’est ainsi qu’une variation de 40 % de la valeur de la résistance entre 50 MHz et 50GHz
et de 1 % de la valeur de l’inductance a été constatée pour une ligne simple (figure 1.1) de
3 mm de long et de 2um de large en technologie CMOS. Alors qu’une variation de 62 %
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pour R et de 10 % pour L entre les même bornes a été établie pour une ligne coplanaire
de 3 mm de long et 2um de large, espacement de 1um.
La combinaison de ces deux effets HF change considérablement le comportement résistif et inductif de ces lignes. C’est pourquoi il est important de disposer d’outils qui permettent de tenir compte de l’influence de ces paramètres lors du dessin de circuits intégrés RF.
Comparaison mesures et outil
Les paramètres mesurés des structures représentées sur les figures 1.2 et 1.3 ont été obtenus en utilisant l’analyseur de réseau vectoriel Agilent8510XF après calibrage SOLT. Ils sont
comparés aux paramètres S obtenus après simulation avec le simulateur Spectre (de
Cadence) du circuit généré par Assura RCX-PL. Ce dernier circuit contient la représentation
électrique des inductances parasites.
Résultats concernant la structure en U : figure 1.2
La structure en U utilisée a 2 mm de long, 3um de « largeur masse » et de « largeur ligne »
pour 5um d’« espacement ». La fenêtre de mesure et d’analyse est en fréquence entre
500 KHz et 50GHz.
En dessous de 30GHz sur la figure 4, la différence entre la mesure et la simulation est
au maximum de 0.5dB pour S12 et de 1.2dB pour S11.
Autour de 30GHz le circuit est résonant. Dès lors, la précision du modèle électrique
utilisé par l’outil Assura afin de représenter les éléments parasites des lignes devient critique. Au vu des pics apparaissant sur les courbes de paramètre S de Assura et des différences de résultats avec les mesures, nous avons conclu à une limite d’utilisation du
moteur d’extraction de Cadence.
Fig. 4 : Comparaison des paramètres S d’une structure en U.
Les différences de résultats de paramètres S se reflètent sur la courbe de l’inductance
où un écart maximum de 10 % entre les mesures et la simulation est constaté (figure 5). Ce
faible écart est égal au seuil de tolérance admis dans le cadre l’étude. De même que la différence sur la valeur de la résistance qui est en dessous de 3 %.
Fig. 5 : Résistance et inductance comparées de la structure en U.
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L’analyse des variations de la résistance et de l’inductance pour des fréquences allant
jusqu’à 50GHz montre que la valeur de la résistance HF peut être supérieure de 70 % à
celle à 50MHz, tandis que la valeur de l’inductance diminue de plus de 12 %. Ceci illustre
combien il est important de tenir compte de ces parasites à haute fréquence dans l’analyse
des interconnexions des circuits.
La structure coplanaire (figure 1.3) présente des résultats similaires, voire des écarts
moins importants entre les résultats de simulation et les résultats de mesure.
Résultats concernant un Oscillateur Contrôlé en Tension
Afin d’évaluer l’importance des inductances parasites sur des structures complexes, et
aussi de valider l’utilisation du moteur d’extraction de Cadence, l’étude des éléments
d’interconnexion d’un oscillateur contrôlé en tension a été menée.
L’oscillateur [8] conçu dans la technologie BiCMOS QUBIC4G [4] présente des nœuds
connectant son inductance au reste de son circuit. Ces nœuds nommés Tank A et Tank B
sur la figure 6 sont parfaitement symétriques.
inductanc e
Tank A
Tank B
interconnexions
Circuit de r glage de
l os cillateur
Fig. 6 : Structure de l’oscillateur contrôlé en tension étudié.
L’effet des inductances parasites de ces interconnexions sur la fréquence d’oscillation
a été analysé. Pour ce faire, le paramètre S11 issu de la simulation du modèle schématique
de l’oscillateur, modèle n’incluant pas les inductances parasites, est comparé à celui issu
de l’extraction de tous les éléments parasites (dont les inductances) par Assura.
Les résultats montrent une baisse de la fréquence de résonance, de 10.8GHz à
9.1GHz, soit près de 16 % ! Cette baisse est quasiment égale à celle relevée lors des
mesures [8].
Schematic & RC-Extracted S11
RLCK-extracted S 11
Fig. 7 : Fréquence de résonance de l’oscillateur contrôlé en tension.
De plus, une seconde fréquence de résonance est mise en exergue. Sa présence
s’explique par la spécificité dans la conception de l’oscillateur contrôlé en tension étudié.
L’équation qui régit sa valeur n’inclue que les inductances parasites.
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Grâce à une optimisation de géométrie, l’impact de ces inductances sur la fréquence
de résonance de l’oscillateur a été minimisé.
Conclusion
La simulation des lignes d’interconnexion, après extraction par l’outil Assura RCX-PL de
leurs paramètres parasites R et C mais aussi des parasites inductifs, fournit une estimation
correcte du comportement électrique de ces structures sur une large bande de fréquence
et pour un temps de simulation bien moindre qu’avec les outils électromagnétiques.
Pour les lignes de transmission, les écarts entre les données provenant des mesures et
celles provenant de la simulation sont faibles. L’outil présente cependant quelques limitations
à très haute fréquence et au-delà de la fréquence de résonance des lignes présentées.
Dans le cas de l’oscillateur, l’analyse des inductances parasites permet d’évaluer avec
précision la fréquence d’oscillation du circuit, et ainsi d’évaluer les performances du circuit
avant fabrication.
Les résultats de cette étude ouvrent la voie à l’analyse du couplage inductif. En effet,
diverses structures d’un circuit (lignes d’alimentation, inductances, lignes transportant un
signal à haute fréquence) peuvent interagir de façon inductive. Cette interaction peut
générer un comportement inattendu du circuit. La mutuelle entre différents éléments du
circuit (figure 8) doit être minimisée. La suite de cette étude y est consacrée.
LNA
Mixer
= p otentiel probl m e
Fig. 8 : Couplage inductif.
Remerciements
Les auteurs tiennent à remercier leur collègue D. Lesenechal pour les mesures RF qu’il a
effectuées, ainsi que leurs collègues A. Farrugia et C. S. Vaucher pour leur collaboration
dans le cadre de l’étude de l’oscillateur contrôlé en tension.
Ce travail a été réalisé avec le support de la Région de Basse-Normandie, du Fonds
Européen de Développement Régional (FEDER) et du ministère français de la recherche.
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Schedae, 2007, prépublication n° 18, (fascicule n° 2, p. 87-94).
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