10. Automatisme et contrôle nerveux de la motricité digestive

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10. Automatisme et contrôle nerveux de la motricité
digestive (intestinale)
Introduction
La paroi digestive est typiquement formée de deux couches de muscles lisses
(fig.10.1 et 10.2) dont l'activité doit être coordonnée :
1) une couche longitudinale externe
2) une couche circulaire interne
A cela peut s'ajouter du muscle lisse oblique (estomac) ou du muscle strié
(œsophage, sphincter anal externe). Le muscle longitudinal peut former un manchon
(IG) ou bien être regroupé sous forme de bande (ténia coli) sur le caecum ou le
côlon.
Figure 10.1 Les couches musculaires lisses du tube digestif.
Figure 10.2. Les 2 couches musculaires de l'intestin
Muscularis externa
Couche (fibres) longitudinale
Epithelium
Muscularis mucosa
Muscularis interna
Couche (fibres) circulaire
Muscularis
Interna
(circular)
Muscularis
externa
(longitudinal)
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La différence majeure entre un muscle strié et un muscle lisse est que ce dernier est
doué d'automatismes alors que l'activité motrice d'un muscle strié est subordonnée
à une commande par le système nerveux extrinsèque. Un segment d'intestin isolé et
placé dans un liquide de survie se contracte régulièrement (fig. 10.3) ; pour le tube
digestif, le système nerveux ne joue qu'un rôle de coordination et de modulation
de l'activité motrice grâce à l'existence de plexus nerveux.
L'automatisme du tube digestif repose sur l'existence de cellules spécialisées : les
cellules interstitielles de Cajal (CIC).
Figure 10.3.: Automatisme de l'intestin : mise en évidence in vitro. Un fragment
d'intestin placé dans un liquide de survie se contracte spontanément en dehors de
toute innervation extrinsèque.
10.1. Les cellules interstitielles de Cajal (CIC)
Les cellules interstitielles de Cajal (CIC) sont des cellules différentes des fibres
lisses (elles sont pauvres en éléments contractiles). Elles sont principalement
localisées entre les couches musculaires longitudinales et circulaires au
voisinage des plexus myentériques (fig. 10.4). Elles développent de nombreuses
ramifications interconnectées pour former un réseau. Elles sont connectées aux
cellules lisses par des jonctions serrées ce qui donne à l'ensemble des propriétés
de "câble".
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Figure 10.4. Les cellules interstitielles de Cajal sont à l'origine de l'automatisme
des fibres lisses gastro-intestinales. Elles sont situées entre les couches musculaires
lisses longitudinales et circulaires et autour des ganglions des plexus myentériques.
Les cellules de Cajal ont 4 fonctions majeures :
1) elles sont le siège de l'automatisme du tube digestif (pacemaker)
2) elles assurent la dépolarisation des cellules musculaires lisses en ouvrant
leurs canaux calciques "voltage dépendant". Cela est à l'origine des ondes
lentes (OL) c'est-à-dire des oscillations gulières du potentiel de repos des
fibres lisses. Ces OL déterminent un rythme électrique de base (REB) dont
la fréquence est propre aux différents segments du tube digestif.
3) elles assurent la conduction électronique des OL (propriétés de câble).
4) Les CIC situées au cœur même des fibres lisses assurent la liaison entre les
motoneurones (excitateurs ou inhibiteurs) et les fibres lisses. Les
motoneurones innervent "en passage" des varicosités terminales au contact
avec les CIC.
Les CIC peuvent se regrouper en certaines zones et former de véritables
pacemaker locaux (comme au niveau de la grande courbure de l'estomac
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corpus) (voir fig.7.8). En revanche, tous les segments de l'IG possèdent des CIC
qui se répartissent sur l'ensemble de sa longueur.
Les CIC sont absentes de certaines zones (ex. grosse tubérosité de l'estomac)
qui de ce fait ne possèdent pas d'activité automatique. De même certaines
pathologies comme l'achalasie seraient dues à des déficits en CIC.
10.2. Les ondes lentes, le rythme électrique de base et les
potentiels d'action de la cellule lisse
L'enregistrement avec des microélectrodes intracellulaires de l'activité électrique
d'une fibre lisse permet de mesurer un potentiel de repos de l'ordre de -50 mV
c'est-à-dire de nettement inférieur à celui d'un fibre musculaire striée ou
cardiaque (-80 mV ).
Sous l'influence des CIC et avec une fréquence qui dépend du segment du tube
digestif (3 à 6 par minute pour l'estomac, 12 à 17 par min pour l'IG et 9 à 16 sur le
gros intestin chez l'homme), les fibres lisses se dépolarisent régulièrement. Les
dépolarisation partielles (de -50 mV à -40 mV) forment des oscillations du
potentiel de membrane nommées ondes lentes et leur régularité donne
naissance à un rythme électrique de base (REB) (fig. 10.5).
La dépolarisation partielle va persister sous la forme d'un plateau qui peut durer
10 sec au niveau de l'estomac. L'onde lente n'est pas à l'origine d'une activité
mécanique ; une activité mécanique ne sera vue que si le sommet de l'onde lente
est surchargé de potentiels de pointe (spikes) encore appelés potentiels
d'action. Les potentiels de pointe correspondent à des dépolarisations presque
totales de la fibre lisse (fig.10.5) ; il n'y a pas d'inversion de polarité.
La puissance de l'activité mécanique est proportionnelle à la fréquence des
potentiels de pointe. La dépolarisation de la cellule lisse est due à une entrée
de calcium et non de sodium comme pour un axone ou une fibre striée (la
tetrodoxine, un inhibiteur spécifique du canal sodique est sans effet sur la
dépolarisation de la fibre lisse digestive).
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Figure 10.5 : Automatisme de la fibre lisse du tube digestif. Le potentiel de
repos est de -50 mV. L'activité automatique de la fibre se traduit par l'occurrence
de dépolarisation partielle des cellules intestinales qui forment une succession
d'ondes lentes (slow waves), le rythme électrique de base (REB). Les
dépolarisations ont pour origine les cellules de Cajal. Lorsque les potentiels sont
surchargés de pointes (spikes), une activité mécanique est clenchée.
10.3. Distribution spatio-temporelle des ondes lentes et
synchronisation de l'activité
Sur une section donnée de l'IG, on constate une synchronisation du REB entre
les fibres lisses ce qui est à l'origine du caractère annulaire de la contraction
intestinale (fig.10.6). Cette synchronisation est due à la connectivité assurée par
les CIC. En revanche au niveau du côlon, il n'y a pas de synchronisation au
niveau d'une même section ce qui donne des contractions "vermiculaire" plutôt
qu'annulaire (fig.10.7). Ces contractions sont plus adaptées au brassage alors
que les contractions annulaires assurent la propagation du chyme avec les
contractions péristaltiques.
Figure 10.6. Propagation synchrone des ondes lentes (OL) sur une section
de l'intestin grêle. La contraction de l'intestin grêle se présente comme un
anneau se déplaçant de façon orale-aborale.
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