Tchad - Perspectives économiques en Afrique

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Tchad
2012
www.africaneconomicoutlook.org
Tchad
La croissance du produit intérieur brut a ralenti fortement, passant de 14.3 % en 2010 à 2.8 % en 2011
mais sur la période 2012-2013 elle pourrait atteindre 5.1 % grâce à l'industrie pétrolière
Le raffermissement des cours du pétrole et la stabilisation des dépenses publiques en 2012 devraient aider
à améliorer les indicateurs des finances publiques et la position extérieure du pays
Sur une population totale de 11.2 millions d'habitants, le taux de pauvreté est estimé à 55 % et monte à
87 % en milieu rural. Le pays a besoin de politiques volontaristes pour la transformation du monde rural
Vue d'ensemble
La croissaince du produit intérieur brut (PIB) du Tchad devrait atteindre 7 % en 2012, tirée par le secteur non
pétrolier, grâce à la mise en service de nouvelles unités de production d’électricité et de ciment. Mais elle
pourrait se ralentir en 2013 (3.2 %) du fait de la baisse de la production pétrolière. L’inflation sera maintenue
sur la période 2012-13 largement en deçà de 3 %, critère de convergence retenu par la Communauté
économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC). En 2011, l’économie tchadienne a connu un net
ralentissement avec un taux de croissance de 2.8 %, contre 14.3 % en 2010, à cause principalement de la baisse
d’activité dans le secteur primaire.
A terme, les objectifs budgétaires suivants sont visés par le gouvernement : (i) solde primaire hors pétrole
autour de 11.2 % à l’horizon 2013; (ii) solde budgétaire global autour de 4 % à partir de 2012; et (iii) taux de
pression fiscale hors pétrole supérieur à 9 % en 2014.
Pour atteindre ces objectifs, les efforts de maîtrise et de rationalisation des dépenses courantes devraient être
maintenus. Sur la période 2012-13, le processus de consolidation de la position extérieure sera poursuivi. Le
solde de la balance globale se maintiendrait aux environs de 3.6 % du PIB en 2012 pour fléchir à 0.8 % du PIB
en 2013. La diminution progressive de la production de pétrole serait compensée par le raffermissement des
cours ainsi que par la progression de la filière coton et du commerce transfrontalier de bétail.
Les perspectives de l’économie tchadienne en 2012 et à moyen terme seront marquées par les enjeux majeurs:
Les conséquences du conflit libyen caractérisées par d’importants risques d’instabilité sur le Tchad :
l’accueil du flux de déplacés, l'effet de ce conflit sur les échanges commerciaux, les transferts courants, les
investissements directs (IDE) libyens ainsi que la baisse des recettes douanières sont les principales
répercussions de la crise libyenne sur le pays.
Les carences dans la gestion budgétaire : le Tchad n’a pas de programme formel avec le FMI depuis
le non aboutissement du Staff Monitored Program (SMP) de 2009. De ce fait, le FMI n’a plus de
représentant dans le pays depuis octobre 2010. Le Tchad cherche à atteindre le point d’achèvement de
l’initiative des pays pauvres très endettés (PPTE) depuis 2001.
La dégradation des relations économiques sino-tchadiennes: en janvier 2012, soit six mois après
son inauguration, les autorités tchadiennes ont dû fermer durant une dizaine de jours la raffinerie de
pétrole construite dans le cadre d’une joint-venture avec une société chinoise, China National Petroleum
Corporation (CNPC). Le manque de transparence chez la partie chinoise, la volonté des autorités
tchadiennes de fixer le prix à la pompe des produits raffinés sans tenir compte des coûts de revient ainsi
que la contrebande de carburant en provenance du Nigeria sont à l’origine de cette situation conflictuelle.
Des mesures devraient être prises rapidement pour une entente pérenne entre les deux parties.
La gestion des aléas climatiques: entre 1910 et 2010 le lac Tchad aurait perdu plus de 80% de sa
superficie. Pour faire face aux conséquences de cette calamité le gouvernement a proposé plusieurs
politiques et programmes. Mais les moyens nécessaires pour les mettre en œuvre demeurent encore
limités. Or, ces aléas climatiques ont un effet important sur la production vivrière et sur l’élevage.
Perspectives économiques en Afrique 2012
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Figure 1 : Taux de croissance du PIB réel (Centrale)
Crois s ance réelle du PIB (%)
40%
30%
20%
10%
0%
2003
2004
2005
Taux de crois s ance du PIB réel (%)
2006
2007
2008
2009
Afrique centrale - Taux de crois s ance du PIB réel (%)
2010
2011
2012
2013
Afrique - Taux de crois s ance du PIB réel (%)
2010 : estimations ; 2011 et années suivantes : prévisions.
http://dx.doi.org/10.1787/888932623611
Tableau 1 : Indicateurs macro-économiques
2010
2011
2012
2013
Taux de croissance du PIB réel
14.3
2.8
7
3.2
Taux de croissance du PIB réel par habitant
11.7
0.2
4.4
0.6
Inflation IPC
-2.1
-0.6
2.6
3
Balance budgétaire % PIB
-3.8
0.4
0.2
-1.1
Balance courante % PIB
-0.5
2.3
3
0.6
2010 : estimations ; 2011 et années suivantes : prévisions.
http://dx.doi.org/10.1787/888932605029
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Développements récents et perspectives
Tableau 2 : PIB par Secteur (en pourcentage du PIB)
2006 2011
Agriculture, foresterie, pêche et chasse
22
16.2
Agriculture, élevage, sylviculture et pêche
-
-
dont agriculture
-
-
Mines et extraction
28.8
30.5
dont pétrole
-
-
Industries manufacturières
5.5
5.6
Electricité, gaz et eau
0.5
0.4
Electricité, eau et assainissement
-
-
Construction
4.6
7
Vente en gros et de détail, hôtels et restaurants
20.6
18.4
dont hôtels et restaurants
-
-
Transports, entreposages et communications
1.1
1.5
Transport et stockage, information et communication
-
-
Finance, immobilier et services aux entreprises
-
-
Intermédiation financière, services immobiliers, services aux entreprises et autres services
10.2
12.2
Services des administrations publiques
6.7
8.3
Administration publique et défense, sécurité sociale, éducation, santé et travaux sociaux
-
-
Administration publique, éducation, santé
-
-
Administration publique, éducation, santé et autres services sociaux et personnels
-
-
Autres services communautaires, sociaux et personnels
-
-
Autres services
0
0
Produit intérieur brut aux prix de base / au coût des facteurs
100
100
Vente en gros et de détail, hôtels et restaurants
-
-
2010 : estimations ; 2011 et années suivantes : prévisions.
http://dx.doi.org/10.1787/888932625587
Après avoir enregistré une expansion de 14.3 % en 2010, l’économie tchadienne a connu un fort ralentissement
en 2011 avec un taux de croissance de 2.8 %. Cette évolution résulte principalement de la baisse d’activité dans
le secteur primaire. Le secteur non pétrolier, qui représente 73 % du PIB, a affiché une croissance de 2.4 % en
2011 contre 16.6 % en 2010. Quant au secteur pétrolier (27 % du PIB), malgré la baisse de la production
(‑1.4 %), le redressement des cours mondiaux du pétrole brut a soutenu sa croissance. L’effet prix imprime ainsi
à ce secteur un taux de croissance de 3.6 % soit une progression de 0.3 point par rapport au taux affiché en
2010.
Si les secteurs secondaire (14 % du PIB) et tertiaire (40 % du PIB) prennent un poids accru dans la création de la
richesse nationale, celle-ci reste largement dépendante du secteur primaire qui compte pour 46% dans le PIB.
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Avec une baisse de 5.1 %, le secteur primaire a ainsi contribué au ralentissement de la croissance en 2011.
Cette évolution est imputable à une baisse de la production agricole vivrière de 29.1 % due, à son tour, au
retournement cyclique après la forte hausse de 61.7 % enregistré en 2010, et aussi au retard des pluies observé
en 2011. En dépit de cette tendance à la baisse, la croissance du secteur primaire enregistrera en 2012 et 2013
un rebond grâce aux bons résultats de la production agricole.
L’activité agro-industrielle connait quant à elle une croissance de 8.4 % favorisée par le retour des paysans à la
culture du coton et la bonne tenue des cours mondiaux de ce produit. S’agissant de l’exploitation pétrolière, la
production du brut est en baisse de 1.4 % suite à des conditions géologiques moins favorables et aux coûts de
production de plus en plus élevés. Cette baisse pourrait se poursuivre avec des prévisions de taux de croissance
respectivement de 1.1 % et ‑4.6 % en 2012 et 2013.
L’activité dans le secteur secondaire a connu une hausse de 18.7 %, progression qu’explique la forte hausse
(53.8 %) enregistrée par la branche égrenage de coton consécutive à la solution apportée aux problèmes
techniques connus par la société Coton-Tchad. Le démarrage de la production de ciment au second semestre
2011 et la bonne tenue de la demande intérieure ont permis à l’ensemble des autres productions industrielles
de progresser de 4.9 %. La branche électricité, gaz et eau a progressé de 11.8%, grâce à l’apport de la Société
de raffinage de N’Djamena (SRN) au second semestre 2011. Les perspectives du secteur secondaire sont
prometteuses pour 2012 et 2013 avec des prévisions de taux de croissance respectivement de 18.7 % et de
7.5 %. Ces prévisions s’appuient sur les changements structurels qui interviendront à court terme dans ce
secteur, notamment la mise en service de la zone industrielle et l’amélioration significative de la production
d’électricité.
Quant au tertiaire, il affiche une croissance de 5.8 % en 2011 contre 14.7 % en 2010, un résultat dû au recul
important des activités du commerce, des transports et des télécommunications ainsi que des activités
hôtelières, conséquences, notamment, du retrait de la Mission des Nations unies en République centrafricaine et
au Tchad (MINURCAT). L’activation de la fibre optique et ses implications sur les sous-secteurs, en particulier de
la communication, pourraient entraîner une croissance du tertiaire de l’ordre de 6.7 % en 2012 avant un
nouveau fléchissement à 2.3 % en 2013 sous l’effet de la baisse des activités du commerce.
En termes de ressources et d’emplois, la consommation finale marchande a enregistré en 2011 une croissance
de 8.8 % contre 13 % en 2010. Cette évolution résulte de la consommation des administrations publiques et du
dynamisme du secteur privé.
Selon les prévisions, la croissance du PIB serait de l’ordre de 7 % en 2012 et de 3.2 % en 2013, tirée
essentiellement par le secteur non pétrolier grâce au développement du secteur agricole et aux effets induits de
l’entrée en service de la raffinerie. En 2013, malgré l’apport des champs pétroliers de Bongor, l’accroissement
des coûts de production des champs du bassin de Doba orienterait le profil de croissance du secteur pétrolier à
la baisse (‑3%).
Ces prévisions de croissance, surtout pour 2012, pourraient toutefois être démenties si des aménagements
institutionnels adéquats ne sont pas trouvés pour le mécanisme de fixation des prix des produits pétroliers à la
pompe. La fixation de ces prix à des niveaux inférieurs à leur coût de production pourrait en effet engendrer
des difficultés de fonctionnement pour la SRN, détériorer les relations avec l’opérateur et partenaire chinois, la
CNPC, et favoriser d’importantes sorties en contrebande de produits pétroliers vers les pays frontaliers,
notamment la République centrafricaine et le Cameroun. Sur le plan externe, un retournement de tendance
défavorable des cours internationaux des produits pétroliers pourrait également compromettre les prévisions de
croissance de 2012 et 2013.
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Politiques macroéconomiques
Politique budgétaire
La situation des finances publiques en 2011 s’est nettement améliorée par rapport à 2010. L’exécution
budgétaire s’est traduite par une diminution du déficit des finances publiques, le solde global passant de ‑3.8 %
du PIB à 0.4 % du PIB. Cette amélioration résulte de la combinaison d’une hausse de 26.9 % des recettes non
pétrolières et d’une contraction de 13.1 % des dépenses courantes. Ces efforts ont permis l’amélioration de
0.4 point du solde primaire de base hors pétrole. Cependant, les dépenses budgétaires consécutives à
l’organisation des élections législatives et présidentielle, en février et avril 2011, comme la prise en charge des
réfugiés tchadiens suite à la crise libyenne ont eu un effet négatif sur la gestion des finances publiques. C’est
ainsi que les dépenses exceptionnelles ont représenté plus d’un point de PIB en 2011.
Outre la hausse des recettes pétrolières de 37.7 %, l’amélioration des soldes budgétaires en 2011 est la
conséquence d’une progression moindre des dépenses. Ces ajustements ont contribué à ralentir la baisse des
réserves de la banque centrale. En revanche, le rythme des investissements en 2010 et 2011 a généré des
arriérés intérieurs de paiements importants, de l’ordre de 143.4 milliards XAF (Franc CFA BEAC).
Les efforts d’investissements consentis pour la célébration du cinquantenaire de l’indépendance du pays ont
permis la réhabilitation d’une bonne partie du réseau routier et l’amélioration de la fournitures de biens et
services aux populations. On peut encore relever dans le budget la baisse des postes : matériels et fournitures
civils (‑7.3%) et le ralentissement des transferts et subventions. Ces derniers postes ont tenu lieu d’ajustement
tandis que la masse salariale et les fournitures militaires enregistraient des croissances respectives de 20.3 % et
19.0 %.
Le gouvernement a adopté en avril 2008 la deuxie,e génération de strategie nationale de croissance et de
réduction de la pauvreté (SNRP-II). Les principales priorités de cette stratégie, qui couvre la période 2008-2011,
sont : le monde rural, la bonne gouvernance, l'investissement dans le capital humain et les infrastructures. Une
évaluation de sa mise en oeuvre effectuée par une equipe du Fonds Monétaire International (FMI) reléve
cependant que «la volonté d'opérer les réformes nécessares s'est avéree insuffisante jusqu'à présent»,
notamment dans la gestion des finances publiques ainsi que dans l’alignement du budget annuel aux priorités de
la SNRP‑II. En outre, la gestion des finances publiques s’écarte souvent du cadre des dépenses à moyen terme
(CDMT). L’exécution budgétaire continue d’être marquée par un nombre élevé de dépenses avant
ordonnancement (DAO) mettant ainsi à mal les procédures budgétaires. Quant au processus de préparation du
budget, il obéit imparfaitement au cycle budgétaire, la loi de finances de l’année N + 1 étant toujours adoptée
par l’Assemblée nationale au dernier trimestre de l’année N.
Au vu des réalisations budgétaires de 2011, la politique fiscale du Tchad continue de s’appuyer fortement sur le
secteur pétrolier dont les recettes fiscales représentent 63% du total des recettes, contre 65 % en 2010. Des
progrès dans le sens d’un rééquilibrage fiscal s’imposent compte tenu des difficultés géologiques auxquelles est
confrontée l’exploitation pétrolière. D’où la nécessité de poursuivre la restructuration de l’administration fiscale
et de renforcer les efforts de collecte de taxes hors secteur pétrolier. La possibilité d’élargir la base taxable
existe. Le niveau de la pression fiscale hors secteur pétrolier : 8.8 % en 2011 contre 7.3 % en 2010 demeure
relativement modeste comparée à la moyenne observée en Afrique subsaharienne. À l’instar des autres pays de
la CEMAC, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) est appliquée au taux de 18 %. Toutefois, au Tchad, les biens de
première nécessité tels que les médicaments, le lait, la viande et le pain sont exonérés de la TVA.
Principale source de revenu de l’Etat, les recettes pétrolières, en plus d’être affectées par les aléas
conjoncturels, pourraient subir les effets de la hausse des coûts de production et des investissements de soutien
à la production. Est ainsi attendue une baisse de ces recettes de l’ordre de 30 % dès 2012, qui pourrait se
poursuivre dans les années à venir.
À terme, les objectifs budgétaires suivants sont visés par le gouvernement : (i) solde primaire hors pétrole (base
engagements, hors dons) autour de 11.2 % à l’horizon 2013; (ii) solde budgétaire global autour de 4 % à partir
de 2012 ; et (iii) taux de pression fiscale hors pétrole supérieur à 9 % en 2014. Pour atteindre ces objectifs, les
efforts de maîtrise et de rationalisation des dépenses courantes devraient être maintenus. A cet égard, les
mesures courageuses de contrôle et de réduction des effectifs militaires et civils vont dans le bon sens. Par
contre, les récents mouvements de revendications salariales et l’augmentation du niveau général des
rémunérations qui en a résulté, comme la fixation du prix des produits pétroliers de la SRN hors des
mécanismes de marché, constituent des obstacles importants à la réalisation des objectifs budgétaires de
2012/13.
Perspectives économiques en Afrique 2012
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Tableau 3 : Opérations financières de l'Etat (en pourcentage du PIB)
2003
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
Recettes totales (avec dons)
16.4
18.8
23.8
27.7
19.4
20.5
24
23.1
21.7
Recettes fiscales
6.6
3.8
5.5
5.3
7.1
5.2
5.1
4.8
4.9
Recettes pétrolières
1.4
13
16.5
20.6
8.4
13
14.2
14.5
13.9
Dons
-
-
-
-
-
-
-
-
-
Dépenses totales (et prêts nets) (a)
20.7
16.3
21.4
23.2
29.3
24.3
23.5
22.9
22.8
Dépenses courantes
8.4
10.3
13.6
16.2
18.8
14.2
13.9
13.4
13.4
Sans les intérêts
8
9.9
13.2
15.9
18.1
13.9
13.6
13.2
13.3
Salaires
3.5
2.6
4.5
4.9
5.9
4.1
4.2
4.3
4.5
Intérêts
0.5
0.4
0.4
0.3
0.6
0.3
0.3
0.2
0.1
Solde primaire
-3.9
2.9
2.8
4.8
-9.2
-3.4
0.8
0.4
-1
Solde global
-4.4
2.5
2.5
4.5
-9.8
-3.8
0.4
0.2
-1.1
2010 : estimations ; 2011 et années suivantes : prévisions.
http://dx.doi.org/10.1787/888932626575
Politique monétaire
La conduite de la politique monétaire au cours de 2011 s’est faite dans un contexte budgétaire favorable.
Contrairement à ce qui s’était produit en 2010 l’État n’a pas eu recours au financement monétaire de son
déficit. Mieux : il ne s’est pas endetté auprès du système bancaire dans son ensemble. La dette nette de l’État
s'est contractée de 5.1 % en 2011 contre une expansion de 62.4 % en 2010. La non monétisation du déficit
budgétaire, l’exonération des taxes sur les produits de consommation courante ainsi que la réduction du prix
des produits pétroliers à la pompe à la suite du démarrage des activités de la SRN au cours du deuxième
semestre ont permis une baisse du niveau général des prix en 2011. Ainsi, sur deux années consécutives, le
Tchad a connu des taux d’inflation négatifs : ‑2.1 % en 2010, ‑0.6 % en 2011. Cette performance le situe
largement en deçà du taux d’inflation de 3.0% figurant parmi les critères de convergence de la CEMAC.
En dépit de l’évolution favorable de la politique monétaire, l’arrimage à l’euro ne permet pas à l’économie
tchadienne d’adopter des mesures rapides et souples pour pleinement profiter de l’évolution favorable des
cours mondiaux de ses matières premières, principalement le coton et la gomme arabique. L’augmentation de
35.7 % des avoirs extérieurs nets du fait du cours soutenu du pétrole aurait pu être encore supérieure avec une
politique monétaire moins rigide. Sur le plan interne, malgré une déflation sur deux années consécutives, la
banque centrale a maintenu son taux d'intérêt d'appels d'offres (TIAO) à 4 %, enlevant ainsi toute flexibilité au
financement interne de l’économie par le système bancaire. Dans ce contexte, les crédits à l’économie n’ont
progressé que de 6.7 %. Les taux d’emprunt des entreprises sur un à trois ans varient de 6.5 % à 14 % et
demeurent élevés.
Coopération économique, intégration régionale et commerce
À la suite du raffermissement des cours du pétrole, le Tchad a poursuivi la consolidation de sa position
extérieure entamée en 2010. La forte croissance des exportations de biens (21.6 %) combinée à la stabilisation
des importations à leur niveau de 2010 a abouti à une amélioration significative du solde global de la balance
des paiements: 2.3 % du PIB en 2011 contre ‑0.5 % en 2010.
Les exportations de biens ont représenté 36.4 % du PIB en 2011 et, pour 91.2 %, sont des exportations de
pétrole. La croissance de 21.3 % enregistrée sur ces dernières résulte essentiellement de la hausse des cours du
brut. Tous les postes d’exportation ont enregistré des taux de croissance significatifs. Il en est ainsi des
exportations de fibres de coton qui ont plus que doublé en un an, résultat de la reprise de la filière cotonnière
par Coton-Tchad, la société étatique tchadienne qui détient le monopole de la commercialisation.
Perspectives économiques en Afrique 2012
7 | © BAfD, OCDE, PNUD, CEA
Quant aux importations de biens, elles ont été stabilisées à un niveau proche de celui de 2010, soit 21.3 % du
PIB en 2011. De même, les importations de services ont modérément augmenté avec un taux de croissance de
2.6 % en 2011 (28.7 % en 2010). Ces évolutions traduisent le maintien de la demande publique pour le
bâtiment et les travaux publics (BTP) à son niveau de 2010 mais également la réduction des importations du
secteur pétrolier. L’entrée en service de la SRN a aussi contribué à cette stabilisation.
Ainsi, en 2011, le compte courant affiche un solde positif de 2.3 % du PIB, en nette amélioration par rapport au
déficit de 0.5 % de l’exercice 2010. Le surplus de la balance globale de 126 milliards XAF a consolidé les
réserves extérieures du Tchad pour les situer à 2.4 mois d'importations de biens et services contre 1.8 mois en
2010. Sur la période 2012/13, le processus de consolidation de la position extérieure sera poursuivi. Le solde de
la balance globale se maintiendrait aux environs de 3.0 % du PIB en 2012 pour fléchir à 0.6 % du PIB en 2013.
La diminution progressive de la production de pétrole serait compensée par le raffermissement des cours ainsi
que par la montée en puissance de la filière coton et du commerce transfrontalier de bétail. Du côté de la
demande, la pleine exploitation de la raffinerie et d’une cimenterie pourrait conduire à une diminution notable
des importations de produits intermédiaires, avec un effet favorable sur la position extérieure du pays.
Tableau 4 : Comptes courants (en pourcentage du PIB)
2003
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
Balance commerciale
-8.6
32.4
26.2
28.8
5.1
13.5
15.1
15.9
13.9
Exportations de biens (f.o.b.)
21.8
53.6
51.5
51.5
36.9
33.3
36.4
37.2
35.7
Importations de biens (f.o.b.)
30.4
21.2
25.2
22.7
31.7
19.8
21.3
21.2
21.8
Services
-28.2
-27.6
-26.3
-22.9
-26.7
-16.7
-15.6
-15.8
-15.9
Revenu des facteurs
-16.4
-18.2
-11.1
-8.7
-2.8
-3.3
-3.1
-3
-2.9
Transferts courants
3.6
4.4
7.6
6
7.5
6
5.9
5.9
5.6
Solde des comptes courants
-49.6
-8.9
-3.6
3.2
-16.9
-0.5
2.3
3
0.6
2010 : estimations ; 2011 et années suivantes : prévisions.
http://dx.doi.org/10.1787/888932627563
Politique de la dette
L’encours de la dette extérieure du Tchad à la fin 2011 s’élève à 2.3 milliards de dollars (USD) contre
2.1 milliards USD en 2010. Face aux incertitudes pesant sur l’évolution de ses recettes externes en début
d’année 2011 le pays a émis un emprunt obligataire sur le marché sous-régional de la CEMAC qui a été
entièrement souscrit. D’où l’accroissement de 9.7 % de l’encours de la dette par rapport à son niveau de 2010.
Avec un taux de 18.6 % du PIB en 2011, la l’endettement extérieur du Tchad demeure relativement faible. La
capacité d’assurer le service de la dette reste aussi très importante car le ratio service de la dette/ exportations
est de 1.9 % en 2011 contre 2.2 % en 2010. De même, le niveau d’endettement du Tchad reste soutenable, le
service de la dette ne représentant que 4 % des recettes budgétaires. L’endettement extérieur multilatéral
constitue la quasi-totalité de cette dette.
Cependant, l’exposition du pays à la volatilité des cours du pétrole ainsi que le rythme des dépenses risquent de
rendre cette situation d’endettement proche du seuil de vulnérabilité de la gestion de la dette. Hormis ce
risque, les échéances du service de la dette sont respectées. En outre, la gestion de la dette est assurée par une
structure spécifique qui suit et actualise les informations sur la dette du pays.
Perspectives économiques en Afrique 2012
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Figure 2 : Part de l’encours de la dette extérieure dans le PIB et ratio du service de la dette sur les
exportations (en pourcentage)
50%
Pourcentage
40%
30%
20%
10%
0%
2003
2004
2005
2006
Dette/PIB
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
Service de la dette/Exportations
2010 : estimations ; 2011 et années suivantes : prévisions.
http://dx.doi.org/10.1787/888932623611
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Gouvernance économique et politique
Secteur privé
L’évaluation du climat des affaires au Tchad fait apparaître un recul du pays sur l’ensemble des indicateurs. Il
occupe le dernier rang (183 sur 183) des économies dans le classement général de "Doing Business" (Banque
Mondiale) de 2012 contre 182 sur 183 en 2011. Par exemple, les délais pour la création d’une entreprise
atteignent 66 jours contre une moyenne de 37 jours pour l’Afrique subsaharienne. Pour remédier à cette
situation le gouvernement a adopté en 2010 une charte pour ameliorer l’environnement des affaires qui tarde à
être mise en pratique. Par ailleurs, un guichet unique pour faciliter l’agrément d’entreprendre a été mis en
place en novembre 2011. Le pays a fait des progrès sur le critère de création de conditions propices à
l’obtention du crédit en passant de la 152e à la 98e place d’une année à l’autre.
En matière d’emploi, le Tchad dispose d’un code du travail novateur sur certains aspects mais rigide sur
d’autres. Sa mise en œuvre souffre des dysfonctionnements administratifs et judiciaires du pays. Le rapport
2011-2012 de "Global Competitiveness" (World Economic Forum)’, place le Tchad au 86e rang sur 142
économies en matière de flexibilité de l’emploi. Quant au droit de la propriété privée et au droit des affaires, ils
répondent aux règles édictées par l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA)
que le Tchad a ratifiées en 1996. Néanmoins, la facilité qu’ont les entreprises à enregistrer leurs titres de
propriété, le nombre d’étapes, la durée et les coûts d’accès à la propriété classent le Tchad au 143e rang
mondial de "Doing Business" en 2012 contre le 139e en 2011.
Secteur financier
Le système bancaire du Tchad est constitué de neuf banques. Il est vulnérable en raison de sa faible extension,
de la forte concentration du risque, de la sous-capitalisation des établissements bancaires propriétés de l’Etat, de
l'insuffisance du contrôle sur place et, de manière générale, du sous-développement des marchés et services
financiers dans l'ensemble de la CEMAC. En matière de régulation, la Commission bancaire de l’Afrique centrale
(COBAC) tarde à mettre en œuvre son plan d’action pour intensifier ses opérations de contrôle sur pièces et sur
place afin de minimiser les risques ci-dessus évoqués.
En 2011, les crédits à l’économie se sont inscrits en légère hausse : 6.7 %. Cette progression modeste dans un
environnement où tout est à faire s’explique par la détérioration de la qualité du portefeuille de crédits avec
une forte augmentation des créances douteuses. Le système bancaire est confronté à un problème de réemploi
de ses ressources en raison, d’une part, de la faiblesse du crédit au secteur privé et, d’autre part, de la politique
de désendettement de l’Etat. Il propose 27 guichets avec un bilan total de 1 milliard USD, soit 6.6 % seulement
du total bilanciel de la CEMAC.
La micro finance représente l’un des instruments de mise en œuvre de la SNRP‑II. En concertation avec les
principaux acteurs du secteur, le gouvernement a défini une stratégie nationale de la micro finance (SNMF)
visant à favoriser son développement. Animé par plus de 200 structures, il connait un fort dynamisme, surtout
dans le sud du pays.
Le ratio crédit à l’économie/PIB se situe à 4.5 % en 2011 contre 4.2 % en 2010. Cet indicateur ainsi que son
évolution reflètent les difficultés d’accès au crédit, notamment aux crédits d’investissement. La nature des
dépôts (qui sont souvent à court terme) et le dysfonctionnement du système judiciaire sont les principales
causes de cette situation. À l’instar de ce qui se passe dans les autres pays de la CEMAC les systèmes de
paiement et de compensation restent faiblement développés au Tchad. En 2011, les textes permettant l'accès
au crédit ont été améliorés par des amendements à la loi uniforme de l'OHADA qui élargit la gamme des actifs
pouvant être utilisés comme garantie.
Gestion du secteur public, institutions et réformes
La loi protège les droits en matière de propriété et de contrat ; cependant la mise en pratique demeure
relativement faible. L’on note cependant une amélioration dans l’exercice du droit de la propriété suite au
déploiement progressif de l’administration et à l’amélioration de la sécurité. En général, les différends sont
réglées à l’amiable en raison du manque de confiance dans le système judiciaire.
L’amélioration de la sécurité observée depuis 2010 a contribué à renforcer les capacités de l’administration
centrale à faire face à ses obligations. Ces progrès ont notamment été remarqués dans la gestion du flux de
refugiés provoqué par le conflit libyen et de l’épidémie de choléra. Néanmoins, l’utilisation efficace des
ressources et l’insuffisance de crédits budgétaires pour les dépenses prioritaires sont toujours des défis à
relever.
En 2011, la corruption dans l’administration est considérée comme le deuxième facteur de blocage dans la
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conduite des affaires au Tchad. D’après le rapport 2011-2012 de Global Competitiveness le Tchad occupe le
dernier rang mondial (142e) pour les paiements illégaux et les pots-de-vin. Dans la foulée de la campagne anticorruption de 2011 au cours de laquelle trois ministres ont été arrêtés pour détournement de fonds et un autre
limogé pour gestion fautive, le gouvernement continue de donner des signaux forts dans l’obligation pour
l’exécutif de rendre des comptes.
La société civile tchadienne demeure fragilisée par les conséquences des années de conflits armés. Néanmoins,
des progrès sont enregistrés dans l’accès à l’information sur les affaires publiques. Le mécanisme en place du
collège de gestion des revenus pétroliers, dans lequel est représentée la société civile, permet une participation
effective des parties prenantes à la gestion de la rente pétrolière et donc, une diffusion de l’information. Le
Tchad a obtenu le statut de pays candidat à la validation pour l’Initiative de transparence dans les industries
extractives (ITIE).
Gestion des ressources naturelles et environnement
Avec l’organisation du sommet sur le lac Tchad, qui suit l’initiative de la « Grande Muraille verte » lancée par
l'Union Africaine pour venir en aide aux pays subsahariens, le gouvernement se montre très actif sur le front de
la lutte contre l’avancée du désert. Ceci dénote une véritable prise de conscience des autorités pour les
problèmes de l’environnement.
Face aux conséquences de la réduction de la superficie du lac Tchad (d’après les experts, entre 1910 et 2010, le
lac aurait perdu plus de 80 % de sa superficie) le gouvernement a promu plusieurs politiques et programmes.
Mais les moyens nécessaires à leur mise en œuvre demeurent encore limités. Au niveau institutionnel a été créé
le Haut comité national pour l’environnement (HCNE). Dans les zones de production pétrolière, tous les
aménagements ont été assujettis à des études d’impact environnemental. Sur le plan législatif, plusieurs textes
ont été adoptés, telle une loi définissant les principes généraux de la protection de l’environnement. Au plan
politique, a été adopté un Plan national d’action sur l’environnement (PNAE). Le Tchad a par ailleurs ratifié la
convention sur les changements climatiques, la convention sur la protection de la couche d’ozone et son
protocole ainsi que les conventions sur les déchets dangereux.
Contexte politique
Le contexte politique tchadien en 2011 a été marqué par:
1. la réélection du président Idriss Deby Itno avec 83.59 % des voix dès le premier tour ;
2. la formation d’un nouveau gouvernement en août à la suite des élections législatives et présidentielle. Le
Premier ministre Emmanuel Nadingar a été reconduit et a formé une équipe de 40 membres dont 5
femmes, tous issus de la majorité présidentielle, des partis alliés et de la société civile. L’opposition a décidé
de rester en dehors du gouvernement ;
3. une série de conflits sociaux, caractérisés par des revendications salariales et catégorielles notamment : la
grève des étudiants qui revendiquent des arriérés de bourses ; les revendications des ex-travailleurs de
l’entreprise TCC (Tchad Cameroun Contractors), sous-traitante d’Esso ; la grève des travailleurs du secteur
public à l’issue de laquelle un accord a été trouvé avec le gouvernement : les salaires devraient augmenter
progressivement de 20 % à 40 % jusqu’en 2014;
4. la gestion du flux de déplacés provoqué par le conflit libyen. Ce dernier fait peser d’importants risques
d’instabilité sur le climat de paix prévalant désormais au Tchad. Le gouvernement a procédé au
rapatriement de près de 100 000 ressortissants tchadiens. Les conséquences de cette crise sur les échanges
commerciaux et les transferts courants entre le Tchad et la Libye apparaissent très importantes, surtout
pour les investissements directs de la Libye et les recettes douanières.
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Contexte social et développement humain
Développement des ressources humaines
Le taux de pauvreté est estimé à 55% sur une population estimée à 11.2 millions. Ce taux s’éleve à 87 % en
milieu rural. Au regard de ces données, la réduction de la pauvreté passe par les transformations dans le monde
rural.
La politique de santé et de nutrition du Tchad repose sur le programme national de santé (PNS) ayant pour
objectifs l’amélioration de l'efficacité du système de santé, le renforcement des mesures de prévention et une
meilleure réponse aux besoins des plus vulnérables. Outre le PNS, le ministère de la Santé a adopté une feuille
de route en vue de réduire la mortalité maternelle et infantile d'ici 2015. La gestion de ces deux programmes
continue de souffrir de certaines lacunes : (i) le déficit en personnel, avec un médecin pour 29 420 habitants,
bien en deçà des normes de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et la concentration du personnel médical
dans la capitale où ne vit que 9.0 % de la population; (ii) le manque de matériel, alors que de nouveaux
hôpitaux sont en construction ; (iii) l’insuffisance de financement pour les dépenses courantes et (iv) la pénurie
de médicaments. Au plan alimentaire, les derniers chiffres de l’Unicef révèlent un taux global de malnutrition
aiguë allant de 15.2 à 24.9 % (seuil d'urgence de l'OMS : 15 %).
La politique d'éducation figurant dans la SNRP‑II est axée sur un relèvement du niveau d'éducation de
l'ensemble de la population. À ce jour, les objectifs de cette stratégie pour le taux d’inscription dans le primaire
ont été nettement dépassés (121 %). L’augmentation des effectifs du secondaire a été encore plus rapide
(environ 13 % par an). Dans l’enseignement supérieur, le nombre d’étudiants est estimé à plus de 20 000. Les
taux nets de scolarisation au primaire sont de 67 % pour les filles et de 77 % pour les garçons. Le taux
d’achèvement au primaire est de 64 %. En dépit de ces progrès, des contraintes diverses empêchent que les
objectifs de la SNRP‑II en matière d’éducation soient atteints
La prévalence nationale du VIH/Sida est de 3.5 % contre 4.9 % pour l’Afrique sub-saharienne. Le gouvernement
poursuit des campagnes de communication pour informer les populations sur le VIH et le paludisme et les
éduquer sur les méthodes de prévention. S’agissant de la lutte contre le VIH, le Trésor public a débloqué en
2011 plus de 1.5 milliard XAF pour l’achat des antirétroviraux et des réactifs et la gratuité de la prise en charge
des personnes atteintes du VIH. Quant au nombre de cas de tuberculose, le pays affiche un taux de détection de
48 %.
Réduction de la pauvreté, protection sociale et travail
Les objectifs de réduction de la pauvreté tels qu’ils sont inscrits dans le SNRP‑II se sont traduits dans la loi de
finances pour 2012. L’accroissement des recettes a permis d’améliorer le niveau des dépenses sociales et
d’investissement.
Mesurant l’importance de la participation de la population au niveau local le gouvernement a organisé en 2012,
et pour la première fois au Tchad, les élections communales.
Les régimes de pension et les plans d’épargne pour les personnes âgées existent mais seulement pour la frange
de la population active travaillant dans le secteur formel.
Égalité hommes-femmes
En matière de promotion féminine, le Tchad réalise de modestes progrès. Le Parlement, compte 28 femmes sur
188 députés soit environ 15 %. Les femmes-ministres représentaient seulement un peu plus de 10 % en 2006 ;
dans le gouvernement désigné en août 2011 leur proportion est passée à 12.5 %. Cependant, le taux
d’analphabétisme reste plus élevé chez les femmes (73 %) que chez les hommes (54 %). Outre la
constitution du pays, qui consacre l’égalité entre la femme et l’homme dans l’accès aux services sociaux
d’éducation et de santé, une politique nationale du genre est en cours d’élaboration avec pour objectifs de
définir les orientations du pays en matière d’intégration du genre dans les politiques et stratégies sectorielles de
développement. Le Tchad a ratifié la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discriminations à
l’égard des femmes (CEDAW) en 1995 et est signataire des principaux traités et conventions internationaux sur
les droits des femmes et des enfants.
Cependant, la violence domestique appuyée sur les coutumes traditionnelles est toujours courante dans le pays.
La mutilation génitale est pratiquée sur 45 % des femmes avant l’âge de la puberté. L’agriculture, l’élevage et
la pêche sont de loin l’activité économique principale, assurant 82 % des emplois dont près de la moitié sont
occupés par des femmes. Enfin, la mise en œuvre des volets de la SNRP‑II relatifs à la promotion de l’égalité
des sexes se heurte à l’action de groupes de pressions religieux.
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Analyse thématique : Promouvoir l’emploi des jeunes
La population tchadienne, à l’instar de celle du continent, est jeune. Sur 11.2 millions d’habitants, 50.3 % ont
moins de 15 ans et la population âgée de 60 ans et plus ne représente que 4 %. La population active est estimée
à 5 millions de personnes soit 45.5 % de la population totale. Le secteur formel n’absorbe que 5 % de la
population active. Près de la moitié des salariés du système formel (123 000 personnes en juin 2010) relèvent
de la fonction publique. Le reste est employé dans les activités de services de l’industrie pétrolière, les sociétés
de sécurité et de gardiennage, l’industrie cotonnière et sucrière, le BTP, etc... Les trois quarts environ de la
population active non agricole sont employés dans le secteur informel. Selon les estimations basées sur les
données de ECOSIT2[i][ii], le taux de chômage se situerait à 34 % en milieu urbain et serait de l’ordre de 1.3 %
en milieu rural. Compte tenu de la jeunesse de la population, le sous-emploi et le chômage touchent en premier
lieu les jeunes et plus particulièrement les primo-demandeurs d’emploi.
Le changement structurel de l’économie tchadienne intervenu en 2003 avec l’avènement du pétrole a
grandement contribué au sous-emploi et au chômage des jeunes. Il s’est opéré sans que soit définie une
politique à même de faire coïncider les besoins de la nouvelle économie avec l’offre d’emplois.
À titre d’exemple de ce changement structurel, la part de la production pétrolière dans le PIB, nulle en 2002,
s’est élevée à plus de 40 % du PIB, en moyenne, sur la période 2003-10. De même, la part du pétrole dans les
exportations est passée de zéro, en 2002, à plus de 90 % en moyenne sur la même période 2003-10. Une
proportion importante de cette rente pétrolière a servi au financement des importations qui représentent en
moyenne plus de 28 % du PIB hors pétrole. Quant à l’État, l’essentiel de ses revenus est tiré de la rente
pétrolière dont les recettes, de 10.6 milliards XAF en 2003 sont passées à 615.1 milliards XAF en 2010. Soit
4.1 % des revenus de l’État en 2003 et 64 % en 2010.
Avec cette évolution de la rente pétrolière, les autres secteurs d’activités, et la mise en œuvre d’une politique
d’emploi à leur profit, n’ont pas figuré parmi les priorités économiques et se sont trouvés marginalisés. En
outre, tout en modifiant les structures de l’économie tchadienne, le pétrole a eu un impact limité sur les autres
secteurs en raison de ses spécificités d’exploitation. Celle-ci repose entièrement sur une main-d’œuvre
étrangère, hautement qualifiée. Même ses activités de sous-traitance sont assurées, pour la plupart, par des
firmes étrangères qui emploient, elles aussi, une main d’œuvre étrangère. C’est pourquoi, les emplois directs
créés pour les jeunes tchadiens à l’avènement du pétrole ont été limités à quelques activités de sécurité et
gardiennage des sites d’exploitation, à la restauration et, dans une faible proportion, au BTP.
L’économie de rente pétrolière n’a pas permis le financement d’autres secteurs d’activités à même de créer
suffisamment d’emplois pour résorber la demande. D’autre part, l’Etat n’a pas utilisé la rente pétrolière pour
créer les structures de formation susceptibles de satisfaire les besoins en emplois de l’industrie extractive
pétrolière.
Du côté de l’offre, l’analyse du problème de l’emploi des jeunes au Tchad révèle :
L’inadéquation de la formation : elle se caractérise par l’existence d’un nombre important de jeunes
diplômés du cycle universitaire (surtout dans les domaines administratifs et des sciences sociales) et la
quasi-absence de dispositifs d’enseignement technique et de formation professionnelle. L’offre de formation
à même de satisfaire la demande de l’industrie pétrolière et ses activités de sous-traitance est inexistante.
Les structures d’enseignement technique telles que l’Institut universitaire du pétrole de Mao et l’École
nationale des travaux publics sont peu outillées en ressources humaines et financières pour faire face à la
demande. Ce déficit de qualification conduit à recourir à la main-d’œuvre étrangère même pour certains
métiers de base.
La faiblesse des structures en charge de l’emploi : évoluant dans le contexte d’un État fragile, le
ministère de la Fonction publique et du Travail fait face à d’importants défis en termes de ressources
humaines. Quant à l’Agence nationale de la promotion de l’emploi, confrontée au problème de son
autonomie financière, elle concentre son attention sur la collecte et l’administration de la taxe sur les
autorisations d’emploi de la main-d’œuvre étrangère[i]. La promotion de l’emploi et la surveillance de
l’application des textes en la matière sont ainsi peu suivies par ces organismes.
L’absence d’une politique de l’emploi : le pays ne dispose pas d’une politique de l’emploi ni a fortiori
d’une politique spécifique pour l’emploi des jeunes. Le gouvernement a adopté en 2000 une Déclaration de
la politique nationale de l’emploi. Il a ensuite adopté en 2008 la SNRP‑II comme cadre de référence de la
politique gouvernementale, et elle intègre l’emploi comme un de ses domaines prioritaires. Les conflits
armés récurrents et l’instabilité politique n’ont pas permis une mise en œuvre adéquate des mesures
préconisées dans ces documents de stratégie. Afin de jeter les bases de la définition d’une nouvelle
politique nationale de l’emploi le gouvernement a organisé en novembre 2010 un Forum national de
l’emploi qui a regroupé toutes les parties prenantes. Ce forum a formulé d’importantes recommandations
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sur l’ensemble du problème de l’emploi, notamment sur les structures de promotion et d’encadrement, sur
la place des jeunes et la question du genre ainsi que sur la promotion de l’emploi en milieu rural. En dépit
de la pertinence des recommandations et de l’acuité du problème de l’emploi, à ce jour aucune action n’a
été entreprise pour l’élaboration et la mise en œuvre d’une politique nationale de l’emploi.
Du côté de la demande, l’emploi des jeunes souffre de:
L’impact de l’avènement du pétrole sur les autres secteurs : l’avènement du pétrole en 2003 a
créé une économie de rente qui n’a pas favorisé le développement des secteurs qui, jusque-là, constituaient
les bases de l’économie tchadienne, à savoir la filière coton, l’agriculture et l’élevage. Importants
pourvoyeurs d’emplois tant en milieu urbain que rural, leur marginalisation a eu un effet négatif sur la
création d’emplois pour les jeunes.
Un environnement des affaires peu attrayant : l’évaluation du climat des affaires place le Tchad au
dernier rang des économies dans le classement général de ‘’Doing Business’’. Les taxes et impôts qu’une
entreprise de taille moyenne doit régler chaque année relèguent le pays au 180e rang mondial en 2012. En
matière d’emploi, le Tchad dispose d’un code du travail rigide à certains égards. Sa mise en œuvre souffre
de dysfonctionnements administratifs et judiciaires importants. Enfin, le rapport 2011-2012 de ‘’Global
competitiveness’’ place le Tchad au 86 e rang sur 142 économies en matière de flexibilité de l’emploi.
L’environnement des affaires est, par conséquent, peu favorable à la création d’emplois.
Notes
[1]
[1] ECOSIT 2 : La Deuxième Enquête sur la Consommation du Secteur Informel au Tchad
[1] L’utilisation de la main-d’œuvre étrangère au Tchad, quelle que soit la banche d’activité, est soumise à une
taxe de 500 000 CFA par employé.
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