I4. ROIS DU NORD ET DU SUD ET LE PRINCE DE L`ALLIANCE

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I4. ROIS DU NORD ET DU SUD
ET LE PRINCE DE L’ALLIANCE
Nous avons quitté Daniel au chapitre 11 et au
verset 11, alors que le roi du sud, Ptolémée IV,
triomphe du roi du nord, Antiochus III, en 217 av
JC, à Raphia. Antioches perd plus de 10 000 hommes
et 4 000 sont faits prisonniers. Mais Ptolémée ne
profite pas de son avantage, comme l’annonçait le
verset 12. Il fera tomber des milliers, mais il ne
triomphera pas. Paresseux, débauché, il meurt seize
ans plus tard, mystérieusement, avec sa sœur-épouse
Arsinoe. Son fils Ptolémée V, lui succède.
Verset 13 : Le roi du nord reviendra et
rassemblera une multitude plus nombreuse que la
première. Au bout de quelque temps, de quelques
années, il se mettra en marche avec une grande armée
et de grandes richesses.
Verset 14. C’est une parenthèse. Un panorama
historique nous est offert : En ce temps-là, plusieurs
s’élèveront contre le roi du sud, et des hommes violents
parmi ton peuple se révolteront pour accomplir la
vision, et ils succomberont.
En ce temps-là… Un temps où Rome va
commencer à intervenir dans les affaires du MoyenOrient. Un temps où les rois du nord et du sud, les
royaumes séleucides et lagides, issus du
démembrement de l’ancien empire d’Alexandre se
heurtent l’un à l’autre. Un temps où les rois
d’Egypte sont contraints de demander la protection
de Rome. Un temps où la Palestine n’est pas
épargnée, car elle est le lieu de passage des forces du
nord vers le sud. Annexée tour à tour par le nord et
le sud, elle finira par se débattre, mais en vain, sous
la main de fer de Rome. Au verset 14, il est question
d’elle : des hommes violents parmi ton peuple (le
peuple de Daniel), se révolteront pour accomplir la
vision, et ils succomberont. Cette révolte débutera à
l’époque des Séleucides, déjà sous Antiochus III,
mais surtout sous Antiochus IV Epiphane, elle se
poursuivra au temps des Romains, pour aboutir,
après le Christ, à la destruction de Jérusalem et de
sont temple.
Nous avons donc, au verset 14, un raccourci de
l’histoire agitée du peuple juif pendant environ deux
siècles, jusqu’à sa dispersion dans le monde.
Après la parenthèse du verset 14, retour aux
évènements qui débutent au verset 13. Verset 15 : le
roi du nord s’avancera, il élèvera des terrasses et
s’emparera des villes fortes. Les troupes du sud et
l’élite du roi ne résisteront pas, elles manqueront de
force pour résister.
Voilà donc Antiochus III avec une armée de
100 000 fantassins et 20 000 cavaliers. Il s’empare de
villes fortifiées, Gaza, Sidon, et reconquiert la
Palestine. Les Egyptiens se retirent.
Mais Antiochus commet l’imprudence de se
heurter aux Romains qui viennent de battre son allié
Philippe V de Macédoine. Il débarque lui-même en
Grèce et il est battu aux Thermopyles et à Magnésie,
en -191. Contraint de signer la paix d’Apamée très
avantageuse pour Rome, en -188, il perd une partie
de ses territoires, livre ses éléphants et sa flotte, doit
payer une énorme indemnité de guerre de 12 000
talents, à verser en douze annuités, son fils
Antiochus, le futur Antiochus IV Epiphane, est
envoyé comme otage à Rome. Antiochus III est tué
en -187, et son autre fils Séleucus IV lui succède.
Celui-ci n’arrive pas à payer l’indemnité exigée
par les Romains, il est contraint, lui aussi, d’envoyer
son fils Démétrius en otage à Rome. Son ministre
Héliodore va à Jérusalem pour s’emparer du trésor
du temple. Ce tableau peint en 1674, représente
Héliodore qui aurait été chassé du temple par des
anges. A son retour, Héliodore assassine Séleucus IV.
Mais Antiochus, frère de Séleucus IV, libéré par
Rome où il avait été otage pendant douze ans, tue
Héliodore. Il devient roi sous le nom d’Antiochus IV
Epiphane. Il se proclame divin et exige qu’on lui
rende un culte.
Il envahit l’Egypte et Chypre. Mais les Romains
lui ordonnent d’évacuer ces deux pays. Il se retourne
alors contre les Juifs avec une extrême brutalité.
Convaincu que leur religion est le ferment de leurs
révoltes, il décide de l’anéantir. Des massacres sont
organisés. Antiochus Epiphane interdit sous peine de
mort, la circoncision, la possession des Ecritures, il
sacrifie des porcs dans le temple de Jérusalem et y
place un autel consacré à Zeus. Les Macchabées se
soulèvent. Antiochus décide alors l’extermination du
peuple juif. Mais sa mort soudaine, en 164, sauve les
Juifs.
Il est remplacé par son fils Antiochus V. Des
troubles se multiplient. Démétrius, fils de Séleucus
IV, revient de Rome où il avait été lui aussi envoyé
en otage. Il tue son cousin Antiochus V et prend sa
place avec l’accord du sénat romain.
Tout ceci montre que l’influence de Rome
augmente sur le territoire agité des Séleucides et des
Lagides. Ce qui nous amène à penser que le verset 16
concerne l’arrivée du pouvoir romain au MoyenOrient, et plus précisément à la frontière du nord et
du sud.
Ainsi, au verset 15, le roi du nord qui entre en
Palestine et s’empare des villes fortifiées, c’est
l’annonce de ce que feront les Romains au verset 16 :
Celui (le représentant de Rome) qui marchera contre
lui (le roi du nord) fera ce qu’il voudra, et personne
ne lui résistera. Il s’arrêtera dans le plus beau des
pays, exterminant ce qui tombera sous sa main.
Avec Pompée, en 64 av JC, Rome met fin au
royaume séleucide, le réduisant à n’être qu’une
province romaine. Un an plus tard, Pompée prend
Jérusalem après un siège de trois mois.
Verset 17 : Il se proposera d’arriver avec toutes
les forces de son royaume, et de conclure la paix avec
le roi du sud. Il lui donnera sa fille pour femme, pour
amener sa ruine, mais cela n’aura pas lieu et ne lui
réussira pas.
Le texte hébreu dit que le roi du sud donne à
l’envahisseur non pas sa fille pour femme, mais la
fille des femmes, une expression qui semble mettre
l’accent sur la féminité de cette femme. Sans doute
s’agit-il de Cléopâtre, la fille de Ptolémée XII. En 51
av JC, son père la place sous la protection de Rome.
Trois ans plus tard, elle devient la maîtresse de Jules
César qui a envahi l’Egypte. Après l’assassinat de
Jules César, elle séduit Marc Antoine, le rival
d’Octave pour le remplacement de Jules César,
Octave qui s’appellera plus tard Auguste. Octave bat
Marc Antoine à Actium, en 31 av JC. Il prend alors
un pouvoir sans partage, et il deviendra le premier
empereur romain. Marc Antoine se suicide.
Cléopâtre essaie en vain de conquérir Octave, et elle
se suicide à son tour en – 30. Avec elle disparaît le
royaume des Lagides. L’Egypte devient une province
romaine.
Versets 18 et 19 : Il tournera ses vues du côté des
îles et il en prendra plusieurs. Mais un chef,
(traduction littérale de l’hébreu) fera cesser son
déshonneur sans faire revenir sur lui son déshonneur.
Il se dirigera ensuite vers les forteresses de son pays, et
il chancellera, il tombera, et on ne le trouvera plus.
Le mot hébreu qu’on a traduit par îles est mieux
rendu par terres maritimes ou terres côtières. La
guerre, qui menace ailleurs, fait sortir Jules César de
l’Egypte. Sur le Bosphore, Pharnace est vaincu.
César écrit alors au sénat romain : Veni vidi vici, Je
suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu. Après sa victoire, Jules
César va sur les rivages de l’Afrique du Nord, et il
bat ceux qui ont soutenu Pompée contre lui. Puis il
revient en Italie, vers les forteresses de son pays.
Des rumeurs courent sur ses ambitions. On dit
qu’il cherche sa gloire personnelle, qu’il veut mettre
fin à la République, prendre tout le pouvoir pour lui
et devenir empereur. Et on l’assassine en -44. Il
tombe ici, percé par vingt-trois poignards.
C’est alors que prennent un sens les mots : Mais
un chef, fera cesser son déshonneur sans faire revenir
sur lui son déshonneur. Ce chef est Octave. Il met à
mort les assassins de Jules César, tous ceux qui ont
eu part au complot. Il lave ainsi l’honneur de César.
Le Sénat lui décerne le titre d’Auguste, qui signifie
« sacré ». En -13, il est élu « Souverain Pontife »,
titre que porteront plus tard les papes, et on l’honore
comme un dieu. Avec lui la République prend fin. Il
devient le premier empereur romain, sans qu’on
l’accuse, comme on l’avait fait avec Jules César, de
chercher sa propre gloire. Sous son règne, l’empire
connaît la paix et la prospérité.
Verset 20 : Celui qui le remplacera (qui
remplacera Jules César) fera venir un exacteur dans
la plus belle partie du royaume. Mais en quelques
jours il sera brisé, et ce ne sera ni par la colère ni par
la guerre.
Un exacteur. Plus précisément, un leveur de
taxes. Dans la plus belle partie du royaume, ce qui
correspond au plus beau des pays, la Palestine. Luc
2:1 dit qu’en ce temps-là, parut un édit de César
Auguste, ordonnant un recensement de toute la terre.
Un recensement pour savoir combien rapporteront
les taxes. A cause de recensement, Joseph et Marie
vont à Bethléhem, et Jésus y naît. En l’an 14,
Auguste meurt dans son lit et non poignardé comme
son prédécesseur. Jésus a alors 18 ans.
Verset 21 : Un homme méprisé prendra sa place,
sans être revêtu de la dignité royale. Il paraîtra au
milieu de la paix et s’emparera du royaume par
l’intrigue.
Né d’un premier mariage de Livie, qui épousera
plus tard l’empereur Auguste, Tibère hérite, à 56
ans, de l’œuvre immense de César et d’Auguste. Il
est très méfiant et hypocrite. Nombreux sont ceux
qu’il fait tuer, même parmi ses anciens amis. Il
devient impopulaire après l’assassinat de son neveu
Germanicus. On a dit de lui qu’il était un pervers
sexuel, un tyran sanguinaire. La fin de son règne est
marquée par la terreur. Quand il meurt, les Romains
se réjouissent. On lui a donné plusieurs surnoms. Sa
passion pour le vin le fait par exemple appeler
Biberius (Biberon) au lieu de Tiberius. Il meurt en
l’an 37, étouffé, dit-on, par Caligula, fils de
Germanicus.
Verset 22 : Les troupes qui se répandront comme
un torrent seront submergées devant lui, et anéanties,
de même qu’un prince de l’alliance. Tibère remporta
de grands succès militaires chez les Germains qui
déferlaient du nord, et à l’est, aux frontières de
l’Arménie et de la Parthie. Le prince de l’alliance qui
est anéanti est celui dont il est dit, au chapitre 9:27 :
Il fera une solide alliance avec plusieurs pendant une
semaine, et à la moitié de la semaine, il fera cesser le
sacrifice et l’offrande. Jésus est mort sous le règne de
Tibère, crucifié sur l’ordre de Ponce Pilate.
Verset 23 : Après qu’on se sera joint à lui, il usera
de tromperie. Il se mettra en marche, et il aura le
dessus avec peu de monde.
La tactique de Rome, avec les pays étrangers,
consistait à faire des traités d’assistance mutuelle.
Mais ces traités étaient trompeurs, car Rome ne
cherchait que son propre avantage. Les fardeaux de
la guerre revenaient à ses alliés, et elle se réservait
les avantages de la conquête. Les alliés finissaient
par être absorbés par l’empire romain. Or à la tête
de cet immense empire, il y avait le territoire
minuscule de Rome. Peu à peu, sa petite armée
s’agrandit de tous les mercenaires étrangers.
Verset 24: Il entrera, au sein de la paix, dans les
lieux les plus fertiles de la province. Il fera ce que
n’avaient pas fait ses pères, ni les pères de ses pères. Il
distribuera le butin, les dépouilles et les richesses. Il
formera des projets contre les forteresses, et cela
pendant un temps.
Ce temps-là est le temps de l’empire romain,
jusqu’à ce que Dieu y mette un terme, en 330, au
moment où le siège de l’empire est transféré de
Rome à Constantinople. La distribution du butin au
peuple et à l’armée devient une habitude. Déjà Jules
César revenant de Rome, en 46 av JC, avec un
énorme butin, avait offert à chaque citoyen de Rome
100 deniers, l’équivalent de 100 jours de salaire. Des
banquets publics avaient réuni plus de 200 000
convives. Les légionnaires avaient reçu 25 000
sesterces chacun (environ 5 000 deniers) et des lots
de terre. Ces distributions devinrent une habitude.
Remarquons que le pouvoir de l’empire romain
s’exerce pendant un temps, selon la fin du verset 24.
Un temps, chez Daniel, veut aussi dire un an, on l’a
vu. 360 jours = 360 ans. Or à partir de la victoire
d’Actium, en 31 av JC, jusqu’à la fin de l’empire, à
Rome, et à son transfert à Constantinople en 330 ap
JC, il y a 360 ans.
La victoire d’Actium est importante, parce
qu’elle pose la fondation de l’empire romain, centré
sur Rome, jusqu’à ce que Rome, abandonnée pour
Constantinople, soit au pouvoir de l’Eglise. Cet
événement fondateur mérite donc qu’on y revienne,
ce que fait le verset 25 : A la tête d’une grande armée,
il emploiera sa force et son ardeur contre le roi du sud.
Et le roi du sud s’engagera dans la guerre avec une
armée nombreuse et très puissante, mais il ne résistera
pas, car on méditera contre lui de mauvais desseins.
Le pouvoir romain, qui a déjà mis fin au règne
des Séleucides, est représenté ici par Octave. Octave
combat Marc Antoine, allié de Cléopâtre, la dernière
descendante des Lagides. Marc Antoine, battu à
Actium, se suicide peu après, suivi par Cléopâtre.
C’est la fin du royaume des Lagides. Devenu le
premier empereur de l’histoire de Rome, Octave
reçoit le titre d’Auguste, qui signifie Sacré. Ses
successeurs porteront eux aussi ce titre.
Verset 26 : Ceux qui mangeront à sa table le
détruiront. Ses troupes déborderont, beaucoup
tomberont.
La plupart des nombreux successeurs
d’Auguste, jusqu’à Constantin qui quitte Rome pour
Constantinople, mourront assassinés ou suicidés, à la
suite d’intrigues de palais ou de révoltes des
militaires.
Verset 27 : Les deux rois chercheront dans leur
cœur à faire le mal, et à la même table ils parleront
avec fausseté. Mais cela ne réussira pas, car la fin
n’arrivera qu’au temps marqué.
Les intrigues d’Octave et de Marc Antoine pour
le contrôle du pouvoir universel, même s’il a abouti à
la victoire d’Octave, n’était qu’un pâle reflet de ce
qui se passera à la fin, lorsqu’un autre pouvoir,
d’origine romaine, lui aussi, parviendra à contrôler
le monde. Quand arrivera la fin ? Au temps marqué.
Pas avant ni après. Au temps de la fin, dont il est
question à partir du verset 45.
Octave, que l’on connaît davantage sous le nom
d’Auguste, a laissé à la postérité l’image du
restaurateur de la paix, de la prospérité, des
traditions et des arts. Ce qu’on a appelé « le siècle
d’Auguste » est longtemps resté dans le souvenir.
L’empereur, divinisé, reçoit aussi, rappelons-le, le
titre de Souverain Pontife, chef suprême de la
religion romaine. Ses successeurs, en particulier ceux
qui ont persécuté les chrétiens, recevront eux aussi
ce titre de Souverain Pontife, qui sera par la suite
porté par les papes. Il y a dans tout cela comme
l’annonce de l’Antichrist du temps de la fin.
Verset 28 : Il retournera dans son pays avec de
grandes richesses. Il sera dans son cœur hostile à
l’alliance sainte, il agira contre elle puis retournera
dans son pays.
L’alliance sainte unissait Dieu à son peuple.
Jésus, le chef de l’alliance, du verset 22, vient la
sceller sur la croix. Les empereurs ont été hostiles à
l’alliance sainte. Auguste ordonne un recensement
d’Israël, Marie est forcée d’accoucher à Bethléhem.
Sous Tibère, Jésus est crucifié. Titus détruit
Jérusalem et son temple. De Néron à Dioclétien, les
chrétiens sont martyrisés. Constantin, même s’il met
fin aux persécutions des chrétiens, se sert de la
religion chrétienne plus qu’il ne la sert, pour mieux
établir son pouvoir.
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