
Les erreurs médicales : une réalité inquiétante
Émission du 21 septembre 2006
L’histoire de Johanne Daly
Johanne Daly est mécanicienne de métier. Elle vit aujourd’hui avec une invalidité
permanente à la suite d’un accident de travail. En 2001, son coffre à outils pesant près de
2000 livres lui tombe sur le pied. Son tendon d'Achille est sectionné. À la suite de cet
accident, elle estime avoir été victime d’au moins dix erreurs médicales successives dont
une thrombophlébite non diagnostiquée, un mauvais replacement du pied au cours d’une
opération, trois mauvaises orthèses. Son état a dégénéré à un point tel qu'elle a failli être
amputée.
Aujourd’hui, Johanne Daly poursuit cinq médecins de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont
pour une somme de 672 000 dollars. Selon la poursuite, les cinq médecins (sur huit
qu’elle a consulté) ne lui ont pas apporté les soins et les traitements appropriés et ne l'ont
pas suivie adéquatement.
L’erreur médicale en chiffres :
Chaque année, au Québec, 650 000 personnes sont hospitalisées. De ce nombre, on
estime, en moyenne, que un patient sur cent, serait victime de «préjudices corporels
évitables», terme officiel désignant toute forme d’erreur médicale. Pourtant, 95 % d’entre
elles endurent leur mal, souvent parce qu’elles ignorent carrément ce qui leur est arrivé.
L’an passé, 190 poursuites ont été intentées au Québec contre des médecins.
Les poursuites visent le plus souvent les obstétriciens, les orthopédistes et les
neurochirurgiens, qui comptent à eux trois pour 60 % de toutes les erreurs médicales
commises en milieu hospitalier. Hors du milieu hospitalier, ce sont les plasticiens qui
sont les plus poursuivis : un sur quatre est poursuivi chaque année au Canada.
Mais qu’est-ce qui amène les gens à poursuivre? Selon Me Jean-Pierre Ménard, avocat
de Montréal spécialisé en poursuites à la suite d’erreurs médicales, la majorité des gens
qui se présentent à son bureau lui disent : «…pour que cela se sache. Pour que ça
n’arrive pas à d’autres…». D’après lui, ce que les gens recherchent avant tout, c’est
l’imputabilité du système de santé.
Mais la poursuite, dans un cas d’erreur médicale, n’est pas chose facile pour le patient qui
amorce souvent un processus long, pénible et coûteux.
Les erreurs : comment elles se produisent
Le Dr Alain Vadeboncoeur, urgentologue à l’Institut de cardiologie de Montréal, agit à
titre d’expert dans des dossiers impliquant des erreurs médicales. Oui, les médecins font
aussi des erreurs, dit-il: «… on n’est pas des machines…». Plus souvent qu’autrement,
dit-il, une erreur résulte d’un ensemble de mauvaises décisions, prises par plusieurs,
souvent dans un contexte loin d’être parfait, comme celui de l’urgence.