UE 2.11 THERAPEUTIQUE GENERALITES SUR LES ANTIMITOTIQUES 1) LE CANCER : Le cancer est la prolifération anarchique de cellules dont la transformation en cellules spécifiques ne se fait plus ou pas, créant ainsi une « tumeur cancéreuse ». Une cellule normale se divise pour devenir une cellule spécifique. Une cellule cancéreuse continue à se diviser.il s’agit de cellules à comportement jeune, c'est-àdire « néoplasique » (nouvellement formée) Rien ne différencie une cellule saine à division rapide d’une cellule cancéreuse à division rapide, parc qu’elles sont en division constante dans les 2cas, sans différenciation nette, à l’état de mitose. La mitose est un processus de multiplication qui permet d’obtenir, à partir d’une cellule à 2 chromosomes, 2 nouvelles cellules. 2) DEFINITION : Les antimitotiques s’opposent à la multiplication des cellules cancéreuses par différents mécanismes. En raison de son très grand nombre de multiplication, la cellule cancéreuse finit par apprendre à se protéger contre l’anticancéreux. Il existe donc des anticancéreux à mécanisme d’action très variable, pour tenter de bloquer par divers moyens cette multiplication. 3) STRATEGIE THERAPEUTIQUE Actuellement, le traitement du cancer repose sur la destruction des cellules cancéreuses, le but étant d’éliminer la dernière cellule cancéreuse. Il existe plusieurs moyens de traiter le cancer et de lutter contre la résistance aux traitements anticancéreux. Chirurgie Il s’agit de l’exérèse (ablation) totale ou partielle de la tumeur et d’une quantité variable de tissu sain autour. Radiothérapie Elle consiste à « brûler » la tumeur et le tissu environnant, le but étant de compléter le travail de la chirurgie. Chimiothérapie Elle consiste en l’utilisation de substances capables de stopper la prolifération des cellules cancéreuses et leur dissémination. Il s’agit toujours d’une poly chimiothérapie, pour laquelle on utilise plusieurs anticancéreux à mécanisme d’action différent. Elle est utilisée soit avant soit après l’intervention chirurgicale. Hormonothérapie Certains cancers dépendent de la présence d’hormones pour se développer. L’hormonothérapie va bloquer ces hormones par des antihormonaux ou stopper la production de ces hormones. On parle de castration chimique. Immunothérapie Certains cancers sont des proliférations de cellules du système immunitaire ou du système sanguin. L’immunothérapie permet de diminuer la prolifération de ce type de cellules en créant une dépression immunitaire (corticoïde). Il existe également des modulo-immunitaires tels que L’INTERFERON. 4) CHAMBRE IMPLANTABLE POUR PERFUSION INTRAVEINEUSE Définition La chambre implantable est un petit boitier cylindrique et plat, muni dune membre souple. Elle est implantée chirurgicalement sous la peau dans la région sousclavière gauche ou elle est fixée par des ligatures. Elle est relié à la veine sousclavière par un cathéter. Intérêt La chambre implantable permet de préserver le capital veineux ayant à recevoir les traitements intraveineux de longue durée de chimio. Elle permet un abord veineux profond, sans avoir à utiliser chaque fois une veine superficielle. C’est une voie d’accès permanente pour les injections d’anticancéreux et le branchement d’éventuelles perfusions. Modalités d’emploi Il faut respecter une asepsie rigoureuse grâce à l’utilisation d’un kit pour injection. Celui-ci contient tout le nécessaire pour effectuer une perfusion. Le mode opératoire répond aux exigences suivantes : - Enfiler des gants stériles - Mettre en place un champ percé stérile - Piquer perpendiculairement à la membrane avec une aiguille de Huber - Monter sur une seringue ou un flacon de perfusion à l’aide d’un nécessaire à perfuser Les anticancéreux sont dilués dans du sérum physiologique ou dans du sérum glucosé. Il faut effectuer un rinçage veineux entre chaque produit. Ce rinçage du cathéter peut se faire avec une solution de chlorure de sodium 0,9% contenant une faible quantité d’héparine. L’héparinisation doit se faire au moins tous les 15 jours. Après la séance de chimio, la zone sous-clavière est recouverte d’une compresse. 5) PROTOCOLE DE CHIMIOTHERAPIE La chimio hospitalière est réalisé par succession de cures réparties sur 4 à 6 mois, pour atténuer l’importance des effets secondaires. Une séance de chimio est effectuée généralement tous les 3 à 4 semaines. La guérison est confirmée après 5 ans, depuis la mise en place du premier traitement. Les guérisons constatées avant ce délai sont des rémissions. Les anticancéreux sont utilisés dans le cadre de protocoles, sans cesse modifiés, comparés entre eux, pour tenter d’obtenir le meilleur taux de réussite possible. Un protocole ne doit jamais être modifié sans l’accord du cancérologue. La posologie sur l’ordonnance doit être exprimée en surface corporelle. Des examens bio doivent être effectués avant chaque cure, autorisant la poursuite du traitement. CLASSIFICATION DES ANTICANCEREUX Les anticancéreux agissent à différents niveaux et lieux de la cellule cancéreuse : soit au niveau de l’ADN, soit au niveau des constituants de la mitose. 1) MECANISME D’ACTION Actions sur l’ADN Le chromosome est constitué de 2 brins d’ADN formant une double hélice. Lors de la mitose, le chromosome doit se retrouver en double identique à luimême. Pour cela, l’ADN se duplique, la doble hélice s’ouvre et chaque brin ainsi libéré sera copié pour former 2 nouvelles hélices. Si l’ADN ne peut pas se dupliquer la cellule meurt : - Les alkylants se positionnent entre 2 brins - Les intercalants entre 2 morceaux d’ADN - Les fragmenteurs coupent des morceaux d’ADN Interférence dans la synthèse protéique Une protéine est constituée d’une suite d’acides aminés. L’ordre selon lequel ils sont collés les uns après les autres provient de l’information génétique issue des chromosomes. Cette synthèse a lieu au niveau du ribosome. Si l’information génétique est faussée dès le départ, la réalisation des proteines ne pourra se faire. Les analogues des acides nucléiques vont se substituer aux vrais acides nucléiques, rendant la lecture de l’information génétique impossible et provoquant la mort de la cellule cancéreuse. Les poisons de fuseau Lorsqu’une cellule a doublé sa quantité de chromosomes en vue de réaliser sa multiplication en 2 nouvelles cellules, elle rassemble les chromosomes en son centre. Les chromosomes dédoublés sont rattachés aux 2 pôles de la cellule par un fuseau constitué de micro-tubulines. Lorsque celles-ci se contractent, les chromosomes dédoublés se séparent et regagnent chacun son pôle de la cellule. C’est à ce niveau que se constitueront les 2 nouvelles cellules. Le poison du fuseau bloque la contraction des micro-tubulines et la cellule, ne pouvant plus se diviser meurt. 2) PRINCIPAUX PRODUITS RENCONTRES Ils sont inscrits sur la liste 1. Remarque : il n’y a pas de domaine réservé pour un anticancéreux particulier. L’indication donnée sera fonction des protocoles expérimentés. Moutardes azotées Ce sont des alkylants, dérivés du gaz moutarde, gaz chloré : - ENDOXAN (cyclophosphamide) - ALKERAN (melphalan) - HOLOXAN Dérivés du platine Ce sont des alkylants qui ont une toxicité rénale, hématologique, auditive : CYSPLATYL (cisplastine) Anthracyclines Ce sont des intercalants. Les anthracyclines sont des antibiotiques cancéreux. Ils ont une toxicité cardiaque : - ADRIBLASTINE (adriamycine) A partir de cette substance ont été synthétisés de nombreux dérivés, comme : - FARMORUBICINE (épirubicine) Vinca-alcaloides Ce sont des dérivés de la pervenche de Madagascar. Ce sont des poisons de fuseau. - ONCOVIN (vincristine) - NAVELBINE (vinorelbine) Les antimétabolites Ils vont prendre de la place de ses bases puriques ou pyrimidiques. Ce sont des bases nucléique »s nécessaires à la constitution de l’ADN. Leur présence dans l’ADN va perturber leur structure et rendre leur traduction impossible ; - FLUORO-URACILE - ARACYTINE Inhibiteurs de la topo-isomérase Ils inhibent l’enzyme permettant aux chromosomes de se rassembler au centre de la cellule en voie de division : VEHEM (téniposime) Taxanes Ce sont des poisons de fuseau. C’est actuellement le produit de référence dans le traitement de certains cancers métastasés : - TAXOL (paclitaxel) - TAXOTERE (docétaxel) Ils ont une toxicité cutanée, cardiaque et neurologique. Le méthotrexate Il s’agit d’un analogue de l’acide folique, bloquant la synthèse de l’ADN. Il est utilisé dans le traitement des carcinomes et des localisations méningés. La bléomycine Elle permet le traitement des lymphomes de Hodgkin ou des lymphomes non Hodgkiniens et celui des carcinomes testiculaires. Elle agit en cassant les brins d’ADN. EFFETS SECONDAIRES DES ANTIMITOTIQUES 1) PRINCIPE DES EFFETS SECONDAIRES Les anticancéreux sont des antinéoplasiques. Ils ont une attirance pour les cellules jeunes de certains tissus sains. Il y aura donc des effets secondaires communs à tous les anticancéreux, en raison de l’atteinte de ces tissus. Néanmoins, ils s’expriment de manière différente en fonction des substances utilisées. Les anticancéreux ont une attirance pour des tissus toujours atteints : o Lieu de productivité des éléments figurés de sang : moelle osseuse o Follicule pileux, dû à la croissance continue du poil ou du cheveu o Gonades (testicules ovaires), en raison de la production des glandes sexuelles. Cette atteinte systématique est plus ou moins marquée en fonction des substances. Chaque anticancéreux a de plus une toxicité spécifique en raison de son affinité pour certains organes, sa structure chimique, son comportement chimique et sa faculté à s’accumuler dans les organes. 2) TOXICITE HEMATOLOGIQUE/APLASIE MEDULLAIRE Il existe dans la moelle osseuse 3 types de cellules souches productrices des : GR :réticulocytes (jeune globule rouge) GB granulocytes (cellules souches des globules blancs) Plaquette Atteinte des GR Elle est responsable d’anémie, qui se traduit par de la pâleur, asthénie, des cheveux et ongles cassants. Le dépistage bio détermine le traitement. : - Transfusion - Apport de fer - Apport d’acide folique - Culot globulaire (GR seulement) Atteinte des GB L’atteinte des lymphocytes provoque une baisse de l’immunité, celle des polynucléaires neutrophiles, une neutropénie. Pour combattre les risques infectieux, il faut : Respecter les règles d’asepsie Tenir compte des infections nosocomiales Instituer un traitement antibiotique, préventif ou curatif Les signes se manifestent par : La modification de l’état général Hyperthermie, frisson Sueurs Trouble de la conscience, des hallucinations Des plaies qui s’infectent Une pathologie ORL Atteinte des plaquettes Elle se manifeste par des risques hémorragiques. Les saignements mineurs sont les repères potentiels de saignements graves : hématurie, AVC hémorragique… Le dépistage se fera par la recherche des saignements : Modification de l’état général Polypnée Hypotension Pâleur Anxiété Agitation 3) ALOPECIE Il s’agit de la perte de cheveux et des poils. Elle est réversible à l’arrêt de la chimio. 4) TROUBLES DIGESTIFS Diarrhées Plus ou moins sévères, elles peuvent aller jusqu’à l’hémorragie et la déshydratation. Elles sont dues à l’attaque directe des anticancéreux sur les cellules digestives, intestinales en voie de multiplication et son traitées par des pansements gastriques. Nausées, vomissements Ils sont provoqués par l’atteinte directe sur les cellules de contrôle du plexus digestif, il existe plusieurs types de vomissements. Pendant la cure Ils sont prévenus par l’administration d’antivomitifs spé de la chimio. Ce sont les antagonistes de la sérotonine (setron), administré avant la séance de chimio et renouvelés si nécessaire (perfusion). - KYTRIL : (granisetron) en cp, sol buv, inj : 1 à 2 mg dans l’heure qui précède la chimio, à renouveler dans les 12h. - ZOPHREN : (ondansétron) cp, lyoph, sirop, suppo, et amp inj : adulte 8 mg 2 heures avant la chimio puis en relais 8mg/ 12h pendant 5 jours max. Leur prescription se fait sur ordonnance hospitalière. Lorsque le vomissement a eu lieu, il est traité par des antivomitifs généraux : PRIMPERAN (métoclopramide) cp, sirop, amp inj : 5 à 10 mg 3 fois par jour. Retardés Ils sont dus à l’accumulation des antimitotiques et ils surviennent pendant 24 à 48h après la séance. Ils sont prévenus par des antivomitifs spé ou génééraux par voie orale ou rectale. Un traitement d’appoint par les corticoïdes permet de limiter l’inflammation stomacale ou digestive et les vomissements, ainsi que la douleur. Anticipés Ils sont dus à l’anxiété générée par les mauvaises conditions de la cure précédente. Ils sont prévenus par les anxiolytiques : XANAX (alprazolam) : 0,25 mg 3 fois par jour LEXOMIL (bromazépam) : ¼ cp le matin, ¼ cp le midi et ½ cp le soir 5) EFFETS SECONDAIRES SUR CERTAINS ORGANES Toxicité cardiaque : Elle est fréquente avec les anthracyclines (antibio antimitotiques intercalants : ADRIBLASTINES, FARMORUBICINE, RUBIDAZONE. Elle s’exprime par des troubles du rythme, de la tachycardie. Toxicité rénale : Elle est rencontrée fréquemment avec les dérivés du platine (CYSPLATYL, CISPLATINE, PARAPLATINE). Elle s’exprime par une insuffisance rénale, conséquence d’une vasoconstriction intrarénale et d’une toxicité directe sur les néphrons. Troubles neurologiques : o Atteinte de la vigilance, état de conscience o Atteintes périphériques, fourmillements, troubles de la motricité. o Douleurs, polynévrites Toxicité pulmonaire : Elle est fréquente avec BLEOMYCINE, METHOTREXATE. Elle s’exprime par une insuffisance respiratoire accompagnée de toux sèche, voire de râles crépitant. Toxicité hépatique : Insuffisance hépatique progressive à dose cumulative. Elle s’exprime par des douleurs hépatiques, une élévation des transaminases, un ictère. Troubles dermatologiques : Eruptions cutanées, allergies, desquamation. Atteinte des muqueuses et des veines : Les antimitotiques sont caustiques par atteinte directe des tissus constituant les muqueuses et de la paroi des veines. 6) ATTEINTE DES ORGANES DE LA REPRODUCTION Les antimitotiques perturbent le métabolisme de l’ADN, support de l’information génétique et de l’hérédité. Il peut y avoir altération au niveau des cellules de la reproduction : Chez l’homme, ils induisent une azoospermie possible, avec risque de stérilité. Chez la femme, ils provoquent des complications ovariennes, entrainant la stérilité. Ils perturbent le cycle avec des aménorrhées. La grossesse est une contre indication à la chimio, en raison du risque tératogène. 7) LA CICLOSPORINE CANCEROLOGIE ET LES IMMUNOSUPPRESSEURS EN But du traitement : L’aplasie médullaire acquise lors des traitements anticancéreux peut être traitée par la greffe de moelle. Les immunosuppresseurs assurent la prévention du rejet de greffe. Ils diminuent la réponse immunitaire empêchant ainsi l’organisme de s’attaquer à la greffe. En effet, celle-ci est considérée par les défenses immunitaires de l’hôte comme un corps étranger à rejeter. Produits disponibles : Le tacrolimus (PROGRAF) est un nouvel immunosuppresseur chimique proche de la ciclosporine (SANDIMMUN, NEORAL) indiqué, comme la ciclosporine, dans le traitement du rejet rebelle corticorésistant après transplantation d’organes ou greffe. Les immunosuppresseurs, autres que la ciclosporine, sont les corticoides (CORTANCYL, MEDROL…), les antimétabolites ( IMUREL, CELLCEPT…) et les anticorps anti-lymphocytes (ORTHOCLONE OKT3, LYMPHOGLOBULINE…) Les effets secondaires de la ciclosporines : Néphrotoxicité Il s’agit du principal effet secondaire car la ciclosporine est toxique pour les néphrons. La néphrotoxicité peut être aigue et réversible, mais peut évoluer vers une insuffisance rénale chronique avec diminution du nb de néphrons fonctionnels. Immunodépression Risques d’infections et de tumeurs malignes en cas d’immunodépression accrue. Troubles cardiovasculaires Hypertension artérielle, œdème du visage et signes de rétention hydrosodée. Troubles digestifs Anorexie, nausées, vomissements, diarrhée Troubles neurosensoriels Hypertrophie gingivale et hirsutisme fréquents Troubles neurologiques Paresthésies avec sensation de brûlure des pieds et des mains. Tremblements des extrémités. Troubles métaboliques Crise de goutte et hyperuricémie. Hyperkaliémie. Il faut éviter les apports supplémentaires en potassium et les diurétiques d’épargne potassique. Hyper lipidémie. hépatoxicité hépatite rare et réversible à l’arrêt du traitement. Augmentation de la bilirubinémie, des phosphatases alcalines et des gamma GT. Conseils au patient Les immunosuppresseurs sont des médicaments qui diminuent la réponse immunitaire. Ce qui expose le patient à deux complications : - Augmentation de la fréquence et la gravité des infections - Augmentation du risque de survenue de certaines affections malignes Les surveillances du risque infectieux et du risque tumoral doivent être régulières.