LE RECHAUFFEMENT CLIMATIQUE
ET SES CONSEQUENCES METEORLOGIQUES POUR LA CARAIBE
J.F. Guérémy
Météo-France/CNRM
Cette présentation s’appuie grandement sur le cent rapport du Groupe d’experts
Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC ou IPCC en anglais), ainsi que sur des
résultats un peu plus spécifiques obtenues par Météo-France. Le GIECC a été mis en place en
1988 par l’Organisation Météorologique Mondiale et par le Programme des Nations Unis
pour l’Environnement. Depuis sa création, le GIEC a notamment produit 3 séries de 3
rapports d’évaluation correspondant aux travaux de trois groupes qui se focalisent sur les
bases scientifiques du changement climatique (groupe I), sur les impacts, l’adaptation et la
vulnérabilité (groupe II), et sur l’atténuation (groupe III). L’ensemble du quatrième rapport du
GIEC sera publié courant 2007.
L’observation du changement climatique montre les éléments suivants. Les
reconstitutions de températures et de concentration en CO2 sur 600 mille ans montrent qu’il a
existé dans le passé des alternances de périodes glaciaires et interglaciaires avec de faibles
températures associées à de faibles concentrations en CO2 et vice-versa (la température
précédant la concentration en CO2 ). La concentration en CO2 actuelle (350 ppm) n’a jamais
été atteinte sur cette période. Au 20ème siècle, la température moyenne globale a augmentée de
0.6°C, avec un palier autour des années 1960 et une augmentation plus marquée au cours des
20 dernières années. Régionalement, les températures (aussi bien en surface que dans la
troposphère) ont plus augmenté au dessus des continents qu’au dessus des océans. Le
maximum d’augmentation est constaté sur continents dans les régions sèches des subtropiques
et des moyennes latitudes ainsi que les régions subpolaires de l’hémisphère nord, et sur
océans dans les gions subtropicales (plutôt sur leurs faces polaires). Au 20ème siècle, le
niveau de la mer moyen global s’est élevé de 17 cm. Sur les îles des petites Antilles, les
températures ont augmenté selon un rythme de 3°C par siècle sur la seconde moitié du 20ème
siècle; les précipitations, quant à elles, ne montrent pas de tendance significative. Les
cyclones ayant affecté l’arc antillais ne présentent pas non plus de tendance marquée (sinon la
faiblesse relative du nombre de ceux-ci durant les années 1970 à 1990).
Les analyses des causes du changement climatique ont nous apporté les constatations
suivantes. L’évolution temporelle des paramètres orbitaux de la terre (précession, inclinaison,
excentricité) est très fortement corrélée à celle de la température moyenne globale au cours
des 600 mille années passées. La variabilité solaire et le volcanisme explique également une
part de la variabilité de la température moyenne globale, mais de moindre importance à la
cause précédente. Enfin, les évolutions naturelles (liées notamment aux végétaux) et
anthropiques (émissions liées aux activités humaines) des gaz à effet de serre constituent une
troisième cause de variabilité forcée de la température moyenne globale. La concentration en
CO2 a augmenté de 35% depuis le début de l’ère industrielle (fin du 18ème siècle). Le forçage
radiatif de cette augmentation de concentration constitue la contribution positive
prépondérante (1.66 W/m2) au forçage total de 1.6 W/m2 (une contribution totale de 1.25
W/m2 provenant de l’effet des rosols). Les modèles couplés océan-atmosphère, en simulant
le comportement de la physique de ces deux milieux fluides, permettent de quantifier l’impact
de ce forçage radiatif additionnel aux activités humaines; le résultat est actuellement sans
équivoque, c’est à dire que la non prise en compte de ce forçage radiatif positif ne permet pas
de simuler correctement l’évolution de la température moyenne globale au cours du 20ème
siècle (la température simulée est, comme attendue, trop froide).
Les projections climatiques du changement futur nous délivrent les informations
suivantes. Ces projections sont réalisées à partir de différents scénarios de développement
économique donnant lieu à des évolutions temporelles d’émissions de gaz à effet de serre et
d’aérosols correspondant. Ces dernières évolutions sont alors prises en compte dans des
simulations du système terre réalisées à l’aide des modèles couplés océan-atmosphère cités
précédemment. Ces simulations produisent une augmentation de 0.2°C par décennie de la
température moyenne globale sur les 25 prochaines années, quelque soit le scénario. Au bout
de 100 ans de simulation, des différences apparaissent entre snarios donnant une
augmentation de température moyenne globale de 1.8°C à 4°C du scénario le plus optimiste
au plus pessimiste (le fait de maintenir constantes les quantités de gaz et d’aérosols émises
donne tout de même un réchauffement de 0.6°C); ces augmentations de température
s’accompagnent d’une augmentation du niveau de la mer de 20 à 60 cm, suivant le scénario.
Au bout de ces 10 ans de simulation, l’on retrouve les structures régionales différenciées du
réchauffement déjà constatées au cours du 20ème siècle (cf ci-dessus). Il apparaît, en plus, un
réchauffement plus marqué du Pacifique équatorial est par rapport à l’ouest, ceci ayant un
impact sur le climat de la Caraïbe, comme détaillé dans ce qui suit. Effectivement, en terme
de circulation atmosphérique, la structure tri dimensionnelle du réchauffement dans la
troposphère va être à l’origine d’une diminution de l’intensité de la circulation méridienne de
Hadley, ainsi surtout d’un déplacement vers les pôles des branches descendantes (induisant à
leur base une augmentation de la pression de surface) ; de la même manière, la circulation
zonale du Pacifique équatoriale (dite circulation de Walker) va diminuer d’intensité et surtout
sa branche descendante va être calée vers l’est, jusque sur l’ouest de l’Atlantique tropical.
Cette subsidence (courant descendant) accrue sur la Caraïbe va contrecarrer la convection
atmosphérique et donc être à l’origine d’une réduction des précipitations sur l’arc antillais,
surtout l’été. Les projections climatiques prévoient donc pour la fin du siècle sur l’arc antillais
une augmentation des températures de 2°C (voire plus sur les îles elles-mêmes, par rapport à
l’océan environnant) et une réduction de 20 % des précipitations en été. Concernant les
cyclones affectant les Caraïbes, des simulations à haute résolution spatiale (50 km environ,
par rapport aux 200 à 300 km des modèles de climat courants) montrent que le nombre de
jours cycloniques diminue à l’ouest de l’arc antillais, de manière d’autant plus marqué que le
scénario est pessimiste; dans le même temps, l’intensité des précipitations associées à ces
cyclones tend à augmenter dans le secteur du cyclone elles étaient déjà maximales (au
nord-est du centre).
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